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Les pôles commerciaux de la Lorraine centrale et méridionale vers

3. Quelle était la population marchande installée en dehors des principaux pôles commerciaux ?

3.1. La dotation commerciale des campagnes 1 Les données disponibles et leur utilisation

Les rôles d’imposition

La collecte des rôles d’impositions n’est pas très difficile pour les villes et les bourgs qui, à quelques exceptions près comme Pont-à-Mousson et Neufchâteau, ont conservé leurs archives fiscales. La moisson est cependant bien plus maigre pour les communautés rurales. A la différence de l’Ile-de-France étudiée par Jacques Dupâquier ou de la Normandie étudiée par

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John PATTEN, “Village and town: an occupational study”, Agricultural History Review, 20, 1972, pp. 1-16 ; A. J. TAWNEY et R. H. TAWNEY, “An occupational census of the 17th

century”, Economic History Review, 5, 1934-1935, pp. 25-64.

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Guy Lemarchand, peu de rôles d’impositions nous sont parvenus pour la Lorraine160

. Nous disposons de rôles plus ou moins complets pour la fin du XVIIIe siècle pour 62 villages de l’actuelle Meurthe-et-Moselle et pour 49 de l’actuel département des Vosges. Chacun d’eux comptant respectivement 594 et 514 communes, seuls 10 % environ des villages de notre zone de prospection sont donc documentés. La transmission des archives et leur conservation relèvent cependant largement du hasard : ainsi, la couverture du territoire par ces fonds d’archives est assez régulière, qui concernent en outre des localités de toutes tailles. Les villages de Meurthe-et-Moselle étudiables se localisent autant dans les zones de vignoble que dans celles du plateau céréalier ou dans les environs de Nancy ; ceux des Vosges se situent autant dans la « Plaine » céréalière que dans les collines de la Vôge ou dans les espaces montagnards. On a donc de bonnes raisons de penser que l’on dispose d’un échantillon sélectionné de manière aléatoire, et à ce titre relativement représentatif des villages lorrains de cette époque, tant par la population que par les activités pratiquées.

Les campagnes lorraines d’avant la Révolution Industrielle étaient marquées par la prédominance écrasante des activités agricoles. Du fait cependant de la très grande diversité géographique des espaces lorrains, en termes de relief, de climat ou encore de qualité et d’usage des sols, les campagnes étaient très différenciées, si bien que de nombreux petits pays aux caractéristiques bien marquées peuvent être distingués161. Nous en avons en particulier identifié cinq, pour lesquels nous disposons de rôles de Subvention en abondance.

1) Les altitudes de la Montagne vosgienne sont assez modérées, et ne montent pas au- dessus de 1800 m. Il s’agit cependant de zones au climat assez rude, les froids hivernaux du climat semi-continental étant renforcés par l’altitude. Percées de profondes vallées où coulent des rivières, les Vosges sont fortement mises en valeur. Malgré des terres siliceuses où la culture du froment est difficile, l’occupation humaine est assez dense, grâce aux possibilités de mise en valeur des zones de montagne pour le pacage des bêtes – notamment dans les Hautes Chaumes – et grâce à l’abondance du bois162. Celui-ci est utilisé pour faire fonctionner des « usines à feu » locales, mais est aussi destiné à la coupe à destination des pays de la Plaine. La coupe et le flottage des bois sont ainsi des activités importantes des espaces vosgiens, la Moselle et ses affluents se trouvant parcourus par des trains de planches, nommés « voiles ».

2) Sur les franges occidentales de la Montagne, on peut isoler une petite région de moyenne montagne, la Vôge, située entre la chaîne secondaire des Vosges à l’est, la chaîne des Faucilles au nord et à l’ouest, et s’étendant jusqu’à la Franche-Comté au sud. Elle se caractérise, à l’époque qui nous occupe, par l’importance des activités manufacturières qui s’y déploient, notamment autour de Darney et de Bains.

3) La Plaine, ainsi nommée par opposition à la Montagne, est en fait une zone de plateaux formée d’un ensemble de collines, située aux pieds de la Montagne vosgienne. Bien connue grâce au travail d’Alain Jacquet, il s’agit d’une région agricole assez riche163. On n’y trouve pas de grosses villes, mais seulement des bourgs qui ne se distinguent guère, par la

160 Sur ces problèmes, voir : Jacques DUPÂQUIER, La population rurale du Bassin Parisien à l’époque de

Louis XIV, Paris, Editions de l’EHESS, 1979 ; Guy LEMARCHAND, La fin du féodalisme dans le Pays de Caux, Paris, Editions du CTHS, 1989, pp. 237-241.

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Géographie lorraine, publiée par la Société Lorraine des Etudes Locales dans l’enseignement public, Nancy, Berger-Levrault, 1937 ; René FRECAUT (dir.), Géographie de la Lorraine, Nancy-Metz, Presses Universitaires de Nancy/Editions Serpenoise, 1983 ; Annette LEXA-CHOMARD et Christian PAUTROT, Géologie et

géographie lorraine, Metz, Editions Serpenoise, 2006.

162 Pierre BOYE, Les Hautes Chaumes des Vosges, étude de géographie et d’économie historiques, Paris,

Berger-Levrault, 1903.

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Alain JACQUET, La terre, la charrue, les écus. La société villageoise dans la plaine thermale des Vosges de

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taille, de leur environnement paysan immédiat. Dans sa partie occidentale, c’est un des principaux domaines de la vigne de l’espace lorrain164

.

4) Le Saintois est une petite région de plaine au relief ondulé, aux riches terres à blé165. C’est également une zone viticole importante, en particulier dans les vallées des affluents de la Meurthe et de la Moselle. Les productions agricoles trouvent un débouché aisé sur les marchés des bourgs (Bayon, Pont-Saint-Vincent) et les petites villes (Vézelise) qui quadrillent le territoire. Le Saintois fait ainsi fonction de grenier à blé pour la Lorraine centrale. Les productions viticoles, de très médiocre qualité, sont destinées à la consommation locale et régionale166.

5) Dans cette zone de plaine riche de la Lorraine centrale, il faut cependant isoler les villages des environs de Nancy. La présence d’une ville de près de 30.000 habitants à proximité a une influence certaine sur les productions locales et la ventilation socioprofessionnelle des populations : bien des habitants produisent ou écoulent des denrées alimentaires à destination de la grande ville proche. Etant un espace traversé par les routes convergeant à Nancy, les environs de la ville sont marqués par la présence massive d’acteurs de la circulation comme les aubergistes ou les voituriers.

6) Le nord et l’ouest de la Lorraine est une zone de faible altitude, marquée par des plissements et des plateaux disposés en gradins, « dont la grande dimension est dirigée du sud au nord, avec inclinaison marquée de toute la masse vers l’ouest, en plongeant sur le bassin parisien »167. Région aux sols fertiles, ses côtes sont également propices au développement de la viticulture. Le vin est cependant produit en quantités restreintes, et n’est pas destinée à l’exportation hors de la région. Cette zone est traversée de vallées profondes, comme celles de la Meuse ou de la Moselle. Le pays de Pont-à-Mousson est situé dans la vallée de la Moselle, à cheval sur les côtes et les plateaux. Les activités des habitants, en plus de la culture de la vigne et des travaux des champs, sont marquées par la présence de la ville – près de 7.000 habitants en 1793 – et par l’importance du trafic dans la vallée de la Moselle : le nombre d’aubergistes et des voituriers dans les villages est du même ordre que dans les environs de Nancy.

La présentation des données

Nous avons fait le choix ici, pour chaque localité, de dénombrer tout d’abord l’ensemble des acteurs de la circulation des marchandises et des échanges - aubergistes, charretiers et voituriers inclus -, puis de faire le décompte des seuls marchands, toutes spécialités confondues. Les premiers pratiquaient en effet souvent des activités commerciales, ou bien servaient d’adjuvants aux marchands. De plus, leur présence est le signe de la participation des villages à la circulation des marchandises et des personnes à une échelle infrarégionale ou régionale. Pour faciliter la comparaison entre les données de chaque village, nous avons calculé des ratios marchands : combien de marchands ou d’acteurs des échanges trouve-t-on dans chaque localité pour 100 habitants ? Sans revenir sur les limites d’une telle

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Rien ne permet cependant d’affirmer que les villages de vignerons sont plus riches que les autres : tout dépend en fait de la taille des parcelles exploitées par les vignerons, et des gains qu’ils peuvent de ce fait tirer de leur exploitation. Maurice Lacoste signale que les cahiers de doléances de bon nombre d’entre eux soulignent en 1789 que les travailleurs des vignes ne gagnaient que leur journée (La crise agricole dans le département de la

Meurthe à la fin de l’Ancien Régime et au début de la Révolution, Thèse dactylographiée, Paris, 1951, p. 86- 87).

165

Marie-José LAPERCHE-FOURNEL, L’intendance de Lorraine et Barrois à la fin du XVIIe siècle : édition

critique du mémoire « pour l’instruction du Duc de Bourgogne », Paris, Editions du CTHS, 2006.

166 LACOSTE, La crise agricole, pp. 586-587. 167

Jacques RISTON, Contribution à l’histoire de la vigne et de sa culture dans la région lorraine, Nancy, Vagner et Lambert, 1914, p. 39.

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approche (pourquoi calculer le ratio par rapport au nombre d’habitants de la localité et non par rapport à l’aire de chalandise estimée ?), nous l’avons choisie pour sa simplicité.

Nous avons relevé les villages dans lesquels des marchands étaient signalés, et nous avons rapporté leur nombre à l’ensemble des villages de la même classe de population, calculant ainsi des fréquences d’apparition des marchands à niveau de population donné. La constitution des catégories de villages s’est faite en combinant des données numériques à des données qualitatives. Les dictionnaires de géographie comme celui d’Expilly ou encore les descriptions régionales comme celle de Durival tendent à considérer comme « petit village » toute localité de moins de 150 à 200 habitants. A l’inverse, à partir de 500 à 600 habitants, ils parlent volontiers de village « gros » ou « considérable ». Il n’est donc pas illégitime, à les suivre, de distinguer trois classes de localités selon leur niveau de population : moins de 200 habitants ; de 200 à 500 habitants ; plus de 500 habitants.

3.1.2. Des campagnes richement dotées en marchands

Les seuils d’apparition des marchands ruraux sont très bas

Le mode le plus simple de présentation des résultats est de classer les ratios marchands obtenus selon la taille des localités, selon les tranches de population retenues ci-dessus. Pour chacune des classes de villages, nous avons calculé la probabilité d’apparition de marchands, puis le ratio marchand moyen des localités dotées de commerçants168.

Il ressort de ces données que les commerçants étaient présents dans tous les types de villages, y compris les plus petits. Jouaient cependant des effets de seuil assez marqués. Globalement, à en juger par notre échantillon, il n’était pas rare de trouver des marchands dans des localités de 200 à 300 habitants, et leur présence était presque systématique dans les villages de plus de 500 habitants, dont certains disposaient même d’un appareil commercial nombreux et différencié. Les travaux de Brian Berry et de ses collaborateurs sur les appareils commerciaux régionaux suggèrent, pour les Grandes Plaines américaines des années 1950 et 1960, un lien étroit entre le niveau d’équipement commercial des localités et leur niveau de

168 Les ratios marchands par village sont présentés à l’annexe 10.

Fréquence d'apparition des acteurs dans les villages (années 1770/1790) Villages de moins de 200 habitants Acteurs du commerce 0,50 Marchands 0,25 Villages de 200 à 500 habitants Acteurs du commerce 0,93 Marchands 0,76 Villages de plus de 500 habitants Acteurs du commerce 0,96 Marchands 0,87

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population169. Passé un certain niveau de population – ou plus précisément, de niveau de population de statut social déterminé -, un certain nombre de spécialités productives ou marchandes deviennent nécessaires à la desserte des besoins de la population des espaces considérés170.

Les seuils et probabilités d’apparition sont corroborés par d’autres approches

On pourrait penser que nos résultats, qui vont dans le sens d’une large dotation commerciale des campagnes, sont entachés par des effets de sources - les villages étudiés, notamment les plus petits, étant par un heureux hasard massivement équipés de marchands. Deux séries de données vont nous permettre de tester nos résultats. Les dossiers de faillite tout d’abord, massivement conservés à partir des années 1760, nous permettent d’étudier à quels niveaux de population les marchands apparaissent dans les localités171. Les registres des patentes de l’année 1793 conservés pour la plupart des localités du district de Vézelise aideront à préciser ces résultats.

a) Les bilans de faillite déposés

Sur la période 1771/1790, on relève pour nos espaces d’observation 484 dossiers de demande d’atermoiement déposés. Nous avons de bonnes raisons de penser qu’un tel relevé ne constitue en aucun cas une carte satisfaisante du commerce des Duchés à la fin du XVIIIe siècle : la faible place qu’occupent plusieurs villes, comme Saint-Dié ou Epinal, n’est pas du tout proportionnelle à leur participation à la vie d’échanges de la province. Ce tableau des bilans déposés reflète sans doute surtout l’assise effective de la Juridiction Consulaire parmi les marchands de la province. Il nous indique cependant plusieurs localités rurales où l’on trouvait des marchands. Leur ventilation par grands types de localités est présentée dans le tableau ci-dessous.

169 BERRY, Géographie des marchés et du commerce de détail, chapitre 2 : « Les variations systématiques de la

hiérarchie », pp. 53-105. Sur l’emploi de la notion de seuil dans les sciences sociales, voir : Boleslaw MALISZ,

La formation des systèmes d’habitat. Esquisse d’une théorie des seuils, Paris, Dunod, 1972.

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« La nomenclature des métiers a montré (…) que les fonctions de la ville, les services offerts s’étaient diversifiés. En grandissant, elle devenait donc apte à couvrir dans leur totalité les besoins d’une zone plus vaste. Son pouvoir de commandement régional s’élargissait et compensait l’élévation du degré de dépendance qui l’attachait à l’extérieur à travers le commerce lointain. Les foires nous sont apparues (…) comme des vitrines commerciales : mais une ville ne essor démographique joue le même rôle de plus en plus efficacement ; elle exerce une démonstration permanente ; lorsqu’elle atteint un certain poids, de nouveaux besoins apparaissent. Les inspecteurs des manufactures l’avaient noté vers le milieu du siècle dans l’habillement. La croissance vertigineuse des débits de boisson, cabarets et bouchons donne un autre exemple, à revoir dans une perspective d’hygiène sociale, mais très lié, déjà, à la fonction marchande », PERROT, Genèse d’une ville moderne, p. 531.

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Un tel tableau, au demeurant peu satisfaisant, a pu être tenté à l’échelle de l’Angleterre en 1785 par H.-C. et L. MUI (Shops and Shopkeeping in 18th Century England, pp. 53-63).

Types de localités Nombre de

dossiers Proportion Villes 386 79,8 Villages et bourgs 98 20,2 Ensemble 484 100

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Sans grande surprise, les villes s’arrogent les quatre cinquièmes des dossiers de faillite déposés. Il se peut cependant que leur place dans le commerce soit surévaluée, et que les marchands ruraux fussent en réalité plus nombreux. Le fait de déposer un bilan à la justice consulaire suppose en effet un certain niveau d’affaires et une certaine reconnaissance de son activité par l’institution. De ce fait, le commerce occasionnel ou la revente se trouvent vraisemblablement exclus de notre relevé. Celui-ci ne peut donc au mieux que dresser un tableau du haut du panier des marchands ruraux. Au moins avons-nous ici la certitude que les marchands étudiés ne sont pas des commerçants occasionnels.

Nous avons vu plus haut que la présence de marchés dans une localité en faisait un pôle commercial animant les échanges à l’échelle d’un petit pays. Ce n’était pas le cas des foires isolées, qui n’exerçaient un tel rayonnement qu’une ou plusieurs fois par an ; au demeurant, les foires isolées étaient en Lorraine d’envergure modeste, et ne pouvaient à ce titre exercer une polarisation commerciale importante. On peut donc à bon droit considérer les sièges de foires seules comme des villages, à l’exception de Saint-Nicolas-de-Port – gros bourg proche de Nancy que les autorités ont préféré priver de marché pour éviter des afflux insuffisants de grains dans la capitale de la province. Ainsi, si l’on relève l’ensemble des localités non-urbaines dépourvues de marché, la répartition des marchands par groupes de population est la suivante.

En tenant compte non pas le nombre de marchands, mais le nombre de localités où ils apparaissent, on aboutit à des résultats similaires. Les petits villages sont faiblement représentés dans notre échantillon, tandis que les localités de plus de 500 habitants s’arrogent la majorité des marchands faillis.

La comparaison entre la répartition géographique des marchands faillis et le nombre de localités de chaque catégorie dans les espaces observés – correspondant très grossièrement à la Meurthe-et-Moselle et aux Vosges actuelles – suggère que les villages de plus de 500

Population des localités Nombre de localités où apparaissent des marchands Fréquence < 300 habitants 8 0,18 300 à 500 habitants 13 0,29 > 500 habitants 24 0,53 Ensemble 45 1,00 Population des localités Nombre de dossiers Fréquence < 300 habitants 15 0,22 300 à 500 habitants 18 0,26 > 500 habitants 36 0,52 Ensemble 69 1,00

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habitants étaient nettement surreprésentés dans notre échantillon de commerçants, à l’inverse des villages de moins de 300 habitants.

Ces résultats sont largement congruents avec nos observations portant sur les rôles d’imposition. On peut donc raisonnablement supposer que la probabilité de trouver un marchand dans les campagnes est d’autant plus forte que le village est plus peuplé. Le seuil de 500 habitants pour une implantation assurée de marchands dans les localités rurales est le résultat le plus assuré de toute cette enquête. On peut donc raisonnablement penser que plus d’un village lorrain sur quatre comptait au moins un commerçant à la veille de la Révolution française. L’accès des campagnards aux boutiques rurales était donc assez aisé, étant donnée la densité du semis des boutiques sur le territoire172.

b) L’équipement commercial des villages du district de Vézelise en 1793

Le district de Vézelise est un petit territoire essentiellement rural, au cœur d’une zone agricole relativement aisée, le Saintois : il se peut de ce fait que le nombre de commerçants présents dans les localités soit plus élevé que la moyenne. Les villages du district sont cependant très bien reliés à la petite ville, ce qui pourrait décourager l’installation de marchands de commodités dans les campagnes – sachant que dans le même temps cela pourrait favoriser les activités commerciales destinées à fournir Vézelise en matières premières et denrées de consommation. Les registres des patentes pour les villages du district sont d’une grande précision, et indiquent dans la plupart des localités la spécialisation commerciale des marchands. De tels détails nous permettent de calculer comme plus haut les fréquences d’apparition des commerçants dans leur ensemble, des seuls marchands des commodités et des seuls marchands en boutique – étant donné que le nombre de colporteurs dans les villages est important. Les résultats sont synthétisés en reprenant les tranches de population employées dans les paragraphes précédents. Ils ne concernent que les 54 villages (sur 64) pour lesquels nous disposons d’indications précises sur la population marchande et ses activités.

172 Sans donner de chiffres précis, S. I. MITCHELL parvient à la même conclusion pour le Cheshire à la fin du

XVIIIe siècle (‘The development of urban retailing 1700-1815’, in Peter CLARK (dir.), The Transformation of

English Provincial Towns 1600-1800, Hutchinson, Londres, 1985, pp. 259-283, plus spécialement pp. 270-271).

Population des villages en 1793

Nombre de villages dans chaque tranche de population (départements actuels)

Meurthe-et-

Moselle Vosges Ensemble Part en % < 300 habitants 339 235 574 49,3 de 300 à 499 habitants 174 143 317 27,2 > 500 habitants 116 157 273 23,5 Ensemble 629 535 1164 100,0

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Les fréquences d’apparition des marchands toutes spécialités confondues sont tout à fait comparables à celles mises en évidence à l’échelle de la province entière, ce qui tend à corroborer nos résultats. La fréquence d’apparition des seuls boutiquiers en commodité est également élevée, mais est d’interprétation plus délicate : la relative richesse de l’espace considéré tend peut-être à surévaluer le nombre de marchands de biens de consommation dans les campagnes.

Etant donnée l’étroitesse de notre échantillon, il ne nous est pas possible de dire s’il existait des différences de seuil d’apparition des marchands entre microrégions173

. Dans le cas lorrain, il se peut par exemple que dans des villages de vignerons, dont la production était