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II. Chapitre 2 : Matériels et méthodes

1. Dosage des éléments inorganiques

Pour déterminer la composition des particules en éléments inorganiques, nous avons choisi d’utiliser l’ICP-MS (Inductively Coupled Plasma-Mass Spectrometry) et l’ICP-AES (Inductively coupled Plasma-Atomic Emission Spectroscopy) de façon complémentaire : l’ICP-AES pour les éléments majeurs de l’atmosphère et l’ICP-MS pour les éléments mineurs et traces. Ces techniques se sont, en effet, révélées de bonnes méthodes pour la mesure des éléments au sein des particules. Elles possèdent l’avantage de permettre l’analyse simultanée et rapide d’un grand nombre d’éléments. L’ICP-AES, ayant une grande plage de linéarité (du ppb à la centaine de ppm), a des limites de détection de l’ordre de quelques μg/l et donc se révèle très efficace pour la quantification des éléments majeurs. Les limites de détection de l’ICP-MS sont inférieures au μg/l et cette technique est très bien adaptée pour la détection des éléments traces et ultra traces (Salomon et al., 2002).

Nous avons analysé une large gamme d’éléments pour caractériser au mieux les particules recueillies en milieu urbain et rural. Au total, nous nous sommes intéressés à 25 éléments dont la majorité est connue pour avoir des effets toxiques sur l’Homme (Baccarelli et Bollati, 2009 ; Poey et Philibert, 2000) : Argent (Ag), Aluminium (Al), Arsenic (As), Baryum (Ba), Bismuth (Bi), Cadmium (Cd), Cobalt (Co), Chrome (Cr), Cuivre (Cu), Fer (Fe), Manganèse (Mn), Niobium (Nb), Nickel (Ni), Phosphore (P), Plomb (Pb), Rubidium (Rb), Antimoine (Sb), Scandium (Sc), Etain (Sn), Strontium (Sr), Tellure (Te), Titane (Ti), Thallium (Tl), Vanadium (V) et Zinc (Zn).

1.1. Préparation des échantillons

Les techniques que nous avons choisies nécessitent une mise en solution préalable des échantillons.

1.1.1. Minéralisation des particules

Environ 1/17 de filtre d’arrêt (retenant les PUF) ou environ 4 mg de PF sont pesés et déposés dans un godet SAVILLEX® en PTFE (PolyTétraFluoroEthylène ou téflon) de 15 mL. Ces échantillons sont minéralisés par digestion acide en phase liquide, à chaud (120°C) durant 4 heures environ par un mélange de trois acides concentrés de qualité Suprapur® Merck, l’acide

106 nitrique (HNO3), l’acide fluorhydrique (HF) et l’acide perchlorique (HClO4), dans les proportions respectives de 4:1:0,5 en volume. Après évaporation quasi-totale des acides à 180°C durant près de quatre heures, la goutte résiduelle est reprise dans quelques mL d'eau ultrapure puis portée à 110°C pendant une heure afin de solubiliser tous les éléments concentrés dans la goutte restante. Après refroidissement, la solution obtenue est ajustée à 13 mL d’eau ultrapure et acidifiée à 0,2 % par le HNO3 pour la conservation, puis filtrée sur une membrane en acétate de cellulose VWR® (0,45 μm ; 25 mm). Le filtrat obtenu, contenant les éléments à analyser, est récupéré dans un flacon en polyéthylène et stocké à -20°C jusqu’à le jour de l’analyse. Le même protocole a été appliqué d’une part sur un filtre vierge afin de déterminer la contribution des fibres du filtre à la teneur en éléments dans les échantillons et d’autre part, sur le mélange d’acide utilisé, pour prendre en considération l’éventuelle contamination durant les phases de préparation et d’analyse (Ledoux et al., 2006).

Les solutions ainsi obtenues serviront à l'analyse des éléments Al, Ba, Fe, Mn, P, Sr, Ti et Zn par ICP–AES et les éléments Ag, As, Bi, Cd, Co, Cr, Cu, Nb, Ni, Pb, Rb, Sb, Sc, Sn, Te, Tl, V par ICP-MS.

1.1.2. Conditionnement du matériel

L’ICP-MS permet de détecter des concentrations de l’ordre de la centaine de ng/L permettant ainsi le dosage des éléments traces présents dans les particules atmosphériques, ce qui exige en même temps l’utilisation d’un matériel propre pour éviter les contaminations et minimiser l’erreur pendant l’analyse. L’ensemble du matériel utilisé est donc préalablement rincé à l’eau ultrapure, puis rempli d’une solution d’acide chlorhydrique (HCl) 0,5M et de HNO3 0,5M de lavage pendant 48 heures environ. Ensuite, l’ensemble est rincé abondamment à l’eau ultrapure et mis à sécher sous une hotte à flux laminaire.

1.2. Dosage par spectrométrie d’émission atomique (ICP-AES)

1.2.1. Principe

L’émission atomique utilise la propriété des atomes de passer d’un niveau d’énergie supérieur à un niveau inférieur en émettant des raies de longueurs d’ondes caractéristique de chaque atome. Cette technique repose donc sur la mesure de cette énergie émise, sous forme

107 d’un rayon lumineux à une longueur d’onde spécifique, par un atome qui passe d’un état excité à un état plus stable.

Afin d’être excité, l’échantillon doit arriver à la torche plasma sous forme de fines gouttelettes ne dépassant pas quelques microns de diamètre. Pour cela on utilise un nébuliseur comportant deux arrivées, l’une pour l’échantillon en solution et l’autre pour un gaz (argon, Ar) servant à rompre le liquide en gouttelettes et donc à générer l’aérosol primaire. Ce dernier sera transformé en micro-gouttelettes de quelques micromètres, après élimination des grosses gouttelettes par gravité, dans la chambre de nébulisation. L'aérosol ainsi formé est envoyé par le flux de gaz dans une torche à plasma d'argon à très haute température (entre 6 000 et 10 000 °C), suffisante pour vaporiser, dissocier et atomiser la plupart des éléments. Le plasma produit une double action sur les atomes : il les excite ce qui leur fait émettre des photons (ces photons sont détectés lorsque l'on utilise l’ICP-AES) et il les fait passer à l’état d’ions positifs mono-chargés (ces ions sont alors dirigés et identifiés grâce à un spectromètre de masse dans le cas de l’ICP-MS). Le plasma est entretenu par un champ magnétique induit par une bobine. Chaque élément excité dans le plasma, en revenant à son état fondamental, émet alors des photons de longueurs d’onde caractéristiques de l’élément et dont l’intensité lumineuse est proportionnelle à la concentration de l’élément dans l’échantillon. Les rayons émis sont détectés dans notre cas par un détecteur à injection de charge (CID = Charge Injection Device).

Les limitations de cette technique sont essentiellement liées à des phénomènes d'interférences spectrales, c'est-à-dire à la superposition de raies d’émission atomique d'éléments différents. Les spectromètres sont conçus afin d'offrir la plus grande possibilité de séparation des longueurs d'onde, mais les interférences sur certaines raies ne peuvent être résolues. Il faut donc analyser, pour un élément chimique, les raies d'émission les moins sensibles à de possibles interférences.

1.2.2. Conditions opératoires

Les analyses ont été réalisés à l’aide d’un spectromètre d'émission Thermo Fisher® iCAP série 6000. La mesure de l'émission des éléments étudiés a été effectuée prioritairement dans l'axe du plasma (mode axial) pour améliorer les limites de détection et augmenter la sensibilité. Dans le cas de l'analyse de filtre, la présence de certains éléments à des teneurs élevées (Al par

108 exemple) a nécessité d'effectuer la mesure de l'émission en visée radiale sur ces éléments de manière à ne pas saturer le détecteur.

Pour chaque élément, différentes raies d’émission donc différentes longueur d’onde sont disponibles. Ces raies ont été judicieusement choisies afin de pouvoir analyser l’ensemble des éléments dans le même échantillon et minimiser les éventuels phénomènes d'interférence.

L’appareil est calibré à partir d’une gamme étalon multi-élémentaires pour pouvoir déterminer la concentration des éléments présents dans les échantillons analysés. Les raies choisies, la gamme d’étalonnage retenue et les limites de quantification (LDQ) de chaque élément figurent dans le Tableau II-3.

Tableau II-3 : Caractéristiques de la méthode de dosage des éléments par ICP-AES.

Eléments Longueur d’onde (nm)

Gamme d’étalonnage (ppb) Limites de quantification (ppb) Al 3961 50-20000 4 Ba 4554 0,5-50 0,4 Fe 2382 ; 2599 50-20000 21 Mn 2605 ; 2576 5-500 1 P 1782 5-500 3 Sr 4077 0,5-50 0,2 Ti 3234 5-500 4 Zn 2138 5-500 2

1.3. Dosage par spectrométrie de masse (ICP-MS)

1.3.1. Principe

La spectrométrie de masse est une technique d’analyse reposant sur la séparation, l’identification et la quantification des différents isotopes des éléments constitutifs d’un échantillon en fonction de leur masse. L’ICP-MS est basée sur le couplage d'une torche à plasma générant des ions positifs mono-chargés et d’un spectromètre de masse quadripolaire séparant ces ions en fonction de leur masse.

Les ions formés dans le plasma (voir paragraphe 1.2.1) sont extraits par une interface constituée de 2 cônes (échantillonneur et écorceur) permettant le passage de ces ions vers le système de séparation. Un système de vide différentiel accélère les ions vers un système optique (ensemble de lentilles et de miroir électrostatiques) qui rend homocinétique le faisceau d’ions extraits et le focalise vers le quadripôle tout en éliminant les photons et éléments neutres

109 indésirables. Le quadripôle est constitué de 4 barres cylindriques séparées en 2 paires polarisées de signe opposé. Par application de tensions ayant des composantes continues et alternatives, seuls les ions ayant le rapport masse/charge (m/z) désiré passent à travers le quadripôle et seront transmis au détecteur. Souvent il y a formation des ions positifs mono chargés donc la séparation sera en fonction de la masse des espèces. La modification de ces tensions au niveau du quadripôle permet une analyse successive des différents rapports m/z. La détection des ions positifs s'effectue grâce à un multiplicateur d'électrons à dynodes discrètes (DDEM = Discrete Dynode Electron Multiplier). Les dynodes sont soumises à une tension négative de quelques milliers de volts. A la sortie du quadripôle, un ion positif, attiré par la tension négative, heurte la surface semi-conductrice de la première dynode. Cet ion provoque l'émission d'un ou de plusieurs électrons secondaires qui heurtent à nouveau la paroi de la deuxième dynode : un effet « boule de neige » se produit. Les électrons émis atteignent à la fin un collecteur équipé d'un préamplificateur. Le signal se traduit en nombre de coups, proportionnel au nombre d’ions, et une interface informatique assure le transfert des données afin qu'elles soient traitées. Les nombres de coups sont convertis en concentrations grâce à l’utilisation des solutions étalons. Cependant on ne peut doser que les éléments pour lesquels l’étalonnage a été soigneusement réalisé.

L’ICP-MS n’est cependant pas exempte de problèmes. Au sein du plasma ou du faisceau ionique sortant du plasma, des recombinaisons peuvent avoir lieu entre les éléments provenant du plasma (Ar), de l’air (O2, N2, CO2), du solvant, et même de l’échantillon lui-même. Ceci abouti à la formation des ions polyatomiques (oxydes, hydroxydes, argides, hydrures, halogénures) ayant un rapport m/z identique à celui des éléments recherchés et donc leur présence entraine une surestimation de ces éléments. En plus des ions polyatomiques, des interférences isobariques peuvent avoir lieu quand 2 isotopes de 2 éléments différents ont le même rapport m/z. Le plus souvent, il est possible de trouver un isotope ne représentant pas d’éventuel recouvrement. Concernant les interférences dues aux ions polyatomiques, une cellule de collision réaction (Interface Collision Reaction, CRI) est utilisée en ajoutant de gaz (hélium ou dihydrogène) au niveau des cônes de l’interface pour réduire ces interférences. De plus, des ions doublements chargés, ayant des rapports m/z identiques à ceux des ions mono-chargés des éléments recherchés, peuvent être générés dans le plasma. Ce type d’interférence peut être réduit par optimisation des conditions de plasma lors de l’optimisation initiale de l’appareil.

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1.3.2. Conditions opératoires

Les analyses sont réalisées en utilisant un spectromètre de masse avec un plasma à couplage inductif modèle Varian® 820-MS.

Pour la plupart des isotopes analysés, il existe une ou plusieurs interférences polyatomiques. Ceci a exigé un choix précis du gaz de collision qui minimisait les interférences, mais en même temps permettais de conserver une bonne sensibilité de détection des éléments. Afin de pouvoir déterminer la concentration des éléments présents dans les échantillons analysés, l’appareil a été calibré par une gamme étalon multi-élémentaires. L’isotope, le gaz de collision et la gamme d’étalonnage retenus, ainsi que la LDQ pour chaque élément sont présentés dans le Tableau II-4.

Tableau II-4 : Caractéristiques de la méthode de dosage des éléments par ICP-MS.

Eléments isotope Gaz de collision Gamme d’étalonnage (ppb) Limites de quantification (ppb) Ag 107Ag Air 0,2-50 0,077 As 75As Air 0,2-50 0,162 Bi 209Bi Air 0,2-50 0,145 Cd 110Cd Air 0,2-50 0,038 Co 59Co Air 0,2-50 0,059 Cr 52Cr Hélium 0,2-50 0,006 Cu 65Cu Hélium 0,2-50 0,039 Nb 93Nb Air 0,2-5 0,087 Ni 60Ni Hélium 0,2-50 0,032 Pb 208Pb Air 0,2-50 0,072 Rb 85Rb Air 0,2-50 0,059 Sb 121Sb Air 0,2-50 0,112 Sc 45Sc Air 0,2-10 0,084 Sn 118Sn Air 0,2-50 0,105 Te 128Te Air 0,2-10 0,084 Tl 205Tl Air 0,4-20 0,121 V 51V Hélium 0,2-50 0,005