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I. Chapitre 1 : Synthèse bibliographique

3. Contexte local : le Liban

3.4. Qualité de l’air au Liban

3.4.2. Cas de Tripoli

L'union des municipalités d’Al Fayhaa (au nord du Liban) se compose de trois villes : Tripoli, El Mina et Beddaoui. Tripoli, située à 80 km de Beyrouth, est la capitale du Nord et la deuxième plus grande ville après Beyrouth. El Mina, la deuxième ville d'Al Fayhaa, est la zone voisine de Tripoli et est fortement liée à elle géographiquement et historiquement. Beddaoui, la troisième ville, est le cœur des activités industrielles et des complications de zones résidentielles pauvres d'Al Fayhaa. Cette région a attiré l’attention des chercheurs depuis l’année 2000 et

41 quelques études menées afin d’évaluer la qualité de l’air dans la région, sont présentées ci-dessous.

Les résultats de l'inventaire réalisé par l’observatoire de l’environnement et de développement de Tripoli (TEDO) dans la région d’Al Fayhaa ont montré que les problèmes de la pollution de l’air sont dus à 16 secteurs qui ont clairement des impacts sur l'environnement. Parmi ces secteurs nous citons : le système de transport, les navires (port), la centrale électrique de Deir Amar, la décharge, la construction, la remise en suspension des poussières à partir des routes pavées, le transfert de l'essence dans les réservoirs des camions, les générateurs électriques et le chauffage domestique. Il a été montré que ces 16 secteurs sont situés dans des zones spécifiques de Tripoli, El Mina et Beddaoui qui sont également caractérisées par des niveaux élevés de polluants (TSP, PM10, PM2,5, NO2, SO2 O3, benzène, toluène et xylène) qui dépassent les normes de l’US-EPA ainsi que les normes libanaises (SMAP, 2002).

Ensuite, en 2008 TEDO a installé des stations de surveillance fixes dans le centre-ville de Tripoli (station urbaine) et sur le toit du bâtiment de TEDO (station périurbaine sous l’influence des vents marins) afin de surveiller les TSP, PM10 et PM2.5 à Tripoli. TEDO a également installé 13 stations de surveillance d’échantillonnage passif, réparties dans 13 zones d’Al Fayhaa, et ceci dans le but de contrôler les polluants suivants : benzène, toluène, xylène, HF, NO2, SO2 et O3. Durant la période d’échantillonnage, les relevés de TSP ont dépassé 40 fois la norme quotidienne nationale fixée à 75 μg/m3; De même, les valeurs de PM10 ont dépassé 61 fois la norme quotidienne nationale fixée à 50 μg/m3 sur 84 jours d’échantillonnage. Concernant les PM2,5, généralement les valeurs enregistrées à Tripoli ont été sensiblement supérieures aux normes quotidiennes de l’US-EPA (35 μg/m3) et de l’OMS (25 μg/m3

) (TEDO, 2009).

3.4.3. Cas de Beyrouth

La plupart des travaux réalisés dans l’agglomération de Beyrouth ont porté sur les émissions des particules atmosphériques (PM10 ; PM2,5 et récemment les PM0,25) alors que d’autres ont évalué les émissions des gaz NO2 et SO2.

42 3.4.3.a. Les gaz NO2 et SO2

Une étude a été menée par l’Université Saint-Joseph de Beyrouth, la région Ile-de-France et Airparif entre décembre 2004 et juillet 2006. Elle repose sur un réseau de stations dans l’agglomération de Beyrouth équipées de préleveurs à diffusion passive pour la mesure de NO2

et SO2 (Afif et al., 2008 ; Afif et al., 2009). Des faibles concentrations en SO2 ont été observées (Afif et al., 2008) par contre, la concentration moyenne annuelle de NO2 mesurée en 2005 était de 67 µg/m3 (Afif et al., 2009), supérieure à la valeur annuelle maximale recommandée par l’OMS (40 µg/m3). Par conséquent, la capitale libanaise soufre d’une pollution chronique au NO2 mais, par contre le cas ne se présente pas pour le SO2. Les concentrations atmosphériques les plus élevées des deux polluants ciblés ont été mesurées en hiver. En plus des sources locales, le transport à longue distance peut représenter une source importante de SO2 à Beyrouth, expliquant environ 50% des niveaux de SO2 dans la ville. Quant au NO2, sa principale source d’émission est le système de transport.

3.4.3.b. Les particules atmosphériques

Dans ce paragraphe un ordre chronologique des études réalisées dans l’agglomération de Beyrouth sur les particules atmosphériques, leurs concentrations et compositions, est présenté.

Lors d’une étude réalisée par El-Fadel et collaborateurs en 1999 (El-Fadel et al., 1999), des échantillons d'air prélevés dans plusieurs sites à Beyrouth ont révélé une concentration moyenne de TSP de 166 µg/m3. D’après les auteurs, les principales sources des TSP sont les émissions des échappements des véhicules, la remise en suspension des poussières par la circulation de ces véhicules, ainsi que par les activités de construction et les carrières.

En 2004, Shaka et Saliba (Shaka et Saliba, 2004) ont déterminé des teneurs moyennes de 76 et de 40 μg/m3 pour les PM10-2,5 et les PM2,5 respectivement, et ont observé la présence des anions SO42-, NO3-, SiO42-, CO3- et du cation NH4+ en concentrations plus importantes dans les PM2,5 que dans les PM10-2,5 collectées au niveau du campus de l’Université Américaine de Beyrouth (AUB). Ils ont également montré que les tempêtes de poussières se caractérisent par un enrichissement en SiO42- et CaCO3. Des groupes fonctionnels organiques comme les carbones aliphatiques, les alcools, les carbonyles, et les nitrates organiques ont également été détectés. Des

43 concentrations plus élevées d'espèces organiques, ont été identifiées dans les PM2,5 alors que des concentrations élevées en eau ont été observées dans les PM10-2,5.

En 2006, Moussa et collaborateurs ont mesuré les hydrocarbures légers (formaldéhyde, acétaldéhyde, propanal, acétone) et le monoxyde du carbone dans deux sites différents de Beyrouth. Ils ont trouvé que les formaldéhydes et les acétaldéhydes étaient les plus abondants, et que les émissions des véhicules de transport constituent la source principale de ces composés (Moussa et al., 2006).

Durant la même année, Saliba et collaborateurs ont suivi la variation des concentrations de CO, SO2, O3, et PM10 dans l’air de la ville de Beyrouth afin d’identifier leurs sources majeures d’émission. Les résultats montrent que les concentrations mensuelles moyennes de CO, SO2 et O3 sont inférieures aux valeurs fixées par l’US-EPA à la différence des PM10, et que les véhicules de transport et les chauffages sont les sources majeures de CO et SO2 respectivement (Saliba et al., 2006).

Entre Février 2004 et Janvier 2005, des faibles concentrations de PM (PM10-2,5 et PM2,5) ont été mesurées à Beyrouth (Borj Hammoud) durant la saison pluvieuse alors que des niveaux élevés ont été observés durant les tempêtes de sable provenant des déserts d’Arabie et/ou de l’Afrique. Les concentrations moyennes annuelles étaient de 53±20 et 31±9 µg/m3

pour les PM

10-2,5 et PM2,5 respectivement. D’après les auteurs, les ions NO3-, SO42-, CO32- et Cl- sont les principaux constituants anioniques des PM10-2,5, alors que les sulfates sont principalement dominants dans les PM2,5 sous forme de (NH4)2SO4. En parallèle, les cations Ca2+ et Na+ dominent dans les grosses particules tandis que les particules fines sont dominées par les cations NH4+, Ca2+ et Na+ (Kouyoumdjian et Saliba, 2006). Les auteurs ajoutent qu’en été, une augmentation des ions nitrates et sulfates a été remarquée en raison de l’amélioration des réactions photochimiques facilitant ainsi la conversion des gaz de NO2 et SO2 en NO3- et SO42- respectivement. De plus, les émissions de NO2 ont été principalement attribuables au système de transport local. Par contre celles de SO2 sont dues aux phénomènes de transport local et à longue distance (vents venant du centre et de l’Est de l'Europe). D’autre part, en plus du sel marin, des concentrations élevées de chlorure ont été également attribuées à l’incinération des déchets à proximité du site et les concentrations élevées de calcium qui ont été observées sont une bonne indication de l'abondance du calcium terrigène dans la région.

44 En 2007, la composition de ces particules, collectées à Borj Hammoud, en éléments majeurs et traces a été déterminée par Saliba et collaborateurs (Saliba et al., 2007a). Les résultats montrent que les éléments terrigènes (Si, Ca, K, Ti, Mn et Fe) sont plus abondants dans la fraction PM10-2,5 tandis que les éléments d’origine anthropique (S, Cu, Zn et Pb) dominent dans les PM2,5. Les concentrations élevées des éléments terrigènes ont été associées aux tempêtes de sable venant du désert du Sahara et de l'Afrique. Les auteurs ont également attribué les concentrations élevées de Cu et Zn aux particules générées par l’usure des disques et plaquettes de freins et des pneus.

En 2009, la relation entre les concentrations en PM10 et celles des ions inorganiques solubles présents à l’intérieur et à l’extérieur des maisons à Beyrouth a été étudiée par Saliba et collaborateurs (Saliba et al., 2009). Cette étude a montré des teneurs élevées en PM10 qui sont en corrélation avec le trafic automobile, l’activité des fumeurs à l’intérieur, mais aussi avec le degré de ventilation des maisons. Les sulfates et nitrates hydrosolubles ont montré des concentrations pratiquement identiques dans l’air intérieur et extérieur de résidences sans fumeur. Tandis que dans les maisons avec fumeur, le niveau des nitrates solubles était beaucoup plus faible du fait de leur réaction possible avec la fumée de tabac pour produire les nitrosamines.

En 2010, une évaluation des concentrations des PM10 et PM2,5 collectées entre 2003 et 2007 dans divers sites de Beyrouth a été réalisée et les concentrations obtenues étaient supérieures à celles fixées par l’OMS (20 et 10 µg/m3 respectivement). De plus, les concentrations moyennes globales pour les deux types de particules ont été plus élevées en automne et en été. D’après les auteurs ceci est dû aux faibles précipitations, à l’augmentation des activités de la tempête de poussière en automne, l’augmentation des brises de la mer et de la terre en été, accompagnée d’une augmentation des activités de trafic (l'été est une grande saison touristique) (Saliba et al., 2010).

Une autre étude a été réalisée en 2011 par Massoud et collaborateurs (Massoud et al.,

2011). Dans cette étude, les concentrations des PM10 et PM2,5 collectées dans trois sites à Beyrouth entre Mai 2009 et Avril 2010, ainsi que leurs compositions chimiques ont été

déterminées. Les résultats ont montré que malgré que les concentrations de PM10 et de PM2.5

aient montré des facteurs de corrélation élevés et de faibles coefficients de divergence indiquant une grande homogénéité entre les trois sites, une hétérogénéité a été trouvée dans leurs

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composants individuels. A partir des coefficients de divergences, les auteurs ont pu mettre en

évidence que les contributions des ions et des éléments aux niveaux totaux des PM sont différentes entre les 3 sites malgré que ces espèces proviennent de sources similaires.

En 2012, Saliba et Chamseddine ont mené une étude à Beyrouth en collectant les particules atmosphériques (PM10 et PM2,5) au niveau du campus de l’université AUB depuis août 2009 jusqu’au avril 2010. Les résultats ont montré que durant les épisodes riches en poussières, les niveaux de PM10 et de PM2,5 ont augmenté de 80 et 75% respectivement et qu’une augmentation des nitrates dans les PM10 (36%) et les PM2,5 (54%) a été attribuée à la réaction de HONO et HNO3 avec les particules de poussière (CaCO3) qui est améliorée en zone urbaine (Saliba et Chamseddine, 2012).

Très récemment, une étude a été menée par Daher et collaborateurs en 2013 (Daher et al., 2013) dans le but de caractériser les émissions dues au trafic routier dans l’agglomération de Beyrouth. Des PM10-2,5, PM2,5-0,25 et des PM0,25 ont été collectées au niveau d’un site urbain de fond et d’un autre site proche d’une autoroute. La fermeture chimique a montré que la fraction PM10-2,5 est composée en grande partie des éléments « terrigènes », contribuant à 12-23% de sa masse, tandis que pour les PM2,5-0,25 et PM0,25, les composés organiques (46-56%) dominent au niveau du site proche de l’autoroute alors que les ions secondaires (54-68%) ont été plus abondants au niveau du site de fond. Les auteurs ont montré aussi que les niveaux de carbone organique varient de 4 µg/m3 dans les PM10-2,5 jusqu’à 10,1 µg/m3

dans les PM0,25 collectées à côté de l’autoroute, dépassant celles collectées dans le site de fond (4-7 fois). Quant au carbone élémentaire, il a été montré que sa teneur dans les PM0,25 collectées à côté de l’autoroute était 7 fois supérieure à celle trouvée dans le site de fond, indiquant une contribution des véhicules au diesel aux émissions du trafic routier. Finalement, des HAP ont été détectés dans le site proche de l’autoroute (un maximum de 11,5 ng/m3

) et pas dans le site de fond, avec la majorité confiné à la fraction PM0,25.

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Partie B :

Particules atmosphériques et pathologies

respiratoires

La seconde partie de cette analyse bibliographique sera consacrée à l’étude de l’impact des particules sur l’appareil respiratoire. Nous reviendrons dans un premier temps sur l’anatomie et la physiologie de l’appareil respiratoire, afin de comprendre comment elles peuvent déterminer la déposition et la rétention des particules, avant d’aborder la génotoxicité et les mécanismes d’altérations épigénétiques.

1. L’appareil respiratoire : principale cible des particules