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Chapitre 2 : Effets multi-échelles de la végétation naturelle sur la régulation de la

2.2 Données utilisées

Dans la zone d’étude, 90 parcelles de mil (45 en 2013 et 45 en 2014) réparties sur un site d’environ 400 km2 ont été observées (Figure 21). Pour chacune de ces parcelles des données entomologiques sur les ravageurs de l’épi du mil et leurs ennemis naturels ont été collectées, des données sur les pratiques culturales ont été relevées auprès des cultivateurs, des données sur le paysage nécessaire au traitement de l’image satellite à très haute résolution spatiales ont été inventoriées. Mais, avant de décrire plus en détail le contenu de ces données, nous allons d’abord présenter le protocole d’échantillonnage qui a orienté le choix des champs de mil qui ont été suivis durant ces deux années consécutives.

2.2.1 Sélection des parcelles d’échantillonnage

L’étude de l’influence des éléments du paysage sur la régulation naturelle de la mineuse de l’épi du mil, Heliocheilus albipunctela de Joannis a nécessité préalablement la mise en place d’un protocole d’échantillonnage spatial basée sur des critères paysagers. Pour se faire, ce dispositif s’est appuyé sur deux variables paysagères considérées comme des leviers susceptibles de jouer un rôle important dans la régulation naturelle de la mineuse du mil (Soti et al. 2018). La première concerne la végétation naturelle, essentiellement composée d’arbres dans notre zone

70 d’étude, qui pourrait par sa présence et sa densité favoriser la régulation naturelle des insectes ravageurs. La deuxième concerne la densité de mil, qui en tant que « ressource » pour la mineuse de l’épi du mil qui se nourrit de l’épi pour réaliser son cycle de développement, est considérée comme pouvant être défavorable à la régulation naturelle, si elle domine dans une zone donnée (Bianchi et al. 2006). Pour répondre au mieux à ces deux hypothèses, il nous est apparu fondamental de proposer un plan d’échantillonnage offrant le plus large gradient possible de densité de mil et de végétation arborée, et d’assurer une répétitivité minimum des sites en terme de composition du paysage. L’identification des deux variables paysagères-clés a été possible grâce à l’utilisation préalable d’une image satellite Pléiades à résolution spatiale submétrique qui a permis de réaliser une cartographie fine de l’occupation du sol de la zone d’étude (Figure 21). Calculées dans un hexagone d’1 km2, considéré comme l’aire de vie maximal du ravageur (Soti et al. 2018), ces deux variables « densité de mil » et « densité de végétation naturelle » réparties en trois classes de densité ‘Forte, modéré et faible » ont été combinées deux à deux (figure 21).

Figure 21 : Plan d’échantillonnage de la zone d’étude selon la densité de mil et de végétation arborée. La combinaison de chaque classe de densité arbre et mil (3 classes de densité arbre * 3 classes de densité mil) ont permis d’obtenir une carte composée de 9 modalités paysagères distinctes (Figure 21). Enfin, au regard du nombre limité de sites d’observations pouvant être déployés, 45 au total, nous avons choisi de garder au minimum 5 sites d’observations par type ou « patch »

71 paysager, afin d’asseoir un minimum l’interprétation des résultats finaux. Les parcelles sélectionnées ont été volontairement choisies à une distance d’au moins deux kilomètres entre elles afin d’éviter les effets d’autocorrélation spatiale entre les parcelles (Figure 22).

Figure 22 : Distribution des 45 parcelles sélectionnées en 2013. (Source : Ibrahima Thiaw, 2018)

2.2.2 Le BSI, un indice de mesure de la régulation naturelle de la mineuse de l’épi de

mil

Sur les 45 parcelles présélectionnées (Figure 22), des collectes de données entomologique ont été réalisées en 2013 et 2014, afin de mesurer la régulation naturelle de la mineuse du mil sur l’ensemble de notre zone d’étude. Pour ce faire, nous avons utilisé un indicateur de régulation naturelle développé par Woltz et al. (2012b) appelé BSI (Biocontrol Service Index). Ce BSI ou indice de régulation naturelle est le rapport entre le nombre de larves détruits par l’action des ennemis naturels et celui obtenus sans l’action de ces derniers comme ci-dessous :

1) =

avec M qui est égale au nombre de larves sur l’épi infesté et protégé de toute action d’ennemis naturels à l’aide d’un manchon, T1 le nombre de larves sur l’épi infesté et non protégé et T0 le

72 nombre de larves sur l’épi non infesté (figure 23-a). Pour son calcul, un dispositif de terrain composé de trois à quatre modalités (figure 23-b) a été mis en place dans chacune des parcelles de mil. Des rubans rouges sont attachés à la base des épis pour localiser les modalités. Après une période de 18 jours, il est procédé au décompte du nombre de larves présent au niveau des trois épis (Figure 23a) qui permettra alors de calculer le BSI pour chaque modalité. Enfin, les valeurs du BSI ont été ensuite moyennées pour déterminer un indicateur de régulation à l’échelle parcellaire. La valeur du BSI varie entre 0 et 1. Une valeur nulle indique une absence de régulation, tandis que l’unité 1 témoigne d’une parfaite régulation naturelle.

Figure 23 : Dispositif de calcul du BSI. (Source : Sow et 2018)

La représentation cartographique du BSI calculé en 2013 (figure 24) a permis de mettre en évidence l’importance de la régulation naturelle dans la zone avec des taux supérieurs à 60%, et surtout de montrer une forte hétérogénéité spatiale de la valeur du BSI dans la zone de Bambey qui pourrait en l’absence de traitement d’insecticide, être lié à des facteurs environnementaux et/ou des facteurs liés aux pratiques agricoles. C’est ce que nous allons chercher à tester au travers de ce chapitre.

73 Figure 24 : Distribution spatiale du BSI dans la zone d'étude en 2013.

2.2.3 Les images satellites Pléiades

Deux images satellites Pléiades à résolution spatiale submétrique ont été acquises afin de réaliser la carte d’occupation du sol de la zone d’étude en 2013 et en 2014. Ces cartes ont été réalisées dans la perspective de calculer les indicateurs paysagers permettant de quantifier la composition et la structure des éléments du paysage de notre zone d’étude et d’identifier les motifs paysagers favorables à la régulation naturelle de la mineuse de l’épi de mil. Couvrant une surface de 20*20 km centrée sur la commune rurale de Dangalma à 10 km de Bambey, ces images ont été acquises par CIRAD, dans le cadre du programme ISIS (CNES). La commande était constituée d’une image multi-spectrale (XS) composée de 4 bandes spectrales - bleu, vert, rouge et proche-infra-rouge - à une résolution spatiale de 2 m et d’une image en mode panchromatique (Pan) à 0,4 cm de résolution spatiale (Tableau 4).

Tableau 4 : Caractéristiques des images pléiades

Mode Canal Longueur d’onde (nm) Résolution spatiale (m)

XS B0 (Bleu) 430 – 550 2 B1 (Vert) 490 – 610 2 B2 (Rouge) 600 – 720 2 B1 (PIR) 750 – 950 2 Pan PA 480 – 830 0,4

74 La première image Pléiades a été acquise le 16 janvier 2013, afin de cartographier les cultures et les arbres (Ndao 2013). Acquise durant la saison sèche, les arbres sont en feuilles et donc facilement identifiables. Concernant les cultures de mil et d’arachide, elles peuvent être facilement discriminées du fait que les cultures de mil conservent des résidus sur le sol, alors que les cultures d’arachide en sont dénudées.

La deuxième acquisition a été réalisée afin de mettre à jour la carte d’occupation du sol pour la deuxième année du projet. Elle a été acquise le 19 octobre 2014 en fin de saison des pluies lorsque les cultures arrivent à maturité. Elle a été choisie afin d’étudier l’apport d’une image en saison humide à l’identification des cultures, autre que le mil et l’arachide.

2.2.4 Les données de terrain sur les éléments du paysage

Deux campagnes d’acquisition de données de terrain sur le paysage ont été réalisées en 2013 et 2014 au moment des acquisitions satellites. En effet, la rotation culturale étant une pratique courante dans la région, l’acquisition de données surtout pour les types de culture au moment de l’acquisition de l’image était indispensable pour les traitements prévus par la suite et pour la mise à jour des données sur l’occupation du sol. Ces informations ont été collectées en priorité autour des 45 parcelles de mil dans une zone tampon d’environ 1000 m de rayon (Figure 22). Des données sur les types de cultures et les types d’arbres ont été collectées aléatoirement et leurs positions géographiques ont été enregistrées à l’aide de GPS (Global Positioning System). Les parcelles de cultures et les arbres ont été localisés géographiquement. Le tableau suivant résume les données collectées et qui ont été utilisées pour le traitement des deux images satellites Pléiades et la validation des cartes d’occupation du sol obtenues :

Tableau 5 : Collecte de données de terrain sur le paysage réalisée à Bambey (2013-2014).

Date de la mission Nombre de parcelle

de culture Nombre d’arbre

févr-13 397 427

févr-14 400 356

nov-14 458 758

Total 1255 1541

Une fois collectées, les données ont été digitalisées et intégrées dans le logiciel d’information géographique ArcGIS.

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2.2.5 Les pratiques agricoles

Les pratiques agricoles concernent l’ensemble des techniques culturales utilisées par les cultivateurs sur les 45 champs de mil observés (Sow 2014). Dans cette étude, les données sur les pratiques agricoles ont été obtenues grâce à des enquêtes agronomiques réalisées chaque année sur le terrain. Les informations collectées ont été ciblées sur des indicateurs supposés avoir un impact sur l’abondance des ravageurs du mil et leurs ennemis naturels. Ils ont concerné :

- Les conditions de semis (date, semis à sec) - Le précédant cultural

- Le type de sol et sa préparation - La nature de la fumure utilisée - La date de démariage

- Le type d’engrais - Le nombre de sarclage

Ces pratiques peuvent en effet avoir un impact majeur sur les organismes vivant dans le sol et sur les relations entre les organismes de différents niveaux trophiques. Par exemple, l’intensité du labour, la méthode utilisée et la période de culture sont tous des facteurs qui peuvent avoir un impact sur les arthropodes. Par ailleurs, il a été démontré que l’utilisation de pesticides et d’herbicides a un effet négatif sur les communautés d’ennemis naturels.