Le
tableau posé surune table, on prendun
linge très-propre et très-fin qu'onimbibe dans l'eau-de-vio,eiavec lequel,sans frollcr, on hu-mecteune
partie desa toile.Au
boutde quelques instants, on lave celte partieavecune
éponge douce pleine d'eaupure et fraîche,etl'on revient plusieursfois, en ayantsoin de s'arrêter à temps pour ne pas risquer d'entamerlapeinture.On
laveraainsi progressivementtoute la surfacedu
tableau,en ayant soin de nese servir, pour essuyeràmesure
les places épongées, quo des partiesdulinge qui sontrestées propres. Lorsqu'on croit l'opéra-tion réussie,avecun
lingefin,sec et doux,on essuiela peinture pour bienvoir s'il neresieaucune tracedevernisets'ilyaencore quelques partiesànettoyeravecl'eau-de-vie, puis avt^c l'eau jiuro,aprèsquoil'on essuie eton laisse bien sécher avantde poser lenouveau
vernis.L'eau pure employée pour nettoyerles tableaux est
un
desmoyens
les plus innocents qu'ilyait,en ce qu'il n'a prisequesurlacrasse qui lesrecouvre; elle suffitàles débarrasserde touslescorps gluants,tels
que
gomme
arabiiiue, colledepoisson,colle forte,miel,sucre candi,etc., quisedissolvent facilementdansl'eau.I.e blancd'oeuf, lorsqu'il est
devenu
vieux,n'estsolublenidansl'eau nien agissant surlui par les acides: celavientde la malheureuse ha-bitude de quelquesartistesqui vernissent aublancd'œuf pursans ad-dition desucre candini d'eau-de-vie.De
tous lesselsalcalinsqui peuvent nettoyer lestableaux, tels que cendre debois, cendrede perles, sel do verre, potasse et seldelarlro dissous dans l'eau,un
seul, à notre avis, doit être employé, car tous les autres attaquentl'huile etles couleurs,et sont de véritables mor-dants appliqués au nettoyage des tableaux.Ou
peutdonc se servirda— 58 —
seldetartre, et
commencer
parune
faiblesolution, qu'on peutrccforcer ensuite.Sicependant, pour
un
nettoyage, toutes les ressourcesci-dessus in-diquéesrestaient sans résultats,on
essayeraitdu
borax, qui, dissous dansl'eau,donne
l'alcali le plus innocent et agitdoucement
etlente-ment;
les cendres debois, finement tamisées,produisent lemême
ré-sultat lorsqu'on lesrépandsurletableau,etqu'aprèslesavoirarrosées d'eautièdeon
frottelégèrement avecl'éponge.Maisilne
faut pas lais-ser séjourner longtempscette lessive surla couleur,on
doit l'enlever avecune éponge
dèsqu'ons'aperçoitdu
nettoiement.L'eau de chaux pure
ou
dissolution de chaux dans de l'eau peut rendrelemême
service.Les savons étant obtenus par
un mélange
de graisseoud'huilesavec les sels alcalins, ceux-ci en acquièrent par suiteune
force dissolvante de laquelleon
doit seméfier.Le
savonnoir surtoutpeut devenir d'un emploi fortdaugereux
encertainscas;on
doit donc,quand
il est né-cessairede s'enservir,éprouverleurforce surlapartielamoins
impor-tantedu
tableau, ets'arrêter s'ilyadanger. Toutce que nousvenons
de dire témoigne assez de la nécessité dene
confier destableaux de prixpourles nettoyer qu'àun
restaurateur habileetprudent.Le
savon battu dans l'eau pure,où
l'onaura misun peu
de sel or-dinaire, produitune mousse ou écume
avec laquelleon
peutnettoyer lespeintures les plusenfumées.On
doit mettre cetteécume
sur les parties à nettoyer,et,dès qu'ellese résorbeetdisparaît,l'enleveravecune éponge
imbibée d'eau pure.Avec
de l'esprit-de-vin et del'huile detérébenthine,on
obtientune eau
diteà
nettoyer,dont se serventd'ordinaire lesmarchands
de ta-bleaux.Le mélange
doit se faire ainsi:deux
parties d'esprit rectifiéavec
une
partie de thérébenthine; d'autres huiles coupées dans cette proportiondonnent
lesmêmes
résultats: telles sontcelles d'aspic, de lavandeetde romarin.Lestableaux
non
vernispeuvent se nettoyer par desmoyens
plusdoux; on
peut y employerdu
levaindissousdans del'eau; de lafarine dansde
l'eaudechaux; del'eau-de-vieou du
vinaigre.La
saliveestparfoisemployée
surdetrès-petites toiles;maisellepeut agirsurles couleursenraisondel'acidephosphoriquequiexisteenelle.Un
desmoyens
lesplusdésastreuxemployéspar certains restaurateurs, estdeseservird'urinepourlesnettoyer;on
nedoitjamais l'employer.Il
en
est aussiqui se serventdu
sublimé corrosifde mercure; c'estun
poison terribleetaussidangereux
pourl'homme
qui l'emploieque
parlesrésultais qu'ilpeutamener
là oiion
l'applique.—
SI)— CHAPITRE II
Ilnesuffitpasdesavoir dévernir, nettoyer,revernir
un
tabieanpor.r résumer ensoi lasciencedu
restaurateur; bien loinde là: carlesbois, les toiles, lescartons sur lesquels ils ontétéfaitsdemandent
souventmême
plusde réparation que letableaumême.
Il y a des
panneaux
vermoulus, pourris, fendus,voilés; il y a des toiles qui se ratatinent,dontlapeintures'écaille,se ridej il existe des trous, des ouvertures dans certaines toilesqui nécessitent des répara-rations de nature aussivariée que lesdéyâts auxquels le restaurateur doitremédier.Un
vieux tableaudontlatoile estcrevassée, trouée, friable, ne peut subir d'autre opération que d'Clro rentoilé, c'esl-à-dire collé sur luc toileneuve.Lorsqu'ilnes'agitque de
raccommoder
quelquesplacesisolées dans lesquellesun
dégâtest arrivé, on peut le faire en se servantdesfrag-ments
de toileusée qu'oncolle àl'enversdu
tableau.Quant
aux bosses creusesousortantes quise manifestent parfoissurun
tableauquiauraété encontact avecun
corps dur,ou bien quiaura été frottécontreun
angle,ilestpeu demoyen
d'yremédier,du moins
complètement.Pour
yessayer,on
doit aplatir etrepasser à l'enversles placesainsiendommagées,
et,si la toile n'a pas été percée parsuite durenfonce-ment
qu'elle asubi, il estnécessaire d'y pralKjuerune
incision; puison
colle surlereversun
peu decharpieappuyée surun
fragmentdo
vieille toile, et, par-dessus, on retouche letableauavec
un
ton sem-blable à celui qui existaitsurl'endroitmalade.Il yaeu
un
temps où, faute de connaiseances nécessaires,en place devernirles tableaux,ou
les enduisaitavecun
corpsgras. Ces sortes d'enduits,durcisparle temps,offrentune
difficultéénorme
àsurmon-terpourle restaurateur; car ni l'eau pour laver, ni l'acidepour grat-terne peuvent en avoir raison.I.ameilleure façon est,selon nous,de
traiter ces tableaux avec l'huile de lin. Pour en arriverà kïur net-toiement,il faut, pondant les chaleurs de l'été, lescouvriravec cette huile, en ayant soin,à mesure que vousla voyezs'absorberet s'em-boire, d'en verser de nouvelle sur lesplaces d'où elle estdisparue;
auboutdedix
àquinzejours, cettecouched'huile est devenuegluante.Vous vousservirez alors d'alcoolpuret fortpour enlever cette huile»
qui entraîne les anciennespartieshuileusesavecelle;àmesure qu'elles disparaîtroni, vous verrezrenaître les couleursdans leur pureté pri-mitive.
— 60 —
Nous
avonsditcomment
leblanc d'œuf pur, posécomme
vernis et renouvelédelempsàaulre, finitparformerune
croliiejaunâtre etplus dureque lagomme
copale elle-même, etque, presque toujours, elle résisteaux acides, ainsi qu'aux sels les plus actifs.Un
des meilleursmoyens
est defrotterla toileavec de l'huiledelin, de la laisser imbi-bée decelle huileune
heureou deux,et, au bout dece temps, de l'en-leverparl'esprit-de-vin; avecl'huile delin, le blanc d'œuf viendra.Une
chose encore vient détériorer les tableaux, c'est la moisis-sure; il yen
adeux
sortes: la moisissure proprement dite et la moi-sissurefausseou
apparente.La
premièreprovientde l'humidité; celle-là n'est qu'un mince in-convénient parmi tant d'autres qui sont attachés à la peinture; lorsqu'elle estrécente,on
fait sécher le tableau,on
le nettoiepar le froiiement, et tout est dit.Cependant
il peut arriver que, par suite, letableauaitperdusatransparence; sicelaétait,ilfaudrait ledévernirel le revernir.
La
moisissureapparente peutvenirde plusieurscausesquenous de-vons
faireconnaître,puisque chacuned'elles ason remède.L'unedes espèces demoisissures
que nous venons
de dire provient de mordants trop violents donton
se seraservi pour nettoyerle ta-bleau,etqui enontdénaturé les couleurs; quelquefois ce moisi ap.parent cède àl'huile grasse qui vientrafraîchir lestonsde la peinture.
Maislorsque, parce
moyen, on ne
réussitpas,on
doit opéreravec de l'alcooletdu
vernisau
masticen
égale quantité, et s'en servircomme
sil'on voulait dévernir.
Il arrive quela moisissurese
met
aprèsdespeintures vernies à l'es-prit;on
doitalors se servir decettemême
substance pourl'enlever eten
débarrasserletableau.Quelquefois
on
voit se manifester de la moisissure après avoirren-toilé
une
peinture;en
ce cas, elleprovientde la chaleurdu
ferà re-passerdontilafalluse servir, laquelle roussit lescouleurs en brûlant l'ancien vernis.Ilarrivesouvent, dans
une
circonstancepareille àcelle-ci, que cette apparente moisissure s'enlèveavecl'alcooletl'huilede thérébenthine;d'autres fois,
on
nepeut parvenir à raviver les couleurs qu'àl'aide de l'huilegrassequ'ony
ajoute.On
voit sur certaines peintures se formerimmédiatement du
moisi lorsqu'on leshumecte
pourles nettoyer; celaprovientdu
blanc d'œuf quilesrecouvrait et qui n'a pas été enlevé avant de les vernir; il est bienentendu que celane
peutarriver qu'à des tableaux craquelés et crevassés, ce qui permetàl'eau de pénétrersous levernis etd'atlein-
-ci-drele blancd'œuf; il devient nécessaire
en
ce cas d'enlever par l'es-pril-de-vin, soit pur, soit môlé d'huile delin,le blancd'oeufavec le vernistoutensemble.Ilarrive souvent qu'un tableau de
moyenne
dimension, ayant été peintparglacis etnon
parempâtement,
se gerce detoutesparts,en
sorte que la peinture semblecouverte d'unréseau,et c'estlà
un
in-convénient auquel il estextrêmement
difficile de remédier, excepté dans certains cas où, les crevasses n'étant pas trop nombreuses,on
peutlesrempliravecun
cératfaitdecireviergefondue dansla théré-benlbine.Il y afort peud'outilsqu'onpuisse employer pour le nettoyage des tableaux;ainsi, en faitd'instrumentsdefer ou d'acier,
on
ne se sert quedu
grattoir etdu
rasoir, etencore ils no doiventservir que pour enlever,enraclant, lesaspérités, qui parfoisont lellcmcut durci, qLio Di l'alcool,ni aucunelessive,ne sauraientles faire disparaître.On
se sert d'un ferà repasser demi-chaud pour étendreune
toileneuve
derrièreune
peinture; il estindispensable aussipouraplatir descouleursécaillées.Lorsqu'on fait cette opération,
on
doit d'abord couvrir les places écaillées d'un papier saucé de craie blanche. Cela fait, on passe et repasse le fer à plusieursreprises, etjus(iu'à ce qu'on no sente plus dessous d'inégalités.Peut-êiro bien que, dans l'opération, le papiers'attachera après la peinture; gardez-vous alors de vouloir le retirer do vivo force, car vous pourriez enlever avec
un
fragment de peinture; mouillez-lû pa-tiemmentjusqu'à ce qu'il se détache.Dans
le casoù
lapartie à réparer estconsidérable,on
doitla cou-vrir decolled'amidon etplacerpar dessusun
papierhuilé.IlIaroiiQagc on
rcutoiIiig:cdes t.ibicnnx.
Cette opération est très-délicate.
On
colle d'abord surla peinture plusieursdoublespapiers... qui formentun
cartonnage, puison enlèvela vieille toile, soit en l'humectantavec une éponge mouillée, soit en l'usantavecune pierrepouce et
on
applicjuesurl'enversde lapeinliiroune
toileneuve
après avoir enduit l'une et l'autre d'une coucho do colle.Quand
cette dernière est presque sècheon promène un
fer chaudsur latoile pour la rendre plusunieetplus adhérente; après quoi ilne resteplus qu'àenleverlecartonnage, ce quisefait avecune
éponge, et letableau setroave rentoilé.Cet ingénieuxprocédéest
dû
à M.M. Ilacquin etPicaultrestaurateurs de tableauxrenommés
auXVIU
siècle.— G2 —
S'ils'agitd'enlever
un
tableaude dessusun
panneau,on
collepre-mièrement
dessusune
gaze eiplusieursdoubles de papier, cecarton-nage
étant sec,on
placele tableau surune
surface bien unie etplaie, surune
table, et avecune
scie fineon entame
lepanneau
parpetits trianglesou petits carréscontigusqu'on enlève ensuitepatiemment
et très-facilementavecun
fermoirou
ciseau.On
approcheainsipeu
àpeu
de lapeinturesans crainte dela détériorer,on
vient ensuite avecun
petit rabot et des râpes réduire ce quirestedebois à
une
si faible épaisseurqu'en lemouillant ensuite avecune éponge on
ledétache sans peine etl'onarriveàla couche première appliquéeau panneau
avant de coïnmencer le tableau.On
enlève celte impression qu'on trouvepresque toujours fendillée eton
procède au rentoilagecomme
il estditplus haut,
Pour
coller sur bolsou
sur enduit de plâtreun
tableau peintsur toile,on
emploie dela colle forteou
des couleurs grasses,ou
bienune
composition de poix grecque et de cire.Quelques
personnesfontune
collecomposée
de farine et d'unpeu
d'ailécrasé dansl'eau, d'autres mettent fondre dela colle forte