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D1. Propriétés électrophysiologiques in vitro en condition physiologique

Les expériences in vitro visant à caractériser les propriétés électrophysiologiques intrinsèques des neurones du GPe ont principalement été réalisées sur des tranches aigues de rongeurs. Ces expériences ont révélé qu’au niveau électrophysiologique, les neurones du GPe présentent une vaste hétérogénéité et la classification en fonction de leurs propriétés intrinsèques reste très controversée (Deister et al, 2013; Gunay et al, 2008 ). Cependant, une caractéristique fondamentale et universelle de ces neurones est leur activité autonome. En effet, les résultats obtenus par Chan et al (Chan et al, 2004) démontrent que in vitro les neurones du GPe génèrent une activité autonome et régulière. Ceci leur est permis en particulier par la présence à leur surface de canaux HCN (Hyperpolarisation-activated

Cyclic-Nucleotid modulated Cation Non-selective Channel) et de courant sodiques persistants INaP

(Chan et al, 2011; Chan et al, 2004 ; Mercer et al, 2007 ). Dans le GPe, les canaux HCN ont une désactivation relativement lente donc leur action dépolarisante se ressent tout au long de la décharge et d’autant plus après l’hyperpolarisation du neurone (Chan et al, 2004). Cela

31 aide à garantir que le potentiel de membrane ne se stabilise pas à des potentiels inférieurs à ceux nécessaires pour activer les canaux Na+. Néanmoins, il a été observé qu’alors que l’activité de décharge des neurones du GPe est assez régulière à haute fréquence, ces neurones peuvent décharger de manière irrégulière à basse fréquence. La régularité de leur activité électrique serait due aux propriétés des canaux potassiques de type SK activés par les conductances calciques qui sont présents dans ces neurones (Deister et al, 2009) même si les canaux HCN participent aussi activement à ces caractéristiques de décharge (Chan et al, 2011) puisqu’il a clairement été établi que leur blocage pharmacologique ralentit la décharge électrique et diminue la régularité des neurones du GPe.

La grande variabilité électrophysiologique des neurones du GPe (Deister et al, 2013) provient certainement du fait que plus de 10 types de canaux voltage-dépendants différents sont présents sur la membrane plasmique de ces derniers (Baranauskas et al, 1999; Chan et al, 2004 ; Mercer et al, 2007 ; Surmeier et al, 1994 ). Dès lors, des différences d’expression de ces canaux vont contribuer aux activités électriques variables des différents neurones (Gunay et al, 2008). Diverses études se sont penchées sur la caractérisation des propriétés membranaires des neurones pallidaux dont la connaissance est cruciale dans la compréhension de son fonctionnement et ont proposé une classification de ces neurones. D’après les résultats de Cooper et Stanford (Cooper & Stanford, 2000) obtenus in vitro, les neurones du GPe peuvent être classés en trois catégories. Les neurones de type A, représentant 63% des neurones pallidaux, possèdent une large arborisation dendritique et leur fréquence de décharge spontanée est régulière. Les neurones de type B représentent 32% des neurones pallidaux. Ces cellules sont spontanément actives et leur patron d’activité électrique est irrégulier. Les neurones de types C sont rares (5% des neurones pallidaux). Ils sont identifiables par leur gros corps cellulaire (27 × 15 μm) et ces neurones possèdent une large arborisation dendritique ce qui pourrait correspondre aux neurones cholinergiques du noyau basal de Meyert. Les neurones de type A pourraient correspondre aux neurones de type I décrits par Nambu & Llinas {Nambu, 1997 #1392; Nambu, 1994 #1393} alors que les caractéristiques des neurones de types B correspondent à celles des neurones de type II décrit par ces mêmes auteurs chez le cochon-d’inde. De plus, la morphologique des neurones de type B est similaire à celle des neurones décrits par (Millhouse, 1986). Une étude utilisant des stimulations computationnelles suggère que la variabilité intrinsèque des neurones du GPe est due à la diversité des canaux présents sur le neurone (Gunay et al, 2008). De plus, les propriétés électrophysiologiques des neurones sont extrêmement dépendantes du contexte environnemental et des autres conductances présentes au moment de l’enregistrement (Gunay et al, 2008). Ainsi, cette étude suggère qu’il existerait un continuum concernant les propriétés électrophysiologiques des neurones et il serait

32 impossible de les classer en fonction de ces critères. Une étude récente menée au laboratoire a permis de clarifier le nombre de sous-populations neuronales du GPe grâce à une corrélation entre la présence d’un marqueur neurochimique et les propriétés électrophysiologiques intrinsèques des neurones du GPe chez le rat (Figure 14) (Abdi et al, 2015). Les auteurs ont montré que les neurones prototypiques exprimant la Parvalbumine (PV) sont caractérisés par un taux de décharge spontané rapide et régulier (25-30Hz), des rebonds d’inhibition, une accommodation de leur fréquence de décharge, un courant Ih participant à l’activité pacemaker et une amplitude de l’AHP (After hyperpolarisation

potential) faible alors que les neurones arkypallidaux, exprimant le facteur de transcription

FoxP2 et le neuropeptide PPE déchargent à basse fréquence (5Hz) et de manière irrégulière. Ils n’ont pas la capacité de rebond après une bouffée de potentiel d’actions (PA) et ont une amplitude de l’AHP prononcée (deux fois plus importante que celle des neurones prototypiques PV+). Les neurones prototypiques n’exprimant pas la PV (uniquement Nkx2.1+) ont quant à eux des propriétés intermédiaires. Ces résultats suggèrent que la différence d’excitabilité entre les neurones prototypiques et arkypallidaux repose en partie sur la différence d’amplitude des courants INaP qui sont deux fois plus grands chez les neurones prototypiques que chez les neurones arkypallidaux et sur des différences de densités de canaux CavH et Kv4 pouvant respectivement sous-tendre les différences observées entre l’amplitude de l’AHP et le taux de décharge spontané des deux types neuronaux pallidaux.

D2. Propriétés életrophysiologiques in vivo en condition physiologique

In vivo, les neurones du GPe ont une activité autonome (DeLong, 1971 ; Filion & Tremblay,

1991). Selon différentes études, les neurones du GPe ont un taux de décharge moyen compris entre 10-40Hz (Cruz et al, 2009; Kita & Kitai, 1991 ; Ni et al, 2000 ) en condition contrôle qui est largement diminué en condition parkinsonienne (Cruz et al, 2009). Néanmois, certaines données remettent en cause cette hypoctivité des neurones du GPe en condition parkinsonienne (Levy et al, 1997). De manière générale, les neurones pallidaux enregistrés in vivo affichent un taux de décharge régulier, à haute fréquence qui est interrompu par des pauses. L’activité globale de ces neurones in vivo est désynchronisée (DeLong, 1971, Bergman, 1998 #1429). Comme les neurones du GPe reçoivent leurs principales afférences du striatum, ils diminuent globalement leur activité de décharge au cours du mouvement. Mais ils reçoivent également de denses entrées excitatrices du NST qui peuvent accélérer leur fréquence de décharges. Malgré le fait que les neurones pallidaux n’ont pas besoin des entrées synaptiques pour maintenir leur activité, les pauses observées

33 glutamatergique du NST ainsi que de leur modulation inter-neuronale réciproque (Kita & Kita, 2011; Noblejas et al, 2015).

Figure 14: Propriétés électrophysiologiques in vitro des neurones prototypiques et arkypallidaux du GPe. A-B. Activité de décharge typique de neurones prototypique s enregistrés

en configuration patch perforé. De gauche à droite : Activité de décharge spontanée, activité de décharge évoquée induite par l’injection de 100 pA de courant pendant 2 s, et en réponse à un créneau de courant hyperpolarisant (−100 pA ou −80 pA pendant 500 ms; produisant une déflexion du potentiel de ∼ 40 mV (flèche noire) suivi d’un “sag qui est un phénomène d’échappement à l’hyperpolarisation provoqué par l’activation des canaux HCN . A droite, images du neurone enregistré rempli à la biocytine (Bc) sur lequel un marquage immunohistochimique a été réalisé l’identifier sa nature moléculaire. Ce neurone est PV-positif et donc identifié comme un neurone prototypique. C. Même description qu’en A et B mais pour un neurone arkypallidal exprimant le marqueur FoxP2. Température d’enregistrement : 32°C.

Ainsi, le mode d’activité de ces neurones repose sur un équilibre entre leur propriété pacemaker et la modulation synaptique qu’ils reçoivent. D’après différentes données issues d’enregistrements électrophysiologiques extracellulaires, réalisés in vivo chez le singe, les neurones du GPe ont été classés en deux grandes catégories. Les plus nombreux sont des neurones qui déchargent à haute fréquence et ayant des pauses spontanées de leur activité. Ces neurones sont nommés « high frequency pausers » (HFP). Puis une seconde population minoritaire de neurone pallidaux déchargent à basse fréquence et plutôt en ayant une activité en bouffées de PA. Ces neurones sont appelés « low frequency bursters » (LFP) (Figure 15) (DeLong, 1971, Gardiner, 1992 #3141). De plus, des études également

34 réalisées chez le singe, ont montré que la forme des PA de ces neurones est différente (Bugaysen et al, 2010). Ceci suggère l’existence de différentes propriétés cellulaires dans la génération des PA. Des enregistrements réalisés chez l’homme confirme l’existence de plusieurs types cellulaires dans le GPe (Magnin et al, 2000) suggérant que ces sous-populations sont conservées chez l’Homme. Les expériences réalisées chez le rat anesthésié révèlent qu’environ 70% des neurones pallidaux ont une activité régulière continue, d’autres affichent une activité en bouffées de PA périodiques et d’autres ne déchargent pas spontanément. Une partie des neurones présentant une activité continue peut être activée par des stimulations antidromiques dans le STR, le NST ou la SN alors que ce n’est pas le cas de ceux présentant une activité en bouffées. Un très faible nombre de neurones silencieux présente une réponse antidromique uniquement lors d’une stimulation du STR (Kita & Kitai, 1991). Ces profils d’activités sont en partie retrouvés chez le singe concernant les neurones HFPs et LFBs. Les neurones HFP et LFP enregistrés chez le primate semblent correspondre respectivement aux neurones prototypiques et arkypallidaux retrouvés chez les rongeurs.

Figure 15: Profils électrophysiologiques typiques d’un neurone « high frequency pauser » (HFP) (A) et d’un neurone « low frequency burster » (LFP) (B) décrits chez le singe.

D3. Propriétés électrophysiologiques pathologiques in vivo

Animal éveillé

L’activité du GPe est fortement perturbée en condition parkinsonienne. En effet, chez le singe MPTP éveillé et les patients parkinsoniens, le profil d’activité de ces neurones change par rapport aux données obtenues en condition contrôle. Une activité de décharge synchronisée, rythmique et en bouffées de PA émerge du GPe. De plus, la variabilité moyenne de l’activité de décharge augmente et les neurones du GPe deviennent hypoactifs (Filion & Tremblay, 1991 ; Magnin et al, 2000; Nini et al, 1995 ). Des résultats similaires sont obtenus chez le rat lésé à la 6-OHDA. L’intensité de ces changements varie avec le temps et la sévérité de la lésion dopaminergique. L’ensemble de ces changements

35 électrophysiologiques sont associés à certains symptômes tels que l’akinésie et les tremblements de repos observés dans la MP. L’hypoactivité des neurones du GPe peut être expliquée par une hyperactivité de la voie striato-pallidale comme le prédit le modèle classique d’organisation anatomo-fonctionnelle des GB décrit par Alexander et crutcher (Alexander et al, 1990). Pour étayer cette hypothèse, une augmentation des pauses d’activité est observée uniquement au niveau des neurones du GPe. Ce résultat est en faveur d’une augmentation des entrées inhibitrices dans le GPe (Kita & Kita, 2011). Mais d’autres hypothèses sont également envisagées telles qu’une perte d’excitabilité intrinsèque. En effet, une étude menée sur des souris parkinsoniennes montre que les neurones du GPe subissent une réduction d’expression des canaux HCN ce qui a pour conséquence une réduction de l’activité de décharge de ces neurones (Chan et al, 2011).

L’émergence d’activités oscillatoires au niveau du GPe chez les modèles animaux de la MP est une autre signature électrophysiologique de cette pathologie. Ces oscillations, mesurées au niveau de potentiels de champs locaux (LFP), sont situées dans la gamme de fréquence des ondes β (entre 15-30Hz) et sont dues à la synchronisation excessive des neurones du GPe (Nini et al, 1995). Les oscillations β du GPe sont de moins grande amplitude que celles observées dans le NST et le GPi (Sharott et al, 2005). Les canalopathies touchant en particulier les canaux HCN et Na+ dans les neurones du GPe lors de la MP pourraient avoir une implication dans l’établissement de ces ondes lentes (Chan et al, 2011 ; Hashimoto & Kita, 2006). Il a également été montré que la boucle de rétrocontrôle existant entre le GPe et le NST joue un rôle important dans l’apparition de ces oscillations. En effet, une étude menée chez le singe MPTP révèle que l’injection d’un antagoniste glutamatergique dans le NST ou de muscimol (agoniste des récepteurs GABAA) dans le GPe, a pour conséquence un renforcement de la voie pallido-sous-thalamique, conduisant à une profonde réduction des oscillations β dans le réseau GPe-NST (Tachibana et al, 2011).

Animal anesthésié

Chez le rat anesthésié, des données révèlent que les neurones du GPe ont une fréquence de décharge plus lente suite à une déplétion dopaminergique par rapport à la situation contrôle. Il apparait également une synchronisation entre les neurones et l’émergence d’activité dans la gamme des oscillations β (Mallet et al, 2008a) ce qui est aussi observé au niveau du NST (Mallet et al, 2008a ; Sharott et al, 2005). De plus, des observations révèlent que chez des rats parkinsoniens anesthésiés, durant les vagues d’activité lentes corticales (SWA), les neurones prototypiques déchargent en antiphase avec l’activité corticale alors que les neurones arkypallidaux déchargent en phase avec cette dernière (Figure 16) (Mallet et al, 2012). Cette dichotomie fonctionnelle est retrouvée chez les rats contrôles (Figure 16) (Abdi et al, 2015) ce qui prouve qu’elle n’est pas une adaptation induite par le

36 développement de la MP. Mais chez les animaux contrôles, les neurones prototypiques déchargent de manière très régulière et sans coordination avec les vagues d’activité corticale, alors que la déplétion dopaminergique induit une profonde irrégularité de leur activité et les couple en anti-phase avec les vagues d’activité de ce dernier. La perte dopaminergique a peu d’effet sur les neurones arkypallidaux qui en condition contrôle et en condition parkinsonienne sont couplés en phase avec l’électrocorticogramme (EcoG) même s’il est à noter un couplage plus important en condition parkinsonienne (Abdi et al, 2015).

Figure 16 : Activité de décharge spontanée in vivo de neurones prototypiques et arkypallidaux identifiés par leur profil moléculaire spécifique chez les rats témoins et 6 -OHDA. A. Activité typique d’un neurone prototypique du GPe enregistré chez un rat témoin pendant l’enregistrement simultané de l’électrocorticogramme (ECoG). Le même neurone a été enregistré pendant une activité corticale à ondes lentes (SWA) et une activation corticale. B. Même description qu’en A mais chez un rat 6-OHDA. C. Même description qu’en A mais sur un neurone arkypallidal du GPe. D. Même description qu’en C mais chez un rat 6-OHDA. (Abdi et al, 2015).

4. Fonctions du globus pallidus externe