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L’erreur : Définition, Évolution et Typologie

II.1.3 Distinction faute-erreur

Dans le langage courant, la notion de faute et celle de l’erreur sont considérées comme synonymes, contrairement au domaine de la didactique des langues où elles sont différentes. La faute est considérée comme relevant de la responsabilité de l’apprenant, elle signale ses manquements, les ratés de son apprentissage. Car il connait et maitrise les règles et la structure de la langue, mais à cause de différents facteurs (stresse, manque de confiance en soi, fatigue…) il n’arrive pas à utiliser la bonne forme.

L’erreur est un indicateur de processus, elle informe l’enseignant sur des capacités présentes chez l’apprenant scripteur et de leur degré de maîtrise (Astolfi, 2006). Elle relève d’une méconnaissance de la règle de fonctionnement. Il est donc clair que les erreurs sont bien différentes des fautes, et que le terme d’erreur nous parait beaucoup plus approprié.

On peut dire que l’erreur est un signe d’échec de l’apprenant quand il affronte un type d’obstacle donné, elle est toujours et forcément présente et transitoire dans l’apprentissage de

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langues. Pour Brousseau G, « l’erreur n’est pas seulement l’effet de l’ignorance, de

l’incertitude, du hasard (…) mais l’effet d’une connaissance antérieure qui avait son intérêt,

ses succès, mais qui, maintenant, se révèle fausse, ou simplement inadaptée ». (Rapport de stage sur l’enseignement-apprentissage du FLE à l’école-Al-Nahdha-dAbu-Dhabi)

Durant l’apprentissage et dans l’emploi d’une ou de plusieurs langues, on commet souvent des erreurs et des fautes, elles sont en général inévitables. L’erreur est intégrée au système grammatical de l’apprenant, tandis que la faute est associée à la performance indépendante du niveau de compétence de cet apprenant.

Nous remarquons donc qu’il existe une forte analogie entre l’erreur et la faute. Selon le dictionnaire Hachette, la faute est définie comme un manquement au devoir, à la morale ou à la loi, un manquement à certaines règles. Commettre une faute apparaissait comme quelque chose de grave qu’il fallait à tout prix punir et sanctionner.

En didactique, le mot « erreur » semble le plus apprécié. La notion de faute a été remplacée par la notion d’erreur. Et depuis quelques années, le concept de l’erreur bénéficie d’une valorisation au sein du système scolaire, elle va être considérée comme un processus d’apprentissage bénéfique.

Le Cadre Européen Commun de Référence pour les langues a fait une distinction entre les fautes et les erreurs en montrant que les erreurs sont entrainées par un écart déformé de la compétence cible d’un apprenant d’une langue seconde, tandis que les fautes apparaissent quand un apprenant est incapable de mettre ses compétences en œuvre comme le scripteur natif. « Les erreurs sont causées par une déviation ou une représentation déformée de la

compétence cible. Il s’agit alors d’une adéquation de la compétence et de la performance de l’apprenant qui a développé des règles différentes des normes de la langue seconde. Les fautes, pour leur part, ont lieu quand l’utilisateur-apprenant est incapable de mettre ses

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compétences en œuvre, comme se pourrait être le cas pour un lecteur natif. ». (Cadre

Européen Commun de Référence pour les Langues, 2005 : 118).

La distinction entre faute et erreur est étroitement liée à la dichotomie Chomskyenne compétence/performance. Selon Chomsky, la compétence renvoie au système de règles intériorisées par l’apprenant, grâce auquel il est capable d’énoncer un nombre infini de phrases. La performance est la manifestation de la compétence du scripteur dans sa production écrite. L’erreur est donc révèle donc d’une maîtrise déficitaire des règles de fonctionnement. La faute est associée à la performance indépendante du niveau de compétence et elle est souvent non répétitive et autocorrective.

Cette distinction importante entre erreur et faute, est liée aux notions de performance et de compétence proposées dans le cadre de la grammaire générative. Un problème de performance, c’est‐à‐dire un échec d’exécution lors de la mise en œuvre de savoirs linguistiques dans la production ou la compréhension d’énoncés, sera appelé faute, alors qu’un dysfonctionnement attribuable à une faille dans la compétence du locuteur, soit sa capacité à produire ou à reconnaitre des énoncés appartenant à sa langue, sera désigné par le terme erreur. Bien que cette opposition semble partagée par de nombreux chercheurs, il existe certaines nuances dans la terminologie employée.

Révélant une certaine distinction par rapport à l’erreur, la faute perpétrée dans l’apprentissage de l’écrit est le produit de différentes performances que l’apprenant entreprend en raison de mauvais choix du style engagé et de la stratégie optée qui, parfois, ne conviennent pas au contexte et au bon usage de la langue.

Ainsi, la faute se produit dans des circonstances particulières comme le stress, le surmenage, le doute ou l’hésitation. Parfois, elle provient même de la mauvaise planification, de la transposition d’un sujet à l’autre une fois l’apprenant s’engage dans l’énonciation.

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Donc, pour un observateur peu averti, l’erreur perpétrée par l’apprenant est une faute qu’il faut impérativement sanctionner, alors que pour l’enseignant elle est considérée en tant qu’indice bienvenu d’une étape obligatoire, comme un outil rentable dans le processus d’apprentissage.

En effet, le mot faute véhicule, dans certaines de ses acceptions, l’idée de manquement à un engagement moral ou religieux, à une loi; il est donc plus lourdement connoté qu’erreur. La didactique n’ayant plus tendance à considérer l’erreur comme pathologique et comme à éradiquer, mais plutôt comme un phénomène normal du processus d’apprentissage, voire un élément central de ce processus, il est tout à fait compréhensible que l’on préfère un terme avec moins de connotations négatives. Mais au‐delà de ces considérations connotatives, ces choix terminologiques cachent‐ils des nuances conceptuelles ? Cette question est cruciale lorsqu’on s’intéresse à l’analyse d’erreurs, puisque les différents dysfonctionnements dénotés par ces termes n’auront peut‐être pas la même pertinence du point de vue de l’analyse.