• Aucun résultat trouvé

Le BER contribue à la longévité et à la viabilité cellulaire par le maintien de l’intégrité du génome et participe à de nombreuses autres fonctions cellulaires. De ce fait, des défauts dans la voie du BER sont associés à un certain nombre de pathologies.

BER et vieillissement prématuré

En dehors du cerveau, lorsque des cellules sont BER déficientes, l’augmentation et ainsi l’accumulation des dommages oxydatifs dans leur ADN conduit à un vieillissement rapide de ces dernières. Ainsi, plusieurs études menées sur la souris ont démontré que des défauts dans le BER ou une diminution de la réparation des lésions issues d’oxydations ou encore une sensibilité accrue au ROS menait à des phénotypes dégénératifs et au vieillissement accéléré et prématuré des animaux [114].

En parallèle, les télomères (extrémités des chromosomes) sont extrêmement sensibles aux lésions oxydatives, notamment au niveau des répétitions TTAGGG. Les lésions uraciles et 8-oxoG sont donc très abondantes au niveau des télomères. Le mécanisme BER propre aux télomères n’est toujours pas bien compris, il a cependant été mis en évidence que les protéines garde du corps (« shelterin ») TRF1, TRF2 (« Telomeric Repeat Factor 1 et 2 ») et POT1 (« Protection Of Telomeres protein 1 ») interagissent physiquement avec les acteurs du BER tels que Polβ, FEN1, APE1 et NEIL3 [115, 116].

74 BER et cancers

Les disfonctionnements du BER et l’instabilité génomique dont il en résulte sont liés à de plus grandes prédispositions à certains cancers. Ainsi, une forme de Polβ délétée entre les positions 208 et 236 ou encore les formes mutées K289M et I260M ont été retrouvées dans certaines tumeurs humaines différentes, mais leur présence n’a pas pu être reliée directement à ces maladies.

Cependant, il a été montré que le BER était beaucoup moins efficace en présence de ces formes modifiées de Polβ [117]. Chez la souris, certains mutants de Polβ ont été corrélés avec le lupus [118].

La déficience des protéines APE1, XRCC1, et LIG1 ont été reliées à la prédisposition à des cancers [117].

La déficience des ADN glycosylases est impliquée dans de nombreuses pathologies humaines, dont des cancers et des maladies neurodégénératives telle que la Chorée de Huntington. Des études ont montré que les ADN glycosylases MUTYH, MBD4, hNEIL1 et hOGG1 peu ou non fonctionnelles augmentaient individuellement le risque de différents types de cancers (Tableau 5). Certaines ADN glycosylases telle qu’UNG1 ou SMUG1 ne semblent pas induire de pathologie lorsqu’elles sont les seules inactives. Cependant, lorsque les deux gènes relatifs à ces enzymes sont supprimés chez la souris en même temps, on observe l’apparition de maladies telles que des cancers (Tableau 5). Il en est de même pour NEIL1 et NTHL1, MUTYL et OGG1 (Tableau 5). Cela signifie que, dans certains cas, lorsqu’une ADN glycosylase est non fonctionnelle, un système de secours existe pour pallier à l’enzyme défectueuse. Les ADN glycosylases prennent en charge des panels substrats spécifiques (Tableau 7, p.

85), et partagent des substrats communs. Ainsi, le recouvrement des activités des ADN glycosylases permet de limiter les conséquences de l’inactivité de l’un des initiateurs du BER.

En parallèle, des altérations au niveau des gènes codants pour les protéines impliquées dans le BER ont récemment été reliées à certains cancers, notamment sur les gènes produisant les ADN-glycosylases MBD4 et NEIL1 (Tableau 5). MBD4 initie donc le BER en se liant à des régions de l’ADN hyperméthylées, sur des îlots CpG méthylés (voir la section précédente I.2.2.1 p. 69). Cette ADN glycosylase excise les bases mésappariées aux G, provenant généralement de la désamination de la cytosine en uracile et de la 5-méthylcytosine en thymine (potentiellement mutagènes car cela mène respectivement aux mésappariements G.U et G.T) [36]. Des études récentes ont montré un lien entre le « silencing » épigénétique du gène de MBD4 et un certain type de cancer colorectal et ovarien [119].

Une déficience de l’ADN glycosylase NEIL1 a été corrélée à une augmentation en 8-oxoG dans l’ADN, et aux mésappariements de bases associés tels que 8-oxoG.A, menant à des transversions G:C → T:A [120]. De plus, chez des patients atteints de cancer de l’estomac, la production d’ARNm codant pour NEIL1 était diminuée de 46% en moyenne [121]. Dans une autre étude, 42% des patients ayant un

75

cancer des poumons présentent la région promotrice du gène NEIL1 hyperméthylée [122]. Ces informations permettent de souligner l’implication d’ADN glycosylases telles que MBD4 et hNEIL1 dans la prévention de l’apparition de cancers chez l’homme.

BER et maladies neurodégénératives

Les neurones sont des cellules qui n’ont pas la capacité de se diviser, et l’accumulation de mutations dues à une déficience du BER favorise la décroissance du nombre de cellules neuronales.

Dans des études récentes, l’hypersensibilité des neurones au stress oxydant suivie de l’apoptose a été reliée aux protéines UNG, AAG et APE1 défectueuses [117]. Une baisse de production de l’ADN glycosylase hOGG1 dans les neurones a également été corrélée à la maladie d’Alzheimer chez la souris [101, 123].

Pour finir, certaines ADN glycosylases (hNEIL1, hOGG1) ainsi que la PARP1 et FEN1 ont été reliées au Syndrome de Cockayne (« Cockayne Syndrome », CS), une maladie génétique où le sujet présente une croissance insuffisante, une dysmorphie spatiale, une photosensibilité cutanée, des troubles neurologiques progressifs atteignant la vision et l’audition ainsi qu’un retard mental. L’ADN des cellules des patients atteints du CS semblent accumuler les lésions oxydatives et UV-induites [101].

En parallèle, plusieurs protéines du BER interviennent dans l’augmentation de la pénétrance de la Chorée de Huntington (Tableau 5). Cette maladie est causée par l’augmentation du nombre de répétitions du triplet de nucléotides (TNR) « CAG » dans la séquence du gène HTT (ou HD) codant pour la protéine Huntingtine. HTT joue un rôle essentiel dans la régulation du trafic vésiculaire et la sécrétion de facteurs neurotrophiques. En dessous de 28 répétitions, le gène code pour une protéine normale, et à partir de 40 répétitions, la pénétrance de la maladie est complète. Le LP-BER intervient dans le mécanisme « TriNucleotide Repeat expansion » (TNR) par lequel le nombre de répétitions de ce triplet CAG augmente. Ce mécanisme fait intervenir les ADN glycosylases hOGG1, hNEIL1 et la FEN1 chez l’Homme. Les guanines et les cytosines des triplets CAG du gène HTT peuvent subir des oxydations ce qui induit ainsi la formation de 8-oxoG et de 5-OhC. Ces lésions sont réparées par hOGG1 et hNEIL1, un nouveau fragment est synthétisé ensuite les Polβ. L’incapacité de FEN1 à couper efficacement le brin déplacé lors de la phase de resynthèse du LP-BER conduit à l’expansion des triplets [124].

76

Tableau 5 : Liste non exhaustive des implications connues des ADN glycosylases dans les maladies humaines

TDG Noyau Mortalité embryonnaire [129] -

MBD4 Noyau

Viables et fertiles, fréquence des transitions C → T multipliée par un facteur 3 dans les îlots CpG [130]

77 Monofunctional uracil DNA glycosylase 1 ; TDG, Thymine DNA Glycosylase ; MBD4, Methyl-CpG binding domain 4, DNA Glycosylase ; AAG (MPG), 3-Methyladenine-DNA glycosylase ; OGG1, 8-oxoguanine DNA glycosylase 1 ; MUTYH, MUTY DNA glycosylase ; NTHL1, Endonuclease III-like protein ; NEIL1/2/3, Endonuclease VIII like protein 1/2/3.

• Phénotypes : KO, knockout ; MSH2, MutS Homolog 2 ; IgM, Immunoglobulin M.