• Aucun résultat trouvé

La voie SphK1/S1P est-elle modulée par les androgènes dans les cellules

tumorales prostatiques ?

Nous démontrons pour la première fois l'implication de la voie SphK1/S1P dans la réponse aux androgènes des cellules tumorales prostatiques androgéno-dépendantes.

Dans des conditions de privation en androgènes, nous observons une diminution de la prolifération des cellules tumorales prostatiques hormono-dépendantes LNCaP et de la sécrétion du PSA associées à une inhibition transitoire de l'activité SphK1. Nous confirmons ces résultats in vivo dans un modèle de xénogreffe orthotopique de cellules LNCaP/GFP dans des souris SCID. L'efficacité de la castration, au niveau la masse tumorale et de la dissémination métastatique, est associée à une inhibition de l'activité SphK1.

Le mécanisme qui altère la voie SphK1/S1P dans les conditions de privation en androgènes reste inconnu. Il semble cependant indépendant de la dégradation de la SphK1 par les cathepsines car l'utilisation d'un inhibiteur pharmacologique (CA-074A) n'a pas montré d'effet protecteur vis-à-vis de la perte de prolifération induite par la privation. Le mécanime est également indépendant de la production de ROS car les anti-oxydants connus restent sans effet (ex : N-Acétyl-cystéine). A priori, la SphK1 n'est pas dégradée par le protéasome car elle ne présente pas de sites connus d'ubiquitination. Afin d'écarter cette possibilité nous testerons des inhibiteurs du protéasome et vérifierons l'état d'ubiquitination de la protéine par western-blot.

Dans un deuxième temps, nous montrons que la surexpression de la SphK1 protège les cellules LNCaP vis-à-vis de la privation en androgènes. De plus, nous observons que les cellules qui surexpriment l'enzyme présentent une sécrétion plus importante de PSA dans le milieu de culture dans les conditions de privation. La SphK1 pourrait ainsi être impliquée dans la voie de sécrétion du PSA en agissant au niveau du cytosquelette d'actine. Nous savons que l'activation des récepteurs des androgènes membranaires conduit à la sécrétion du PSA via la stimulation de la voie FAK/PI3K/Cdc42/Rac1 suivie de la modification du cytosquelette. Nous analyserons le cytosquelette d'actine des cellules LNCaP surexprimant ou non la SphK1 par microscopie de fluorescence avec un marquage du cytosquelette avec de la phalloidine-rhodamine.

La prolifération des cellules LNCaP induite par les androgènes est dépendante de la voie SphK1/S1P. Nous mettons en évidence que l'effet mitogénique de la DHT est bloqué par l'utilisation d'inhibiteurs pharmacologiques de la SphK1. De plus, la DHT stimule l'activité enzymatique de la SphK1 de manière rapide et transitoire mettant en évidence une action non génomique de l'hormone. L'action de la voie SphK1/S1P dans la réponse aux androgènes est indépendante des récepteurs de la S1P couplés aux protéines G de type Gi car nous n'avons pas observé d'effet négatif de la toxine pertussique sur l'induction de la prolifération par l'addition de DHT. De plus les cellules LNCaP n'expriment pas S1P1 et

présentent de faible taux de messager pour S1P2 et S1P3. Nous concluons que la voie

SphK1/S1P doit agir de manière intracellulaire pour promouvoir la survie et la prolifération des cellules tumorales prostatiques. Enfin, l'utilisation d'inhibiteurs pharmacologiques de la voie PI3K/Akt nous a permis de confirmer que cette voie est bien impliquée dans la réponse des cellules LNCaP aux androgènes et de la positionner en amont de la voie SphK1/S1P.

La voie SphK1/S1P est-elle impliquée dans la survie et la transition des cellules

LNCaP vers le statut d'androgéno-indépendance ?

Dans la deuxième partie de notre travail nous mettons en évidence que la voie SphK1/S1P est impliquée dans la transition des cellules LNCaP vers l'androgéno-indépendance tumorale. Dans des conditions de privation androgénique prolongée mimant le traitement hormonal du cancer de la prostate, les cellules LNCaP acquièrent un phénotype neuroendocrine caractérisé par un changement morphologique typique ainsi que la sécrétion de neuropeptides tels que la NSE. Comme attendu, ces cellules ne répondent plus à la stimulation par les androgènes : l'addition de DHT n'induit ni la prolifération cellulaire ni la sécrétion de PSA. Dans ces conditions, nous observons une augmentation progressive et soutenue de l'activité SphK1 - résultat inédit dans l'acquisition du phénotype neuroendocrine - associée à une augmentation de la protéine SphK1. Nous observons également la stimulation des voies ERK1/2 et PI3K/Akt, deux voies de survie qui sont connues pour être fortement activées pendant la transdifférenciation neuroendocrine. Le mécanisme par lequel la SphK1 est activée reste à élucider. Ces phénomènes sont de type adaptatif puisque la réintroduction des androgènes induit une complète réversion du phénotype et un retour à une activité SphK1 basale.

L'analyse immunohistochimique de coupes de tumeurs prostatiques a renforcé les résultats précédents révélant que les cellules neuroendocrines positives pour la chromogranine A présentent un fort marquage pour la SphK1. Cette observation est très intéressante et soulève plusieurs questions. En effet, sachant que les cellules neuroendocrines sécrètent de nombreux neuropeptides possédant des effets mitogéniques vis-à-vis des cellules

cancéreuses du voisinage, il serait intéressant de déterminer si ces neuropeptides exercent leurs effets sur la cellule tumorale via l’activation de la voie SphK1/S1P. Plus intéressante serait l’hypothèse selon laquelle la cellule neuroendocrine, qui semble avoir une forte expression protéique de la SphK1 (activité enzymatique non connue), libérerait de la S1P qui pourrait agir de manière paracrine pour stimuler la prolifération des cellules tumorales du microenvironnement et l’angiogenèse.

Ces travaux mettent en exergue pour la première fois un lien étroit entre la voie SphK1/S1P et l'hormono-dépendance/indépendance des cellules tumorales prostatiques. Ainsi, la SphK1 apparaît comme une cible thérapeutique potentielle pour bloquer la transition de l’hormono-dépendance vers l’hormono-résistance qui correspond à l’ultime étape de la maladie.