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iv corrélation différenciation neuroendocrine et agressivité tumorale Le suivi de 25 patients pendant plusieurs années a permis à Abrahamsson et al de

démontrer en 1989 une corrélation entre la progression tumorale (degré de différenciation) et l'augmentation du nombre de cellules NE [Abrahamsson PA., 1989]. Ces résultats ont été confirmés par une étude plus conséquente de 104 patients ayant subi une prostatectomie [Weinstein MH., 1996]. Des résultats contradictoires ont été obtenus par Cohen et Noordzij. Ces derniers démontrent que la différenciation NE ne corrèle pas significativement avec la progression tumorale [Cohen MK., 1994; Noordzij MA., 1995]. Il a été montré que 43% des patients présentant une différenciation NE manifestent une progression de la maladie. [Abrahamsson PA., 1998]. La différenciation NE dans l'adénocarcinome prostatique n'est pas un indicateur indépendant statistiquement significatif du pronostic. Une étude menée par Cussenot et al. chez 135 patients pendant 2 ans a montré que la CgA dosée dans le sérum est un facteur pronostique car les patients négatifs pour ce neuropeptide présentent une meilleure courbe de survie [Cussenot O., 1996]. Des niveaux élevés de CgA dans le sang ont été détectés dans 15% des patients avant le traitement. Pendant la progression vers l'hormono-résistance, la ChrA était élevée dans 55% des patients. Par contre, la détermination de la différenciation NE par immunomarquage n'a pas aidé pour la prédiction ce qui suggère que la progression tumorale serait corrélée à une augmentation de la

sécrétion de neuropeptides comme la CgA par les cellules NE et non pas à une augmentation du nombre de ces cellules [Cussenot O., 1996].

Par ailleurs, l'enrichissement des tumeurs en cellules NE induit par le traitement hormonal pourrait être associé à un mauvais pronostic. La différenciation NE augmente avec la durée de l'hormonothérapie et la progression vers la stade hormono-réfractaire [Hirano D., 2004].

Les cellules NE permettent-elles la survie des cellules de l'adénocarcinome prostatique ? Des expériences réalisées chez l'animal ont montré que les cellules NE étaient nécessaires à la survie des cellules tumorales prostatiques après la privation androgénique. Après développement d'une tumeur à partir de cellules LNCaP injectées de manière sous-cutanée, Jin et al ont implanté un fragment de tumeur neuroendocrine NE-10. La castration entraîne une diminution de la croissance des tumeurs uniquement dans les souris ne possédant pas la tumeur NE-10 [Jin RJ., 2004]. De plus, le milieu le culture de sous-clones NE issus de cellules LNCaP par transdifférenciation a un effet stimulateur de la prolifération des cellules LNCaP dans des conditions de privation androgénique [Yuan TC., 2006]. Les neuropeptides sécrétés par les cellules NE semblent favoriser la survie des cellules tumorales prostatiques. Une étude menée par Gong et al. a mis en évidence que la CgA augmente la prolifération des cellules LNCaP et C4-2 de manière dose et temps dépendante via l'activation d'Akt suivie d'une augmentation de l'expression de la survivine qui est une protéine anti- apoptotique [Gong J., 2007].

Comme nous l'avons vu précédemment, de nombreux mécanismes ont été décrits pour expliquer l'androgéno-indépendance des cellules tumorales prostatiques (figure 18). A ce jour, le cancer de la prostate androgéno-résistant reste incurable et la découverte de ces voies de survie offre de nouvelles possibilités thérapeutiques.

Nous nous proposons d'étudier l'intérêt de la sphingosine kinase-1, lipide kinase oncogénique surexprimée dans de nombreuses tumeurs solides et impliquée dans la résistance aux traitements anti-tumoraux, comme cible thérapeutique dans le cancer de la prostate.

Chapitre III : La voie sphingosine kinase-1 / S1P dans le cancer

1. La sphingosine kinase

La sphingosine kinase (SphK) est une enzyme ubiquitaire et conservée pendant l'évolution. L'activité enzymatique de la SphK est présente dans les organismes unicellulaires tels que les levures Saccharomyces cerevisiæ et Hansenula ciferrii [Stoffel W.,1968], Tetrahymena pyriformis qui est un protozoaire cilié [Keenan RW, 1972] ainsi que chez les plantes (Arabidopsis thaliana). Chez les mammifères, l'activité a été mise en évidence dans les années 1970 dans le foie de rat [Keenan RW, 1969], le cerveau de bovin [Louie DD., 1976] ainsi que dans les plaquettes porcines [Stoffel W, 1973]. Deux isoformes de l'enzyme ont été mises en évidence : SphK1 et SphK2. La génération de souris knock-out (KO) pour les gènes codant pour la sphingosine kinase a permis de montrer que les animaux déficients pour SphK1 ou SphK2 étaient viables, fertiles et ne présentaient pas d'anomalies évidentes. Cette absence de phénotype peut être expliqué par un mécanisme de compensation entre les deux isoenzymes indiquant qu'elles présentent des fonctions redondantes chez la souris [Allende ML., 2004; Mizugishi K., 2005]. Les souris double-KO pour les deux isoformes (SphK1-/- / SphK2-/-) décèdent au stade embryonnaire suite à des hémorragies notamment au niveau du cerveau, de la corde spinale et de la mandibule. Ces embryons présentent une neurogenèse et une angiogenèse défectueuses [Mizugishi K., 2005].

La SphK est une lipide kinase oncogénique [Xia P., 2000] impliquée dans le métabolisme des sphingolipides (Clin d'œil p.63) : elle phosphoryle la sphingosine, le catabolite direct du céramide, pour former la sphingosine 1-phosphate (S1P).

Figure 19 : Le biostat sphingolipidique

Ces trois métabolites sphingolipidiques sont interconvertibles et jouent des rôles opposés dans la régulation de la prolifération et de la mort cellulaire. Le céramide fonctionne comme une molécule pro-apoptotique et anti-mitogénique alors que la S1P est un second messager anti-apoptotique et pro-mitogénique. Les effets opposés de ces deux sphingolipides ont conduit au concept selon lequel la balance dynamique entre les taux de céramide et de S1P pourrait représenter un facteur déterminant pour le devenir de la cellule [Cuvillier O., 1996].

La dérégulation de cette balance en faveur de la S1P joue un rôle dans l'initiation et la progression tumorale. En effet, la voie SphK/S1P est impliquée dans la régulation de divers processus tels que la prolifération cellulaire, la résistance aux traitement anti-tumoraux, l'angiogenèse et l'inflammation [Spiegel S., 2003].