• Aucun résultat trouvé

1.2 L’interf´erom´etrie atomique

1.2.4 Diff´erents types de gravim`etres

Dans cette partie, je vais lister quelques types de gravim`etres r´ealis´es avec des atomes froids, en rappelant les diff´erents types d’interf´erom`etres utilis´es, et les diff´erentes sensibi-lit´es obtenues. En effet l’exp´erience FORCA-G a d’abord ´et´e test´ee dans une configuration de gravim`etre, et une information cruciale pour la mesure de force `a faible distance est de connaˆıtre la sensibilit´e avec laquelle nous sommes capables de mesurer des forces.

Cette courte liste compl`ete l’´etat de l’art se trouvant dans la th`ese de B. Pelle [Pelle, 2013].

Gravim`etres `a atomes en chute libre :

Dans le cas d’un gravim`etre `a atomes en chute libre, les faisceaux Raman sont align´es avec la verticale, l’« aire » de l’interf´erom`etre est donc nulle, seule importe la diff´erence d’impulsion entre les paquets d’ondes dans les deux bras de l’interf´erom`etre. La s´equence d’impulsions utilis´ee est de type ”Mach-Zender” π2 - π- π2 o`u les impulsions ont une dur´ee τ − 2τ − τ et sont s´epar´ees d’un temps de pr´ecession T/2 [Cheinet, 2006]. Ce type d’in-terf´erom`etre est sym´etrique (les atomes passent autant de temps dans chacun des deux ´etats hyperfins, ce qui permet d’ˆetre insensible `a la diff´erence de fr´equence entre les deux ´etats hyperfins). Le d´ephasage s’´ecrit ∆φ = (kef fg − α)(T + 2τ)(T + π), o`u α est une rampe lin´eaire de fr´equence appliqu´ee `a un des faisceaux Raman durant l’interf´erom`etre afin de conserver la condition de r´esonance (pour rattraper l’effet Doppler). Le d´ephasage est proportionnel `a T2 : plus le temps de chute est long, meilleure est la sensibilit´e. Les meilleures sensibilit´es atteintes sont :

— δg/g = 5, 7 × 10−9 τ−1/2 en relatif qui donne δg/g = 2 × 10−10 apr`es 1500 s d’int´egration au SYRTE [Gillot et al. , 2014],

— δg/g = 4, 2 × 10−9 τ−1/2 en relatif, qui donne δg/g = 2, 9 × 10−10 apr`es 300 s d’int´egration `a HUST `a Wuhan [Hu et al. , 2013]

Une exp´erience d´evelopp´ee `a Stanford par M. Kasevich vise `a tester le principe d’´equiva-lence en mesurant simultan´ement la valeur de la gravit´e pour les deux isotopes 87Rb et

85Rb. Leurs premi`eres publications montrent [Dickerson et al. , 2013], [Sugarbaker et al. , 2013] le plus grand interf´erom`etre atomique du monde avec un temps de pr´ecession de 2,3 s. En effet, les atomes sont lanc´es en configuration de fontaine dans une tour de 10 m de haut, `a l’apog´ee, leur s´eparation spatiale coh´erente atteint 1,4 cm !

Un autre type de gravim`etre a ´et´e d´evelopp´e en Australie. Au lieu d’utiliser des tran-sitions Raman, ils utilisent des r´eseaux de Bragg comme type de s´eparatrice [Altin et al. , 2013]. Les atomes restent dans le mˆeme ´etat hyperfin, seul leur ´etat externe change, ce qui permet d’ˆetre insensible `a certains effets, par exemple aux fluctuations de d´eplacement lumineux des lasers d’interrogation (voir partie 1.4.1.3). Ils atteignent une sensibilit´e rela-tive sur g, δg/g = 2, 7 × 10−9 apr`es 1000 s de mesure.

Ces gravim`etres ont ´et´e d´evelopp´es dans diff´erents buts. Notamment pour participer `a la red´efinition du kg dans un projet de « Balance du Watt » [Jiang et al. , 2013], ou dans des projets visant `a mesurer la constante de gravitation G [Hu et al. , 2013]. D’autres dis-positifs visant `a tester le principe d’´equivalence ont aussi ´et´e d´evelopp´es. Plusieurs groupes r´ealisent ce genre de mesure, notamment en France, `a l’Onera, o`u ils ont mesur´e simulta-n´ement g pour deux isotopes du Rb [Bonnin et al. , 2013], `a l’Institut d’Optique o`u des atomes de Rb et K se retrouvent en microgravit´e [Geiger et al. , 2011], en Australie o`u une mesure a ´et´e r´ealis´ee avec des condensats de 87Rb -85Rb [Kuhn et al. , 2014], et en Allemagne o`u des atomes vont ˆetre lanc´es dans une fus´ee, et o`u des exp´eriences en chute libre ont d´ej`a ´et´e r´ealis´ees dans une tour situ´ee `a Brˆeme [M¨untinga et al. , 2013].

De nouvelles configurations visent `a augmenter la sensibilit´e de l’interf´erom`etre avec, par exemple, une d´ependance en T3 [McDonald et al. , 2014]. Ces gravim`etres ne peuvent en revanche pas ˆetre utilis´es pour mesurer des forces `a faible distance, car les atomes chutent sur une grande distance. Ce sont des exp´eriences pour certaines volumineuses, pour d’autres beaucoup plus compactes car embarquables `a terme. La sensibilit´e des gra-vim`etres `a atomes en chute libre est tellement bonne qu’elle concurrence les gravim`etres `

a coin de cube [Merlet et al. , 2010], et qu’une PME fran¸caise Muquans a pour projet de commercialiser ce genre d’appareil.

Configuration semi-pi´eg´ee :

Un autre type de gravim`etre utilise une configuration un peu diff´erente : les atomes sont semi-pi´eg´es, ce qui permet d’augmenter le temps de pr´ecession libre. Ils utilisent un interf´e-rom`etre de Ramsey-Bord´e en fontaine combin´e `a des oscillations de Bloch qui permettent d’empˆecher les atomes de tomber. L’interf´erom`etre est constitu´e de deux paires d’impul-sions π2 s´epar´ees par un temps de pr´ecession T. La premi`ere exp´erience de ce type utilisait des oscillations de Bloch continues, maintenant les atomes en l´evitation [Charri`ere et al. , 2012]. Leur sensibilit´e relative sur la mesure de gravit´e est de δg/g = 3, 4 × 10−6/√

Hz et atteint une r´esolution de δg/g = 2, 0 × 10−7apr`es 300 s d’int´egration. Une deuxi`eme exp´e-rience utilise des oscillations de Bloch, mais de fa¸con puls´ee, pour r´e-acc´el´erer les atomes (comme un diabolo, relanc´e avant de toucher le sol) [Andia et al. , 2013]. La sensibilit´e court terme est de δg/g = 7, 4 × 10−7/√

Hz ce qui am`ene `a une r´esolution de δg/g = 4, 8 × 10−8

apr`es 4 minutes d’int´egration. Ces exp´eriences montrent un pas en avant vers des exp´e-riences compactifiables et sont une deuxi`eme approche vers la commercialisation. Dans ces exp´eriences, les atomes se d´eplacent toutefois de plusieurs millim`etres, et elles ne peuvent pas ˆetre utilis´ees pour mesurer des forces `a faible distance.

Gravim`etres `a atomes pi´eg´es :

Un dernier type d’exp´erience permet de mesurer la gravit´e en ayant des atomes totale-ment pi´eg´es. Ces exp´eriences utilisent par exemple des atomes pi´eg´es sur une puce ato-mique [Baumg¨artner et al. , 2010], ou des atomes pi´eg´es dans un r´eseau vertical de longueur d’onde λr. Dans ce type de r´eseau, l’acc´el´eration de pesanteur g l`eve la d´eg´en´erescence des niveaux d’´energie des atomes en fonction du puits dans lequel ils sont pi´eg´es, comme d´ecrit dans la Figure 1.7. La diff´erence d’´energie entre deux puits distants de ∆z est ´egale `

a h.νB = mat.g.∆z o`u mat est la masse de l’atome consid´er´e. Dans le cas d’une s´eparation d’un puits ∆z = λr/2 et on appelle νB = mat.g.λr/2h la fr´equence de Bloch. C’est cette configuration qui est utilis´ee dans FORCA-G, expliqu´ee plus en d´etails dans la partie 1.3 et qui est aussi utilis´ee dans une exp´erience men´ee `a Florence au LENS.

Dans cette derni`ere exp´erience, les atomes sont des atomes de Sr, pi´eg´es dans un r´e-seau dont la fr´equence est d´esaccord´ee dans le rouge par rapport aux transitions du Sr. Cette exp´erience n’utilise pas d’interf´erom`etre pour mesurer νB, mais la modulation en fr´equence ou en amplitude du potentiel p´eriodique g´en´erant le r´eseau. Il est possible d’in-duire des transitions par effet tunnel d’un puits vers un puits adjacent lorsque la fr´equence de modulation est ´egale `a νB. Ces transitions par effet tunnel se traduisent par une aug-mentation de la taille du nuage atomique dans le r´eseau qui peut ˆetre observ´ee `a l’aide d’une cam´era CCD. On peut utiliser cette m´ethode pour mesurer la fr´equence de Bloch. Le rapport h/mSr ´etant connu `a quelques 10−10 en relatif et la longueur d’onde du r´e-seau pouvant ˆetre mesur´ee facilement au mˆeme niveau, on peut en d´eduire g [Poli et al. , 2011]. La derni`ere mesure publi´ee [Tarallo et al. , 2014] a montr´e une sensibilit´e relative

Figure 1.7 : Lev´ee de d´eg´en´erescence des niveaux atomiques en pr´esence de l’acc´el´eration de pesanteur g.

δg/g = 1, 8 × 10−6/√

Hz pour le88Sr, qui m`ene `a une sensibilit´e de δg/g = 4 × 10−8apr`es 900 s d’int´egration. Dans leur configuration, ils peuvent pi´eger simultan´ement les deux isotopes87Sr et 88Sr, et ont r´ealis´e un test du principe d’´equivalence avec une incertitude de 1, 6 × 10−7. Cette exp´erience pourrait aussi servir `a mesurer des forces `a faible distance, comme propos´e dans [Ivanov, 2012].