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L’œdème Maculaire

C. Diagnostic positif

1. Clinique

L’anamnèse recherchera surtout les signes fonctionnels oculaires et les signes associés qui pourraient orienter vers une étiologie, tandis que l’examen physique s’acharnera à visualiser un épaississement de la macula à la lampe à fente.

 Les signes fonctionnels

Le syndrome maculaire est fait d’une baisse de l’acuité visuelle (BAV) associée à des métamorphopsies, un scotome central et des dyschromatopsies.

 La baisse de l’acuité visuelle

L’acuité visuelle se définit comme la capacité à distinguer deux points très proches l’un de l’autre c’est un pouvoir séparateur et non un minimum visible. L’œil forme ainsi un angle avec les deux points : c’est l’angle minimum de résolution ou minimum angle of resolution (MAR des Anglo- Saxons). L’inverse de la valeur de l’angle minimum de résolution exprimé en minutes d’arc correspond à l’acuité visuelle décimale (AV = 1/MAR). L’existence d’un œdème maculaire se traduit surtout par une baisse de l’acuité visuelle (BAV) non douloureuse, premier motif de consultation. La présence de liquide au niveau maculaire, centre de l’acuité visuelle, altère le fonctionnement des photorécepteurs d’où cette BAV. Elle se quantifie en pratique clinique par la mesure de l’acuité visuelle qui se fait grâce à plusieurs échelles décimales (échelles de Snellen et de Monoyer) ou logarithmiques (échelle ETDRS: Early Treatment Diabetic Retinopathy Study). L’échelle ETDRS constitue le gold

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standard en recherche clinique, les échelles décimales manquant de précision dans les AV basses et n’obtenant pas une réduction constante de l’AV entre deux lignes d’AV.

 Les métamorphopsies

Elles sont définies comme une déformation des images. Plusieurs tests d’évaluation objective sont développés mais non utilisés en pratique courante. La métamorphopsie peut s’associer à une altération de la taille des images soit en plus grande (macropsie) ou en plus petite (micropsie). Cela est lié à la distance entre les photorécepteurs : soit plus rapprochés (image semble plus grande) soit éloignés (sensation de petitesse de l’image).

 Le scotome central

Le scotome est ressenti comme une opacité centrale relativement dense et étendue avec tout autour des déformations de lignes s’il est associé à des métamorphopsies (Fig. 7). Il est lié à l’infiltration œdémateuse de la rétine superficielle.

 La dyschromatopsie

La dyschromatopsie est un trouble de la vision des couleurs souvent associé à la maculopathie débutante. Elle n’est pas toujours évidente mais se manifeste en général par une confusion d’axe bleu-jaune. C’est une anomalie acquise de la vision des couleurs : dyschromatopsie acquise ou DA type III.

 Autres

Rarement il pourrait s’agir d’une photophobie indolore ou douloureuse ou d’une diplopie monoculaire.

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a. b.

Figure 7: Grille d’Amsler avec métamorphopsie et scotome central:

a micropsie, b macropsie[1]

 Les signes physiques

L’examen physique pour la recherche d’un œdème maculaire consiste à réaliser, après dilatation pupillaire, un fond d’œil au biomicroscope. L’utilisation d’une lentille de contact est préférable à la lentille sans contact et ce avec une fente fine, légèrement décalée. Il s’agit de l’examen à la lampe à fente ou stéréoscopie qui est un examen subjectif car dépendant de plusieurs facteurs à savoir la précision et l’expérience de l’observateur, la compliance du patient, la qualité de la dilatation pupillaire, l’existence d’opacités des milieux oculaires mais aussi l’existence et l’étendue de l’œdème rétinien [10]. L’OM peut apparaître sous forme d’un épaississement maculaire ou de logettes intrarétiniennes qui caractérisent l’OM cystoïde. Quoique le fond d’œil ne reste qu’un examen d’appoint dans le diagnostic de l’OM, l’examen de toute la rétine périphérique sera fait à la recherche d’autres anomalies pouvant orienter vers une origine étiologique.

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L’analyse du segment antérieur quant à elle pourrait objectiver les conséquences de l’OM, des étiologies, ou des complications associées. On cherche plus précisément un syndrome sec accompagné d’une kératite superficielle, surtout chez les patients diabétiques ; un effet Tyndall attestant d’une origine inflammatoire de l’œdème ; une rubéose irienne ; des séquelles de chirurgie de cataracte compliquée soit de rupture capsulaire, d’une fuite du vitré en chambre antérieure ou de lésions iriennes ; un implant mal centré ou une opacification capsulaire postérieure; une cataracte participant à la baisse d’acuité visuelle.

2. Paraclinique

 Explorations fonctionnelles

Vision des couleurs

L’étude de la vision des couleurs permet d’apprécier la fonctionnalité des cônes maculaires. Les dyschromatopsies sont héréditaires ou acquises d’axe rouge-vert (type I et II) ou bleu-jaune (type III) comme dans l’œdème maculaire. Des tests d’assortiments désaturés (Test de Panel D15 désaturé) permettent d’étudier cette perte de sensibilité à la saturation. Elle apparait de façon précoce dans l’OM avant les signes du fond d’œil et de la tomographie par cohérence optique (OCT) mais peut également constituer une séquelle.

Sensibilité au contraste

C’est un marqueur précoce de l’atteinte ophtalmique avant la BAV. Les plaintes qui poussent à explorer la vision des contrastes sont : une vision terne, fade, délavée et des éblouissements. Ses tests d’exploration sont chronophages et laborieux donc rarement utilisés en pratique courante. La mesure de la sensibilité au contraste reste importante pour le suivi fonctionnel des patients.

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Micropérimétrie

Elle permet de mesurer la sensibilité rétinienne. D’après de nombreuses études il y’aurait une corrélation entre la sensibilité rétinienne en micropérimétrie, le volume rétinien et l’épaisseur rétinienne en OCT au cours de diverses pathologies [40-41]. Cette donnée peut être utilisée pour le suivi des patients [42]. Une diminution de l’OM entraine une augmentation de la sensibilité rétinienne et vice versa.

Electrophysiologie à l’exclusion de l’électrorétinogramme multifocal

Elle permet d’évaluer de façon objective la fonction visuelle. Il s’agit de l’enregistrement de la réponse visuelle en rapport avec une stimulation lumineuse. C’est un ensemble de tests regroupant les potentiels évoqués visuels, l’électrorétinogramme global ou en damier et l’électro-oculogramme.

L’électrorétinogramme multifocal

Cet examen explore spécifiquement la réponse locale de la rétine interne de la zone maculaire.

 Imagerie :

Photographies en couleurs, monochromatiques, large champ

Ce sont des photographies du fond d’œil. Elles sont utilisées en complément ou en remplacement de la biomicroscopie clinique. Elles permettent une analyse plus raffinée et plus aisée (Fig. 8).

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a. b.

Figure 8 Photographie au fond d’œil

(a) Aspect normal de la macula

(b) Œdème maculaire diabétique sévère avec des hémorragies punctiformes et des exsudats circinés périmaculaires

Autofluorescence (AF) dans l’œdème maculaire

Il s’agit d’une imagerie sans danger et d’acquisition rapide mais qui ne saurait remplacer l’angiographie. Dans l’œdème maculaire cystoïde, elle détecte une modification de l’hypo- autofluorescence naturelle de la macula due au déplacement des pigments maculaires par les kystes d’œdème. Ces acquisitions sont parfaitement superposables aux temps tardifs à l’angiographie à fluorescéine selon Mc Bain et al. [43] avec une sensibilité et une spécificité élevées de 81% et de 69 % respectivement. Toutefois, une augmentation d’épaisseur maculaire sans kystes lors d’un décollement séreux rétinien par exemple n’aura pas de traduction en AF.

Angiographie à la fluorescéine

C’est un examen essentiel permettant d’apprécier la dynamique vasculaire de la rétine et de la choroïde. Quoique le diagnostic d’OM soit maintenant fait avant tout grâce à l’OCT, l’angiographie permet le dépistage des zones de non-perfusion ou d’aspect de diffusion dans le but d’un diagnostic étiologique et d’une prise en charge

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thérapeutique. Techniquement elle consiste à mettre en évidence la circulation et la diffusion d’un traceur injecté par voie intraveineuse (fluorescéinate de sodium). Ce traceur circule rapidement (quelques secondes) et permet une analyse morphologique et dynamique du lit vasculaire. (Fig. 9)

.

Figure 9: Angiographie à la fluorescéine

a. Normale

b. Diffusion du colorant au niveau maculaire

Angiographie au vert d’indocyanine (angio- ICG)

L’angio-ICG permet d’outrepasser l’épithélium pigmentaire. Ses indications sont claires et précises : chez les sujets jeunes, dans la choriorétinopathie séreuse centrale (CRSC), les maladies inflammatoires et la myopie forte; et chez les sujets âgés, dans la DMLA et les tumeurs choroïdiennes.

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L’échographie

L’examen échographique est pertinent pour l’analyse de l’état vitréorétinien en cas de perte de transparence des milieux. Elle analyse la rétine périphérique, l’épaisseur et l’échostructure de la paroi maculaire, l’interface vitréomaculaire grâce à sa capacité à traverser toutes les opacités oculaires. Ceci d’autant plus que l’exploration du fond d’œil par les moyens optiques standards (verres d’examen) ou les moyens d’imagerie par procédés optiques (OCT, rétinographie, etc.) est limitée.

Tomographie en cohérence optique (OCT)

La tomographie en cohérence optique est l’examen clé dans l’OM, c’est une technique d’imagerie non invasive permettant d’acquérir des coupes antéropostérieures haute résolution de la rétine. Décrite pour la première fois en 1991, elle a subi de profondes modifications allant du time domain (TD-OCT) au spectral domain (SD-OCT) avec la possibilité de combiner plusieurs techniques d’imagerie : clichés en couleurs, en autofluorescence, en angiographie à la fluorescéine ou au vert d’indocyanine. L’analyse du segment antérieur ou l’examen en ultra grand champ est rendu possible actuellement par d’autres modules optiques. Des algorithmes et des logiciels ont été développés proposant des fonctions nouvelles comme l’EDI-OCT (visualisation et mesure de la choroïde) ou l’OCT « en face » (images transverses possibles).

L’OCT est essentielle pour le diagnostic positif et étiologique, le suivi sous traitement ainsi que pour l’évaluation des facteurs de mauvais pronostic visuel. Par définition, l’OM est une exsudation intra-ou sous-rétinienne, extracellulaire ou intracellulaire. L’analyse fine des coupes OCT a permis de visualiser différentes formes traduisant l’OM : un simple épaississement rétinien, une perte de la dépression fovéolaire, des logettes kystiques intrarétiniennes ou un décollement séreux rétinien (DSR) sont des marqueurs de l’œdème maculaire (Fig. 10). Elle peut mettre en évidence un œdème minime avant l’apparition de signes au fond d’œil mais peut diagnostiquer par excès un œdème maculaire (la présence de kystes ne signifiant pas forcément OMC). [1,8,44]

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Figure 10 A : Les couches rétiniennes de la macula d’un œil normal à l’OCT [1] 1 : cortex vitréen postérieur ; 2 : espace pré rétinien ; 3 : couche des fibres optiques ; 4 : couche des cellules ganglionnaires ; 5 : couche plexiforme interne ; 6 : couche nucléaire interne ; 7 : couche plexiforme externe ; 8.1 : couche nucléaire externe ; 8.2 : couche des fibres de Henlé ; 9 : membrane limitante externe ; 10 : zone myoïde ; 11 :

zone ellipsoïde ; 12 : segments externes des photorécepteurs ; 13 : zone d’interdigitation ; 14 : complexe EP/membrane de Bruch ; 15 : choriocapillaire ; 16 : couche de Sattler ; 17 : couche de Haller ; 18 : jonction choroïdo-sclérale

Figure 10 B: OCT maculaire montrant un OM cystoïde avec un décollement séreux rétinien

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L’angio-OCT

L’angio-OCT est une révolution car elle offre une visualisation des vaisseaux rétiniens maculaires sans injection intraveineuse de colorant. Ainsi il permet de visualiser une ischémie maculaire et d’évaluer son extension sur les logettes maculaires très bien visualisées. En effet ces logettes ne sont pas masquées comme en angiographie par la diffusion du colorant qui accompagne l’œdème maculaire.

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