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3.6 Coûts des investissements en technologies décarbonées

3.6.1 Les diérentes options de remplacement

En supposant que 1000 MW de nucléaire soient déclassés, il nous faut comparer des investissements en capacité qui fournissent la même quantité d'énergie, sachant que chaque technologie possède des caractéristiques propres (facteur de charge, intermittence) qui im- pliquent que les 1000 MW que nous cherchons à remplacer ne sont pas forcément équivalents à 1000 MW de puissance pour une autre technologie. Nous détaillons ici les hypothèses sous-jacentes au calcul de coûts générés par des investissements strictement équivalents en termes de quantité d'électricité produite.

Option 1 : remplacement par une nouvelle tranche de nucléaire. L'option par défaut retenue est de remplacer la tranche de nucléaire déclassée par une nouvelle tranche de nucléaire de type EPR (nouvelle génération). Nous supposons que le facteur de charge15

associé à cette nouvelle technologie nucléaire est identique à celui de l'ancienne génération, pris ici à 80%. La diérence entre ces deux générations de technologies se réalise en réalité sur la durée de vie d'une installation : nous retenons une durée de vie de 60 ans pour une centrale de type EPR, quand la tranche déclassée avait été amortie sur 40 ans. Nous évaluerons donc le coût associé à l'investissement dans 1000 MW de nucléaire nouvelle génération, qui produira chaque année pendant 60 ans 80% * 1000 * 8760 = 7 TWh d'électricité.

Les autres technologies de remplacement envisagées ont toutes des durées de vie de l'ordre de 20 ans, alors que le nucléaire évoqué précédemment est supposé fonctionner pendant 60 ans. Nous retiendrons donc qu'il faudra dans chacun des cas suivants trois séries d'investissements successifs (en 2030, 2050 et 2070) pour couvrir un même service énergétique. En revanche, nous nous restreindrons au cas où l'investisseur prend d'ores et déjà la décision d'investir dans la même technologie pendant 60 ans16.

Option 2 : remplacement par de l'éolien terrestre. Le cas du remplacement d'une tranche de nucléaire par des éoliennes terrestres est plus délicat à construire que le cas

15. Le facteur de charge correspond au rapport entre la production eective sur un nombre d'heures données (en général une année) et la puissance maximale multipliée par ce même nombre d'heures. Il est très souvent utilisé comme indicateur de l'énergie susceptible d'être produite par une installation électrique. 16. Les coûts estimés peuvent alors être légèrement surestimés dans la mesure où la possibilité d'investir dans une technologie qui serait devenue relativement moins chère représente un avantage pour l'investisseur.

précédent, essentiellement du fait du phénomène d'intermittence associé à cette technolo- gie. Tout d'abord, le facteur de charge est cette fois-ci de 20% soit quatre fois inférieur au facteur de charge du nucléaire. Si l'énergie produite par cette technologie était dis- patchable, il faudrait donc installer environ 4000 MW d'éolien pour retrouver les 7 TWh indiqués précédemment. Cependant, il faut tenir compte du caractère intermittent asso- cié à cette technologie : il peut exister des plages horaires pour lesquelles une éolienne est opérationnelle mais ne produit pas d'électricité car il n'y a pas de vent pour la faire tourner. Dans ce cas, il faut que le relais soit assuré par une technologie de production complémentaire et exible (temps de réaction court), en l'occurrence une technologie ther- mique à combustion (TAC) au Gaz. Pour obtenir l'équivalent "dispatchable" (classique) de l'énergie "intermittente" produite par une technologie, nous nous appuyons sur la notion de crédit de capacité17, qui mesure la capacité d'un moyen de production à assurer l'équi-

libre production-consommation avec une probabilité de défaillance limitée. Dans le cas de l'éolien terrestre et dans le contexte du scénario étudié, nous considérons que le crédit de capacité est égal à 10%. Ainsi, les 4000 MW d'éolien qui étaient supposés équivalents aux 1000 MW de nucléaire, ne sont en fait équivalents qu'à 400 MW d'énergie dispatchable classique. Il faut donc compléter ces 4000 MW d'éolien par 600 MW de TAC au gaz, qui ne fonctionneront que très peu en réalité (environ 500 heures par an), mais qui sont néces- saires pour assurer que cette combinaison "éolien + TAC" puisse assurer à toute heure le même service énergétique qu'une technologie dispatchable comme le nucléaire. Dans ce cas, l'énergie totale produite (éolien et TAC compris) est légèrement supérieure aux 7 GWh nécessaires : nous réajustons donc la puissance éolienne à installer et retenons comme op- tion nale un investissement dans 3800 MW d'éolien terrestre et 600 MW de TAC au gaz, à renouveler deux fois sur la période considérée de 60 ans.

Option 3 : remplacement par de l'éolien oshore. La technologie éolienne oshore est également une technologie intermittente. Nous reproduisons alors le raisonnement ex- pliqué précédemment, avec une hypothèse de facteur de charge de 30% et de crédit de capacité de 15%. Nous retenons comme option nale une série de trois investissements successifs dans 2550MW d'éolien oshore et de 600 MW de TAC au gaz.

Option 4 : remplacement par de la biomasse. La technologie biomasse produit de l'énergie dispatchable classique (combustible stockable). Ainsi, avec un facteur de charge de 80% identique à celui du nucléaire, l'option retenue est une série de trois investissements successifs de 1000 MW en technologie biomasse.

Option 5 : remplacement par du photovoltaïque. De nouveau, nous étudions le cas d'une technologie intermittente, avec pour caractéristiques un facteur de charge de 10% et un crédit de capacité de 5%. Nous retenons comme option une série de trois investissements successifs dans 7600 MW d'installation photovoltaïque et 600 MW de TAC au gaz.

Les cinq alternatives présentées précédemment ont été calibrées de façon à être équi- valentes en termes de fourniture énergétique : chaque modalité d'investissement permet de produire environ 94 TWh d'énergie cumulée actualisée sur 60 ans dans le cadre de référence (CMPC de 8 % et prix du CO2 à 31 e/tCO2).

17. Le crédit de capacité est la capacité (puissance) conventionnelle pouvant être remplacée par une source variable (éolien par exemple) sans diminuer la abilité totale du système (cf. Rues et Ploszek - UKERC 2006).