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LA DETERMINATION DES DIRIGEANTS SOCIAUX EN FONCTION DE LEUR

SECTION I : LES DIRIGEANTS SOCIAUX RESPONSABLES

B- LA DETERMINATION DES DIRIGEANTS SOCIAUX EN FONCTION DE LEUR

Le dirigeant social est, il faut le rappeler, celui qui exerce des fonctions d’administration et/ou de gestion de l’entreprise. Il est considéré comme le représentant de la société. Mandaté par celle-ci, il détient des pouvoirs étendus pour agir en son nom. Cependant, il existe des individus qui, n’ayant pas la qualité, s’immiscent dans la gestion des affaires sociales. Tandis que ceux qui ont la qualité sont appelés dirigeants de droit (1), les autres qui interfèrent dans la gestion sociale sont des dirigeants de fait (2).

1-Les dirigeants de droit.

Les dirigeants de droit peuvent être appréhendés comme des personnes physiques ou morales, régulièrement désignées pour gérer la société et qui, à ce titre, assurent légalement les fonctions de direction ou d’administration en son sein et l’engagent normalement à l’extérieur46.

Le dirigeant de droit est donc titulaire de la fonction de direction. Il est désigné par les statuts de la société, la loi ou un acte administratif47 pour exercer les pouvoirs s’attachant à cette fonction de direction et de gestion par le texte juridique qui régit la société considérée. Nous identifions, d’après ces critères, les dirigeants de droit des sociétés suivantes : la SNC, la SCS, la SA et la SAS.

Dans la SNC, les dirigeants de droit sont appelés gérants. Ils peuvent être associés ou non, personnes physiques ou personnes morales48. D’après les articles 277 et 277-1 de l’A.U.D.S.C.G.I.E. révisé, le gérant dispose de pouvoirs étendus dans la société. Il peut accomplir tous les actes de gestion dans l’intérêt de la société et engage celle-ci dans ses rapports avec les tiers. Les dirigeants de droit tout comme les représentants de la personne morale engagent leur responsabilité pénale lorsqu’ils commettent des fautes de gestion dans l’exercice de leurs fonctions.

Dans le cas de la SCS, les dirigeants de droit sont les associés commandités49.

Du côté de la SARL, les dirigeants de droit sont aussi appelés gérants. Il peut s’agir d’une ou de plusieurs personnes physiques, associés ou pas50. Les gérants sont nommés par les associés

46AKAM AKAM (A.), « La responsabilité civile des dirigeants sociaux en droit OHADA », in Revue internationale de droit économique-2/ 2007 (t. XXI, 2),p. 211-243.

47 C’est le cas du décret présidentiel pour les dirigeants des sociétés d’Etat.

48 Art. 276 de l’AUDSCGIE.

49 Art. 298 de l’AUDSCGIE.

50 Art. 323 de l’AUDSCGIE.

dans les statuts ou dans un acte postérieur51. Le gérant peut faire tous les actes de gestion dans l’intérêt de la société52. L’étendue de ces pouvoirs a comme revers la responsabilité pénale du ou des gérants pour les fautes de gestion. C’est pourquoi l’article 330 de l’A.U.D.S.C.G.I.E.

révisé dispose : « Les gérants sont responsables, individuellement ou solidairement, selon le cas, envers la société ou envers les tiers, soit des infractions aux dispositions législatives ou règlementaires applicables aux sociétés à responsabilité limitée, soit des violations des statuts, soit des fautes commises dans leur gestion. Si plusieurs gérants ont coopéré aux mêmes faits, la juridiction compétente détermine la part contributive de chacun dans la réparation du préjudice. »

Dans la SA, les dirigeants de droit peuvent être nommés ainsi qu’il suit : le conseil d’administration, le président du conseil d’administration, le président directeur général et le directeur général dans la SA avec conseil d’administration, et l’administrateur général pour la SA sans conseil d’administration.

S’agissant tout d’abord de la SA avec un conseil administration, celui-ci détermine les orientations de l’activité sociale et veille à leur mise en œuvre53. Il procède aussi au contrôle et vérifications qu’il juge opportun54. Les administrateurs sont désignés par les statuts ou par l’assemblée générale55. Le président du conseil d’administration, le président directeur général et le directeur général sont nommés parmi les membres du conseil d’administration56. Le président du conseil d’administration préside les réunions du conseil d’administration et les assemblées générales, et veille à ce que le conseil d’administration assure le contrôle de la gestion sociale57. Le président directeur général quant à lui détient des pouvoirs les plus étendus pour agir en toute circonstance au nom de la société. Il engage la société dans ses

51 Dans ce cas précis, la décision est prise à la majorité des associés représentant plus de la moitié du capital.

52 Art. 328. D’après l’article 329, « Dans les rapports avec les tiers, le gérant est investi des pouvoirs les plus étendus pour agir en toute circonstance au nom de la société, sous réserve des pouvoirs que le présent Acte uniforme attribue expressément aux associes. La société est engagée, même par les actes du gérant qui ne relèvent pas de l'objet social, à moins qu'elle ne prouve que le tiers savait que l'acte de passait cet objet ou qu'il ne pouvait l'ignorer compte tenu des circonstances, étant exclu que la seule publication des statuts suffise àconstituer cette preuve. Les clauses statutaires limitant les pouvoirs des gérants qui résultent du présent article sont inopposables aux tiers de bonne foi ».

53 V. l’art. 435.

54Ibid. D’autres pouvoirs sont déterminés par les art. 451 et 452.

55 Art. 419.

56 V. les art. 462, 477 et 485 de l’AUDSCGIE.

57 Art. 480.

rapports avec les tiers. Le directeur général de son côté est investi des mêmes pouvoirs que le président directeur général58.

S’agissant de la SA sans conseil d’administration, l’administrateur général, en tant que dirigeant de droit, est désigné par les statuts ou l’assemblée générale ordinaire59. Tout comme les autres, il dispose de pouvoirs très étendus pour agir au nom de la société, et engager la société dans ses rapports avec les tiers60.

Enfin, du côté de la SAS, le dirigeant de droit peut être soit le président, soit tout autre dirigeant désigné par les statuts. Il peut s’agir d’une personne physique ou d’une personne morale. Il peut exercer les attributions du conseil d’administration à défaut de clauses statutaires spécifiques61. Le dirigeant de droit dispose de pouvoirs étendus pour agir au nom de la société et dans la limite de l’objet social62. Dans ses rapports avec les tiers, il engage la société, même pour les actes qui ne relèvent pas de l’objet social63. Les statuts peuvent également désigner un directeur général ou un directeur général adjoint qui aura les mêmes pouvoirs que le président de la SAS64.

Le dirigeant de droit est ainsi identifié à travers l’importance de ses pouvoirs de gestion sur le personnel et les biens affectés à la réalisation de l’objet social. Cependant, en Droit comparé français, les tribunaux recherchent le dirigeant réel qui n’est pas souvent le dirigeant de droit.

Celui-ci, étant généralement le fondateur, peut confier ses pouvoirs à un mandataire, provoquant du même coup l’impunité du dirigeant de droit65.

En Droit camerounais, la difficulté à identifier un dirigeant de droit ne se pose pas généralement car les fondateurs sont eux-mêmes les dirigeants. D’ailleurs, l’article 230 de l’A.U.P.C.A.P. englobe tous les dirigeants, qu’ils soient personnes physiques ou morales.

Cela concerne également les dirigeants de fait66.

65 C’est le cas des fondateurs de la société qui confient sa gestion à des individus externes liés par des contrats de travail. C’est aussi le cas de grandes sociétés internationales ayant des implantations dans d’autres pays. La difficulté à identifier le dirigeant de droit est donc flagrante.

66 L’art. 230 al 2 dispose à cet effet : «Les dirigeants visés au présent article s’entendent de tous les dirigeants de droit ou de fait et, d’une manière générale, de toute personne ayant directement ou par personne interposée, administré, géré ou liquidé la personne morale sous le couvert ou aux lieux et place de ses représentants légaux »

2- Les dirigeants de fait67.

Si la gestion de l’entreprise est légalement attribuée aux dirigeants de droit (pouvoirs étendus pour agir au nom de la société et engagement de celle-ci dans leurs rapports avec les tiers), il existe quand même des individus qui, sans être légalement reconnus ou habilités, prennent des actes de gestion et de direction qui engagent l’entreprise vis-à-vis des tiers ou assurent sa représentation. Ce faisant, ils se comportent en dirigeants de fait à la place du dirigeant légal et devraient être par conséquent tenus pour responsables des infractions commises au titre de la direction de fait.

Le dirigeant de fait peut être défini comme toute personne physique ou morale68 qui, sans en avoir le titre, exerce la même activité qu’un dirigeant de droit avec la même indépendance et la même souveraineté69. Le dirigeant de fait doit avoir la liberté d’exercer l’activité positive de gestion et de direction70, et le pouvoir d’engager la société par ses décisions71.

Les éléments déterminants pour qualifier une personne de dirigeant de fait sont qu’elle doit exercer de manière illicite et effective la gestion de la société. L’illicéité provenant de l’indépendance du dirigeant de fait qui n’est pas soumis aux prescriptions du véritable chef, c’est-à-dire le dirigeant de droit. Au niveau de la responsabilité, le dirigeant de fait est soumis aux mêmes règles que le dirigeant de droit, tant sur le plan civil72 que pénal. D’ailleurs, le Droit OHADA punit tout dirigeant de fait qui commet une infraction assimilée à la banqueroute73.

Qu’en est-il de la nature juridique des sociétés servant de cadre à la responsabilité des dirigeants ?

67 La loi française du 24 juillet 1966 punit les dirigeants de fait aux art. 431, 463, et 464-4.

68La jurisprudence française a longtemps hésité à attribuer la qualité de dirigeant de fait aux personnes morales.

69Ce sont les critères établis par le professeur RIVES-LANGES. A ce titre, lire RIVES-LANGES (J.-L.), « La notion de dirigeant de fait », D., 1975, chron., p. 41 ; Pour avoir plus de détails sur la notion, lire aussi TRICOT (D.), « Les critères de la gestion de fait », dr. et patrim. Janvier 1996. Lire aussi ROBIN, « La responsabilité pénale des dirigeants de fait des sociétés commerciales, rev. dr. pén. 1967.

70Un auteur a présenté les actes matériels relevant de la direction de fait. Il fait une distinction entre les actes de gestion interne et les actes de gestion externe. Pour plus de détails, lire MACQUERON (JM), La notion de dirigeant de fait : étude de la jurisprudence française de ses origines à 1981, thèse Rouen, 1982.

71Ce qui signifie que l’abstention est exclue. En ce sens : Colmar, 13 janvier 1976, D., 1977, IR ; Cass. com, 18 janvier 2000, Juris-data, n◦000287.

72Il s’agit de la responsabilité civile contractuelle et délictuelle. En matière de jurisprudence, cass. com. 6 octobre 1981, D. 1983.133, note B. SOINNE. En droit OHADA, l’AUDSCGIE prévoit que l’action civile peut être soit individuelle (art. 161) soit sociale (art. 165).

73Art. 230 de l’AUPCAP.

PARAGRAPHE 2 : L’IDENTIFICATION JURIDIQUE DES SOCIETES