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Description d'un système à deux niveaux par le vecteur de Bloch

1.1 Vecteur de Bloch

Dans l'espace de Hilbert de dimension 2, tout état du système atomique est décrit par une matrice densité 2 × 2 ρ de trace égale à 1 et hermitienne. On a donc ρbb = 1 − ρaa et ρab = ρ∗ba. ρ est donc déni par la donnée de

trois paramètres réels et indépendants. On peut utiliser le vecteur de Bloch

~

U pour le représenter commodément dans un espace réel à trois dimensions.

Ce vecteur est déni par :

~

U =< ~σ >= T r(˜ρ~σ)

où ~σ est l'opérateur vectoriel dont les trois composantes sont les trois ma- trices de Pauli, et ˜ρ est la matrice densité "dans le référentiel tournant" à la fréquence ω avec le champ appliqué, c'est-à-dire dans laquelle on a éli- miné l'évolution rapide des cohérences (˜ρba = ρbaeiωt). C'est donc la valeur

moyenne du "spin ctif" associé au système à deux niveaux et dont les compo- santes sont les matrices de Pauli. Ce spin ctif devient un "vrai spin" lorsque le système à deux niveaux est constitué par les deux sous-niveaux Zeeman

d'un champ magnétique oscillant s'appelle alors résonance magnétique, phé- nomène qui a fait, et fait toujours, l'objet de recherches approfondies, à la fois sur le plan fondamental et appliqué.

Plus précisément, le vecteur de Bloch a pour coordonnées les quantités

u, v, w telles que

u + iv = ρbaeiωt

w = 1

2(ρbb− ρaa)

La troisième coordonnée w n'est autre que l'inversion de population sur la transition considérée, tandis que u et v sont liés à l'enveloppe complexe du dipôle atomique introduite dans le chapitre 1 :

D b D E = Re h ˜ De−iωti ˜ D = 2dab(u + iv)

Si le système est dans un cas pur, il peut être décrit par une fonction d'onde atomique qu'on peut toujours mettre sous la forme :

|Ψi = cosθ

2|ai + e

−iω0t−iφsinθ

2|bi On a alors : u + iv = 1 2sin θe −iφ w = −1 2cos θ

Le point P, extrémité du vecteur de Bloch reste sur la sphère de rayon 1 2 pour un cas pur. L'inégalité de Cauchy-Schwartz sur les éléments de la matrice densité impose que u2+ v2+ w2 1

4, et le point P est donc à l'intérieur de cette sphère dans le cas général. Les angles φ et θ introduits dans l'expression de la fonction d'onde sont donc les coordonnées polaires du vecteur ~U, ou du point P. Plus précisément, comme l'évolution spontanée de l'état est ρba = ρba(0) e−iω0t, cette évolution est beaucoup plus lente, en e−iδt pour le vecteur

de Bloch dans le référentiel tournant : le point P est xe lors de l'évolution libre du système à résonance exacte ω = ω0, et tourne dans un plan parallèle à xOy autour de l'axe 0z à la vitesse angulaire ω0− ω hors résonance.

1.2 Cohérence quantique, "q-bits" et "q-registres"

Lorsque u ou v est non nul, ρba est aussi non nul : il y a de la cohérence

quantique dans le système atomique. L'atome est dans une superposition de l'état inférieur et de l'état supérieur qui n'est pas une simple superposition statistique. Il s'agit d'un objet quantique intéressant, un peu dicile à ima- giner, qui possède un dipole moyen, alors que ni |ai, ni |bi n'en ont. On peut s'en faire une idée à l'aide d'un autre problème de dimension 2, celui de la polarisation de la lumière. L'analogue du vecteur de Bloch est la sphère de Poincaré : un état pur correspond à une polarisation parfaitement détermi- née (circulaire pour un point représentatif sur l'axe Oz, rectiligne s'il est dans le plan xOy), un cas non pur à une polarisation dite "partielle". La lumière naturelle, non polarisée, est représentée par l'origine des coordonnées. L'exis- tence d'une cohérence correspond à l'existence d'une certaine proportion de polarisation rectiligne dans l'état de la lumière.

Un système classique à deux états a b, comme celui d'une mémoire d'or- dinateur (un bit, ou "c-bit"), se trouve soit en a (bit 0), soit en b (bit 1). L'informatique actuelle est basée sur la manipulation de "c-registres", for- més d'un très grand nombre de c-bits, comme par exemple (0, 0, 1, 1, 0, 1..), et connectés par des opérations logiques simples et séquentielles .

Un système quantique à deux états a beaucoup plus de possibilités qu'un système classique à deux états. Il peut-être "à la fois" dans les deux états, lorsqu'il se trouve dans une superposition |Ψbiti = α |0i + β |1i. Il s'agit

d'un "q-bit", dont l'évolution obéit aux règles de la mécanique quantique. La variété est encore plus grande lorsqu'on considère les "q-registres" formés de N q-bits, et la possibilité de manipuler des combinaisons linéaires de type

|Ψregi =

P

αi|0, 0, 1, 1, 0, 1..i, où la somme s'étend sur tous les nombres

binaires comme 001101 variant entre 0 et 2N.

La manipulation d'un très grand nombre de q-bits et les opérations sus- ceptibles de les connecter, font l'objet d'un domaine en développement ra- pide à l'heure actuelle, celui du traitement quantique de l'information, ou "informatique quantique" (quantum computing). On a pu montrer que cette nouvelle informatique avait un grand intérêt dans les problèmes de "choix", où il faut faire un grand nombre d'essais au hasard pour trouver la solution (trouver un élément particulier dans une liste, factoriser un grand nombre). En informatique classique, on essaie successivement toutes les valeurs pos- sibles pour un c-registre de N c-bits. En informatique quantique, on essaie des superpositions de q-registres, donc d'états quantiques du type |Ψregi, qui

contiennent "à la fois" toutes les valeurs possibles des registres classiques. On a montré théoriquement qu'on a des procédures plus rapides avec des q-registres qu'avec des c-registres, lorsque N est très grand.

Mais la réalisation pratique d'un tel dispositif se heurte à un problème majeur : les cohérences quantiques sont d'autant plus fragiles que N est grand. Elles relaxent très vite vers 0, et les q-registres se muent alors en superposi- tions statistiques "ordinaires " de c-registres. Le chemin est donc encore très long qui mène à l'ordinateur quantique avec N grand.