I.3 Description d´etaill´ee des ´el´ements du cœur de pile
Bien que le principe de fonctionnement des PEMFC soit relativement simple, les
diff´e-rents ´el´ements utilis´es pour former une cellule sont tr`es sp´ecifiques. Chaque ´el´ement a un rˆole
pr´ecis et doit satisfaire `a de nombreuses exigences (m´ecanique, chimique, ´electrique...).
Un assemblage typique d’une cellule ´elementaire est donn´e sur la figure (I.3). On
re-trouve au centre l’´electrolyte, ou membrane, sur lequel sont d´epos´ees les ´electrodes anodiques
et cathodiques. Les diffuseurs assurent une r´epartition uniforme des r´eactifs aux ´electrodes.
Enfin, `a l’ext´erieur de l’empilement, les plaques bipolaires assurent la tenue m´ecanique de
l’ensemble et le contact ´electrique avec les cellules adjacentes.
Fig. I.3–Vue ´eclat´ee de l’assemblage type de pile PEMFC.
Dans cette section, le rˆole et les caract´eristiques des mat´eriaux mis en jeu sont discut´es
´element par ´el´ement.
I.3.1 Membrane
L’´electrolyte, ou membrane, constitue un des ´el´ements principaux de la pile PEMFC.
Son rˆole est multiple et les performances de la pile d´ependent fortement de ses
caract´eris-tiques m´ecaniques, ´electriques et chimiques. Elle assure notamment la s´eparation des deux
compartimements anodique et cathodique.
Apr`es de nombreux essais infructueux, les recherches se sont rapidement orient´ees vers
des membranes polym`eres `a structure perfluor´ee pour assurer une bonne stabilit´e chimique
en milieu oxydo-r´educteur. Cette couche joue ´egalement le rˆole de support m´ecanique des
´electrodes sur chacune de ses faces.
La structure de la membrane Nafion, principal type de membrane commercialis´e par
Dupont de Nemours, est donn´ee sur la figure (I.4). Cet ´electrolyte est un polym`ere pr´esentant
des groupements acides sulfonates SO−3 [Ker01] qui permettent le transfert des protons de
l’anode `a la cathode. La quantit´e de groupements ioniques dans les membranes est
g´en´erale-ment traduite en terme de poids ´equivalent (EW) de polym`ere. Le param`etreEW est d´efini
comme le poids de la membrane par mole de sites actifs. Il correspond `a l’inverse de la
ca-pacit´e d’´echange ionique (IEC), repr´esentant la quantit´e de groupements ioniques introduite
par gramme de polym`ere. Les membranes sulfonn´ees doivent pr´esenter un poids ´equivalent
compris entre 1100 et 1350 g/mol, soit entre 0.714 10−3 et 0.909 10−3 mol/g, pour les
appli-cations envisag´ees [YY85].
Fig. I.4–Structure de la membrane Nafion.
Les ions n´egatifs (SO−3) sont li´es `a la structure mˆeme de la membrane, contrairement
aux ions hydrog`enes qui vont transporter la charge positive de l’anode `a la cathode. Ce
mou-vement, associ´e au transfert des ´electrons dans le circuit ext´erieur, est `a l’origine du courant
produit. Il faut noter que la conductivit´e protonique de la membrane est fortement
d´epen-dante de la temp´erature de fonctionnement, de la r´epartition et de la concentration en groupes
acides et de son ´etat d’hydratation. Ce dernier point joue un rˆole crucial car la travers´ee des
protons est facilit´ee par leur solvation dans l’eau. Une bonne humidification de la membrane
est alors n´ecessaire pour augmenter sa conductivit´e protonique et par cons´equent diminuer les
pertes ohmiques du syst`eme. Le Nafion a l’avantage d’emprisonner des mol´ecules d’eau grˆace
aux r´egions hydrophiles (groupements sulfonates) pr´esentes dans un mat´eriau hydrophobe
(squelette carbon´e de la mol´ecule) et dispose d’une bonne conductivit´e ionique.
Afin de limiter les pertes de rendement, les membranes doivent ˆetre imperm´eables aux
gaz (notamment `a l’hydrog`ene, de petite taille mol´eculaire) et isolants ´electroniques. En effet,
si les gaz peuvent migrer par perm´eation d’un compartiment `a l’autre, les deux demi-r´eactions
(I.2) et (I.3) sont localis´ees au mˆeme endroit. Les ´electrons ne sont alors plus oblig´es de
cir-culer dans le circuit externe pour se recombiner `a l’autre ´electrode. De mˆeme, tout ´electron
pouvant traverser directement la membrane se traduit ´egalement par une consommation de
r´eactifs sans production de courant (toute l’´energie est d´egrad´ee en chaleur). Ces ph´enom`enes
engendrent une consommation de r´eactifs sans production d’´energie ´electrique qui r´eduit le
rendement ´electrique global.
I.3. DESCRIPTION D ´ETAILL ´EE DES ´EL ´EMENTS DU CŒUR DE PILE
Les temp´eratures de fonctionnement des membranes polym`eres sont limit´ees `a 90 oC
pour des raisons d’hydratation et de tenue m´ecanique. En effet, `a des temp´eratures
sup´e-rieures, l’eau n’est plus retenue dans la membrane et le transfert des protons devient
for-tement limitant. L’ass`echement total de la membrane se traduit par l’apparition de fissures
qui la rendent perm´eable aux gaz. Ce court-circuit est ´egalement responsable d’un
´echauffe-ment local important qui la d´enature encore plus. Les membranes perc´ees doivent alors ˆetre
chang´ees.
Il serait pourtant int´eressant de pouvoir augmenter la temp´erature de fonctionnement
de la membrane pour am´eliorer l’activit´e des catalyseurs aux ´electrodes et r´eduire le risque
d’empoisonnement de l’anode au monoxyde de carbone [KPK+01]. Cette augmentation de
temp´erature permettrait aussi de diminuer les difficult´es li´ees `a la condensation de la vapeur
d’eau dans les plaques bipolaires et les diffuseurs et `a l’´evacuation de l’´energie thermique.
C’est pourquoi des recheches intensives sont men´ees sur de nouveaux mat´eriaux polym`eres
pouvant remplacer le Nafion, tels que les poly´ether-´ether-c´etones (PEEKs) [LWL+05].
Les ´epaisseurs des membranes actuelles sont comprises entre 50 et 200µmet les surfaces
utilis´ees sont fonction de la puissance d´esir´ee.
D’autres mat´eriaux alternatifs pour l’´electrolyte, tels que les membranesDow ou Gore,
sont disponibles mais ces polym`eres, plus r´ecents, ne sont encore que peu utilis´es.
I.3.2 Electrodes
Les ´electrodes anodique et cathodique sont les lieux des r´eactions ´electrochimiques.
A l’anode, l’hydrog`ene est oxyd´e `a l’aide du catalyseur (g´en´eralement du platine). La
mol´ecule d’hydrog`ene se scinde en protons et ´electrons :
H2→2H++ 2e− (I.4)
A la cathode, les protons se recombinent avec les mol´ecules d’oxyg`ene pour former de
l’eau. La r´eduction de l’oxyg`ene se traduit par l’´equation :
1
2O2+ 2H
++ 2e−→H2O (I.5)
Les m´ecanismes r´eactionnels, `a l’anode [CT02] et `a la cathode [ABD01] sont en r´ealit´e
compo-s´es d’´etapes interm´ediaires faisant intervenir le platine, catalyseur de la r´eaction et les esp`eces
adsorb´ees.
La complexit´e du m´ecanisme r´eactionnel `a la cathode se traduit par des surtensions
ca-thodiques nettement plus importantes que les surtensions anodiques.
Les ´electrodes doivent pouvoir assurer le transfert des protons depuis les sites
cataly-tiques d’oxydation de l’hydrog`ene vers les sites de r´eduction de l’oxyg`ene via la membrane.
De mˆeme, les ´electrons produits `a l’anode doivent pouvoir ˆetre ´evacu´es puis redistribu´es `a
la cathode par le circuit ext´erieur. Ainsi, les ´electrodes doivent assurer une bonne
conducti-vit´e ionique et ´electronique. Pour cela, elles sont constitu´ees d’un m´elange intime de carbone
(conducteur ´electronique), d’´electrolyte (conducteur protonique) et de platine (catalyseur).
Ces zones de triple contact, comme illustr´e sur la figure (I.5), sont n´ecessaires `a leur bon
fonctionnement.
Fig. I.5–Structure des ´electrodes (`a gauche) et point triple (`a droite).
Elles sont r´ealis´ees par d´epˆot d’un m´elange de poudre de carbone platin´ee, de particules
de PTFE et d’´electrolyte polym`ere sur un tissu de carbone actif, puis g´en´eralement d´epos´ees
par pressage `a chaud sur la membrane. Les conditions de fabrication de ces composants, et
par cons´equent leur diff´erence de structure [Mid02], d´eterminent largement leur performances
[EAP97]. L’´epaisseur des ´electrodes poreuses ne d´epasse pas quelques dizaines de µm.
Avec le temps, on peut assister `a une baisse d’activit´e des particules de catalyseurs
qui, bien qu’elles ne soient pas consomm´ees lors de la r´eaction, s’effritent progressivement et
n’assurent plus le contact avec l’´electrolyte. De plus, les ´electrodes sont tr`es sensibles au
mo-noxyde de carbone qui peut ˆetre un des produits du reformage de l’hydrog`ene. Quelquesppm
de CO suffisent `a empoisonner les sites actifs, avec pour cons´equence une chute du potentiel.
Le fonctionnement en oxyg`ene pur ou air enrichi en oxyg`ene permet d’am´eliorer
sensi-blement les performances de la pile. La diffusion de l’oxyg`ene dans les diffuseurs et surtout
dans les pores de l’´electrode est facilit´ee. Toutefois, ces progr`es sont `a comparer aux surcoˆuts
et aux difficult´es relatifs `a la complexification du syst`eme.
I.3.3 Diffuseurs
Les couches de diffusion de quelques centaines de µm ont un rˆole double : assurer une
r´epartition uniforme des r´eactifs sur la surface des ´electrodes et permettre le transfert des
´electrons de l’anode vers la cathode via le circuit externe. Ces couches doivent donc ˆetre
conductrices et poreuses. Des feutres de carbone [ZS02] ou des mousses m´etalliques sont
g´en´eralement utilis´ees.
I.3. DESCRIPTION D ´ETAILL ´EE DES ´EL ´EMENTS DU CŒUR DE PILE
De plus, afin de faciliter l’´evacuation de l’eau produite en pile, ces couches sont trait´ees
au T´eflon. Ce traitement hydrophobe r´eduit les risques d’accumulation d’eau liquide qui peut
r´eduire l’acc`es des gaz aux ´electrodes.
Une description plus d´etaill´ee de la structure de ces couches de diffusion est donn´ee
dans la section (V). Cette partie fournit des ´el´ements de discussion sur les caract´eristiques
thermiques des diffuseurs, notamment sur leur conductivit´e thermique.
I.3.4 Plaques bipolaires
Les plaques bipolaires servent `a la distribution des gaz, `a la collecte des ´electrons et `a
l’´evacuation des produits de la r´eaction (l’eau `a la cathode). Elles sont g´en´eralement usin´ees
`a partir de plaques de graphite haute densit´e. Ce mat´eriau pr´esente une forte conductivit´e
´electronique et une bonne r´esistance aux corrosions, acide de la membrane et oxydante du
milieu r´eactionnel. Une description technique des plaques bipolaires produites par Nedstack
est donn´ee dans [MKV+03].
Ces plaques sont dites bipolaires car elles assurent simultan´ement l’alimentation en gaz
des deux cellules les encadrant dans le cas d’empilement de cellules (section I.3.5). Ainsi, une
plaque apporte l’oxyg`ene du cˆot´e cathodique et l’hydrog`ene du cˆot´e anodique de la cellule
suivante. Ces plaques permettent alors l’alimentation en parall`ele des deux pˆoles d’une pile.
Les canaux d’alimentation grav´es dans la plaque doivent pouvoir assurer une
alimenta-tion uniforme en gaz sur toute la surface de la pile et une ´evacuaalimenta-tion efficace de l’eau liquide.
A ce jour, plusieurs conceptions de micro-canaux1 sont test´ees afin d’obtenir une alimentation
optimale [SP04, YRS01]. Des exemples de plaques bipolaires sont donn´es en illustration sur
les photos (I.6).
Fig. I.6–Designs de plaques bipolaires (de type«serpentins»`a droite, et de type«plots»`a gauche).
Afin d’assurer le refroidissement du cœur de pile, un circuit interne peut ˆetre ins´er´e dans
son ´epaisseur. La circulation du liquide de refroidissement, en g´en´eral de l’eau, permet de
limiter l’´echauffement du cœur de pile qui pourrait engendrer des l´esions irr´eversibles.
L’ensemble de ces circuits internes rend l’´epaisseur des plaques importante (sup´erieure
`a 1 mm). La compacit´e et le poids sont encore des facteurs `a am´eliorer pour une r´eduction
de l’encombrement et de l’inertie de la pile. Actuellement, les recherches s’orientent vers des
plaques composites pour gagner en densit´e et compacit´e. Cependant, les plaques m´etalliques
sont toujours l’objet d’´etudes.
I.3.5 Syst`emes & sous-syst`emes
Le cœur de pile est commun´ement appel´eAssemblage Membrane-Electrodes (AME).
Cet ensemble comprend la membrane, les ´electrodes anodique et cathodique et les diffuseurs.
L’ensemble des ph´enom`enes de transport gouvernant les performances ´electriques de la pile
est conditionn´e par les caract´eristiques de l’AME.
On appelle cellule ´el´ementaire l’assemblage constitu´e de l’AME et des plaques
bipo-laires. Cet ensemble permet de prendre en compte l’alimentation en gaz du cœur de pile et
le refroidissement par le circuit interne aux plaques bipolaires.
En r´ealit´e, les piles sont form´ees de plusieurs cellules connect´ees en s´erie afin d’obtenir
des puissances plus ´elev´ees. Les empilements de cellules ´el´ementaires formant une pile sont
aussi appel´esstack. Les stacks peuvent ˆetre compos´es au maximum d’une centaine de cellules.
Une augmentation du nombre de cellules engendre des difficult´es pour l’alimentation en gaz
et la gestion thermique n´ecessitant des modifications de l’architecture du stack [JC01].
I.3.6 Auxiliaires
Pour son bon fonctionnement, la pile PEMFC n´ecessite diff´erents syst`emes auxiliaires :
approvisionnement, refroidissement, contrˆole et r´egulation.
Les circuits de gaz sont contrˆol´es en d´ebit et pression. Ces syst`emes de r´egulation
permettent de maˆıtriser les conditions d’approvisionnement de la pile. Pour am´eliorer les
performances, il est possible de travailler `a des d´ebits en air importants afin d’´evacuer l’eau
produite et de limiter les effets de la faible pression partielle en oxyg`ene de l’air. Toutefois,
l’utilisation de compresseurs entraˆıne un coˆut ´energ´etique important. Du cˆot´e anodique,
l’int´erˆet d’augmenter la stochiom´etrie en hydrog`ene est limit´e et n´ecessite d’int´egrer un
recir-culateur d’hydrog`ene pour r´ecup´erer l’hydrog`ene non consomm´e en sortie et le r´einjecter
en entr´ee.
L’humidification des gaz en entr´ee de pile est n´ecessaire pour diminuer la r´esistance
protonique de la membrane. Elle est g´en´eralement r´ealis´ee par le passage des gaz dans des
colonnes d’eau port´ees `a la temp´erature de saturation d´esir´ee.
Dans le document
Transferts couplés masse-charge-chaleur dans une cellule de pile à combustible à membrane polymère
:
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