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Chapitre 1 : Chauffage au bois et vecteur air dans les BBC

1.5. VECTEUR AIR

1.5.2. Description et condition d’application du chauffage à air

Historique

Le chauffage à air est apparu dans les années 1950. Il fut tout d’abord destiné à chauffer de

grands bâtiments avec une hauteur sous plafond importante. Dans les années 1970, son développement

dans les bâtiments d’habitation a été marqué par de nombreux problèmes d’inconfort et son utilisation

est encore mal perçue aujourd’hui. La Figure 1.31 est issue du catalogue d’un constructeur de plancher

chauffant [Roth, 2010] et illustre très bien ce propos, car elle présente le chauffage à air pulsé comme

le plus éloigné du chauffage idéal.

2,7 m

1,8 m

0,1 m

Idéal Au sol Au plafond Radiateur Air pulsé

Figure 1.31 : Champ de température créé par différents émetteurs de chaleur

En effet, avec une capacité calorifique massique 4 fois inférieure à celle de l’eau et une masse

volumique 1000 fois plus faible, l’air n’est pas un fluide caloporteur approprié pour chauffer un

bâtiment peu ou pas isolé. Les situations d’inconfort rencontrées dans ce type de bâtiment sont alors

tout à fait compréhensibles, car soit la puissance de chauffage véhiculée par l’air est insuffisante pour

couvrir les déperditions, soit les installations répondent à ces besoins par une excessive augmentation

de la température ou du débit d’air pulsé, la pire des situations étant d’avoir à souffler de grandes

quantités d'air très chaud. Aujourd’hui cependant, la généralisation des bâtiments de type BBC dont

les besoins de chauffage sont très faibles permet d’envisager à nouveau l’utilisation du chauffage à air.

Situation actuelle

À l’heure actuelle, le chauffage des habitations de type BBC est une opération complexe à

réaliser, car il n’existe pas de réponse type à cette question, qui présente parfois certains paradoxes :

- Les besoins de chauffage sont très faibles, mais peuvent varier d’un facteur deux selon les

performances des opérations. Ils s’établissent ainsi autour de 15 à 30 kWh/(m².an) ;

- Les puissances spécifiques de chauffage à installer peuvent varier dans des proportions plus

importantes encore, car il faut pouvoir répondre aux pics de froid. Elles s’établissent alors

autour de 10 à 50 W/m² ;

- Les systèmes de production de chaleur actuels sont mal adaptés pour fournir de si faibles

puissances, en particulier pour les chaudières d’une puissance supérieure à 10 kW qui

conviennent mieux à présent pour assurer les besoins de chauffage en petit collectif.

Les systèmes de faible puissance couramment utilisés sont alors des PAC, des systèmes de

chauffage au bois, des radiateurs électriques et dans quelques rares cas, des chaudières gaz à

condensation au fonctionnement bien souvent éloigné de leur régime nominal. À l’exception des

radiateurs électriques et des poêles à bois qui servent d’appoint dans les maisons passives, tous ces

systèmes apparaissent bien souvent surdimensionnés et sont alors en général couplés à une ventilation

performante à récupération de chaleur sur l’air extrait et/ou à un système de production d’ECS, avec

une part de production solaire ou thermodynamique (cf. section 1.3.4).

L’utilisation simultanée du réseau de renouvellement d’air pour assurer la ventilation et le

chauffage des locaux d’habitation est alors une idée séduisante, qui permet notamment de s’affranchir

d’une installation spécifique de distribution de chaleur. Cependant, deux inconvénients majeurs

peuvent être soulignés [VABAT, 2009] :

- La réglementation impose une possibilité de régulation du chauffage dans les constructions

neuves, ce qui parait délicat à réaliser en utilisant le principe de la ventilation par balayage

imposé par la réglementation relative à l’aération des logements ;

- Pour une même puissance de chauffage demandée et une même température de circulation du

fluide caloporteur, le débit volumique d’air à pulser est 3400 fois supérieur à celui de l’eau.

Si en réponse au premier point, il convient de garantir que chaque pièce du logement peut à la

fois être chauffée et aérée de manière convenable, le second point impose nécessairement une

puissance de chauffage extrêmement réduite, comme expliqué dans l’exemple ci-dessous.

Exemple sur une étude de cas [Fraefel, 2000]

Pour une maison individuelle de type BBC de 100 m² habitables, comprenant quatre pièces

principales, une cuisine, une salle de bain et deux cabinets, le débit réglementaire de renouvellement

d’air est de 180 m3

/h. Avec une puissance de chauffage nécessaire prise égale à 36 W/m², la

température de l’air pulsé doit alors être égale à 80°C pour maintenir une température de 20°C dans les

différentes pièces du logement. Une telle température de soufflage ne peut pas être retenue, car elle

présente des inconvénients trop importants, notamment à cause du risque d’inconfort thermique dans

la zone de soufflage, la nécessité de recourir à une production de chaleur à haute température et la

carbonisation systématique au dessus de 50°C des poussières contenues dans l’air.

Sans modification de la puissance de chauffage demandée, le chauffage à air n’est alors

possible qu’en ayant recours à une augmentation significative du débit d’air pulsé. Ainsi, en limitant la

température de soufflage à 40°C pour s’affranchir des phénomènes d’agrégation et de carbonisation

des poussières, le débit d’air nécessaire est porté à 540 m3

/h. Dans ces conditions, les sections des

gaines doivent être largement augmentées pour limiter les pertes de charge et le bruit aérien, mais les

consommations électriques deviennent nécessairement conséquentes et la diffusion d’une telle quantité

d’air ne s’effectue pas sans difficultés pour garantir le confort des occupants. De plus, en l’absence

d’un récupérateur à très haute efficacité, un fonctionnement en tout air neuf n’est pas envisageable du

fait des consommations énergétiques excessives que cela entraînerait. Il serait alors nécessaire

d’effectuer une reprise d’air égale au deux tiers du débit total environ, ce qui ne permet pas de garantir

la bonne évacuation des polluants en cas d’activité émettrice dans le logement.

Dans une telle habitation, ni l’élévation de la température, ni l’augmentation du débit de l’air

pulsé n’apparaissent donc être des solutions tangibles permettant d’envisager convenablement la seule

utilisation de l’air de ventilation pour couvrir les besoins de chauffage du logement (cf. Tableau 1.17).

En conséquence, seul un abaissement important de la puissance de chauffage de l’habitation

permet d’avoir recours à l’air de ventilation comme unique vecteur énergétique pour assurer à la fois

le renouvellement de l’air et le chauffage du logement. En effet, avec une puissance de chauffage

réduite à 10 W/m², conformément aux exigences du standard Passivhaus ou du label Minergie P, et

avec un débit réglementaire de ventilation conservé à 180 m3/h, la température de soufflage de l’air

reste inférieure à 37°C, évitant ainsi tout risque d’inconfort pour les occupants (cf. Tableau 1.17).

Tableau 1.17 : Analyse des conditions d’application du chauffage avec l’air de ventilation

Type de bâtiment BBC classique BBC Passivhaus

Surface 100 m2 100 m2

Puissance spécifique de chauffage 36 W/m² 10 W/m² 9 W/m²

Puissance de chauffage nécessaire 3600 W 1000 W 900 W

Débit volumique 180 m3/h 540 m3/h 180 m3/h 90 m3/h

Température de l’air soufflé 80°C 40°C < 37°C 50°C

Chauffage avec l’air de ventilation Impossible Possible

Enfin, il convient de prendre en considération la modulation du débit de renouvellement d’air,

qui peut être réduit à 90 m3/h dans le cas de la maison prise en exemple. Dans ces conditions et en

prenant cette fois une température limite de 50°C pour l’air pulsé, la puissance maximale qu’il est

possible de transporter avec l’air de ventilation s’établit à 900 W, soit au maximum 9 W/m² pour cette

habitation, comme indiqué en gras dans la dernière colonne du Tableau 1.17.

C’est suite à ce type de raisonnement que les bâtiments souhaitant répondre au standard

Passivhaus doivent présenter une puissance spécifique de chauffage inférieure à 10 W/m². En effet,

c’est bien ce critère qui permet le chauffage via l’air de ventilation. La limite des 15 kWhEP/(m².an)

pour la consommation énergétique annuelle de chauffage rapportée à la surface de l’habitation n’est

ensuite que la conséquence des résultats couramment obtenus par simulation thermique dynamique

avec des bâtiments dont la puissance de chauffage nécessaire était limitée à 10 W/m².

Quid de la majorité des BBC ?

Dans le cas le plus fréquent de bâtiments de type BBC qui présentent une puissance spécifique

de chauffage comprise entre 10 et 50 W/m², il est donc nécessaire de prévoir un appoint de chauffage

ailleurs que sur l’air de ventilation. Si l’introduction de radiateurs électriques dans chaque pièce peut

être exclue compte tenu de leur consommation excessive en énergie primaire, les solutions restantes

impliquent alors la mise en place d’un réseau supplémentaire pour l’émission de la chaleur, sauf dans

le cas du choix d’un appareil indépendant de chauffage au bois de faible puissance. Il est dès lors

intéressant d’étudier cette dernière solution qui présente toutefois l’inconvénient d’être une source

localisée de chaleur, avec près des deux tiers de la puissance obtenue lors de la combustion qui sont

délivrés par rayonnement et convection dans la pièce où est installé l’appareil, le tiers restant étant

rejeté avec les produits de combustion. Un appareil de chauffage domestique au bois d’une puissance

nominale d’environ 6 kW permettrait ainsi de répondre aux puissances spécifiques de chauffage

nécessaires dans ce type d’habitation, mais il conviendrait de mieux répartir la chaleur émise pour

éviter les risques de surchauffe dans le séjour et permettre une harmonisation de la température de

l’ensemble des pièces du logement, en particulier celles étant les plus éloignées de la source.

L’utilisation de l’air de ventilation pour effectuer cette répartition apparaît alors être une

solution judicieuse, d’autant qu’avec un système à récupération de chaleur sur l’air extrait, les calories

contenues dans l’air vicié peuvent être redistribuées par l’air neuf dans les différentes pièces de vie.

Ainsi, alors que les habitations de type BBC ne présentent pas toutes des performances aussi

élevées que celles des réalisations de type Passivhaus et ne peuvent donc pas prétendre à la seule

utilisation de l’air de ventilation pour assurer intégralement leurs besoins de chauffage, il est toutefois

possible d’y mettre en œuvre un système de récupération et de distribution d’air chaud pour mieux

répartir la chaleur émise par une source localisée comme un appareil de chauffage au bois.

Contraintes et techniques associées

Dans tous les cas, le bon fonctionnement d’un système de chauffage par circulation d’air

chaud dépend fortement de l’étanchéité à l’air de l’habitation. Si celle-ci n’est pas suffisamment

étanche, les débits d’air insufflé et aspiré ne correspondront pas aux valeurs calculées ou seront moins

bien répartis, entraînant ainsi des problèmes pour l’obtention des températures de confort souhaitées.

Ce type de système requiert également le placement adéquat et soigné des conduites d’air ainsi

que des bouches de soufflage et de reprise, non seulement pour limiter les pertes de charge mais aussi

pour prévenir d’éventuelles fuites ou d’un refroidissement trop important de l’air chauffé en cas de

non isolation des gaines. Le contrôle de la vitesse d’insufflation de l’air est également un facteur

prépondérant en termes de confort thermique et acoustique des occupants, surtout dans le cas de forts

débits soufflés. Des études sont ainsi menées sur l’optimisation des techniques de diffusion par

mélange pour profiter au mieux de l’effet Coanda et limiter le phénomène de stratification thermique.

Elles sont aussi portées sur le développement de bouches de soufflage pouvant être contrôlées par les

occupants et possédant un fort taux d’induction, ce qui permet un meilleur brassage de l’air chaud

avec l’air ambiant et offre la possibilité de réduire l’écart de température et la vitesse d’air, tout en

délivrant la même puissance thermique [VABAT, 2009].

Avantages et inconvénients

Au titre des avantages, un système de chauffage par circulation d’air chaud permet d’obtenir

un réchauffement très rapide des différentes pièces grâce au brassage de l’air. Ce type de système offre

en outre la possibilité de coupler la ventilation au dispositif de chauffage et/ou de refroidissement de

l’habitation, ce qui permet de supprimer les coûts liés à l’installation des réseaux conventionnels de

diffusion de chaleur ou de froid. Même si les bouches de soufflage et de reprise ne doivent pas être

entravées, ce type de système permet de profiter librement des différentes surfaces de l’habitation. Des

possibilités diversifiées existent pour la régulation de tels systèmes, tant en termes de solutions de

déclenchement que de possibilités de variation du débit et de la température de l’air soufflé.

Parmi les inconvénients, l’augmentation du débit d’air soufflé peut entraîner des risques de

nuisances sonores et des consommations électriques plus importantes, même si des solutions comme

les gaines oblongues par exemple permettent de réduire la taille des réservations pour le passage des

réseaux. Le contrôle de la mise en œuvre du système ainsi que la maintenance régulière des filtres et

des conduites est un point essentiel pour garantir la bonne tenue des performances de l’installation, le

maintien d’une bonne QAI dans le logement et la santé des occupants. Les risques de jets d’air

inconfortables et de propagation des vibrations des moteurs de ventilation doivent aussi faire l’objet

d’un soin particulier lors de la conception de l’installation.