CHAPITRE II : CARACTERISATION ELECTRIQUE DES DOPANTS (CONCENTRATION, NATURE) SUR LA BASE D’UN
I.3 Description des équipements disponibles
L’équipement prototype utilisé pendant ces travaux pour la mesure d’EH et de résistivité en température
a été élaboré avant le début de ces travaux de thèse. Il est le fruit d’une collaboration entre le laboratoire
d’accueil pour cette thèse et le service des basses températures du CEA-Grenoble. Il permet d’effectuer
des mesures de n (ou p), ρ et μ dans la gamme de T [15K-300K] sur les principes évoqués dans les
parties I.1 et I.2 de ce chapitre. Le refroidissement des échantillons est réalisé indirectement par un tube
à gaz pulsé (Figure II-5). Le fonctionnement d’un tel appareil repose sur la circulation en boucle fermée
d’Hélium gazeux dont le refroidissement est obtenu via des cycles de compressions et de détentes
(assurés par un compresseur). Ce tube est composé de deux étages matérialisés par des anneaux en cuivre
refroidis respectivement à 80K et 10K par l’Hélium. Ces anneaux sont reliés par des tresses en cuivre à
73
un puits de mesure lui-même sous atmosphère d’Hélium. C’est donc par conduction thermique que le
transfert de frigories du tube à gaz pulsé vers le puits de mesure (puis vers l’échantillon) est assuré.
L’échantillon à mesurer est placé à l’extrémité d’une canne introduite jusqu’à la base du puits, qui est
lui-même traversé par un champ magnétique constant (0,49T) à polarisation variable (assuré par deux
jeux d’aimants permanents montés sur une glissière). L’ensemble tube à gaz pulsé et puits de mesure
est confiné dans une enceinte maintenue sous vide secondaire. Les pertes thermiques liées au
refroidissement par conduction limitent en pratique le refroidissement de l’échantillon à 15K. Ce
système a été conçu pour répondre au cahier des charges sur la mesure des dopants évoqué
précédemment. En effet il possède de nombreux avantages dont celui de pouvoir refroidir rapidement
un échantillon à 15K (environ 1h15), et cela avec une consommation très faible d’Hélium (légère
déperdition liée à l’introduction de la canne porte échantillon dans le puits). Il est également facile
d’utilisation. Le système cryogénique est couplé à une électronique de mesure pointue. L’ensemble des
données expérimentales mesurées (données de Hall, résistivité, T) sont récupérées sur ordinateur, via
une interface Labview. L’électronique de mesure utilisée (Keithley 6485 Picoammeter) permet de
mesurer d’une part des courants très faibles (jusqu’à 10
-12A), et d’autre part une large gamme de
résistivité (du conducteur à l’ultra résistif : ρ~10
11Ω.cm).
Le champ magnétique mobile utilisé pour la mesure d’effet Hall provoque une légère augmentation de
T dans la base en cuivre du porte échantillon. En effet, la variation de polarisation du champ magnétique
induit des courants de Foucault dans la base en cuivre, qui se dissipent par effet Joule et induisent un
échauffement de celle-ci. A très basse T (T<17K), l’équipement ne parvient pas à contrôler cet
échauffement. Les mesures d’EH s’effectueront donc au mieux entre 17K et 300K. Comme les mesures
de ρ s’affranchissent du besoin d’avoir un champ , il est possible de gagner entre 0,5K et 1,5K pour
les mesures expérimentales de ρ.
74
Figure II-5 : Schéma (a) et photo (b) de l’équipement prototype utilisé permettant d'effectuer des mesures d'effet Hall et de Van der Pauw dans la gamme [15K-300K)
De manière générale, plusieurs géométries peuvent être utilisées pour une mesure d’effet Hall à 4, 6 ou
8 contacts. Toutes requièrent un échantillon d’épaisseur uniforme, des contacts suffisamment petits et
positionnés en bordure d’échantillon. Pour cette thèse, la forme carrée a été retenue car seulement 4
contacts sont nécessaires. Egalement, pour la mesure d’EH, cette géométrie ne nécessite qu’un minimum
d’informations sur l’échantillon (épaisseur de l’échantillon). La pertinence de l’usage de la structure à
4 contacts dans le cas du Si est par ailleurs confirmée par les travaux de Veirman et al. [107]. Ces auteurs
ont en effet effectué des mesures d’EH sur des échantillons modèles (monocristallin, non-compensé) à
l’aide de la structure à 4 contacts : les valeurs de mobilité mesurées sont en excellent accord avec les
modèles de mobilités présents de la littérature pour ce type de Si.
L’équipement prototype permet d’effectuer des mesures sur des carrés de 1 à 2 cm de côté (Figure II-4).
En pratique dans ces travaux, l’injection de courant s’effectue par un coin de l’échantillon, et non par
un bord, comme cela est représenté sur la Figure II-1.
L’inconvénient de cette géométrie (carré avec 4 contacts électriques) réside dans la sensibilité élevée de
la mesure au positionnement (taille et emplacement) des contacts électriques nécessaires à l’injection
du courant dans un échantillon de Si. Nous y reviendrons dans la partie I.4 de ce chapitre.
Pour effectuer ce contact, le choix s’est orienté vers un alliage eutectique d’indium et gallium (InGa).
L’avantage de l’InGa est qu’il est liquide à T ambiante, et que son incorporation dans le Si peut se faire
à T ambiante. Une goutte d’InGa est donc déposée manuellement sur chacun des coins de l’échantillon,
75
puis la pénétration de l’eutectique dans le Si est facilitée par une friction mécanique à l’aide d’une pointe
diamant. Bien que facile à réaliser cette étape expérimentale additionnelle de dépôt de contacts peut
potentiellement ajouter des incertitudes aux valeurs de densités de porteurs, de résistivité et de mobilités
extraites.
Une mesure par EH sur l’équipement est constituée de 2 étapes (pour lesquelles les contacts électriques
sont pris à l’aide de pointes en cuivre positionnées sur chacun des dépôts d’InGa) :
1. La validation du caractère ohmique des contacts électriques
2. La mesure d’EH
La première étape de contrôle de la qualité des contacts consiste à injecter entre deux contacts un courant
I compris entre deux valeurs (I
1et I
2) par pas de ΔI. Tout d’abord, le caractère ohmique des contacts est
vérifié si les tensions mesurées entre les deux points I
1et I
2obéissent à une fonction linéaire du courant
injecté. Ensuite, cette étape permet de s’assurer que les résistances entre les 4 contacts électriques sont
similaires (en répétant l’injection de courant d’abord entre A et B, puis entre B et C, puis entre C et D,
puis entre D et A, et en vérifiant que les pentes des fonctions I=f(V) sont similaires).
Il est intéressant de réitérer cette étape à plusieurs températures pour s’assurer de la tenue de ceux-ci
lorsque la température est abaissée.
Pour la deuxième étape, un courant est d’abord injecté entre les points A et C, et la tension est mesurée
entre B et D (V
BD+/B+) (Figure II-6), puis la mesure est répétée en inversant le sens du courant (V
BD-/B+),
puis ces deux mesures sont répétées en inversant le sens du champ magnétique (V
BD+/B-, V
BD-/B-). Puis
l’ensemble de ces étapes sont répétées en injectant le courant entre les points B et D et en mesurant la
tension entre A et C (V
AC+/B-, V
AC-/B-V
AC+/B-, V
AC-/B-). Les mesures en inversant le sens du courant et du
champ magnétique sont nécessaires afin de minimiser les contributions parasites à la tension de Hall :
les principales étant le potentiel de désalignement (lié au caractère non parfait des contacts et à leur
géométrie), et le potentiel thermoélectrique (qui résulte du contact entre des matériaux différents, à
savoir le Si, le contact électrique et la pointe utilisée pour la prise de contact) [131].
Figure II-6 : Schéma d’une étape de la mesure d’Effet Hall, sur un échantillon de géométrie identique à celle utilisée dans ces travaux de thèse.