CHAPITRE II : CARACTERISATION ELECTRIQUE DES DOPANTS (CONCENTRATION, NATURE) SUR LA BASE D’UN
II.1 Détermination des teneurs en dopants par ajustement des équations théoriques décrivant la
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Nous avons vu dans le chapitre I qu’il était possible d’utiliser la statistique de Fermi-Dirac pour décrire
la variation de la densité de porteurs libres majoritaires en fonction de la température dans un Si dopé
avec plusieurs impuretés. En effet, il n’existe qu’une seule position du niveau de Fermi qui permet de
respecter la condition de neutralité électrique du matériau, et donc de respecter l’équation I-6.
Théoriquement, il n’y a donc qu’un seul ensemble de valeurs {N
A1,… N
Ai; N
D1,…N
Dj} qui permet
d’ajuster les valeurs théoriques de n(T) à un ensemble de valeurs expérimentales. Cela est vrai à
condition que :
- les autres variables (énergie d’ionisation associée aux dopants majoritaires (E
A, E
D), et
dégénérescence g du niveau d’énergie introduit par ces derniers) soient connues.
- un grand nombre de valeurs expérimentales soient disponibles, et que celles-ci soient fiables
(connaissance exacte du facteur de Hall par exemple, pas d’incertitudes expérimentales).
En pratique, cette méthode trouve ses limites dans l’ensemble des conditions sous-jacentes à satisfaire :
les données expérimentales présentent des incertitudes, le nombre de points expérimentaux n’est pas
infini, et les niveaux d’énergie introduits par les dopants majoritaires ne sont pas connus avec précision
(notamment à fort dopage). L’ensemble de ces incertitudes fragilise donc fortement l’application de
cette méthode dès lors que le nombre de variables à déterminer ({N
A1,… N
Ai; N
D1,…N
Dj}) est important.
Dans la littérature, cette méthode a fait ses preuves en se limitant au cas du Si dopé avec deux dopants,
un majoritaire et un minoritaire [129][134][5][80]. Pour la suite nous nous focaliserons donc au cas du
Si compensé qui possède un dopant majoritaire et un dopant minoritaire.
Cependant, dans la mesure où le SoG-Si est susceptible de contenir plus de deux dopants, une étude de
sensibilité à l’ajout d’un second dopant majoritaire en faible quantité sera menée dans le Chapitre III.1.
Cela aura pour objectif d’évaluer l’effet d’une tierce impureté sur la précision de cette technique
électrique lorsqu’appliquée au cas du Si compensé sous l’hypothèse de travail qu’il ne contient que deux
dopants (un majoritaire et un minoritaire).
De manière générale, la gamme de T sur laquelle peut être appliquée cette méthode est celle qui
correspond au domaine de validité des équations I-20 et I-21, à savoir celle décrivant le régime
d’ionisation des dopants (régime de saturation + régime de gel des porteurs : zone B et C de la Figure
I-19). A noter que plus le nombre de points expérimentaux acquis dans cette plage de T sera important,
plus la méthode d’ajustement est susceptible d’être précise.
Application aux forts dopages (N>10
17cm
-3) :
Nous avons pu constater (cf. Partie III.3.1.3 du Chapitre I) qu’à fort dopage N
D, les états énergétiques
permis passent d’un état discret E
Dà une distribution de niveaux d’énergie sous forme de gaussienne se
déplaçant vers la bande de conduction ou de valence avec l’augmentation de la teneur en dopants
majoritaires. L’application de la méthode décrite ci-dessus devient alors plus délicate car la valeur du
niveau d’énergie introduit par le dopant majoritaire devient une inconnue additionnelle dans le processus
d’ajustement. Afin de pallier le manque d’information sur la valeur d’énergie introduite par le dopant
majoritaire dans un échantillon fortement dopé, une méthode est utilisée afin de déterminer cette
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dernière par un traitement particulier des données expérimentales de s(T) [73]. En effet, l’expression de
n(T) ou p(T) peut être simplifiée à basse température (indépendamment du dopage de l’échantillon)
(équation I-23), et ainsi permettre l’accès à E
d(ou E
a, pour le cas du Si de type p) qui n’est autre (dans
la gamme de T correspondant au régime de gel du dopant concerné) que la pente de la courbe ln(s×T
-3/2
)=f(1000/T) (Exemple Figure II-11).
Figure II-11: Exemple, sur un échantillon issu de ce travail, d'extraction de Ea par mesure de p(T) à basse température pour du Si compensé, dopé avec du bore et compensé par des donneurs thermiques (qui sont des agglomérats d’oxygène à
caractère double donneur - cf. partie III.1.1 de ce chapitre).
Bien qu’attrayante, plusieurs sources d’erreurs peuvent venir perturber cette méthode de détermination
de E
d. Tout d’abord, plus la densité de dopants est forte, plus l’apparition progressive de la conduction
par hopping lors du refroidissement de l’échantillon est favorisée. Ce phénomène impacte directement
la mesure de s par effet Hall, avec pour conséquence l’apparition progressive d’une inflexion sur la
courbe s(T) à basse température (Figure II-11). Cette inflexion, qui est un artefact ne représentant pas la
variation réelle de densité de porteurs libres avec la température - peut perturber la mesure d’E
d(ou E
a),
comme la gamme de T dans laquelle s’effectue cette dernière se restreint avec l’augmentation du dopage
majoritaire (voire, dans certains cas de très fort dopage, s’effacer). D’autre part, la pente est extraite à
partir de données expérimentales de s(T) corrigées par le facteur de Hall. Dans ces mêmes gammes de
T, les expressions définissant r
Hsont incertaines (Partie I.1.2 de ce chapitre). Cela peut donc induire une
variation de pente et modifier la valeur du niveau d’énergie du dopant extrait.
Dans la gamme de forts dopages, la variation avec la densité de dopants du niveau d’énergie introduit
par le dopant est importante (Figure I-12) : une moindre erreur sur la détermination de la pente (et donc
du niveau d’énergie) peut entrainer une erreur conséquente sur la détermination de N
Aet N
D. A titre
d’exemple, une erreur de 10% sur la valeur de E
Dentraine une variation d’un ordre de grandeur de la
valeur de concentration en dopants majoritaires correspondante pour une densité en dopants majoritaires
de 10
17cm
-3, et en considérant le modèle d’Altermatt pour la variation de E avec le niveau de dopage.
Application à faibles dopages (N<10
17cm
-3) :
A faible dopage, lorsque la valeur de E
A(ou E
D) peut être considérée comme discrète et constante, cette
procédure a également déjà été utilisée par le passé [79][80] et a donné des résultats satisfaisants dans
le Si de type p compensé. La Figure II-12-a présente notamment l’ajustement des données théoriques,
pour lesquelles le facteur de dégénérescence g est égal à 4, sur les valeurs expérimentales de variation
de densité de porteurs libres avec T dans le cas du Si de type p. Cependant, des essais préliminaires au
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laboratoire, de transposition de cette technique au silicium de type n (avec g=2) ne se sont pas avérés
concluants : la qualité de l’ajustement entre les données expérimentales et théoriques de variation de la
densité de porteurs avec la température est en effet insuffisante pour extraire des concentrations de
dopants fiables (Figure II-12, b).
Figure II-12 : Données expérimentales de (a) p(T) dans du Si compensé de type p dopé au B et au P, corrigées par le facteur de Hall de Szmulowicz, avec [B]= 7,8×1016cm-3, et [P]=6,1×1016cm-3, et comparées à l’équation I.20, et (b) n(T) dans du Si compensé de type n dopé au P et au B, corrigées par le facteur de Hall de Ohta, avec [B]=8,8×1016cm-3, et [P]=9,0×1016cm -3, comparées à l’équation I.19. Les valeurs de EA et ED utilisées dans les équations sont les valeurs à faible dopage [81]
EB=44,39meV, EP=45,5meV.