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Des services d’hospitalisation en difficultés

3.2. Une stratégie thérapeutique délicate à mettre en œuvre

3.2.1. Des services d’hospitalisation en difficultés

3.2.1. Des services d’hospitalisation en difficultés

Le bloc opératoire correspond à la conclusion du parcours du patient hospitalisé lorsqu’une sanction chirurgicale s’impose. Autrement dit, le futur opéré doit passer au préalable par un autre service (hors, bien évidemment, situations d’urgence absolue) avant de subir son intervention. C’est d’ailleurs au sein de ces unités de soins qu’est administrée la prémédication anxiolytique. Nous voyons déjà que la collaboration et la communication entre ces deux entités sont des éléments fondamentaux dans la prise en charge du patient. Pourtant, nous avons mesuré à travers mon enquête qu’il existe un certain nombre de dysfonctionnements, rendant la gestion de l’anxiolyse pharmacologique délicate, notamment en services de chirurgie. Mais qu’est ce que le terme « gestion » signifie ? Il s’agit de « l’action de gérer », synonyme du verbe

« administrer » et qui correspond à « gérer en faisant valoir, en défendant les

intérêts »197. Dès lors, nous nous apercevons qu’une notion d’interaction, de protection intervient puisqu’il faut défendre des intérêts. Nous pouvons aisément penser, dans notre situation, à ceux du patient. Mais pourquoi est ce aussi délicat ? Sont-ils toujours préservés ? Pour répondre à ces interrogations, deux facteurs rendant le travail difficile en services d’hospitalisation sont à prendre en compte.

3.2.1.1. Une communication défaillante

Tout d’abord, le premier facteur est d’ordre structurel. En effet, dans le monde hospitalier actuel, les relations inter services sont complexes. Ainsi, elles mettent en jeu plusieurs intervenants, de fonctions différentes, ne se côtoyant pas ou peu, mais devant travailler dans une harmonie la meilleure possible.

Or, comme nous l’avons vu dans le cadre théorique, le M.A.R., dans un premier temps, prescrit la prémédication anxiolytique. Puis, dans un second temps, l’I.D.E. de service d’hospitalisation l’administre au moment présumé idéal, c'est-à-dire après avoir eu vent de l’avancement du programme opératoire. Dans un troisième temps, les brancardiers acheminent le patient au bloc opératoire et, dans un quatrième temps, il est accueilli par l’équipe opératoire (I.B.O.D.E. et I.A.D.E.) avant d’être, finalement, anesthésié.

Nous comprenons donc que les I.D.E. et les I.A.D.E. n’ont que des relations virtuelles, impersonnelles entre eux, ce qui peut mettre un frein à la communication, et peut être représenté par des transmissions (orales et écrites) imprécises . Or, comme le précise Jean Marty «La performance de l’organisation est en partie liée à la qualité de l’organisation anesthésique, une autre partie relève des secteurs chirurgicaux et surtout de la qualité de l’interface entre ces structures »198. Actuellement, le téléphone est le moyen de correspondance le plus utilisé entre les unités d’hospitalisation chirurgicale et

197 Le Robert illustré d’aujourd’hui en couleur, Op. Cit., p.18.

198 MARTY J., BONNET F., CORDA B., ETTORI F., HOLTZER S., LAGNEAU F., LE CORRE F., PLAUD B., SAMAIN E., VINH M.P., Organisation des sites opératoires, [en ligne], 2001, [06 Avril 2009], conférence d’actualisation disponible sur http://www.sfar.org.

Florian Massacrier Ecole IADE Lyon Promotion 2007-2009

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le bloc opératoire (plus de 82 % des personnes sondées)199, cependant il présente le risque de prévenir un peu tardivement les unités de soins, ce qui aura pour conséquence de retarder l’administration de la thérapeutique anxiolytique.

3.2.1.2. Une pénurie I.D.E.

Le second facteur rendant, actuellement, la charge de travail lourde en unités de soins est d’ordre conjoncturel. En effet, la thérapeutique anxiolytique est administrée par les I.D.E. Or, nous savons que la diminution (ou la non augmentation) des effectifs augmente la charge de travail, tout comme sa pénibilité. Ainsi, j’en ai eu un aperçu lors de mon activité professionnelle, mais aussi lors de la diffusion de mon outil d’enquête.

En effet, un cadre de santé ne voulait pas que je distribue mon questionnaire à son équipe soignante sous prétexte qu’elle était en sous effectif chronique, que je ne pouvais pas encore grever leur temps de travail par un moment supplémentaire nécessaire à la réponse de mon enquête (après négociation, j’ai néanmoins pu obtenir un accord et émettre mo n outil dans cette unité). On s’aperçoit bien qu’une pénurie infirmière existe. En effet, d’après le Professeur Bertrand Guidet, président de la S.R.L.F.200, « nous souffrons en région parisienne de difficultés permanentes pour recruter des infirmières»201. De plus, la pénurie d’I.D.E. figure au premier rang de 15 métiers : en 2004, 83 % des établissements de soins déclaraient des difficultés pour recruter202. Enfin, 7 % des postes étaient vacants en 2005203. Plusieurs raisons sont à l’origine de ce phénomène :

- La première est que les diverses structures hospitalières sont actuellement engluées dans d’énormes problèmes budgétaires, ceux-ci rendent très difficile le recrutement d’I.D.E. Ainsi, en 2008, 29 C.H.U. sur 31 étaient dans une situation

199 Graphique 24 p. 91.

200 S.R.L.F. : Société de Réanimation de Langue Française.

201 PEREZ M., Les unités de réanimation marchent à flux tendu l’hiver, [en ligne], 30 Décembre 2008, [31 Mars 2009], article disponible sur http://www.lefigaro.fr.

202 ESTRYN-BEHAR M., LE NEZET O., NEGRI J.F., CANTET-BAILLY N., BEN-BRICK E., CAILLARD J.F., Le concept de « Magnet hospitals » Evaluation de l’attractivité des 14 CHG et CHU de l’étude PRESST, [en ligne], [31 Mars 2009], étude disponible sur http://www.presst-next.fr.

203CHABOISSIER M., Pénurie d’infirmières en Île de France, [en ligne], 23 Février 2006, [31 Mars 2009], rapport disponible sur http://www.parthage-sante.fr.

financière périlleuse (les deux établissements enquêtés en font d’ailleurs partie), avec des déficits abyssaux à gérer. Ceci équivalait à un montant cumulé total d’environ 900 millions d’euros. Par ailleurs, 33 % des cliniques privées étaient dans cette situation en 2007204.

- La seconde découle de la première. L’impossibilité d’augmenter les effectifs entraîne une augmentation du temps de travail des agents (rappel des personnels sur des jours de repos, nombreuses heures supplémentaires, impossibilité de prendre des congés…), une pénibilité accrue et, par conséquent, un ras le bol général. Ceci est reflété par l’augmentation des arrêts de travail et de l’absentéisme (supérieur à 11 % des effectifs I.D.E. dans plusieurs C.H.U.205). Ainsi, selon Thierry Amouroux, président du S.N.P.I.206,

«l’absentéisme est la traduction des difficultés au quotidien que traversent le personnel infirmier ».

- La troisième est que l’attractivité de la profession infirmière est actuellement en berne : près de 16 % des I.D.E. ont songé à un abandon définitif de leur activité et la durée moyenne de cotisation à la C.N.R.A.C.L.207 est de seulement 28 ans, au lieu des 37,5 réglementaires208. Ainsi, comme le remarque judicieusement le Professeur Elie Azoulay, « le manque de personnel est une réalité. Mais il y a une vraie difficulté aujourd'hui à recruter des infirmières et globalement du personnel paramédical, qui est en général très dévoué, et qui fait un travail pénible. Il faut revaloriser ce métier d'infirmières et proposer des vrais plans de carrière»209.

A travers ces différents points, Françoise Acker en fait d’ailleurs une belle synthèse : « lorsque les effectifs de personnels soignants sont trop justes (en raison d’une pénurie ou d’un resserrement voulu) le temps disponible pour mener à bien l’ensemble des tâches renforce la contrainte à travailler plus vite. Ce cadre temporel conduit à une redistribution de l’importance relative de certains types de travail, importance relative en terme de temps consacré à chacun d’eux et en termes de modes d’engagement des

204 HOLUE C., 2008 : l’hôpital en crise voit venir la réforme, [en ligne], 30 Décembre 2008, [31 Mars2009], article disponible sur http://www.espacegeneraliste.info.

205 LABAT M., Les dix points noirs des hôpitaux français, [en ligne], 23 Octobre 2008, [31 Mars 2009], article disponible sur http://www.bakchich.info.

206 S.N.P.I. : Syndicat National du Personnel Infirmier.

207 C.N.R.A.C.L. : Caisse Nationale de Retraites des Agents des Collectivités Locales.

208 ESTRYN-BEHAR M., LE NEZET O., NEGRI J.F., CANTET-BAILLY N., BEN-BRICK E., CAILLARD J.F., Op. Cit. p. 108.

209 PEREZ M., Op. Cit. p. 108.

Florian Massacrier prémédication anxiolytique dans un timing adéquat, ce qui compromettra évidemment son efficacité.