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3 L’application difficile des règles d’accessibilité

3.2 Des contraintes techniques, financières, sociales et environnementales

La mise en accessibilité peut aussi être contrainte par l’aspect technique En effet, si l’accessibilité est avant tout une norme réglementaire, les acteurs de cette mise en accessibilité ne sont pas toujours formés. Ce manque de formation influe alors sur l’interprétation des acteurs réalisant la mise en accessibilité, et la satisfaction des travaux. Très souvent ils ne sont pas satisfaisants car il y a un décalage entre ce qui doit être fait et donné par le plan au départ et ce qui est fait à l’arrivée après la réalisation des travaux. « Ça

La mise en accessibilité des ERP : quelle intégration dans la chaîne du déplacement, l’accessibilité de la ville et à la ville ?

Pauline ESCARMANT

part d’architectes et d’assembleurs de mobilier qui font n’importe quoi » (Enquêté n°4,

2015).

Dans ce sens, la réflexion paraît indispensable pour éviter ce type de situation. En effet, la réflexion vis-à-vis de l’accessibilité passe dans un premier temps par la compréhension de la loi puis par son interprétation dans son application lors des travaux de mise en accessibilité.

« La difficulté c’est le manque de compréhension de cette règlementation […] je

pense pas que la loi soit trop compliquée, je pense que la prise en compte du handicap est compliquée, la prise en compte du handicap dans la construction c’est encore plus compliquée parce qu’il y a à la fois le handicap lui-même et la construction des règles. Donc tout ça il faut, il faut l’intégrer à la règlementation donc par nature c’est forcément compliqué mais comme tout ce qui est, comme tout ce qui est accessibilité c’est compliquée ». (Enquêté n°1, 2015)

Si la mise aux normes « handicaps » est dite compliquée, celle-ci n’a pas toujours été prise en compte depuis 1975. Si cette mise aux normes avait été appliquée dès 1975, aujourd’hui le constat serait différent. Les travaux de mise en accessibilité dans l’existant seraient moins importants, et ça coûterait moins cher.

La mise en accessibilité de la chaîne du déplacement est aujourd’hui une priorité mais au sein de cette chaîne du déplacement il y a un manque de priorités, « c’est la priorisation qu’on a

du mal à faire » (Enquêté n°2, 2015)

D’un point de vue financier, l’accessibilité coûte cher, c’est une réalité qui a largement été démontré. En effet, lors de l’enquête qualitative les enquêtés ont tous partagé cet avis. Les travaux de mise en accessibilité « c’est compliqué, c’est long, c’est cher ». (Enquêté n°4, 2015) L’aspect économique est réel, c’est généralement le premier frein évoqué. Un enquêté a même dit « si on avait des caisses ouvertes ça serait facile ». (Enquêté n°2, 2015)

Le coût des travaux peut donc être une contrainte mais lorsque cette contrainte est trop élevée des dérogations sont prévues. (Enquêté n°1, 2015)

Par ailleurs, si tout était accessible cela coûterait moins cher à la société dans la mesure où les personnes handicapées ont aujourd’hui besoin d’auxiliaires de vie parce qu’elles ne sont pas

En outre, les représentants d’associations de personnes handicapées interrogés ont chacun évoqué la pression des lobbies subie par le gouvernement. (Enquêtés n°3 et 4, 2015)

L’accessibilité peut aussi être contrainte par l’environnement qui l’entoure. Tout d’abord au niveau physique, la topographie des lieux joue un rôle considérable dans la possibilité de rendre accessible un ou plusieurs éléments de la chaîne du déplacement. « Il y a

le terrain naturel et c’est ridicule de penser que tout est accessible ce n’est pas vrai. »

(Enquêtés n°3, 2015) Cependant, il est important de noter que cette contrainte ne concerne pas tous les types de handicaps mais essentiellement le handicap moteur caractérisé comme le handicap le plus contraignant à traiter techniquement et économiquement.

A cela se rajoute l’encombrement des trottoirs et plus généralement de la voirie et des espaces publics. Partager l’espace public en fonction des usages est primordial. Cependant, les usages ne doivent pas se contraindre entre eux et devenir un obstacle dans l’idée d’assurer une qualité d’usage, un confort et une sécurité à tous. Cet encombrement est aussi dû aux incivilités de la population.

Par ailleurs, l’idée du beau et de l’esthétique est ici vu comme un frein à l’application des normes « handicaps ». Certains acteurs de la mise en accessibilité font n’importe quoi « parce

que ça leur fait plaisir au niveau esthétique » (Enquêté n°4, 2015), « c’est plus jolie comme ça alors ce n’est pas mon problème. ». (Enquêtés n°3, 2015)Toujours dans cette idée

d’esthétique, il est important de noter que la conservation du patrimoine et donc l’architecture peut contraindre la mise en accessibilité pour des raisons techniques ou esthétiques. Des dérogations peuvent alors être données pour les ERP suivants :

ERP classé au titre des monuments historiques ou inscrit en application du code du patrimoine

Sur un bâtiment situé dans un secteur sauvegardé

Sur un bâtiment identifié comme à protéger, mettre en valeur ou requalifier pour un motif culturel, historique, architectural ou écologique

ERP situé aux abords et dans le champ de visibilité d’un monument historique classé ou inscrit, ou dans une aire de mise en valeur de l’architecture et du patrimoine, ou dans un secteur sauvegardé

La mise en accessibilité des ERP : quelle intégration dans la chaîne du déplacement, l’accessibilité de la ville et à la ville ?

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Au niveau social, un manque de volonté est à noter. En effet, toutes les personnes ayant un lien de près ou de loin avec la mise en accessibilité ne sont pas tous réellement engagées.

« Y’a un problème aussi de non prise en compte, c’est une façon de dégager en touche

pour dire on ne veut pas le faire. On ne veut pas ou on ne peut pas. Vous voyez ce que je veux dire, quelle est la réalité ?, on ne peut pas ou on ne veut pas ? Est ce qu’on se donne les moyens ou est ce qu’on se les donne pas ? ». (Enquêté n°4, 2015)

Si les moyens alloués dans le cadre d’une mise en accessibilité sont importants, la volonté ne doit pas être négligée. Ce manque de volonté, d’intérêt et d’investissement de la part des acteurs pourra être une contrainte au moment de chercher des solutions pour rendre accessible un ou des éléments de la chaîne du déplacement. A cela, peut se rajouter la prise en compte du handicap qui sera moindre dans certaines situations. De plus, un point important est encore présent dans nos sociétés, c’est l’idée que « l’accueil d’une « personne différente » peut faire

peur ». (Enquêtés n°3, 2015)

Si l’accessibilité s’apparente à un fonctionnement systémique, la prise en compte de l’accessibilité dans sa globalité est encore difficile aujourd’hui que ça soit pour la prise en compte de tous les types de handicaps ou l’idée de la chaîne du déplacement.

Pour faciliter l’application règlementaire de l’accessibilité au regard des contraintes évoquées précédemment, des dérogations sont aujourd’hui possibles dans les cas suivants :

En cas d'impossibilité technique résultant de l'environnement du bâtiment En cas de contraintes liées à la conservation du patrimoine architectural

Lorsqu’il y a une disproportion manifeste entre les améliorations apportées d’une part, et leurs coûts, leurs effets sur l’usage du bâtiment ou la viabilité de l’exploitation de l’établissement

Lorsque les copropriétaires d’un bâtiment à usage principal d’habitation s’opposent à la réalisation des travaux de mise en accessibilité

Grâce au stage, j’ai pu voir de façon détaillée des exemples de dérogation car j’ai dû réaliser un document synthétique des dérogations demandées pour la mise en accessibilité des lycées

passer d’une approche théorique à une approche pratique. L’approche théorique étant présentée dans cette partie par la ou les définitions de l’accessibilité, ses enjeux, son approche systémique, et ses difficultés d’application.

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DEUXIEME PARTIE : LA MISE EN ACCESSIBILITE DES ERP A