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Densification de la silice par cellule à enclumes de diamants

Chapitre IV : Déformation plastique de la silice densifiée par cellule à enclumes de

IV.1 Densification de la silice par cellule à enclumes de diamants

Afin de suivre l’évolution de la déformation plastique de la silice sous pression, nous avons réalisé un cycle de compression/décompression en cellule à enclumes de diamants à température ambiante entre 0 et 26,2 GPa (tableau IV.1). La mesure d’inhomogénéité ΔPmax a été estimée à partir du signal des différents rubis introduits dans la cellule à enclume de diamant. Les spectres Raman ont été enregistrés par le spectromètre Thermo-Fischer Scientifique (DXR), avec la raie d’excitation à 532 nm. Le signal a été enregistré avec un temps d’accumulations de 20 minutes. L’objectif de grossissement X50 a été utilisé.

Pmax (GPa) 9,8 12 13,6 14,6 15,5 18,1 26,2

ΔPmax (GPa) 0 0,1 0,1 0,3 0,5 0,6 1,0

Tableau IV.1 : Différentes pressions maximales atteintes Pmax et inhomogénéité ΔPmax. IV.1.1 Résultats expérimentaux

IV.1.1.1 Spectres Raman ex-situ du verre de silice

La figure IV.1 présente les spectres Raman ex-situ obtenus suite à un cycle de compression-décompression, après retour à pression atmosphérique. Les spectres Raman du verre de silice changent avec la pression maximale atteinte (Pmax), lorsqu’ on dépasse la limite élastique (9 GPa). Le sommet de la bande principale à 440 cm-1 pour le verre non densifié se déplace vers les hautes fréquences avec l'augmentation de Pmax. Quand Pmax se situe entre 12 et 14,6 GPa, la bande principale et la bande D1, initialement présente à 490 cm-1, fusionnent. La forme de la bande à 800 cm-1 change progressivement, sa largeur augmente avec Pmax. Néanmoins, le changement le plus important du spectre Raman est l'augmentation de l'intensité de la bande D2, qui se déplace légèrement vers les plus hautes fréquences après densification.

58 200 400 600 800 1000 0 10 20 30 40 50 60 70 26.2 18.1 15.5 14.6 13.6 12.0 9.8 0

In

te

n

sité

[U.A]

Déplacement Raman (cm

-1

)

P

max

(GPa)

Figure IV.1: Spectres Raman ex-situ de la silice non densifiée et de la silice densifiée suite à une compression à différentes pressions maximales atteintes Pmax.

IV.1.1.2 Courbe de calibration Raman – densité

Dans le but de déterminer précisément à partir d’un spectre Raman d’un verre de silice densifiée sa pression maximale atteinte, nous avons cherché une méthode pour obtenir la meilleure courbe d’étalonnage possible. Le maximum de la bande principale pourrait être utilisé pour cette calibration mais la détermination de la position maximale de la bande principale présente une incertitude de 5 cm-1. De plus, cette incertitude est amplifiée par la fusion entre la bande principale et la bande D1 à partir de 15 GPa. Nous avons choisi de déterminer un paramètre dont la valeur peut être déterminée avec un maximum de précision et qui varie d’une façon linéaire avec la pression maximale atteinte [Deschamps 2011]. Ici, nous avons utilisé le paramètre σ déterminé prenant en compte la bande principale et les raies D1 et D2 et pour lequel la détermination est reproductible. Tout d’abord une ligne de base est soustraite entre la fréquence ω1 (fréquence la plus basse de la bande principale) et la fréquence ω2 (fréquence la plus élevée de la bande D2)(Fig. IV.2). Nous observons que ces deux fréquences se déplacent vers les hautes fréquences pendant la densification. Le paramètre Raman σ (cm-1) est ensuite obtenu par l'intégration de ce large domaine de fréquence. A partir des courbes d’intégrales, nous associons à chaque pression maximale atteinte la valeur du nombre d’onde qui définit la moitié de l’intégrale c.-à-d. le nombre

59 d’onde qui coupe l’aire de la bande concernée en deux parties égales. La valeur moyenne est définie par l’équation suivante :

׬ ۷܀܉ܕ܉ܖሺ૑ሻ܌૑૑૚ ׬૑૚૑૛۷܀܉ܕ܉ܖሺ૑ሻ܌૑

ൌ 

(IV.1)

Ce paramètre montre une bonne reproductibilité des résultats et l'incertitude est estimée à 3 cm-1 [Deschamps 2013].

200 400 600 800

300 400 500 600 700

Spectre Raman avant l'intégration

Spectre Raman brut (Pmax = 15.5 GPa)

Z

1

Z

2 Ligne de base

Déplacement Raman (cm

-1

)

1 0.5 0

V

(cm-1)

Figure IV.2 : Différentes étapes de détermination du paramètre σ. Le spectre à Pmax = 15,5 GPa est utilisé comme exemple (spectre en pointillé noir). Ce spectre est soustrait de sa ligne de base (en bleu) et délimité par ω1 et ω2 pour donner le spectre

avant intégration (en rouge). La partie en haut à droite montre l’intégration du spectre rouge et la détermination de σ, la fréquence à la moitié de l’intégrale

[Deschamps 2013].

La figure IV.3 montre l'évolution de σ en fonction de la pression maximale atteinte. Les données ont été modélisées selon l'équation (IV.2) d’une sigmoïde :

ો ൌ 

૙ିોܕ܉ܠ ૚ାቆ ۾ܕ܉ܠ  ۾ܕ܉ܠ૚Ȁ૛ 

൅ો

ܕ܉ܠ

(IV.2)

avec σmax- σ0 = 102,7 cm-1, Pmax ½ = 14,23 GPa et γ= 8,19.

Les paramètres σ0 et σmax correspondent respectivement au verre de silice non densifiée et à celui ayant une densification maximale. Pmax ½ est la pression correspondant à 50% de σmax- σ0 et γ est un paramètre sans dimension.

60 0 4 8 12 16 20 24 420 440 460 480 500 520 0 4 8 12 16 20 V

(c

m

-1

)

P

max

(GPa)

Tau

x de

de

nsific

ation

'U U

(%)

Figure IV.3: Paramètre σ en fonction de la pression maximale atteinte (carrés noirs). La courbe obtenue à partir des points expérimentaux est présentée en noir (équation 2). La courbe en pointillé rouge représente la densification permanente par rapport à Pmax [Rouxel

2008].

Nous avons également reporté (Fig. IV.3) la courbe obtenue par Rouxel et al [Rouxel 2008] qui relie le taux de densification permanente de la silice et la pression maximale atteinte. Rouxel et al ont utilisé des échantillons macroscopiques densifiées avec un appareillage multi-enclumes à température ambiante. Ils ont montré qu’une saturation de densification à 20 GPa (21%) est atteinte. La relation qui relie Pmax et Δρ/ρ est donnée ci-dessous :

ઢૉ

ൌ  ቀ

ઢૉ

ܕ܉ܠ

૚ା઺܍ܠܘሾି۾ܕ܉ܠ૚Ȁ૛ ۾૙ ቀોషોܕ܉ܠો૙షો ϒ

െ

૚ା઺

ቍ

(IV.3)

avec (Δρ/ρ) max = 21%, β = 5000 et P0 = 1,67 GPa (β et P0 sont les paramètres ajustées de la figure IV.3). Les autres paramètres sont donnés dans l’équation IV.2.

L’équation (IV.2) relie σ et Pmax. La combinaison de cette équation avec l’équation IV.3 (qui relie Pmax avec Δρ/ρ) donne la relation entre le taux de densification Δρ/ρ et le paramètre Raman σ. L’évolution de ce dernier peut être approchée plus simplement par la relation linéaire suivante (4) : ઢૉ

ൌ ቀ

૙ିો ોିોܕ܉ܠ

ቁቀ

ઢૉ

ܕ܉ܠ

(IV.4)

61 Nous avons calculée Δρ/ρ (%) à partir du paramètre σ déterminé sur les spectres Raman des différents verres de SiO2 densifiées à des différentes Pmax. L’évolution de la densification permanente Δρ/ρ (%) en fonction de σ (cm-1) est donnée sur la figure IV.4. les points sur la figure IV.4 correspondants aux résultats expérimentaux.

420 440 460 480 500 520 0 4 8 12 16 20 densif icat ion rat io 'U / U (%) V (cm-1)

Figure IV.4 : Pourcentage de densification Δρ/ρ (%) en fonction de σ (cm-1).

IV.1.2 Discussion et interprétation IV.1.2.1 Evolution de la structure

La figure IV.1 montre que la bande principale se décale vers les hautes fréquences, au point de se confondre avec la bande D1 quand la pression maximale atteinte augmente. Ce décalage peut être interprété par une diminution et un affinement de la distribution des angles Si-O-Si. Cette diminution est confirmée par les simulations réalisées par Huang et al [Huang 2004]. Avec l’augmentation de la pression, la bande D2 se décale vers les hautes fréquences. De plus, on constate que son intensité augmente par rapport à l’intensité des autres bandes. Ce phénomène peut être interprété comme une augmentation de la proportion des anneaux de petite taille au sein de la population des anneaux. Cette partie sera discutée et développée dans la partie IV.3 de ce chapitre.

IV.1.2.2 Importance du paramètre σ

Les résultats de la figure IV.4 montrent que le paramètre σ qui prend en compte l’ensemble de la bande principale et des bandes D1 et D2 est le plus précis, il est en accord avec les résultats des Rouxel et al [Rouxel 2008]. Considérons la bande principale, sa position est extrêmement

62 sensible à la densité de l’échantillon. Elle a été déjà utilisée pour réaliser un suivi de la température fictive d’échantillons de silices amorphes [Champagnon 2000, 2002]. En revanche, elle présente deux inconvénients : le premier c’est qu’elle est difficile de déconvoluer de la bande D1 lorsque la densité devient élevée. De plus, il a été démontré que la position de la bande principale est très sensible au chargement élastique [Mickalske 1988]. Or nous observons toujours au voisinage d’un indent un phénomène de contraintes résiduelles élastiques [Zeng 1995] induites par des déformations plastiques. Les positions des bandes D1

et D2 sont associées à une modification structurale irréversible des échantillons lors de leur densification. Ainsi, leurs positions sont indépendantes de l’intensité des déformations élastiques [Perriot 2005]. En conclusion, Il nous semble plus intéressant d’utiliser le paramètre σ puisque ce dernier intègre à la fois de la bande principale, la bande D1 et de la bande D2 et montre une variation sensible à la densité.

IV.1.2.3 Importance de la courbe de calibration (Raman-densité)

Afin de discuter le domaine de validité de cette courbe de calibration qui montre l’évolution du paramètre σ (cm-1) en fonction de taux de densification (Δρ/ρ), nous devons considérer le fait que ces expériences ont été réalisées à température ambiante. Puisque la spectroscopie Raman reflète les changements structuraux, la courbe de calibration ne pourrait donc être utilisée que lorsque la compression du verre de silice se fait à température ambiante. De plus, elle peut être utilisée afin de déterminer la densification de SiO2 après une compression quasi-hydrostatique ou non-quasi-hydrostatique dans une cellule haute pression où le transmetteur de la pression est un solide, (NaCl ou KBr [Deschamps 2009c]). La courbe d’étalonnage Raman – densité peut être utilisée, comme une première approximation pour la détermination de la densité locale de la déformation plastique du verre de silice sous indentation, par ailleurs, est ce qu’elle est utile pour la détermination de la densité du verre de silice densifié sous hautes pressions et hautes températures ?

Pour cela, nous comparons nos échantillons de silice densifiés par cellule à enclumes de diamants à température ambiante avec les échantillons de presse « Belt », décrits dans le chapitre précédent. A partir de nos résultats du chapitre III (tableau III.1 et Fig. III.3), nous avons calculé le paramètre σ moyen (cm-1) pour chaque échantillon densifié par presse « Belt » (même calcul que dans la première partie IV.1.1.2). Nous avons ensuite déterminé le pourcentage de densification (%) par l’équation (IV.4), avec σmax – σ0 = 52 cm-1, (σmax etσ0

63 de l’échantillon non densifiée). (Δρ/ρ) max = 16.5 % (valeur le plus grand obtenu par la densification par « Belt »). Les valeurs sont présentées dans le tableau IV.2.

Echantillons densifiées par presse « Belt »

σ moyenne (cm-1) calculé Δρ/ρ macroscopique (%) « Belt » Δρ/ρ calculé par la relation établie (équation IV.4) (%)

Silice non densifiée 419 ± 1 0 0

T= 444°C, P= 4 GPa 435± 2 4,5 5,2

T= 444°C, P= 5 GPa 455± 2 9,2 11,3

T= 573°C, P= 4 GPa 456± 2 9,5 11,8

T=720°C, P= 5 GPa 471± 2 15,5 16,5

T= 1025°C, P= 5 GPa 467± 2 16,5 15,1

Tableau IV.2 : Valeurs de σ (cm-1) calculé pour les échantillons densifiés par presse « Belt »,

Δρ/ρ (%) du « Belt » et Δρ/ρ calculé par la relation (4) établie pour la cellule à enclume de diamant (%).

Après ces calculs nous avons tracé l'évolution de Δρ/ρ de la densité macroscopique en « Belt » en fonction de Δρ/ρ calculé par la relation établie par la cellule à enclume de diamant d’équation 4 (Fig. IV.5). L’approximation linéaire de ces points montre une droite (Y= 0,9362 X).

Figure IV.5: Pourcentage de densification Δρ/ρ « Belt » (%) en fonction de Δρ/ρ (%) calculé par la relation établie par la relation (4).

64 Il nous semble important, avant de discuter sur ces résultats, de rappeler que ces expériences ont été conduites à différents pressions et températures. L’influence de la température ne peut pas être observée dans la cellule à enclume de diamant, puisque les expériences ont été réalisées à température ambiante. La figure IV.5 montre une approximation des points expérimentaux. La pente de la droite obtenue est légèrement inférieure à la pente qui correspondrait à une corrélation parfaite entre les deux méthodes de détermination (pente = 1). Nous observons toute fois une forte corrélation (R2= 0,9489) de la droite de régression établit. En revanche les valeurs calculées tendent à s’éloigner des valeurs correspondant à la