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Développées brusquement, le plus souvent sans que le malade lui-même se soit aperçu de leur accroissement, elles crèvent

souvent à son insu. Elles cèdent d'ordinaire après quelques heures aux mouvements de déglutition. Elles peuventcepen¬

dant persister deuxou troisjours, mais serompent toujours spontanément.

La lésion seprésente alors sous un aspect tout différent.

On constate tout d'abord, au milieu de la muqueuse

congés-— 24

tionnée et au siège même préalablement occupé parla bulle,

une petite membrane opaline, ridée, en tout semblable à celle qui succède à une phlyctène qui s'est rompue. Cette membrane se rétracte bientôtpour devenir une plaque blan¬

cheou jaunâtre, quelquefois grisâtre, d'aspect fibrineux,et régulièrement appliquée sur la muqueuse; elle présente

une forme arrondie et des contours bien nets. La partie cen¬

trale de cette plaque exsudative offre souvent des irrégula¬

ritésplus ou moins frangées, indice de la rupture de la bulle préexistante. Tel a été

l'aspect

de la plupart des éléments de l'éruption dans les deux cas suivants.

ObservationVI

(Personnelle).

(Recueillie dansle Service de M. le Prof. Moure.)

G. D..., dix-sept ans, estunejeune fille maigre,un peu anémiée,très myope. Sa mère est en bonne santé. Son père souffre de la poitrine depuis cinq anset a une hémiplégie gauche.

La malade a eu dans son enfance deuxatteintes de faux croup. Il y a quatre ans elle eut une angine quis'accompagna de fièvre etqui obligea

la malade àgarder le lit pendanthuitjours.

Ellese présente à la consultation de l'hôpital Saint-André, le 12 no¬

vembre 1901, se plaignant de douleurs dans l'oreille droite et disant avoir eu deuxjours auparavantune sensation de brûlure au voile du palais.

La malade, qui aégalement une déviation àgauche de la cloison car¬

tilagineuse du nez, présente de l'otite moyenne sèche double avec tym¬

pansdéprimés et synéchiesau centre.

A l'examen de lagorgeontrouve, symétriquement placées, à 1 cen¬

timètre environ de chaque côté de la ligne médianeet à l'union du voile du palais avec la voûte, deux petites plaques de la dimension d'une lentille, à bords nets, grisâtres, se détachant sur le restedelà muqueuse qui estrougeetenflammée. Un peudouloureusesau toucher,cesplaques n'offrent pas d'infiltration profonde : elles sont souples sur les tissus sous-jacents. Ellesne présentent pas de perte de substance véritable et

ne sont pas en sailliesul' la muqueuse voisine. La partie centrale de chacuned'elles présente une déchirure irrégulière, etelles donnentdans leur ensemble l'impressionde deux bulles ayant versé leur contenu dans la bouche.

On trouve également sur le pilier antérieur droit une vésicule aber¬

rante de la grosseur d'un grain de chènevis, recouverte d'un enduit blanchâtre. Les amygdales ne présententpas traced'inflammation : rien nonplus à la paroi postérieure du pharynx. Pas de tuméfaction gan¬

glionnaire.

Hier, 11 novembre, la malade a eu une céphalée continue qui a dis¬

paru ce matin. Elle ditne pas avoireu de fièvre. Actuellement elle n'a pas d'élévation de température et présente seulement un léger état saburral des premières voiesdigestives. L'appétitestconservé, mais la mastication etla déglutition sont douloureuses.

On prescrit le traitement alcalin et un gargarisme émollient avec

borax et bromure depotassium.

Le 14 novembre, la malade présente toujours deux petites macules blanchâtres. L'inflammation

périphérique

du voilea

beaucoup

diminué.

Le 24, les macules n'ont pas complètement disparu : elles se pré¬

sententencore sous forme de deux petites plaques blanchâtres. La vési¬

culeconstatée sur le pilierdroit a totalement disparu. La malade n'a ressenti aucune nouvelle douleur à la gorge. Elle a depuis cinq jours

unepetite éruption de sept à huit vésicules

d'herpès,

aujourd'hui en voiede

dessiccation,

surle rebord dela lèvre inférieure.

Le 9 décembre, il nereste plus à la place des macules qu'une très

légère hyperhémie de la muqueuse sous forme de deux petites taches rouges. La muqueuse n'est pas

hypertrophiée

et ne présente pas de cicatrice. Pasde nouvelleéruption.

Observation VII (Inédite].

(Recueillie à la Clinique de M. le Prof. Moure.)

L..., cinquante-huit ans, portefaix, vient àlaconsultation de l'hôpital

Saint-André,

le 26avril 1901, accusant unegêne de la déglutitioncons¬

tatéepar le malade, la veille, à son lever.

L'examen de la bouche permetde constater sur la moitié droite du voile du palais, non loin de la luette, une plaque blanchâtre, d'aspect laiteux. Cet exsudât présente une forme assez régulièrement ovalaire, quoique un peu.déchiquetéesur ses bords à sa partie antérieure. Son grand diamètre, situé d'avant en arrière, mesure 1 centimètreenviron et son diamètre transversal. 5 à 0 millimètres. Cette plaque se détache nettementsur la muqueuse voisine qui l'entoure d'une aréole congestive.

Lelarynx ne présente pas d'éruption, maisun simple état catarrhal.

Dans ces deuxcas,lediagnostic de pemphigus aiguaété porté,et cette foiscomme lapremière onprescrit des gargarisme? émollients auborax et aubromure de potassium.

Au lieu de cette membrane blanchâtre, l'emplacement de la bulle, lorsqu'elle a été

hémorragique,

reste souvent indi¬

qué par une pellicule brune plus ou moins

étendue, pré¬

sentant parfois dans son ensemble

l'aspect

d'un large sac rompu, commel'aconstaté Law dans l'observation suivante:

Observation VIII (M. T. Law)

(Compterendu de la SociétélaryngologiquedeLondres;séance du 11 novem¬

bre 1896. Revue delaryngologie, 6 mars 1897.)

Un cas d'hématome du palais ?

La malade vint, le 28 octobre, et sur la recommandation de sonmé¬

decin, consulter l'auteurpour de violentes douleurs au côté gauche de

la bouche etde la gorge, de la difficultéet des douleursà ladéglutition,

et de la tuméfaction en arrière et au-dessous de l'angle de la mâchoire du même côté.

Elleracontait que, la veille au soir, en mangeant du rôti, quelque

chosecassa brusquement dans sa bouche et qu'elle rendit immédiate¬

mentun groscaillot de sang d'un aspectparticulier et, peu après, envi¬

ron un gobelet de sang vermeilet de salive. Pas de toux ni de vomisse¬

ments. Avant l'accident la malade n'avait éprouvé ni douleurs, ni

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sécheresse, ni gêne, nitoute autre sensation désagréable, soit dans la bouche, soit dans lagorge.

Al'examen,on aperçutunlarge sac,forméparl'évidement d'une pus¬

tule. s'étendant dupalais dur au voile,et affectant la forme d'une poire

à grosse extrémité dirigée en avant. Uncertain nombre de petits points

rougessitués au-dessous de l'épithélium/lui donnaient un aspect ecchy-motique, et àunecertaine distance autouronvoyait une vive rougeur.

L'épiglotte était hyperhémiée, maisla muqueuse oro-pharyngée n'offrait

rien d'anormal. Grâce à l'administration de pastilles d'aristol et de cocaïne, et sous l'influence d'un régime approprié, l'état de la malade s'améliorarapidement.

Cette membrane qui succède à la bulle est peu

épaisse

: si on y passe le doigt, elle ne paraît pas en saillie sur la mu¬

queuse voisine. Elle s'enlève facilement, et laisse au-dessous d'elle le chorion de la muqueuse un peu douloureux â la pression, légèrementcongestionné, mais souple et saignant

rarement.

D'une durée de quelques jours, la plaque disparaît peu à peu,laissant après elle une congestion assez marquée de la muqueuse, se traduisantpar unevive rougeur. La muqueuse reprend en une ou deux semaines son aspect normal : elle

se

répare

complètement, sans cicatrice et sans perte de substance.

Lessymptômes fonctionnels se traduisent ordinairement par des troubles de la déglutition, que le malade compare à

une sensation de brûlure. En dehors des mouvements de

déglutition,

lemalade ressent de la gêne, de la sécheresse de la gorge, mais pas de douleur véritable. Le larynx, nous l'avons dit, peut lui-même être le siègede l'éruption, et dans

ce cas les symptômes fonctionnels dépendront de l'empla¬

cement des bulles. Celles-ci reposent-elles sur les cordes vocales? Le timbre de la voix sera modifié de diverses façon

et se traduira par de l'aphonie et de l'enrouement. La mu¬

queuse des cartilages aryténoïdes est-elle au contraire le siège de

l'éruption?

Il peut se faire dans ce cas, comme dans

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-l'observation de Wagnier, un rétrécissement de l'orifice glottique, qui se traduira par de la toux et de la gêne dans les mouvements respiratoires.

Peu ou pas de phénomènes réactionnels, ni de retentisse¬

mentsur l'état général, du moins quand la lésion doit rester localisée à la muqueuse. Il n'y a jamais de tuméfaction gan¬

glionnaire. A peine constate-t-on dans quelques cas un léger

état saburral des premières voies digestives. La fièvre man¬

que le plus souvent. Si cependant nous assistons au début d'un pemphigus qui doit se généraliser, nous trouverons

commed'ordinairelesprodromes de cette affection :

céphalée,

frissons, courbatures, abattementgénéral, et le plussouvent

une élévation de température assez marquée, persistant

jusqu'au

moment où se sera établie l'éruption. Tel fut le début, dans l'observation du docteur Mesnard, que nous rapportons ici :

Observation IX (L. Mesnard)

fGazette hebdomadaire des Sciences médicalesde Bordeaux, 5juillet 1891.) Pemphigus aiguayant débutépar la muqueuse buccale où il a

étélocalisépendant plus de cinq jours.

M. Vid...,vingt-cinq ans, représentant decommerce. Avoue quelques

excès alcooliques. Il présente untremblement alcoolique évident.

Pas d'antécédents morbides héréditaires ou personnels, sauf une

légère bronchite quand il était militaire.

Ledimanche 25 mai, il estpris d'une inflammation de la cavité buc¬

cale, sur laquelle je n'ai que des renseignements insuffisants.

Lelundi, la muqueusebuccale etle pharynxsontexcoriés, nousdit-il,

au point qu'ilne peut avaler qu'à grand'peine du lait ou du bouillon.

Pendant encore deuxjours, il refuse de voirunmédecinetsecontente du repos etde la diète comme touttraitement.

La fièvre est vive lesoir, avec des frissons multiples. Je le vois le jeudi 29. La cavité buccale, le pharynx etla muqueuse intérieure sont excoriés d'unefaçon presqueuniforme. On observepar places, dans la

bouche et le pharynx, un exsudâtconcretpuriforme,et surles lèvres, à l'extérieur,un exsudât plus concret, croûteux par places, et aussi par

places sanguinolent.

Salivation assezabondante; expulsion incessante à cause de la diffi¬

culté de la déglutition. Pouls 110. Température 39,5, le soirvers qua¬

treheures.

Je fus très embarrassépourporter un diagnostic précis. Il n'y avait

pas eu d'intoxication mercurielle ou autre.

On gargarise la bouche avec une infusion de feuilles decoca addition¬

née de borate de soude. Pommade avec vaseline et salol pour les lèvres.

On netrouveaucune éruption nullepart.

Le maladeprend 1gr. 50 d'acide salicyliqueet dulait.

29 mai. Quelques tachesrouges aux doigts, un peu de picotementàce niveau. On continue l'acidesalicylique, bien quela fièvre ait baissé. Le

mêmegargarismeestcontinué.

30 mai. Aux mains,plusieurs bulles biennettes de pemphigus. Même traitement. Température au-dessus de 38o.

L'éruption de pemphigusse continue aux paumes des mains, aux

doigts,aux dos des mains; les avant-bras n'enprésentent pas.

lfcrjuin. Plus de fièvre, déglutition un peu moins pénible.

7juin. Déglutition assezfacile. Quelques bulles de pemphigus gué¬

ries aux mains, d'autres intactes. Appétit bon. Pas defièvre.

9juin. Le malade mange; muqueuse buccale et lèvres normales. Aux mains, macules indiquant les cicatrices des bulles. L'extrémité d'un doigt cependant est recouverte d'une bulleà demiflétrie, pleine d'une sérosité louche.

10juin. Le maladese considérantcomme guéri reprend son travail.

Labulle de pemphigus observée hier est flétrie, à peuprès desséchée.

Aujourd'hui, 1er juillet, le maladeesten parfait étatde santé.

Marche. Pronostic . —La durée del'affection estengénéral

très courte. La bulle persisteau

plus

deux ou trois jours, et

ducinquième au

quinzième

jour toute trace de la macule qui lui succèdea disparu.

L'éruption

cutanée

succède-t-elle à

lalésion des muqueuses ? Nous assistons

à

un

pemphigus

aigu ordinaire, qui se termine

dans les

cas

bénins

en

trois

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ou quatre semaines, après deux ou trois poussées de bulles successives, maisqui peut aussi revêtirdesalluresbeaucoup plus graves; la mort en est la terminaison dans plusieurs observations de Nodet, Pialoux et Saintorens. Une

première

atteinte nedonne pas l'immunité; on a constaté, en effet, la récidive de

l'éruption.

Le pronostic du pemphigus restant localisé aux muqueu¬

ses est des plus bénins. Le trouble apportéà la déglutitionet

aux mouvements respiratoires est passager et ne présente d'ordinaireaucun caractèredegravité. Dans lesformes géné¬

ralisées, la localisation aux muqueusesest unecomplication banale qui cèdesouventde bonne heure; elle peut,

lorsqu'elle

persiste dans les formes graves, influer fâcheusement sur l'étatgénéral en portant obstacle à la nutrition du malade.

Etiologie.

C'est une maladie de tous les âges. L'influence saisonnière ne paraît pas intervenir dans son apparition.

Elle peut sevoir aussi bien chez les individus bien portants que chez les personnes faibles et débilitées. La fatigue et le surmenage semblent agir quelquefois comme cause occa¬

sionnelle.

Diagnostic.

L'apparition brusque de bulles sur lesmu¬

queuses ou la constatation des taches blanches régulière¬

mentarrondiesqui leur succèdent,l'intégritépresqueabsolue de la muqueusevoisine, un trouble modéré dela déglutition

et un retentissement nul ou à peine marqué sur l'état géné¬

ral suffiront dans la grande majorité des cas à établir le diagnostic depemphigusaigu desmuqueuses. Cette affection peut présentercependant quelques analogiesavec un certain nombred'éruptions de la muqueusebuccale et des muqueu¬

ses voisines, et il n'est pas inutile de nous y arrêter un instant.

Nous n'insisterons pas surlesbrûluresqui peuventdonner lieu à des phlyctènes semblables aux bulles de pemphigus.

C'est la première hypothèse qui vient à

l'esprit,

et il faudra l'éliminer tout d'abord en

interrogeant

son malade.

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L'angine erythémateuse simple

survient d'ordinaire au