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Chapitre III : Caractérisation des lignines et des protéines de blé lignines et des protéines de blé

III. Etude et caractérisation des lignines et des protéines de blé

III.1.2. Détermination des masses molaires

Comme discuté au paragraphe I.2.3.1, la détermination de la masse molaire des lignines par chromatographie d’exclusion stérique n’est pas une opération aisée, et de nombreux systèmes (éluant, colonne) existent.121 Les lignines Kraft sont généralement caractérisées en utilisant le THF comme éluant, après une acétylation pour permettre une meilleure solubilisation. Mais cette technique n’est pas appropriée pour les lignosulfonates, qui sont insolubles à la fois dans le THF et dans les réactifs d’acétylation.

Très peu d’exemples sont disponibles dans la littérature où des lignines Kraft et des lignosulfonates sont analysés sur un même appareillage. Dans la mesure où celui-ci conditionne fortement les résultats obtenus, il est préférable de pouvoir tester toutes les lignines dans les mêmes conditions. Nous nous sommes donc appuyés sur les travaux de Ringena et al.124 en utilisant le DMAc/LiCl comme éluant. La calibration a été effectuée à l’aide d’étalons de polystyrènes.

La Figure III.4 présente les distributions de masses des lignines utilisées au cours de cette étude. Les lignosulfonates présentent une distribution grossièrement bimodale, avec un premier maximum autour de 1 600 g.mol-1 et un second vers 10 000 g.mol-1. Le premier pic est plus marqué pour les lignosulfonates de calcium et d’ammonium. Ce pic peut être lié à la fois à la présence de composés résiduels de faibles masses, notamment des résidus d’hémicelluloses, et à l’existence de fractions de lignosulfonates de faibles masses molaires.155 Les lignosulfonates d’ammonium sont ceux qui possèdent le plus de polymères de haute masse, comme en témoigne la longue trainée vers

100 000 g.mol-1. Les différences entre les différents lignosulfonates peuvent provenir de variations dans les conditions de cuissons appliquées par le fournisseur entre les différents lots.

Figure III.4 : Distributions de masses des lignines Kraft et Kraft sulfonée (a) et des lignosulfonates (b). Détection par absorption UV à 280 nm.

Les valeurs des masses molaires moyennes sont consignées dans le Tableau III.1.Les masses molaires moyennes comme la polydispersité sont systématiquement plus élevées pour les lignosulfonates que pour les lignines Kraft et Kraft sulfonée. Ceci provient essentiellement du procédé d’extraction utilisé, qui dégrade moins la lignine que le procédé Kraft. Les valeurs obtenues pour les lignosulfonates sont relativement élevées par rapport à certaines autres reportées dans la littérature,121,124 mais du même ordre de grandeur que celles obtenues par Fredheim et al.127 Plusieurs auteurs reportent également des valeurs nettement inférieures pour de la lignine Kraft.121,123,159,167 Les écarts peuvent provenir des différences dans les systèmes utilisés, des étalons utilisés pour la calibration, ou encore des méthodes d’intégration des chromatogrammes.121 Il n’est pas non plus impossible que des fragments d’hémicelluloses, même présents en faibles quantités, puissent fausser les valeurs mesurées, en augmentant la masse molaire apparente. Néanmoins, ces valeurs ayant toutes été obtenues dans des conditions identiques, elles permettent de comparer de manière fiable les différents échantillons de lignine.

Lignine M

n

(g.mol

-1

) M

w

(g.mol

-1

) M

w

/ M

n

KL 10 200 22 600 2,16

SKL 13 600 35 900 2,64

NH4-LS 20 300 76 500 3,77

Ca-LS 14 000 58 100 4,15

Na-LS 14 700 50 800 3,46

Tableau III.1 : Masses molaires moyennes et indice de polydispersité des lignines étudiées

Les lignosulfonates d’ammonium ont été fractionnés selon deux méthodes. Les distributions de masses correspondantes sont présentées sur la Figure III.5. L’ultrafiltration permet d’obtenir une séparation nette entre les différentes fractions. Les fractions séparées par deux membranes (UF 1 – 10 kDa et UF 10 – 30 kDa) présentent des distributions de masse parfaitement symétriques. La fraction de plus faible masse (UF < 1 kDa) montre un profil plus irrégulier. Les indices de polydispersité sont considérablement réduits après l’ultrafiltration (de 1,24 à 1,92 selon les fractions contre 3,77 pour la lignine initiale), ce qui confirme bien son intérêt pour la séparation des lignosulfonates. Les masses molaires moyennes, présentées dans le Tableau III.2, sont relativement

éloignées des seuils de coupure théoriques des membranes. Cet écart, déjà constaté dans la littérature,155,157,158 est lié aux différences de structure entre les lignosulfonates et les protéines utilisées pour la calibration des membranes.148 Comme précédemment, les masses molaires moyennes calculées ici sont relativement élevées, comparées à celles obtenues par d’autres auteurs après ultrafiltration de liqueur sulfite155 ou de lignosulfonates.157,158

Figure III.5 : Distributions de masses des fractions de NH4-LS séparées par UF (a) et par solubilité dans l'éthanol (b). Détection par absorption UV à 280 nm.

La séparation par solubilité dans l’éthanol est moins évidente. Les fractions solubles dans l’éthanol à 90° et 85° présentent comme attendu les masses molaires les plus faibles, inférieures à celle de la lignine initiale. Leur polydispersité est également fortement réduite. En revanche, les fractions solubles dans l’éthanol à 80° et 75° et la fraction insoluble ont des distributions de masse relativement similaires, avec une polydispersité importante, voisine ou même supérieure à celle de la lignine initiale. Le premier pic, visible sur la lignine initiale autour de 1 600 g.mol-1, disparait progressivement lorsque la teneur en éthanol diminue, validant tout de même cette méthode de séparation. Les distributions de masse de la fraction soluble dans l’éthanol à 75° et de la fraction insoluble présentent une trainée importante pour les très hautes masses molaires. Les valeurs de Mn

et Mw témoignent toutefois de la possibilité de fractionner les lignosulfonates selon leur solubilité dans l’éthanol, puisque qu’une diminution de la concentration en éthanol induit une hausse constante des masses molaires moyennes (Tableau III.2).

Les distributions de masses des fractions de lignine Kraft séparées par voie solvant sont visibles sur la Figure III.6. Les fractions possèdent des masses molaires croissantes selon leur solubilité dans le dichlorométhane, le méthanol et un mélange des deux solvants. Le résidu insoluble possède la plus forte masse molaire, comme en témoigne la large trainée pour des masses molaires supérieures à 100 000 g.mol-1 sur sa distribution de masse. Excepté pour le résidu, la polydispersité des fractions est réduite par rapport à celle de la lignine Kraft initiale.

Figure III.6 : Distributions de masses de la lignine Kraft et des fractions séparées par voie solvant. Détection par absorption UV à 280 nm.

Plusieurs exemples de la littérature concernent le fractionnement de lignines Kraft selon des protocoles similaires (paragraphe I.2.4.2). Les masses molaires moyennes calculées ici sont en bon accord avec celles mesurées par Gosselink et al.163 sur la même lignine Kraft (Indulin AT®, Mead Westvaco) pour un fractionnement identique (Tableau III.2). Certains auteurs rapportent cependant des valeurs de masses molaires moyennes inférieures pour différentes lignines Kraft fractionnées.159,161,166