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G. Va confirmé l'aspect de la recherche d'émotion «d'être choqué» que nous avons pu trouvé dans la première étude qualitative :

Je cherche à me procurer des émotions ... comme je vous disais avant dans l'une des questions que vous m'avez posée. J'aime être interloquée et choquée. J'aime ça, je recherche ce qu'il y a de nouveau,. en même temps, j'aime bien quand je connais certains peintres, voir comment ils évoluent et vers quoi ils vont, quelle est leur recherche. Je crois qu'on est un peu tous des artistes. C'est vrai que la principale chose que je recherche, c'est que ces artistes fassent travailler mon imagination et donc c'est la première, la principale chose que je recherche ...

Cette partie a bien montré un désir lié à la curiosité : être surpris, stupéfait ou étonné par les œuvres et voir des choses rarement vue avant.

Désir esthétique

Le désir esthétique que l'on trouve chez l'interviewé est un désir non-intellectuel, relativement simple et primaire:

Le beau, le joli, pour moi ce n'est pas forcément quelque chose d'intellectuel. Donc j'irai voir pour le plaisir des yeux, sans trop réfléchir. Et je vais trouver joli quelque chose qui peut ne pas être apprécié du tout par les critiques du pays ou les critiques internationales. Mais tant que ça ne me pose aucun problème ... Donc je pense que je ne suis pas modelée par le concept mode, moderne et des choses comme ça. Non, je vais voir quelque chose qui est joli, pour le joli, pour le beau ... je ne vois pas trop ce que je peux vous dire d'autre là-dessus.

Le désir esthétique est le désir

«

de voir pour le plaisir des yeux sans trop réfléchir ». C'est aussi le désir d'apprécier la beauté (pour le joli, pour le beau ... ), un désir spontané au lieu de mimétique, un désir qui est soudain et immédiat.

Désir de nouveauté

Mme B. décrit le désir comme

«

un désir de découverte» : découvrir les nouveaux artistes et de nouvelles œuvres :

Lorsque je visite, j'ai plus le désir d'ouverture culturelle que de possession. Posséder une œuvre contemporaine, ça ne m'intéresse pas spécialement. C'est plus pour connaître les œuvres et les démarches des artistes. Je ne suis pas intéressée par l'achat d'une œuvre. Ce qui m'intéresse est vraiment la découverte.

Il y a toujours cette curiosité de connaître, de découvrir. Il y a des noms qui me sont inconnus. Par exemple, lors de la visite de ce musée, il y a certains artistes que je ne connaissais pas. Je ne viendrais pas spécialement visiter un musée pour voir les œuvres des artistes que je connais, je viens également pour découvrir.

Conclusion :

Vis-à-vis des visites d'exposition d'art contemporain, les visiteurs ont des désirs relativement simples. Le désir d'intellectualité est celui le plus manifesté: ce désir d'intellectualité correspond bien à la définition que nous avons appliquée dans la première étude qualitative. Néanmoins, nous avons trouvé d'autres formes de désirs: ceux de socialité, d'évasion, d'émotion et d'esthétique.

Thème 3 : La valeur perçue après la visite:

Valeur perçue après la visite:

Parmi les impressions personnelles ressenties ont émergé, par ordre décroissant, les valeurs perçues suivantes que nous analyserons dans cet ordre :

«valeur de sentiment: calme, amour, addiction, surprise» ; « valeur d'évasion» ; «valeur d'imagination» ; « valeur intellectuelle » ; « valeur nouveauté » ; « valeur sociale» ; «valeur mémorisation» ; « valeur d'identification» ; « valeur esthétique» ; « valeur multi-sensorielle » ; « stimulation» ; « valeur connaissance » ;

« valeur 'simplement regarder'

».

a. Valeur de sentiment

Pour la plupart des interviewés, le sentiment «calme », «apaisement» sont les valeurs perçues les plus fréquemment exprimées après la visite d'exposition d'art contemporain.

J'avoue avoir ressenti une sensation particulière au terme de ma visite. En effet, on a l'impression de baigner dans un climat de calme et de sérénité, semblant être en totale contradiction avec notre monde stressant et la hâte du quotidien ...

Lors de la visite, nous avons ressenti un calme profond et une atmosphère plutôt relaxante malgré la violence et l'aspect choquant de certaines œuvres.

Cette impression personnelle a montré que «l'accès », comme mode d'entrée à la consommation, pourrait créer certaines ambiances, et dans le cas des œuvres d'art contemporain, malgré les aspects « négatifs» de certaines œuvres, la valeur perçue a été celle de « calme» et de « relaxant ».

Je considère que ça (la visite) m'apporte une évolution,. tu regardes ce qui est fait et c'est comme une mise à jour. La plupart du temps, je ressors paisible ou alors révolté. Cela dépend du sens de l'exposition. Mais souvent l'art me sert à me calmer. Des fois, même avec la révolte que je peux ressentir face à un tableau, ça m'aide à retrouver une certaine

«paix intérieure»

et àfaire un changement complet de mes idées. Ça relaxe et ouvre l'esprit.

Cette intéressante description de l'interviewé montre le paradoxe entre « la révolte» et « la paix intérieure». Ce conflit est lié au changement complet des idées et permet ainsi à l'interviewé de pouvoir évoluer entre ces deux extrêmes.

Un autre élément frappant, c'est l'émotion que dégage chacune de ces œuvres. En effet, la plupart du temps, lorsqu'on est à proximité d'une des œuvres, il règne une très grande tranquillité et une atmosphère paisible.

Concernant les œuvres exposées sur la droite on ressent une sensation d'apaisement, d'harmonie, de lenteur. On veut connaître la fin de l'histoire, la vague qui s'écrase. Cette succession d'images fait penser à un film passé au ralenti.

Ces impressions nous permettent de confirmer la valeur « émotion» que nous avons trouvée dans la première étude qualitative. Certains aspects, mis en évidence dans cette première étude, ne sont pas apparus dans la seconde étude quantitative. Cependant, nous pensons que ces aspects pourraient être importants pour certains individus, même si l'intensité de ces valeurs est apparemment faible par rapport à celle de la valeur «calme ». Ce « calme» est également accompagné par la satisfaction de «simplement regarder, rien de plus que regarder ».

Amour

L'intéressante description suivante illustre bien une relation «sujet-sujet» et «co- inspirateur» : ici le sujet désire; « l'objet» séduit, et vice-versa.

J'ai l'impression d'être un aimant, des fois il m'arrive d'être polarisé de la même façon que la pièce que je visite, et dans ce cas-là, je ne m'attarde pas sur l'œuvre,' d'autres fois, la pièce et moi sommes polarisés différemment et nous nous attirons mutuellement. En tout cas, c'est ce que j'ai ressenti. Pour moi, une chose est sûre, c'est qu'à lafin de la visite, j'ai remarqué qu'il m'avait été impossible d'être indifférent vis-à-vis d'une œuvre. Ça pourrait être comparé à l'émotion amoureuse de la première rencontre.

Addiction

Nous étudions tout d'abord la relation entretenue par les interviewés vis-à-vis de l'art. M. B, un visiteur régulier, compare son lien avec l'art à son lien avec la drogue:

Avec le temps, je me suis habitué à voir un certain nombre d'expositions par mois et c'est devenu pour moi un peu comme une drogue. J'ai un énorme besoin de voir de l'art, je ne sais pas pourquoi. J'ai lu que, inconsciemment, on a tous des signaux à l'intérieur de nous, plus ou moins forts, provoqués par la création des autres et c'est cette création qui nous touche dans notre histoire qui nous est personnelle. Ca nous rappelle des souvenirs. Je ne sais pas si c'est prouvé mais moi ça me parait logique un peu.

Parmi les nombreuses études traitant de l'addiction (Adès 2001, Femandez & Catteeuw 2002, Corcos et al. 2003), une originale variante des perturbations du narcissisme a été proposée outre-atlantique: elle tient son originalité du rôle joué par le courant psychanalytique historique d'Hartmann et par la place prépondérante jouée par le concept du Soi (école d'Ho Kohut, Femandez & Catteeuw 2002). L'accent est mis en termes de cohésion structurale, de stabilité temporelle et de coloration affective de l'image de soi et de sa gestion par le sujet. Cette addiction est ainsi liée à l'image de soi. Le signifiant «additif» est relié à d'autres signifiants et nous permet de chercher d'autres signifiants dans l'entretien:

Quandje vois une œuvre d'art, que celle-ci me plaise ou non, cela provoque en moi de l'émotion, car l'art, pour moi, c'est un des meilleurs moyens de faire sortir des émotions. Par exemple, si une œuvre m'interpelle, elle provoque en moi une réaction spontanée. Je peux être touché par sa beauté, son originalité, par la spiritualité qu'elle dégage.

A partir de la description ci-dessus, nous voyons un aspect affectiflié à l'image de soi qui est un point essentiel de l'addiction comme perturbation du narcissisme. L'œuvre d'art devient ici un intermédiaire pour s'aimer, s'apprécier ou se détester. Ce narcissisme lui-même n'aurait cessé d'exister, de cumuler, de grandir et la relation avec l'œuvre -qui devient la relation avec soi même- pourrait, en conséquence, être additif et difficile à abandonner.

Enchantement

Une autre émotion positive peut naître de la visite, celle liée à l'enchantement et l'affection, le contentement.

(Pouvez-vous m'en dire un peu plus concernant les sentiments que vous avez éprouvés quand vous étiez là pour la première fois ?)

De ma toute première fois? J'étais enchanté, parce que c'était, c'était à Alledri. Il y avait l'affectation qui était, en fait l'affectation c'était le statut que ... j'étais vraiment enchanté, j'étais tellement content.

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