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Dépendance en pression du champ non-affine et ses propriétés

4.2 Propriétés mécaniques en réponse à une tension uniaxiale

4.2.2 Dépendance en pression du champ non-affine et ses propriétés

Comme nous l’avions effectué pour l’étude du champ non-affine dans le cas de matériaux sous pression hydrostatique nulle, les champs de déplacement non-affine seront normalisés dans

toute la suite par leur second moment δui7→ δui/hδu2ii1/2. D’autre part, rappelons que de part

le choix de l’amplitude εxx imposée, notre étude en pression du champ non-affine se réduira au

régime de réponse élastique linéaire. Ainsi, dans ce régime, la structure des champs de dépla-cement non-affine ne dépendra pas de la déformation appliquée.

Afin de caractériser les structures tourbillonnaires apparaissant dans les champs de déplace-ment non-affine de la Fig. 4.6, nous avons utilisé une fonction de corrélation scalaire du champ de vecteur définie comme C(r) = hδu(r).δu(0)i, où δu(r) est le champ non-affine et la moyenne h·i est effectuée sur les paires de particules (i, j) distantes de r, ainsi que sur un ensemble de configurations, notamment à 2D. De telles fonctions ont été représentées sur la Fig. 4.7 pour des systèmes à 2D et 3D de densités identiques à celles présentées sur les snapshots de la Fig. 4.6.

FIG. 4.7 – Fonctions de

corréla-tion scalaire du champ non-affine à 2D et 3D en fonction de la den-sité et de la distance r entre parti-cules. Les densités présentées ici sont identiques à celles utilisées pour les snapshots présentés sur la Fig. 4.6. À 2D, une moyenne d’ensemble a été réalisée sur 10 configurations de même densité, tandis qu’à 3D, une seule confi-guration a été utilisée. À 2D, nous voyons une diminution de la taille des tourbillons, caractérisée par l’anti-corrélation des fonc-tions C(r) comme montré en in-sert. À 3D, cet effet est moindre,

mais néanmoins quantifiable. 0 10 20 30 40 50 60

r/σ 0 0.5 1 < δ u(r) δ u(0)>/< δ u(0) 2 > 2D, ρ=0.873 2D, ρ=1.384 3D, ρ=0.95 3D, ρ=1.2 20 25 30 35 r/σ -0.05 0 0.05 Anti-corrélation

Sur la Fig. 4.7, nous remarquons l’existence d’un régime d’anti-corrélation dans la fonc-tion C(r) qui dépend, pour chaque dimension, de la densité. À ce régime d’anti-corrélafonc-tion est associée une taille caractéristique des tourbillons présents sur la Fig. 4.6. Nous remarquons alors, qu’à 2D, ce régime apparaît à une distance d’autant plus petite que la densité est élevée, suggérant une diminution de la taille des structures tourbillonnaires avec l’augmentation de la densité. À 3D, cet effet est identique bien que beaucoup plus faible comme montré en insert de la Fig. 4.7, dont l’explication réside dans la structure plus complexe des tourbillons à 3D, structure dimensionnellement mal “captée” par la fonction C(r).

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Néanmoins, la transition vers le régime d’anti-corrélation en fonction de la densité reste quan-tifiable, notamment par l’utilisation conjointe de la méthode décrite ci-dessus avec une méthode de coarse-graining du champ non-affine, identique à celle utilisée précédemment dans le cadre des matériaux amorphes sous contrainte hydrostatique nulle. Cette méthode, particulièrement bien adaptée à des systèmes de dimension supérieure à 2, nous permet de mesurer des corréla-tions spatiales entre des éléments du champ non-affine distribués dans des boîtes de volume fini et variable. Nous rappelons que ce champ coarse-grainé est défini comme :

δUj(b) ≡ N1

j

i∈Vj

δu(ri) (4.1)

où Njest le nombre de particules comprises dans un élément de volume Vj de côté b. À partir

de ce champ, nous définissons alors sa fonction de corrélation comme :

B(b) ≡ hδUj(b)

2ij

hδu2i

!1/2

(4.2) en remarquant que celle-ci est normalisée. Une telle fonction définie par l’Éq. 4.2 est représentée sur la Fig. 4.8 pour des verres à 3D de densités différentes, identiques à celles présentées dans les snapshots (c) et (d) de la Fig. 4.6. La décroissance exponentielle de cette fonction B(b) avec une longueur caractéristique ξ(ρ) nous indique qu’il existe dans le champ non-affine à 3D des mouvements collectifs corrélés sur une distance de l’ordre de la distance caractéristique ξ(ρ). Nous remarquons alors une faible variation de cette longueur avec la densité, variation effectivement plus faible que celle obtenue à 2D par l’étude de la fonction C(r).

0 0.2 0.4 0.6 0.8 1

b/L

10-3 10-2 10-1 100

B(b)/B(b

0)

ρ=0.95 ρ=1.2 ~ exp(-b/18) ~ exp(-b/15) FIG. 4.8 – Amplitude de la

fonc-tion de corrélafonc-tion normalisée B(b) du champ non-affine pour deux configurations à 3D de densités différentes, en fonction de la longueur sans dimension b/L. Le champ est moyenné sur un élément de volume de côté

b contenant Nb particules (cf.

l’Éq. (4.2)), et calculé sur une seule configuration par densité. Les densités présentées ici sont identiques à celles utilisées pour les snapshots (c) et (d) de la Fig. 4.6.

Aussi, avons-nous tracé sur la Fig. 4.9 la variation en pression et densité des longueurs ξ à 2D et 3D, obtenues à l’aide des deux méthodes que nous venons de présenter, i.e. par les positions des régimes d’anti-corrélation dans la fonction C(r) en fonction de la pression/densité

(cf. Fig. 4.7), ainsi que par les longueurs caractéristiques de décroissance des fonctions B(b) (cf. Fig. 4.8). Nous avons de plus représenté sur cette figure la dépendance en pression/densité à

2D du premier zéro ζ1

pde la fonction de corrélation Cp(ρ, r) du bruit dans les vecteurs propres,

calculée pour le premier mode de vibration de fréquence non nulle et de plus grande longueur d’onde, i.e. p = 3. Cette fonction sera discutée dans la prochaine Section 4.3.

Sur cette Fig. 4.9, nous remarquons globalement, une diminution des longueurs ξ2D/3D avec

l’augmentation de la pression P (figure de gauche) comme de la densité ρ (figure de droite). À 2D, cette diminution est importante notamment dans le domaine des basses pressions et pressions négatives, pour décroitre plus lentement par la suite et sembler se stabiliser. À 3D, une

telle décroissance de ξ3D avec la pression semble aussi apparaître, tout comme la dépendance

en densité de ξ2D/3D (figure de droite). Notons l’absence de barres d’erreurs qui nous pousse

à admettre ces décroissances avec circonspection. Une absence de dépendance en pression et

densité, pour la longueur ζ1p=3par exemple, n’étant pas exclue.

0 50 100 150 P 10 15 20 25 30 35 40 ξ2D ζ1 p=3, 2D ξ3D 0.9 1 1.1 1.2 1.3 ρ 10 15 20 25 30 35 40 ξ2D ζ1 p=3, 2D ξ3D

FIG. 4.9 – Dépendance en pression (figure de droite) et en densité (figure de gauche) de la

longueur de corrélation des hétérogénéités élastiques à 2D et 3D, obtenues par la mesure des positions des régimes d’anti-corrélation de la fonction C(r) (cf. Fig. 4.7), ainsi que par les va-leurs des longueurs caractéristiques de décroissance des fonctions B(b) (cf. Fig. 4.8). À 2D, les ξ(P) et ξ(ρ) ont été moyennées sur un ensemble de 10 configurations par pression/densité, une

seule ayant été utilisée à 3D. Est présenté aussi le premier zéro ζ1pde la fonction de corrélation

du bruit dans les vecteurs propres à 2D en fonction de la pression et de la densité. Cette fonc-tion est calculée pour le mode p = 3 de plus grande longueur d’onde, et sera discutée dans la prochaine Section 4.3.

Si le champ non-affine met en évidence l’existence de structures corrélées à longue portée, mouvements collectifs de taille caractéristique diminuant avec l’augmentation de la pression hydrostatique, une attention particulière est portée quant à la structure même de ce champ non-affine, notamment à 3D où il est difficilement visualisable. Dans ce but, nous allons une fois de plus utiliser ce qui a été acquis dans le précédent chapitre, à savoir la donnée d’une fonction

S(k) = 1

Nhk δU(k) ki, où δU(k) est la transformée de Fourier du champ non-affine δu(r),

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vu que la fonction S(k) pouvait se décomposer en une partie longitudinale SL(k) et transverse

ST(k) définies comme : k2ST(k) ≡ k 2 Nhk T (k) k2i =N1h

i k ∧ δu(ri)eik.ri 2i (4.3) k2SL(k) ≡ k 2 Nhk L(k) k2i = N1h

i k.δu(ri)eik.ri 2i (4.4)

Ces deux fonctions ont été tracées à 2D et 3D pour des densités identiques à celles utilisées dans les snapshots de la Fig. 4.6, et sont présentées sur la Fig. 4.10. Sur cette figure partie gauche (soit à 2D), nous remarquons que les contributions des parties longitudinales et transverses au champ non-affine sont peu découplées pour la densité la plus basse (ρ = 0.873 ↔ P < 0, sym-boles carrés et cercles), découplage augmentant avec l’augmentation de la densité. Ainsi, pour la densité la plus élevée à 2D (ρ = 1.384 ↔ P ≫ 0, symboles croix et étoiles), la contribution transverse domine de plus d’un facteur 10 la contribution longitudinale au champ non-affine. À 3D, sur la figure de droite, le même effet d’augmentation de découplage entre les parties lon-gitudinales et transverses du champ non-affine apparaît, même si pour la densité la plus basse (ρ = 0.95 ↔ P < 0) la contribution transverse est déjà plus de 10 fois supérieure à la contribution longitudinale. 101 102 λ=2π/|k| 10-3 10-2 10-1 100 101 k 2 SL (k) k 2 ST (k) ρ=0.873, T ρ=0.873, L ρ=1.384, T ρ=1.384, L 2D 101 102 λ=2π/|k| 10-1 100 101 k 2 SL (k) k 2 ST (k) ρ=0.95 ρ=1.2 Champ transverse Champ longitudinal 3D

FIG. 4.10 – Carré de l’amplitude des transformées de Fourier des parties longitudinales SL(k)

et transverses ST(k) du champ non-affine à 2D (figure de gauche) et à 3D (figure de droite) pour

différentes densités et en fonction de la longueur d’onde λ = 2π/ k k k. Gauche : à 2D pour les densités utilisées sur la Fig. 4.6 (a) et (b). Droite : à 3D pour les densités correspondant aux

snapshots (c) et (d) de la même figure. Nous remarquons à 2D que les parties longitudinales

et transverse du champ non-affine sont peu découplées pour la densité la plus basse (cercles et triangles), découplage augmentant avec la densité, le champ transverse dominant de près d’un facteur 10 le champ longitudinal pour la densité la plus grande (plus et étoiles). Cet effet apparaît aussi à 3D, avec toutefois un découplage fort existant déjà pour la densité la plus basse. Cet effet de découplage entre contributions longitudinale et transverse au champ non-affine

en fonction de l’augmentation de la densité, peut être expliqué à l’aide du coefficient de com-pressibilité B = λ + 2µ/d, où d est la dimension, et de sa variation avec la pression. En effet, nous avons vu sur la Fig. 4.5, que la compressibilité B pouvait être correctement prédite soit par la donnée des coefficients de Lamé obtenus par la méthode d’élongation, soit par la méthode de Born. Ceci montre que le champ non-affine ne participe pas à la pression isotrope sous com-pression (ou élongation), mais est principalement associé à la déformation sous cisaillement (ce que nous constatons d’ailleurs sur la Fig. 4.10).

Pour expliquer l’augmentation du découplage avec la pression, notons que dans des systèmes sous pression hydrostatique P ≫ 0 pour lesquels la partie répulsive du potentiel d’interaction

de paire ΦLJ(r) domine, la compression (ou élongation) est alors équivalente à une remise à

l’échelle des positions d’un facteur β(P). Il est alors naturel de penser que dans les systèmes sous pression hydrostatique élevée, la réponse sous compression (ou élongation) donne lieu à une moindre contribution longitudinale au champ non-affine, la réponse transverse étant un moyen moins coûteux pour le système de répondre à la déformation imposée. Notons alors que la partie répulsive dominant ce régime de pression ne semble pas affecter outre mesure la réponse transverse du système, si ce n’est par la taille caractéristique des mouvements collec-tifs transverses contribuant au champ non-affine, taille diminuant légèrement avec la pression comme montré sur la Fig. 4.9. En revanche, pour des systèmes sous pression hydrostatique

P< 0, une telle réponse longitudinale est aussi favorable qu’une réponse transverse, et ce

d’au-tant plus à 2D qu’à 3D, comme il apparaît sur la Fig. 4.10.

Nous avons étudié dans cette partie les propriétés du champ non-affine généré par l’appli-cation d’une sollicitation uniaxiale en tension, dans des matériaux sous pression hydrostatique non-nulle à 2D et 3D. Nous nous sommes tout d’abord interessés au problème de la déter-mination des coefficients élastiques de ces différents matériaux, ce par l’utilisation de deux méthodes. La première consiste à utiliser la formule de Born (Éq. (3.34) p. 52), tandis que la deuxième, met en application les lois d’Hooke, suite à l’application d’une tension uniaxiale sur nos matériaux. Dans le régime élastique de réponse à ce type de déformation, nous avons mis en évidence un écart conséquent dans la donnée des valeurs des coefficients élastiques de Lamé calculés par ces deux méthodes, ce pour toutes les pressions investiguées. Ainsi, la méthode de Born supposant un déplacement affine des atomes à toutes les échelles, nous avons attribué un tel écart à l’existence d’un terme correctif à la prédiction affine de Born, terme qui trouve son existence dans celle d’un champ de réponse élastique dit non-affine, présent dans le matériau, et qui présente des structures corrélées à longue portée. D’autre part, nous avons montré que ce champ non-affine ne contribuait pas de manière significative à un incrément de pression isotrope sous compression ou élongation, celui-ci étant plutôt associé à une réponse en cisaillement, le champ non-affine diminuant le coefficient de cisaillement µ par rapport à la prédiction de Born. Nous avons alors montré que les mouvements collectifs constituant les structures corrélées à longue portée dans le champ non-affine, se présentaient sous forme rotationnelle, avec une taille caractéristique semblant diminuer légèrement avec la pression hydrostatique à 2D comme à 3D. D’autre part, nous avons montré que leur composante transverse dominait, quelle que soit la pression, la composante longitudinale du champ de vecteur non-affine.