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L’acronyme SILAR signifie « Successive Ionic Layer Adsorption and Reaction ». C’est une version modifiée du dépôt en bain chimique. Le principe de ce procédé est évoqué pour la première fois en 1980 [283] puis en 1985 [284]. Il est employé à l’époque pour la croissance de Cu2O sur une lame de verre, mais la technique n’est pas directement nommée SILAR. Son nom lui est donné dans la même année et le processus est expliqué plus précisément [285] avec le développement des croissances de composés II-VI, plus particulièrement du ZnS et du CdS. La méthode est basée sur l’adsorption d’ions sur le substrat et leur réaction avec d’autres ions. Un cycle SILAR est défini par une adsorption cationique à la surface du substrat, un rinçage du surplus, une adsorption anionique avec une réaction entre cations et anions, et un dernier rinçage.

Figure II-28 : Principe du SILAR : (a) adsorption de K+ X- et formation d’une double barrière électrique, (b) premier rinçage éliminant le surplus et les espèces non-adsorbées K+ et X-, (c) réaction des anions Y- avec les cations K+ adsorbés et (d) deuxième rinçage et formation de la couche solide KY (schémas tirés de [223].

Les ions adsorbés prioritairement sont les cations métalliques dus à leur masse plus importante. Les réactions associées à un cycle SILAR (adsorption-rinçage-réaction-rinçage) sont évoquées ci-dessous, ainsi qu’en Figure II-28 [223]:

-Adsorption des ions KX+: TKB+(aq) + UXE-(aq) Equ. II-25

où T, B, U et E sont des constantes et K (Cd2+, Zn2+, Fe3+, Cu+, Sb3+…) et X (SO42–, Cl, NO3–…)des ions. L’adsorption des cations provoque l’apparition d’une double couche électrique d’Helmotz : une couche adsorbée de cations KB+ positivement chargée et une couche extérieure d’anions associés X E-négativement chargée.

-Premier rinçage : élimination des cations non adsorbés et de la couche extérieure d’anions.

-Réaction des ions AZ-: TKB+(aq) + (SYZ-(aq) + RAW+(aq)) KXYZ + RAW+(aq) Equ. II-26

où S, Z, R et W sont des constantes et Y (O, S, Se, Te…) et A (ions chalcogènes) des ions. La réaction des anions YZ- avec les cations adsorbés KB+ a lieu en raison de l’instabilité de surface.

-Deuxième rinçage : élimination de toutes les espèces n’ayant pas réagies.

La formation d’une couche sur un substrat est due à une croissance dite couche d’ions par couche d’ions via les sites de nucléation à la surface mais aussi à une croissance d’amas via l’adsorption et la coagulation de particules colloïdales [286]. L’adsorption d’ions à la surface d’un matériau est une réaction dite exothermique. Ce processus s’opère entre deux phases hétérogènes mises en contact : liquide-solide, gaz-liquide et gaz-solide. Seul le système liquide-solide est pris en compte dans ce type de croissance, et l’adsorption peut être définie comme une couche à l’interface de ces deux phases. Les atomes à la surface du substrat ne sont pas totalement entourés d’autres atomes et possèdent donc des liaisons pendantes qui engendrent des forces résiduelles. Les ions sont adsorbés par les forces entre eux et la surface du substrat. Celles-ci sont essentiellement des forces de Van-Der Walls, des forces de cohésion et des forces d’attraction chimiques.

La répétition des cycles SILAR amène l’élaboration d’une couche sur le substrat avec un contrôle de l’épaisseur grâce à une adaptation du nombre de cycles constituant le procédé entier. Ceci est l’un des avantages du SILAR. D’autres avantages de la technique peuvent également être cités [287]:

Faible température: diminution de la corrosion ou de l’oxydation ;

Croissance sur des substrats à haut rapport de forme ;

Procédé simple et peu coûteux (en comparaison avec les procédés d’épitaxie) ;

Pas de croissance homogène en solution (en comparaison au dépôt en bain chimique) ;

Un grand nombre de matériaux peuvent être utilisé comme substrat ;

Pas de restrictions de taille (selon l’équipement à disposition) ;

Implantation industrielle aisée ;

Néanmoins, afin de croître une couche homogène de bonne qualité structurale, certains paramètres sont primordiaux comme :

La nature et la qualité des précurseurs ;

Le pH des solutions pour la dissociation des ions (cela peut se faire grâce à un agent complexant) ;

La concentration des solutions de précurseurs pour contrôler la quantité d’ions adsorbés ;

Le temps de rinçage permettant d’éliminer les ions en excès ;

Le temps de trempage dans les solutions de précurseurs afin d’avoir une adsorption optimisée ;

Le recuit après dépôt nécessaire pour cristalliser le matériau ;

On trouve dans la littérature moins d’une dizaine d’articles publiés sur le dépôt de Sb2S3 par SILAR. La première publication date de la fin des années 90 avec des résultats très succints sur ses propriétés optiques et électriques [273]. Ce procédé est repris, plus de 10 ans plus tard, avec l’étude de l’absorption d’une hétérojonction à base de TiO2 (ou ZrO2)/Sb2S3/spir-OMeTAD [288] et d’une hétérojonction à base de TiO2/Sb2S3 [289] en fonction du nombre de cycles SILAR. Cette dernière hétérojonction a donné un rendement de photoconversion de 0,27% qui est amélioré l’année suivante grâce à une étude du recuit du Sb2S3 déposé sur des nanofils de TiO2 et à l’incorporation d’un électrolyte à base de sulfure révélant une efficacité de 1,47% [86]. Par la suite, une comparaison des propriétés morphologiques et physiques entre le Sb2S3, le Bi2S3 et l’In2S3 est faite, révélant les qualités d’absorption prometteuses du Sb2S3 pour la création d’un photocourant [290]. Suivant cette voie, un rendement de photoconversion de 4,9% est rapporté très récemment avec une cellule ETA alliant plusieurs matériaux absorbeurs basés sur une hétérojonction de TiO2 poreux/In2S3/Sb2S3/CuSCN [291].

Le Sb2S3 est déposé principalement sur du TiO2 dans la littérature. Les ions Sb3+ nécessaires sont seulement présents pour de faibles pH (inférieur à 3-4). A de tels pH le ZnO est dissout, c’est pour cela que le TiO2 est préféré. Le dépôt de Sb2S3 sur des nanostructures de ZnO est néanmoins possible, mais jamais mentionné par procédé SILAR [92].

Figure II-29 : (a) Image MET de nanoparticules de Sb2S3 sur du TiO2 mésoporeux [289] et (b) photocourant généré pour un film de TiO2 et des couches d’In2S3, de Bi2S3 et de Sb2S3 déposées sur du TiO2 par SILAR [290].

Les précurseurs utilisés pour le SILAR peuvent être les mêmes que pour le dépôt en bain chimique. Néanmoins, le thiosulfate peut être remplacé par le sulfure de sodium (Na2S). Cela permet de réduire l’introduction d’atomes d’oxygène dans la couche. Cependant, le dépôt obtenu n’est jamais observé sous forme de couche homogène sur les nanostructures de TiO2, mais plus souvent sous forme d’agglomérats comme en témoigne la Figure II-29a représentant des nanoparticules de Sb2S3 déposées sur un film mésoporeux de TiO2 [289]. Malgré tout, le photocourrant généré avec un tel dépôt est relativement élevé en comparaison avec d’autres matériaux comme l’In2S3 ou le Bi2S3 (Figure II-29b) [290].

Figure II-30 : Absorption de la lumière d’une couche de Sb2S3 déposée sur du TiO2 par SILAR en fonction (a) du nombre de cycles (de 0 à 7 cycles) [288] et (b) de la température de cristallisation après dépôt [86].

Les propriétés optiques et électriques du matériau dépendent des paramètres SILAR et du recuit de cristallisation effectué après le dépôt. En effet, l’évolution de l’absorption de la lumière en Figure II-30a et II-30b est caractéristique de ces phénomènes. D’une part, l’absorption augmente avec le nombre de cycles SILAR (Figure II-30a) [288], donc avec l’épaisseur de matériau. D’autre part, le recuit de cristallisation joue également sur la qualité d’absorption du matériau en Figure II-30b [86]. En effet, un

recuit trop faible en température ne permet pas une bonne absorption de la lumière, entraînant la détérioration des caractéristiques photovoltaïques par la suite.