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Définitions de la stratégie d’entreprise

PARTIE 2. CADRE THÉORIQUE

2.3. Les théories relatives à la stratégie d’entreprise

2.3.1. Définitions de la stratégie d’entreprise

La stratégie de l’organisation est un thème beaucoup traité dans la littérature académique et comprend une multitude de définitions, des plus générales aux plus spécifiques (Côté et Malo, 2002; Thiétart et Xuereb, 2009). Si elle est définie de

façon large comme l’orientation à long terme d’une organisation, circonscrire sa définition et son champ d’action n’est pas aussi simple. Parce que les organisations opèrent et évoluent au sein d’un environnement à la fois interne et externe complexe : complexe de par la multiplicité et de l’interdépendance des acteurs et des évènements qu’il comporte.

Comme l’indiquent Séguin, Hafsi et Demers (2008), la stratégie devient un puissant instrument pour les gestionnaires, qui leur permet de se guider et d’agir dans un univers changeant et incertain. Dans ce sens, la stratégie est vue comme un « bâton d’aveugle », un filon conducteur, qui aide les dirigeants à conduire, à piloter leurs organisations dans l’obscurité d’un monde turbulent et incertain (Séguin, Hafsi et Demers, 2008).

Ce foisonnement de définitions fait que le concept de stratégie d’entreprise recouvre différents aspects ou différentes réalités : les aspects « contenu » révèlent ce que l’organisation fait comme stratégie, alors que les aspects « processus » indiquent comment l’organisation fait, réalise sa stratégie (Séguin, Hafsi et Demers, 2008). La stratégie d’entreprise se forme à travers un ensemble de décisions et/ou d’actions qui vont dans une direction donnée (Séguin, Hafsi et Demers, 2008). Dans un environnement en constante évolution, l’élaboration de séquences d’actions prédéterminées semble vouée à l’échec selon Thiétart et Xuereb (2009); la stratégie est alors faite de mouvements, de réajustements ou même de remises en cause. Dans un tel contexte, comme l’indiquent Thiétart et Xuereb (2009), la stratégie devient l’élément fondamental de la conduite des entreprises, essentiellement parce qu’elle permet de créer un sens, une direction, qui permet de conduire une action cohérente. Dans les tentatives pour définir ce qu’est la stratégie de l’entreprise, les travaux de Mintzberg et ses alliés ont le mérite d’apporter une clarification, en rassemblant les multiples points de vue en quelques groupes bien définis. Ainsi en est-il des 5P et des 10 écoles de pensée de la stratégie de Mintzberg, Ahlstrand et Lampel (1998, 2009).

Selon Mintzberg, Ahlstrand et Lampel (2009), le concept de stratégie d’entreprise recouvrirait cinq points de vue (les cinq P):

comme plan, la stratégie se définirait comme une direction, un guide ou un schéma d’action tourné vers l’avenir, un chemin allant d’un point à un autre.

 comme modèle (pattern), la stratégie serait décrite comme un comportement répété : car les entreprises tirent des modèles de leur comportement passé. Les actions projetées (stratégie projetée) peuvent se différencier des actions effectivement mises en œuvre (stratégie effective ou stratégie réalisée).

en tant que position, la stratégie implique la présence de produits précis sur des marchés précis, donnant à l’entreprise, une position unique.

 comme perspective, la stratégie indique une façon de faire, qui est propre à une entreprise, avec l’implication d’un ensemble d’activités.

comme stratagème (ploy), la stratégie serait une manœuvre particulière pour tromper ou défaire un concurrent ou un adversaire.

Quant aux dix écoles de pensée de la stratégie, elles sont présentées comme suit par Mintzberg, Ahlstrand et Lampel (1998) :

 L’école de la conception (The design school) : cette école de pensée propose un modèle où la formation de la stratégie vise l’adéquation des capacités internes de l’organisation et des opportunités de son environnement externe; la stratégie est vue également comme issue d’un processus mental du dirigeant.

 L’école de la planification (The planning school) comme un processus formel: la stratégie résulterait d’un processus conscient et maîtrisé de planification formelle, suivant des étapes bien définies.

L’école du positionnement (The positioning school) comme un processus analytique : tout en percevant la formation de la stratégie comme un processus formel et contrôlé, cette école de pensée introduit une perspective analytique. La stratégie résulterait alors d’un processus de sélection de positions génériques (catégories de stratégies optimales, qui donnent une position concurrentielle au sein de l’industrie), basée sur un calcul analytique de la concurrence et de la structure de l’industrie.

L’école entrepreneuriale (The entrepreneurial school) comme un processus visionnaire: elle est centrée sur le concept de vision, en tant que représentation mentale de la stratégie; une vision qui est créée ou est exprimée dans la tête du dirigeant ou leader.

 L’école cognitive (The cognitive school) comme un processus mental : selon les auteurs, c’est une école de pensée en évolution, qui emprunte à la psychologie cognitive. La formation de la stratégie est vue comme un processus qui prend forme dans l’esprit du stratège. Les stratégies émergent alors comme des perspectives, sous formes de concepts, de cartes, de schémas, qui modèlent la façon dont les individus composent avec les éléments de l’environnement.

 L’école d’apprentissage (The learning school) comme un processus émergent : en s’inscrivant dans une approche de description plutôt que de prescription, cette école de pensée cherche à savoir comment les stratégies se forment réellement dans les organisations. Les stratégies peuvent émerger des

actions individuelles ou collectives des personnes et converger vers des modèles (patterns) de comportements qui fonctionnent.

 L’école du pouvoir (The power school) comme un processus de négociation: cette école de pensée introduit les notions de pouvoir et de politique, qui agissent dans le processus de formation de la stratégie. Les stratégies qui en résultent tendent à être émergentes et prennent plutôt la forme de positions et de stratagèmes.

L’école culturelle (The cultural school) : la formation de la stratégie est un processus d’interaction sociale, fondé sur les croyances et les conceptions partagées par les membres d’une organisation. Elle est vue alors comme un processus collectif.

 L’école environnementale (The environmental school) : la formation de la stratégie est vue comme un processus réactif face aux forces de l’environnement.

 L’école de la configuration (The configuration school) : la formation de la stratégie est un processus de transformation sans détruire les structures de l’organisation.

A partir de ces travaux de Minztberg, Ahlstrand et Lampel (2009), il apparaît que le processus de formation de la stratégie peut être animé par diverses dynamiques. D’un côté, dans une dynamique de formalisation, de rationalisation et de contrôle, la stratégie d’entreprise prendra la forme d’un plan, d’une position (écoles de la conception, de la planification et du positionnement). De l’autre côté, c’est une dynamique d’émergence qui anime la formation de la stratégie, selon un processus mental, visionnaire, d’interactions individuelles ou collectives (écoles entrepreneuriale, cognitive, culturelle, d’apprentissage).

Ces dix écoles sont regroupées par Mintzberg, Ahlstrand et Lampel (2009) dans une cartographie indiquant une répartition des différentes écoles en fonction de deux éléments : l’imprévisibilité de l’environnement externe et le caractère rationnel ou naturel du processus stratégique. Ainsi par exemple, l’école de positionnement serait adaptée dans un environnement considéré comme contrôlable, avec un processus rationnel. De l’autre côté, l’école de l’apprentissage correspondrait à la perception d’un environnement confus et imprévisible et à un processus naturel.

Figure 2.3.

Cartographie des écoles de pensée de la stratégie

Imprévisible Confus Environnementale Cognitive De l’apprentissage Culturelle De la configuration Du pouvoir

Du positionnement De la conception Entrepreneuriale

Compréhensible De la planification

Abordable

Rationnel Naturel

Mintzberg, Ahlstrand et Lampel (2009)