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Quelle définition pour le genre et plus particulièrement, pour la réponse au courrier des lecteurs ? au courrier des lecteurs ?

Le travail par genres de textes et la notion d’argumentation

1. La perspective communicative de l’enseignement et de l’apprentissage du français l’apprentissage du français

2.1 Quelle définition pour le genre et plus particulièrement, pour la réponse au courrier des lecteurs ? au courrier des lecteurs ?

Dans les différentes situations d’interaction qui confrontent les membres d’une même société les uns aux autres, il est fait appel à une grande variété de textes. « La notion de texte désigne […] toute unité de production verbale véhiculant un message linguistiquement organisé et tendant à produire sur son destinataire un effet de cohérence » (Bronckart, 1996, p. 378). Les textes produits sont d’une grande variété. Ils permettent d’agir dans une multitude de situations d’interaction et peuvent être regroupés par genres selon leurs caractéristiques (Bronckart, 1996). Dolz et Schneuwly (1997) définissent les genres comme des « formes relativement stables que prennent les énoncés dans des situations habituelles, des entités culturelles intermédiaires qui permettent de stabiliser les éléments formels et rituels des pratiques langagières » (p. 29). Les genres sont donc facilement reconnaissables, car ils possèdent des caractéristiques propres (code et structure). En effet, les membres d’une même communauté linguistique reconnaissent et identifient les différents genres (débat, exposé, fable, conférence,…) et parviennent à s’y conformer dans leurs propres productions. Ceci peut se réaliser malgré le fait, comme le disent les auteurs, qu’il est parfois difficile de distinguer des genres voisins et très similaires comme la conversation, l’entretien et l’interview ou comme la discussion et le débat (Kerbrat-Orecchioni, 1990).

Rastier (2001) définit la notion de genre ainsi : « un texte est une suite empirique attestée, produite dans une pratique sociale déterminée, et fixée sur un support quelconque » (p. 21).

Dans la mesure où les pratiques sociales d’où émergent les textes sont éminemment variables, plusieurs « formes standards » les différencient. Ils sont nommés genres textuels. Rastier considère la dimension générique comme fondamentale pour plusieurs raisons. Voici ici trois d’entre elles :

1. […] le genre assure non seulement le lien entre le texte et le discours, mais aussi entre le texte et la situation, tels qu’ils sont unis dans la pratique […] (p. 229) ;

2. tout texte est donné dans un genre, et perçu à travers lui […] le texte est l’unité fondamentale, mais non maximale puisque tout texte prend son sens dans un corpus. Or le corpus de textes d’un même genre s’impose en général (p. 232) ;

3. le genre l’emporte sur les autres régularités linguistiques […] (p. 232).

Rastier (2001) souligne le caractère situé des textes. Ils sont ancrés dans une situation sociale et s’adaptent à l’évolution de cette situation. L’énonciateur est ainsi triplement situé : dans une tradition linguistique et discursive ; dans une pratique ; enfin dans une situation qui évolue et à laquelle l’énonciateur doit sans cesse s’adapter.

Les recherches de nombreux auteurs (notamment Bakhtine/Volochinov, 1984 ; Canvat, 1999), montrent que les genres ont une dimension culturelle. Cet élément rejoint la

« tradition » (Rastier, 2001) dans laquelle se situent les textes. Dans une même communauté, chacun parvient à identifier et produire des textes avec des caractéristiques communes et appartenant à un genre particulier : récit de vie, devinette, débat, texte explicatif, règle de jeu, etc. Les genres peuvent être ainsi considérés comme des outils qui offrent la possibilité de communiquer (Dolz & Schneuwly, 1998). Cet outil permet à émetteur d’agir langagièrement avec un but précis dans un lieu social défini et en interaction avec un destinataire identifié.

C’est « un outil sémiotique constitué de signes organisés de manière régulière ; cet outil est complexe et comprend des niveaux différents » (Dolz & Schneuwly, p. 65).

Définir la notion de genre demande de considérer quatre points essentiels : 1. l’ancrage social et la nature communicationnelle du discours, 2. les régularités compositionnelles et les caractéristiques formelles des textes produits, 3. les buts poursuivis dans les sphères d’activités choisies, 4. les unités linguistiques qui le caractérisent (Dolz & Gagnon, 2008).

Si l’on considère ces différents points à l’aune du genre de texte RCL, s’agissant de l’ancrage social et de la nature de la communicationnelle du discours, la prise en compte des dimensions de la situation d’interaction est essentielle pour s’adapter au lieu de publication de la RCL, au destinataire et aux lecteurs de la revue, à la controverse soulevée dans la lettre source et, pour finir, à la prise en compte de la position de l’énonciateur.

La prise en compte des régularités compositionnelles et des caractéristiques formelles des textes produits (Charaudeau & Maingueneau, 2002, repris par Dolz & Gagnon, 2008) amène l’énonciateur à prendre en considération un cadre qui présuppose des choix langagiers, linguistiques et communicationnels. S’agissant de la RCL, les normes épistolaires propres à une correspondance sont à respecter dans la rédaction : lieu et date, salutations de départ et finale, signature. De même, une reprise de la controverse de la Lettre Source pour faciliter la

compréhension du lecteur est recommandée. Les contenus de la RCL (prise de position et argumentaire) peuvent ainsi être reliés et éclairés.

Les genres sont également désignés selon les sphères d’activités et les buts qu’ils poursuivent dans chacune d’entre elles (école, média, etc.). « Le fait qu’un texte singulier présente des caractéristiques communes à d’autres textes produits dans des situations similaires permet son repérage comme exemplaire d’un genre » (Dolz & Gagnon, 2008, p. 181). L’organisation d’une RCL suit une forme conventionnelle d’un texte argumentatif : reprise de la controverse avec prise de position de l’énonciateur, argumentation (arguments hiérarchisés par des organisateurs, étayés et contextualisés), conclusion avec reformulation de la position.

Pour terminer, au niveau linguistique, un ensemble d’unités permettent l’identification du texte comme appartenant à un genre particulier. Dans notre cas, l’usage des organisateurs logico-argumentatifs pour hiérarchiser les arguments et le recours à des marqueurs de prise en charge énonciative pour exprimer son opinion composent la RCL.

Pour leur part, Bakhtine/Volochinov (1984) définissent trois dimensions essentielles qui permettent de grouper les textes par genres. Elles sont illustrées ci-dessous par les caractéristiques de la RCL qui nous intéresse pour cette thèse.

La première dimension a trait aux contenus à traiter et à développer à travers le genre choisi.

Le but du texte produit va en déterminer non seulement le contenu mais également la structure. Si on considère la RCL, il s’agira pour l’énonciateur de convaincre un destinataire ainsi que tous les lecteurs potentiels. Pour ce faire, l’énonciateur devra prendre position quant à la controverse initiale et élaborer des arguments pour étayer et justifier sa prise de position.

Plus ces arguments seront fondés et structurés, plus le lecteur pourra se laisser convaincre par l’énonciateur. Par ailleurs, le poids d’un argument ne tient pas seulement à sa structuration mais aussi à sa charge idéologique.

La deuxième dimension touche à la structure communicationnelle et détermine les éléments communs aux textes appartenant au même genre. Dans le cas d’une RCL, l’énonciateur devra tenir compte, lors de sa production, de la structure d’une lettre, de la reprise de la controverse avec prise de position, d’une organisation des arguments et pour finir d’une conclusion.

La troisième et dernière dimension est constituée par les « configurations spécifiques d’unités langagières » (Dolz et al., 2008, p. 44) et regroupe les traces de l’énonciateur, du destinataire, les organisateurs textuels, le temps des verbes, etc. Pour la RCL, il s’agira essentiellement des organisateurs textuels permettant de structurer l’argumentation mais également de la prise de position de l’énonciateur.

Les textes oraux et écrits produits dans différentes situations et qui possèdent des caractéristiques communes sont ainsi regroupés par genre. Le fait qu’ils représentent un matériau concret permet aux élèves de les travailler en les observant, les imitant, les analysant tout en gardant une visée communicative qui fait sens.