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Le féminin dans la série télévisée : mutations intimes

B. Définir le féminin : dissidence par l’intime

Cette acception politique du féminin mène vers une analyse extensive de l’espace politique et de l’espace public dans la série : les milieux du travail, tant dans Top of the

Lake que dans The Handmaid’s Tale ou Mad Men sont le théâtre d’asymétries genrées,

tandis que l’espace de la ville dans This Is England, du lieu communautaire dans Orange

is the New Black, voire à plus petite échelle celui de la rue dans The Handmaid’s Tale,

relaient dans leur géographie même les tensions entre féminin et masculin. Pourtant, nous ne pouvons circonscrire notre étude à l’espace public, le féminin et le masculin ne s’arrêtant pas à la porte du lieu de travail, sans continuer à qualifier les échanges et relations intimes. Définir le féminin implique donc de s’intéresser à la manière dont il se déploie à l’écran, autant dans l’espace public que dans l’espace intime, puisque la caméra ignore ces frontières immatérielles. Nous nous trouvons alors en face de plusieurs paradoxes, qui semblent réduire l’intime à une dimension incommunicable, voire à le confondre avec le privé, faisant ainsi du terme un antonyme naturel du politique. Il nous appartient de prouver qu’il n’en est rien, et que l’intime, au travers de ses différentes acceptions, désigne moins une intériorité cachée qu’un lien partageable. Nous tenterons ici de prouver que c’est ce lien singulier de l’intime qui permet dans la série de définir les contours du féminin comme de figurer la porosité des identités genrées, en tant que ce lien peut figurer une contestation de l’ordre établi. Labilité de l’intime

Si l’on s’intéresse aux évolutions lexicales du terme, il est aisé de se rendre compte que la définition de l’intime a grandement évolué au cours des siècles. Dans son étude lexicographique sur l’intime94, Véronique Montémont note que « la notion renvoie, étymologiquement […], à la dimension la plus intérieure de l’expérience

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humaine, et dans une certaine mesure, à la moins communicable »95. Dans le corpus, cela se traduit par la présence récurrente de temps et d’espaces personnels, qui semblent appartenir à un seul personnage. Ces lieux sont majoritairement décrits comme des espaces assiégés, toujours exposés au danger d’une intrusion extérieure. Ainsi la chambre des personnages de « 15 Million Merits » (Black Mirror, 1.02) est le théâtre d’une négociation constante de l’intime. Les personnages doivent en effet payer afin de ne pas être soumis aux publicités constantes qui recouvrent les murs, pour conserver le privilège du temps et de l’espace intimes, c’est-à-dire le temps d’une relation de soi à soi. La dimension invisible et incommunicable de l’intériorité intime en fait ainsi un terrain bien souvent mis en danger dans les séries du corpus.

Pourtant, on note que « cet adjectif désigne au départ un élément extérieur à la personne, puisqu’il est utilisé pour décrire une relation de proximité amicale particulièrement marquée »96. L’utilisation lexicale première du terme ne semble pas désigner un concept incommunicable, mais bien une relation où cette même intériorité se double d’une capacité de transitivité élective : chaque être peut choisir de partager ses sentiments intimes avec des êtres proches. Michaël Foessel note que :

si l’intime est peut-être invisible, il n’en est pas moins éclairé d’une lumière particulière émise par un autre. En d’autres termes, il s’agit d’un concept relationnel, ce qui le distingue de l’idée d’intériorité. […] L’intime conserve cette dimension dialogique : nos sentiments ‘intérieurs’ sont des rapports avec les autres et non les propriétés d’un Moi solitaire.97

La définition de l’intime ne peut donc pas se limiter à la simple intériorité personnelle de chaque être. Elle doit être élargie pour inclure la possibilité d’un partage, d’un échange, même si celui-ci est électif et s’étend à un nombre restreint de personnes. La qualité d’ami « intime » par exemple ne peut pas être donnée à tous, et désigne une relation particulièrement intense, un lien singulièrement étroit entre deux êtres. La dimension dialogique présentée par Michaël Foessel se double souvent d’une nécessité

95 Véronique Montémont. « Dans la jungle de l’intime : enquête lexicographique et lexicométrique (1606-2008) ». Anne Coudreuse, Françoise Simonet-Tenant (dirs.). Pour une histoire

de l’intime et de ses variations. Paris : L’Harmattan, 2009, pp. 15-38, p. 15.

96 Ibid., p. 17.

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de partage du lien intime, c’est ce que Jacques Lacan avance lorsqu’il évoque « une place que nous pouvons désigner du terme d’extime, conjoignant l’intime à la radicale extériorité »98. On retrouve sous ce terme l’idée d’un passage du plus intérieur au plus extérieur. Serge Tisseron reprend les termes de Lacan et les théorise dans le cadre de l’expérience télévisuelle :

[j]e propose d’appeler ‘extimité’ le mouvement qui pousse chacun à mettre en avant une partie de sa vie intime, autant physique que psychique. […] Elle consiste dans le désir de communiquer à propos de son monde intérieur. […] Si les gens veulent extérioriser certains éléments de leur vie, c’est pour mieux se les approprier, dans un second temps, en les intériorisant sur un autre mode grâce aux réactions qu’ils suscitent chez leurs proches. Le désir d’‘extimité’ est en fait au service de la création d’une intimité plus riche.99

Il semble que la notion même d’extimité, c’est-à-dire du besoin commun à tous de partager à propos de son intériorité, légitime l’acception relationnelle de l’intime. Le désir d’extimité habite de nombreux personnages du corpus, qui témoignent alors d’un besoin d’accéder à l’intime. Dans This Is England, c’est par exemple ce qui pousse Trev à avouer l’agression sexuelle qu’elle a subie à Lol100 : faire face à ses expériences implique pour elle de les partager avec une personne intime. Le déploiement de cet aspect relationnel de l’intime trouve un témoin privilégié dans le développement de certaines formes artistiques spécifiques :

[c]’est dans les correspondances, comme dans les journaux intimes – mais ils sont encore rares au début du XIXe siècle – qu’on perçoit le mieux les frémissements de ces tropismes intimistes. Le choix de la lettre comme médium privilégié de cette vie intérieure logiquement destinée à rester secrète signale assez que, pour exister, l’intime a besoin d’un minimum de théâtralité, aussi confidentielle soit-elle.101

Ainsi, l’évolution historique du terme a accompagné l’évolution des pratiques et des arts pour ouvrir la possibilité d’une transitivité. La centralité de l’écrit dans l’expérience intime trouve une illustration dans The Handmaid’s Tale, lorsque June récupère via un réseau de résistants une pile de lettres écrites par d’autres handmaids qui, dans une situation similaire à la sienne, ont décidé d’écrire pour témoigner de leur expérience

98 Jacques Lacan. Le Séminaire (livre XVI). D’un Autre à l’autre. Paris : Seuil, 2006 [1969], p. 249. 99 Serge Tisseron. L’Intimité surexposée, op.cit., p. 52-53.

100 This Is England ‘86, 1.04.

101 Brigitte et José Luis-Diaz. « Le Siècle de l’intime ». Anne Coudreuse, Françoise Simonet-Tenant (dir.). Pour une histoire de l’intime et de ses variations, op.cit., pp. 117-146, p. 121.

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(1.10). Au-delà de la simple notion de témoignage, qui confère à ces écrits une importance politique, nous émettons l’hypothèse que c’est l’activité même d’écrire qui fait vivre ces femmes, et qui semble primordiale à leur survie intime. Cette transitivité, qu’on la nomme désir d’extimité ou simplement partage, tend à montrer que l’intime est avant tout une notion communicable, à l’inverse de ce que sa signification étymologique laisse à penser. Pourtant, le terme rejoint au XVIIIe siècle son acception originale, et se rapproche alors de la dimension individuelle, personnelle du terme, comme en témoignent les travaux de Véronique Montémont :

[l]e XVIIIe siècle constitue une sorte de transition sémantique : tout en maintenant au premier plan la problématique relationnelle, les lexicographes introduisent discrètement l’idée d’une intériorité du sujet et de sa conscience. Cet élément nouveau amorce un virage sémantique majeur, qui va ramener le terme à son acception étymologique. […] Peu à peu, l’idée de l’intériorité psychologique se ménage une place dans les dictionnaires […]. [Cela marque] le déplacement définitif du concept vers des notions liées à la perception, au ressenti, aux affects, et de fait polarisées sur le sujet percevant. D’une certaine manière, est intime ce que je ressens comme tel.102

Nous identifions ce tournant sémantique comme l’élément fondateur qui permet au médium sériel de figurer l’intime comme un territoire assiégé103. Puisqu’il constitue non seulement un lien mais également un sentiment personnel, l’intime est soumis à de multiples menaces. Dans Orange is the New Black, c’est la possibilité même du féminin qui est remise en question lorsque les détenues perdent leur territoire intime : la vie en communauté les force à partager les espaces de repos et ceux de la toilette, c’est-à-dire l’ensemble de leurs espaces intimes, tandis que la précarité de la vie carcérale ne leur permet plus de s’affirmer en tant que femmes. La figuration de l’intime comme territoire assiégé dans le médium sériel est associée à une thématique propre à l’intime féminin, qui est celle du corps. Cette problématique est singulièrement récente, et nous suivons à nouveau les travaux lexicographiques de Véronique Montémont :

102 Véronique Montémont. « Dans la jungle de l’intime : enquête lexicographique et lexicométrique (1606-2008) », op.cit., pp. 18-19.

103 Nous empruntons l’idée d’un territoire de l’intime à Véronique Montémont, dans son résumé des fluctuations lexicales du terme : « On peut repérer un premier déplacement latéral, qui recentre l’intimité du relationnel vers l’individu, puis un mouvement d’expansion, qui accroît le territoire de l’intime et le fixe comme un périmètre protégé, mais partageable ». Ibid., p. 37.

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au XXe siècle, l’intime devient donc, en quelque sorte, l’espace d’expression d’une extériorisation limitée et (s)élective, de l’intériorité. Cette opération peut s’accomplir dans la privauté du journal, du couple, de la maison ; la qualité d’intime en vient ainsi à désigner un périmètre autour de soi et ce que l’on considère comme relevant de soi, y compris au sens physique.104

Le territoire intime peut donc se faire territoire corporel : il désigne dans son acception la plus contemporaine un espace à soi et autour de soi, qui comprend le corps, c’est-à-dire l’espace le plus personnel que chaque être puisse posséder. Les séries à l’étude attachent une importance certaine à la corporalité, qui est parfois au centre de l’esthétique du médium. The Handmaid’s Tale exemplifie la dépossession du corps subie par les handmaids. Les femmes stériles se voient retirer la souveraineté sur leur corps, et leur sexualité est mise au service de la procréation des familles dirigeantes de Gilead, auxquelles elles sont assignées. Si le corps est le périmètre le plus central de l’intime, il est aussi un territoire soumis à l’asymétrie entre le masculin et le féminin. C’est en effet toujours le corps féminin qui est soumis, monnayé, marchandé dans les séries à l’étude. De Black Mirror à This Is England105, la vulnérabilité du corps féminin est démontrée par l’ascendant que les personnages masculins prennent sur leurs homologues féminins. Il est primordial pour notre étude de souligner cette vulnérabilité de l’intime corporel des femmes et d’observer comment ces territoires sont réappropriés et regagnés par les personnages féminins.

Les problématiques corporelles de l’intime ne sont néanmoins pas contenues, tant s’en faut, dans les oppositions entre masculin et féminin. L’intimité corporelle est aussi menacée par nombre d’autres processus, comme l’absence d’espace corporel suffisant – dont Orange is the New Black explore l’importance dans le milieu carcéral – la grossesse, ou encore le vieillissement. Black Mirror met notablement en scène dans « San Junipero » (3.04) le dilemme dystopique des personnages : faire face à la décrépitude des corps tout en maintenant une vie intime riche, bien que simulée. « San Junipero », communauté virtuelle, accueille les « âmes » de personnes mourantes ou

104 Ibid., p. 20.

105 Nous faisons ici référence principalement à l’épisode « 15 Million Merits » (Black Mirror, 1.02) où le personnage féminin principal, Abi, se voit proposer une carrière d’actrice pornographique plutôt que de chanteuse par le jury d’une émission télévisée, reconverti en conseiller d’orientation inflexible. This Is England s’attèle à la vulnérabilité du corps féminin dans les quelques épisodes où Lol et Trev subissent les agressions sexuelles du père de cette dernière, menant à de nombreux arcs narratifs inattendus et nés de cet événement.

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décédées, leur permettant de vivre infiniment dans un espace préservé de tout danger, même du vieillissement. L’attachement à l’intériorité, et la possibilité de continuer à vivre une vie telle qu’on se ressent être – les idéaux de jeunesse physique et mentale sont omniprésents dans l’épisode – détachent alors l’intime de la corporalité, en donnant aux sentiments intérieurs un moyen technologique de perdurer. Cet épisode met en avant les mutations lexicales de l’intime : si le terme désigne l’intériorité d’une personne, cette dimension intérieure est toutefois partageable par certains personnages de la fiction. L’adjectif « intime « caractérise le plus souvent un lien, un rapport de soi à l’autre, et ne peut s’exprimer sans ce rapport. Pourtant, les usages modernes semblent revenir à la racine étymologique du concept, mettant alors en avant l’intériorité psychologique des êtres. L’intime peut alors être perçu comme un territoire à préserver de tous. Il apparaît comme un terme essentiel à la définition du féminin puisque ce premier est assimilé dans son acception contemporaine à l’espace du corps comme territoire personnel. Or, l’ensemble des séries du corpus font du corps le premier espace grâce auquel les personnages se situent sur la polarité genrée.

L’intime : un antonyme du privé ?

L’acception de l’intime comme territoire dans la définition du féminin semble trop nous rapprocher d’une confusion entre l’intime et le privé : l’intime se limiterait alors à un territoire clos ou une propriété expropriable. En effet, si nous ne rejetons pas pour cette étude la corporalité des personnages comme fondement indéniable de la sphère intime, il nous faut néanmoins faire la distinction entre ce qui est intime et ce qui est privé106. Nous tenterons ici de prouver que si le privé nous permet de définir les contours matériels du féminin, et donc d’en tracer les limites à l’écran, l’intime conduit dans le médium à questionner la dichotomie genrée, voire à la dépasser. Si les contours du féminin sont soumis à des fluctuations politiques, l’intime est encore plus susceptible de se voir modifié au gré des évolutions historiques, puisqu’il possède une dimension politique essentielle. La labilité du terme est le trait même qui permet à

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l’intime de se constituer en tant que moyen privilégié d’établir à l’écran la porosité des frontières entre masculin et féminin. Centre de gravité de la définition des contours du féminin, l’intime ouvre également des temps, des lieux et des postures pour la dépasser.

L’intime a souvent été assimilé au secret – une définition en adéquation avec son origine étymologique. Il a longtemps été considéré à l’aune d’un ancien découpage public/privé, et se superposait au privé, en se confondant avec ce dernier. Dans l’idéal de société démocratique décrit par Serge Tisseron, les deux termes semblent d’ailleurs interchangeables :

[l]e droit à l’intimité est également essentiel à la constitution d’une organisation sociale démocratique. Toutes les sociétés préoccupées de liberté garantissent d’ailleurs officiellement la distinction entre vie publique et vie privée. Inversement, les sociétés totalitaires tentent de l’effacer. Les dictateurs essaient souvent de convaincre leur peuple que tout concerne l’Etat, aussi bien dans la vie intime que dans la vie publique.107

Pourtant, il semble impossible d’assimiler l’intime et le privé, comme d’opposer le public et l’intime. Il s’agit moins ici de nier la nécessité politique et sociale du privé, soulignée par Serge Tisseron, que de le distinguer de la sphère de l’intime. Michaël Foessel s’emploie à établir cette distinction dans La Privation de l’intime :

[l]’identification de l’intime et du privé est abusive pour une raison simple. L’attribut ‘privé’ renvoie insensiblement à un sujet : la ‘propriété’. La propriété privée désigne ce sur quoi l’individu a un droit d’exclusivité, mais qu’il peut néanmoins échanger ou aliéner dans des contrats. Elle n’est donc pas ce qui concerne l’individu dans sa singularité, mais ce qui le rend commensurable aux autres.108

La portée de cette définition du privé apparaît décisive pour notre étude : est privé ce qui relève de l’individu, c’est-à-dire ce dont l’individu est maître ou possesseur. En ce sens le corps, les sentiments mais également les possessions matérielles relèvent du privé. Ces éléments jouent un rôle déterminant dans l’élaboration de l’identité individuelle, et donc dans l’élaboration de l’identité féminine. Pour Alain Ehrenberg, les éléments constitutifs du privé ont été le premier moteur de l’émergence de l’individualité :

107 Serge Tisseron. L’Intimité surexposée, op.cit., p. 51.

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pour les classes populaires, la possession personnelle d’objets a servi de support à l’espace naissant de l’individualité en privé et de moyen pour enrichir une esthétique toute nouvelle de l’existence, sortant du folklore et de la culture populaire traditionnelle. […] L’augmentation physique de l’espace, les progrès de l’équipement ménager […], puis l’arrivée de la télévision donnent une attraction nouvelle à l’espace privé et favorisent le réaménagement des relations en développant une sociabilité familiale neuve.109

Les progrès de l’industrialisation et la possibilité nouvelle de posséder des objets autres que ceux indispensables à la survie semblent établir selon l’auteur le début d’une vision nouvelle de l’individu sur lui-même. Il faut pour notre étude s’intéresser à ce qui relève du privé, notamment au corps et aux objets, dans la mesure où ils jouent un rôle primordial dans l’élaboration de l’identité singulière des individus. C’est donc tout d’abord par l’entremise du privé que nous pouvons délimiter le féminin dans les séries du corpus. L’importance cruciale du vêtement par exemple, et son utilisation comme ressort d’émancipation sociale et politique, sont manifestes dans Mad Men tout comme dans This Is England. Le vêtement est une mise en visibilité du corps, il est une possession privée qui annonce un statut public. De même, dans Orange is the New Black ou Black Mirror, c’est la possession de certains objets qui détermine la féminité. Si Lacie ne vit son individualité qu’au travers du moniteur qui lui indique la note que ses pairs lui donnent (« Nosedive », Black Mirror, 3.01), c’est également l’objet qui semble réunir les femmes de la prison de Litchfield (Orange is the New Black) et faire perdurer la possibilité même de la féminité. Dans l’univers carcéral, la possession privée devient un luxe, et la possibilité de se distinguer en tant qu’être singulier, et surtout en tant qu’être féminin, est réglée sur la détention matérielle. Au seuil de la prison, les effets personnels sont retirés aux femmes. Le féminin se dégage donc à l’écran dans les quelques objets qui lui sont assimilés : les protections hygiéniques, les sous-vêtements que les détenues fabriquent clandestinement110, la coiffure, le maquillage sont autant