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CHAPITRE I LA CROISSANCE FRANÇAISE PEINE À SORTIR DE

2. Un déficit qui se creuse en 2003

Selon les perspectives associées au projet de loi de Finances pour 2003, le besoin de financement des administrations publiques devait se stabiliser cette année à 2,6 points de PIB.

Ces prévisions ont du être révisées dès mars 2003, le gouvernement constatant alors que le déficit public allait enregistrer une dégradation supplémentaire du fait notamment du ralentissement de l’activité pour atteindre 3,4 % du PIB. Pour 2004, les pouvoirs publics s’engageaient alors à ce que les

« efforts de maîtrise de la dépense et la reprise de l’activité » permettent de ramener le déficit public à 2,9 % du PIB. Le gouvernement a reconnu le 1er septembre dernier que le déficit de 2003 devrait augmenter de près de 15 milliards d’euros par rapport à l’an dernier, s’élevant ainsi à 4 % du PIB selon les prévisions communiquées à la Commission européenne.

Ce déficit – le plus accusé depuis 1996 pour la France et le plus important de l’Union européenne avec un besoin de financement des administrations publiques de 60 milliards d’euros – résulte pour une large part de la mauvaise conjoncture : à cause de la faiblesse de l’activité, les rentrées d’impôts et de cotisations sociales sont loin des niveaux escomptés en début d’année ; dans le même temps, les dépenses continuent d’augmenter, en particulier celles d’assurance maladie.

Mais ce creusement est aussi la résultante directe d’un choix de politique économique et fiscale, le déficit ayant été accru par les allégements fiscaux et sociaux de 3,8 milliards d’euros (0,25 point de PIB). Cette situation place la France dans une situation difficile vis-à-vis de la Commission et de ses partenaires européens. Notre pays s’était, en effet, engagé au printemps dernier, non seulement à revenir sous la barre de 3 % du PIB en 2004, mais aussi à améliorer davantage le déficit structurel et à limiter l’accroissement du ratio de dette public en 2003. Lors de son entrevue avec le commissaire européen aux affaires économiques, M. Pedro Solbes, dans le courant du mois d’août, le Premier ministre avait d’ailleurs laissé entendre que le retour sous le seuil européen n’aurait pas lieu avant 2006. La France pouvait se référer au cas de l’Allemagne dont le déficit, annoncé à 3,8 % du PIB, devrait dépasser encore

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3 % l’an prochain. On peut, dans ces conditions, s’étonner de certaines mesures telles que la baisse de l’impôt sur le revenu qui accroissent le déficit sans pour autant relancer la croissance (cf. infra).

Tableau 19 : les prévisions concernant les principaux agrégats de finances publiques dans le scénario à 2,5 % de croissance

(en points de PIB) 2003 2004 2005 2006 2007 Capacité de financement - 4,0 - 3,6 - 2,9 - 2,2 - 1,5 Dette publique 61,4 62,8 63,2 62,9 61,8 Dépenses publiques 54,3 53,9 52,9 52,2 51,6 Progression en volume 2,2 % 1,0 % 0,7 % 1,1 % 1,2 % Prélèvements obligatoires 43,8 43,6 43,5 43,5 43,5 Source : Rapport économique, social et financier annexé au projet de loi de Finances pour 2004.

Quoi qu’il en soit, le gouvernement était tenu de présenter avant le 3 octobre un plan de redressement des comptes s’inscrivant dans le cadre de la procédure pour déficit excessif engagée à l’encontre de notre pays (la sanction peut aller jusqu’au versement d’une amende de trois milliards d’euros). La Commission a constaté le 8 octobre que les mesures prises en cours d’année (annulations de crédits, déremboursement de médicaments pour « service rendu insuffisant », relèvement des taxes sur le tabac, augmentation des cotisations sociales à l’Association pour la garantie des salaires (AGS), réforme des retraites) auront « un impact marginal sur le déficit des administrations publiques en 2003 mais plus marqué pour certaines d’entre elles en 2004 ». Elle relève que le déficit structurel est insuffisamment réduit en 2003 (- 0,1 point), que sa diminution anticipée pour 2004 (- 0,7 point) ne suffira pas pour ramener le déficit nominal sous les 3 % du PIB (objectif désormais reporté à 2005) et que

« les autorités françaises n’ont pas pris les mesures nécessaires pour limiter l’expansion de la dette publique en 2003 ».

La Commission a donc poursuivi la procédure engagée contre notre pays en présentant en novembre des recommandations détaillées tendant notamment à une réduction plus prononcée du déficit structurel. Il revient désormais à l’Eurogroupe de décider ou non du déclenchement de la procédure de sanctions.

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Encadré 7 : La programmation pluriannuelle des finances publiques 2005-2007 La programmation des finances publiques pour 2005 à 2007 annexée au projet de loi de Finances pour 2004 définit le cadre général dans lequel s’inscrit la politique budgétaire du gouvernement. Elle repose sur le scénario central d’une croissance moyenne du PIB de 2,5 % et d’une inflation de 1,5 %, l’hypothèse alternative d’une croissance de 3 % étant également retenue.

Il en ressort que les dépenses de l’Etat devraient être stabilisées en volume à l’horizon 2007 tandis que celles d’assurance maladie devraient évoluer en ligne avec la « croissance moyenne de l’économie » (2,25 % en volume) pour permettre un retour à l’équilibre des administrations de sécurité sociale en 2007. Au total, les dépenses publiques progresseraient en moyenne de 1 % par an.

En conséquence, le déficit public repasserait sous le seuil de 3 % en 2005 grâce à une réduction de 1,1 point du PIB du déficit courant et à une amélioration de 1,4 point du déficit structurel. Il serait ramené à 1,5 % du PIB en 2007 (et à 0,7 % dans le scénario à 3 %) avec une amélioration annuelle du déficit structurel de 0,5 point chaque année. Le ratio dette sur PIB connaîtrait une décrue s’accélérant à partir de 2007, année au cours de laquelle il repasserait sous le seuil de 60 % dans l’hypothèse d’une croissance de 3 % (près de 62 % dans l’autre cas). Le gouvernement entend affecter les « bonnes surprises » conjoncturelles sur les recettes à la réduction du déficit et financer les futures baisses d’impôts par des économies récurrentes.

C - LES INVESTISSEMENTS PUBLICS

Tout comme la Commission européenne lançait aux Etats membres de l’Union un signal d’alarme et s’inquiétait de ce que « la réduction des dépenses publiques a affecté de façon disproportionnée les investissements publics »72, notre assemblée s’est déclarée préoccupée l’année dernière du fléchissement de la dynamique de l’investissement public au cours de la décennie passée73. Depuis, l’évolution constatée au cours de la période la plus récente montre que, si le recul semble avoir été enrayé à la fin des années 1990, le niveau actuel de la FBCF des Administrations publiques (APU)74 dans notre pays demeure aujourd’hui sensiblement inférieur à ce qu’il était au tournant des années 1991-1993 et un certain fléchissement semble même à nouveau être apparu l’année dernière.

Tableau 20 : La part de la FBCF des APU dans le PIB, dans le total des dépenses des APU et dans la FBCF totale

(en %) 1991 1992 1993 1999 2000 2001 2002

FBCF des APU/PIB 3,4 3,5 3,4 3,1 3,2 3,2 3,1

FBCF des APU/Dépenses des APU 7,0 6,9 6,4 5,6 6,1 6,0 5,7 FBCF des APU/FBCF totale 16,6 17,6 18,1 15,4 15,7 15,4 15,4 Source : INSEE (comptes nationaux), calculs Conseil économique et social.

72 « L’investissement public dans le cadre de la stratégie économique », communication de la Commission des Communautés européennes, 2 décembre 1998.

73 « L’investissement public en France : bilan et perspectives », avis adopté le 13 novembre 2002 (rapporteur : M. Charles Demons), JO du 20 novembre 2002.

74 En comptabilité nationale, le secteur institutionnel des APU comprend les administrations publiques centrales (APUC = Etat + organismes divers d’administration centrale/ODAC), les administrations publiques locales (APUL = collectivités locales + organismes divers d’administration locale/ODAL) et les administrations de sécurité sociale (ASS, essentiellement les hôpitaux du point de vue de l’investissement).

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Ainsi, avec un montant de 46,5 milliards d’euros en 2002, le volume des investissements des administrations publiques a reculé de 1,5 % (faisant suite à un repli de 0,4 % en 2001) et a contribué négativement à la croissance de l’année. Pendant la même période, la consommation effective des administrations publiques, quant à elle, continuait à progresser significativement (+ 2,6 en volume pour 2002 après + 2,4 en 2001).

Les résultats, encore non définitifs, des comptes nationaux trimestriels pour le début de l’année 2003 semblent toutefois montrer que la FBCF des APU a légèrement plus progressé en volume que leurs dépenses de consommation (+ 0,3 % contre + 0,1 % au premier comme au deuxième trimestre), par opposition à ce qui avait été constaté pour les six mois précédents (progression de 0,7 % des dépenses de consommation des APU aux troisième et quatrième trimestre 2002 contre, respectivement, - 1,1 % et - 0,7 % pour l’investissement).

On doit néanmoins relever que les annulations de crédits opérées en 2003 (pour un montant total de 2,5 milliards d’euros) ont porté pour plus de la moitié sur des dépenses d’investissement.

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Le constat qui vient d’être dressé de la situation conjoncturelle ne doit pas conduire au renoncement que signifierait une simple posture d’attente de la reprise internationale, qui permettrait à l’Europe – et en particulier à la France – de redémarrer, avec un certain décalage, dans la foulée des Etats-Unis. Il convient, au contraire, dans chacun des domaines évoqués, d’explorer les voies et Les moyens d’une réponse de la politique économique et sociale permettant à l’Europe en général et à la France en particulier de faire face aux chocs actuels.

Instruments adaptés utilisables par les pouvoirs publics existent assurément mais cela suppose d’en définir le dosage avec précision. C’est à cet exercice qu’est précisément consacré le chapitre II.

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