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CHAPITRE I LA CROISSANCE FRANÇAISE PEINE À SORTIR DE

4. Les problèmes posés par la politique de l’emploi

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Selon l’enquête emploi, le taux de chômage au sens du BIT s’élevait, au premier trimestre 2003, à 16,9 % chez les 15-29 ans contre 15,5 % au premier trimestre 2002. Dans cet ensemble, 26 % des hommes (soit 123 000 personnes) étaient au chômage depuis un an ou plus (contre 22,5 % en 2002) et 10,7 % (soit 51 000 personnes) depuis deux ans ou plus (contre 11,1 %). Les données pour les femmes font apparaître une ancienneté au chômage légèrement moindre que pour les hommes (un an ou plus : 26 % ; deux ans ou plus : 8,7 %) et en diminution, ce qui s’explique en partie par le retrait de certaines d’entre elles du marché du travail.

L’insertion professionnelle des jeunes est donc, au total, plus problématique encore que dans le passé récent : le taux d’activité des moins de 15-24 ans est, en France, de 36,9 % contre 47,4 % en moyenne dans l’Union européenne (voir figure 4 en annexe). Ils alternent de plus en plus des périodes de chômage – qui concerne un jeune de moins de 25 ans sur quatre – et de sous-emploi ou d’sous-emploi précaire et sont parfois conduits à élaborer des stratégies d’évitement comme l’allongement de la scolarité (43,2 % des 20-24 ans étaient ainsi scolarisés en mars 2002 contre 16,6 % en mars 1980, voir figure 5 en annexe) qui ne procurent pas une garantie absolue contre le chômage. Il est donc plus nécessaire que jamais de mener une politique active de l’emploi orientée en particulier vers ce public, en complément des efforts également indispensables de formation.

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Graphique 4 : La valeur ajoutée anticipée et réalisée dans l'industrie (glissement annuel, en %)

Source : Lettre de l’OFCE n°241 (juillet 2003) d’après l’INSEE.

Dans le passé, toute remontée du chômage s’était accompagnée d’une augmentation des effectifs aidés, tous types de contrats confondus : de 1982 à 1987, la croissance du chômage a toujours été positive, elle a été réduite en moyenne de 125 000 personnes par an, d’abord par la mise en place des Travaux d’utilité collective (TUC), aujourd’hui remplacés par les Contrats emploi solidarité (CES) ; l’envolée du chômage du début des années 1990 a été freinée par la création de 200 000 emplois aidés supplémentaires au moment de la récession de 1993, notamment par l’intensification des programmes de stage ; enfin, à la suite de la reprise avortée de 1995, la montée du chômage a été limitée par la création de 150 000 emplois, notamment avec la mise en place de contrats aidés dans le secteur marchand.

L’orientation de la politique de l’emploi pour 2003 a été définie en deux temps : en octobre 2002, le projet de loi de Finances pour 2003 prévoyait une forte baisse des emplois aidés, prolongeant les réductions d’effectifs aidés initiées en 2000, en période de forte croissance ; avec la montée du chômage à un rythme mensuel de 20 000 personnes au début de l’année 2003, le gouvernement a annoncé, lors de la table ronde pour l’emploi du 18 mars 2003, que la réduction du nombre de contrats aidés serait finalement moindre que ce qui était prévu.

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Compte tenu des choix définis en octobre 2002 et en mars 2003, la politique de l’emploi a été réorientée vers le secteur marchand (dont les contrats aidés concernaient 1,06 million de personnes à la mi-2003), notamment avec la création des contrats jeunes62. En revanche, l’emploi aidé dans le secteur non marchand doit connaître globalement un recul de 8 % en 2003, soit 38 000 personnes sur les 469 000 personnes aidées en 2002 (27 000 emplois jeunes en moins, 20 000 personnes de moins employées en CES63 et 9 000 nouveaux contrats de type Contrat d'insertion à la vie sociale (CIVIS)64). Aider ainsi les emplois du secteur marchand permet de diminuer de façon ciblée le chômage de certaines catégories, notamment des jeunes, mais en substitution avec d’autres types de chômeurs ou parfois à un même emploi qui aurait été créé sans aide (effet d’aubaine). C’est pourquoi ces aides au secteur marchand devraient avoir un faible impact à court terme sur le chômage. En revanche, la diminution des emplois aidés du secteur non marchand devrait faire très sensiblement remonter le chômage en 2003 et 2004 : elle s’est déjà traduite par 13 000 suppressions d’emplois au deuxième trimestre après 24 000 au cours du trimestre précédent.

En tout état de cause, on voit mal, dans ces conditions, comment le gouvernement pourrait atteindre son objectif de 130 000 créations d’emplois en 2004, après un recul attendu de 100 000 en 2003 (voir figure 10 en annexe).

62 Le gouvernement compte sur 245 000 contrats signés d’ici la fin 2004, permettant la création nette de 40 000 emplois.

63 En 2002, 140 000 personnes étaient employées avec un contrat de type CES. En 2003, 240 000 contrats d’une durée moyenne de 6 mois seraient signés et 120 000 personnes seraient donc employées en fin d’année, soit 20 000 personnes de moins qu’en 2002.

64 Le CIVIS est un nouveau contrat destiné à insérer les jeunes par une activité d’utilité sociale en association. 25 000 contrats de ce type seraient créés par le gouvernement au cours des trois prochaines années.

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Encadré 6 : Les six premiers mois de mise en oeuvre des Contrats jeunes en entreprise

Créé par la loi n°2002-1095 du 29 août 2002 portant création d’un dispositif de soutien à l’emploi des jeunes en entreprise, le Contrat jeune en entreprise (CJE) est une mesure pérenne destinée aux jeunes âgés de 16 à 22 ans révolus ayant un faible niveau de qualification (au plus égal à la dernière année de l’enseignement secondaire long général, technique ou professionnel sans obtention du baccalauréat) et embauchés par des entreprises et des associations entrant dans le champ de l’UNEDIC. Le contrat de travail doit être à durée indéterminée, à temps complet ou à temps partiel au moins égal à un mi-temps. La mesure prend en compte les contrats signés à partir du 1er juillet 2002. L’aide de l’Etat dure trois ans. Elle est octroyée sous une forme forfaitaire (225 euros par mois) pour l’embauche d’un salarié rémunéré au SMIC pendant deux ans (50 % de ce montant pendant la troisième année). Elle est cumulable avec les allègements existants. Le montant de l’aide de l’Etat est majoré jusqu’à 292,5 euros, proportionnellement à la partie du salaire excédant le SMIC dans la limite de 130 % du SMIC applicable dans l’entreprise. Lorsque le salarié est embauché à temps partiel, le montant de l’aide est diminué à due proportion du temps de travail prévu au contrat.

La gestion de la mesure est confiée à l’UNEDIC.

De l’été 2002 à la fin janvier 2003, 50 000 demandes de conventions de CJE ont été déposées auprès des ASSEDIC et 45 875 ont d’ores et déjà été traitées. La montée en charge de ce dispositif, destiné à favoriser l’embauche des jeunes peu qualifiés, s’est fortement accélérée à la fin du second semestre de 2002. Selon une étude de la DARES65, plus des deux tiers des recrutements concernent des garçons. Les jeunes femmes sont embauchées majoritairement dans le secteur tertiaire et quatre fois sur dix à temps partiel, contre une fois sur dix pour les jeunes hommes. Trois contrats sur cinq sont conclus par des entreprises de moins de dix personnes. Avant leur entrée dans la mesure, trois jeunes sur dix étaient au chômage et près de six sur dix étaient en emploi : le dispositif, un contrat à durée indéterminée, semble favoriser la sortie de la précarité pour des jeunes faiblement diplômés qui y sont fréquemment confrontés.

B - DES RISQUES IMPORTANTS CONCERNANT LA CONSOMMATION PRINCIPALEMENT EN LIEN AVEC LA BAISSE DU POUVOIR DACHAT DES MÉNAGES

La tendance constatée depuis deux ans est au ralentissement du pouvoir d’achat des ménages confrontés à la remontée du chômage et à la stabilité de leurs revenus : sa progression est passée de 3 % en moyenne entre 1998 et 2001 à 1,9 % en 2002 ; elle ne devrait pas dépasser 1 % en 2003 et le rebond attendu en 2004 par le gouvernement est loin d’être assuré. En tout état de cause, tout repose sur le retour de la confiance, qui suppose des avancées significatives aussi bien au plan de l’emploi que du niveau de vie.

65 « Les six premiers mois de mise en œuvre des Contrats jeunes en entreprise », Premières informations et premières synthèses, n°15.1, avril 2003. Les données exploitées portent sur 38 830 demandes au 31 janvier 2003.

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