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Déconstruction des stéréotypes sexués et préparation à l’autonomie

Si les filles réussissent globalement mieux que les garçons sur le plan scolaire, elles demeurent encore trop peu présentes dans les filières les plus porteuses d’emplois.

La Convention interministérielle pour l’égalité entre les filles et les garçons, les femmes et les hommes dans le système éducatif, signée pour 5 ans le 29 juin 2006, avait pour objectif de permettre aux filles et aux garçons de sortir de tout déterminisme sexué de l’orientation en mettant en œuvre des actions en direction des jeunes, élèves et étudiants, mais également des parents et de l’ensemble de la communauté éducative, ainsi qu’avec les branches professionnelles, afin que l’information délivrée sur les filières de formation et les métiers encourage filles et garçons à suivre de nouveaux parcours.

Il s’agissait également de promouvoir l’égalité entre les sexes dans le cadre du système éducatif et ainsi de faire évoluer la société dans son ensemble. La Convention précisait que cet apprentissage de l’égalité, basé sur le respect de l’autre sexe, implique notamment la mise en œuvre d’actions de prévention des comportements et violences sexistes. Dans ce cadre s’inscrivait la généralisation des séances d’éducation à la sexualité « en développant parallèlement à l’information sur la connaissance du corps humain et sur la contraception, notamment d’urgence, la question du respect mutuel entre les sexes ».

On notera qu’une évaluation de l’action de chaque ministère ainsi qu’un bilan de l’activité interministérielle devaient être établis à mi-parcours, soit avant la fin de l’année 2008, mais cette évaluation n’a jamais été réalisée.

Une nouvelle Convention interministérielle est sur le point d’être signée à l’initiative conjointe des ministres des droits des Femmes et de l’Éducation nationale.

Parmi les outils de cette Convention figure la mise en place de modules égalité femmes-hommes qui seront intégrés dans la formation du corps enseignant. La délégation aux droits des femmes et à l’égalité se félicite de cette disposition qu’elle avait préconisée dans l’étude sur Le bilan de l’application des dispositifs promouvant l’égalité professionnelle entre femmes et hommes, rapportée par Sylvie Brunet et Maryse Dumas et publiée en mars 2012. Elle rappelle qu’au-delà de l’inscription obligatoire de tels modules dans le cursus de formation (initiale et continue) des enseignants, l’ensemble de la communauté éducative, y compris les personnels de direction et les membres des corps d’inspection, devrait être sensibilisé à cette thématique.

ٰPromotion de la mixité dans l’orientation et la formation initiale

La surreprésentation des femmes dans l’emploi précaire s’explique aussi par l’orientation scolaire des filles et la permanence des stéréotypes sur leur place et leur rôle dans la société, intériorisés tant par elles que par les garçons. Délaissant les filières et les emplois réputés masculins au profit de celles et ceux connotés féminins, les filles s’orientent ou sont orientées dans des filières moins rentables, financièrement et en terme d’avenir professionnel, les plaçant dans des situations plus instables.

« L’avenir est mixte » ainsi que le développe, exemples à l’appui, le site de l’ONISEP, dans sa rubrique Déclic métiers ce qui témoigne d’une intégration de la problématique de l’égalité entre les sexes dans les documents d’aide à l’orientation.

Afin d’accompagner et d’accélérer cette évolution, la délégation aux droits des femmes et à l’égalité réitère des recommandations figurant dans ses précédentes études105. Elle suggère en particulier :

- de promouvoir la mixité des métiers et d’enlever, à cet égard, les œillères des garçons comme des filles lors des parcours de découverte des métiers et des formations, généralisés depuis la rentrée 2009, au bénéfice de tous les élèves de la cinquième à la terminale de lycée d’enseignement général et technologique ainsi que de lycée professionnel ;

- d’organiser des rencontres dans les établissements d’enseignement avec des femmes exerçant des métiers scientifiques ou techniques permettant de découvrir leur variété et leur intérêt.

Cette suggestion vaut tout particulièrement pour les jeunes filles issues de l’immigration qui envisagent encore moins souvent que les autres de travailler dans le secteur de la recherche (0,6 % contre 4,5 % en 2008). Une information plus ciblée des intéressées apparaît à cet égard particulièrement nécessaire ;

- de soutenir les actions de communication des secteurs professionnels peu féminisés pour promouvoir la mixité et d’y développer l’alternance qui implique l’entreprise dans le processus de formation, pour ouvrir de nouvelles perspectives aux jeunes filles et lever leurs réserves vis-à-vis de certains secteurs porteurs d’emplois. Une initiative de même nature pourrait utilement être développée dans les secteurs très féminisés (paramédical, travail social, services à la personne) afin d’inciter les garçons à s’orienter vers des métiers où les débouchés sont nombreux et appelés à se développer encore à l’avenir ;

- de renforcer la prise en compte de l’égalité entre les sexes dans les conventions de coopération avec les branches professionnelles, conformément à l’accord national interprofessionnel du 1er mars 2004 sur la mixité et l’égalité professionnelle.

105 1968-2008 : Évolution et prospective de la situation des femmes dans la société française. Pierrette Crosemarie - Janvier 2009.

Bilan de l’application des dispositifs promouvant l’égalité entre les femmes et les hommes. Sylvie Brunet et Maryse Dumas - Mars 2012.

ٰPromotion d’une éducation fondée sur le respect mutuel des deux sexes

Généraliser, dès la maternelle, l’information sur la connaissance du corps et le respect mutuel entre filles et garçons dans le cadre d’une éducation non-sexiste constituait déjà un objectif inscrit dans la première Convention interministérielle pour la promotion de l’égalité des chances entre les filles les garçons dans le système éducatif, signée le 25 février 2000 soit depuis bientôt 13 ans.

Concomitamment, la loi du 4 juillet 2001 a confié à l’école une mission spécifique en matière d’éducation à la sexualité, considérée comme une composante essentielle de la construction de la personne et de l’éducation du citoyen.

Cette démarche participait également d’une politique plus large de prévention et de protection des jeunes au regard d’un certain nombre de risques (grossesses précoces non désirées, infections sexuellement transmissibles, violences…). La circulaire du 17 février 2003 fixe le cadre et établit les références de cette éducation « qui se fonde sur les valeurs humanistes de tolérance et de liberté, du respect de soi et d’autrui et doit trouver sa place à l’école sans heurter les familles ou froisser les convictions de chacun ».

Ainsi que l’a souligné l’étude de la délégation sur La santé des femmes en France, rapportée par Dominique Hénon et adoptée en juillet 2010, « il n’y a rien à ajouter à ce texte, il faut simplement se donner les moyens de le faire vivre ».

La circulaire prévoit, en particulier, un partenariat entre personnels éducatifs, de santé scolaire et intervenants extérieurs (associations de planning familial notamment) et un cofinancement des interventions entre les services de l’État et les Conseils généraux ou régionaux.

L’étude précitée observait, en outre, que pour de nombreuses adolescentes, qui ne peuvent ou ne veulent pas évoquer les questions de sexualité et de contraception dans leur environnement familial, l’infirmerie scolaire constitue un lieu d’accueil et d’écoute où une relation de confiance et un dialogue peuvent s’établir en toute confidentialité.

L’infirmière scolaire apparaît, en particulier, comme la personne ressource la mieux à même d’agir dans le cadre de la prévention des grossesses chez les adolescentes, phénomène qui touche particulièrement les jeunes filles issues des milieux défavorisés - où la sexualité est souvent un tabou - et renforce encore leur situation de précarité.

Selon le rapport remis, en février 2012, par le professeur Israël Nisand106 à Jeannette Bougrab, alors Secrétaire d’État chargée de la jeunesse, en 2010 environ 16 000 mineures ont été enceintes dont 4 000 sont allées au bout de leur grossesse, le recours à l’IVG étant plus fréquent dans ce cas qu’auparavant (le nombre d’avortements chez les mineures est passée de 8 700 en 1990 à 12 000 en 2010).

La délégation aux droits des femmes et à l’égalité réitère donc la recommandation figurant dans son étude sur La santé des femmes en France. Elle porte sur le renforcement des effectifs des services de santé scolaire : médecins, infirmièr(e)s mais aussi secrétaires médicales dont le rôle est si important pour le suivi et les relais entre les différents intervenants (médecins, assistantes sociales, familles).

106 Et si on parlait de sexe à nos ados. Israël Nisand, Brigitte Letombe et Sophie Marinopoulos. Éditions Odile Jacob - Février 2012.

Ce renforcement des moyens devrait bien entendu concerner les établissements d’enseignement d’Outre-mer où l’information sexuelle et la prévention des grossesses chez les mineures se heurtent à de nombreux freins.

Le préalable de l’amélioration de l’information doit être complété par la garantie d’un accès anonyme et gratuit des mineures aux différentes méthodes contraceptives, tel qu’inscrit dans la loi de financement de la sécurité sociale adoptée par l’Assemblée nationale le 3 décembre 2012, qui prévoit également le remboursement à 100 % de l’IVG pour toutes les femmes.