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CROISSANCE DE COUCHES MINCES D’YSZ SUR SAPHIR

Croissance de couches minces d’YSZ sur saphir

CHAPITRE 2. CROISSANCE DE COUCHES MINCES D’YSZ SUR SAPHIR

2.1 Introduction

L’YSZ est très largement utilisé comme couche mince tampon pour limiter l’in-terdiffusion des ions dans le substrat au cours de la croissance et pour accorder les paramètres de maille entre la plupart des oxydes fonctionnels et le silicium. Sans cet accord de maille, la qualité cristalline et les propriétés des oxydes fonctionnels peuvent être largement dégradées. L’intégration de ces matériaux pour des applica-tions en photonique silicium passe donc par la caractérisation complète de la crois-sance et des propriétés physiques de l’YSZ. Pour caractériser l’YSZ en optique in-tégrée, nous devons considérer un substrat transparent dans les longueurs d’onde télécoms et disponible sur le marché.

Le saphir (Al2O3) présente comme l’YSZ une grande stabilité thermique, chi-mique et mécanique [1, 2]. Il est donc le candidat idéal comme substrat pour cette étude. Ces substrats possèdent également une large fenêtre de transparence (figure 2.1) et un contraste d’indice de réfraction avec l’YSZ (nYSZ = 2.15, nsaphir = 1.74) qui permet un bon confinement de la lumière dans l’YSZ aux longueurs d’onde té-lécoms [1,3–5].

FIGURE2.1 – Fenêtre de transparence a) du saphir issu de [6] et b) de l’YSZ issu de [7].

L’utilisation d’oxydes fonctionnels en photonique n’est possible que si leur ab-sorption dans les longueurs d’onde utilisées est faible. Autrement dit, il faut que l’oxyde soit intrinsèquement le plus transparent possible (peu de transitions vibra-tionnelles dans l’IR) et que la densité de défauts absorbants formés au cours de la croissance soit faible.

La transparence intrinsèque d’un matériau est caractérisée de manière générale par son coefficient d’absorption µ(λ) intervenant dans la loi de Beer-Lambert [8] : I/I0 = eµρx où I/I0 est le rapport d’intensité de l’onde transmise sur l’onde in-cidente après avoir traversé une distance x dans un matériau de masse volumique

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ρ. Les défauts apparaissant lors de la croissance, comme les dislocations, lacunes, inclusions ou écarts à la stoechiométrie, sont responsables de la dégradation des propriétés du matériau et même dans certains cas d’une forte augmentation de son absorption [9]. Il est donc impératif d’optimiser la croissance cristalline pour les évi-ter. Cependant, l’identification et la quantification des différents types de défaut est un travail souvent très compliqué qui requiert un lourd investissement expérimen-tal [10].

L’étude présentée dans ce chapitre consiste en l’optimisation de la qualité cris-talline d’YSZ lorsque celui-ci est déposé sur substrat de saphir par ablation laser pulsé (PLD). Après une brève description des outils de caractérisation utilisés, nous discuterons des résultats d’optimisation concernant le choix du substrat (saphir C ou R) et des différents paramètres de croissance. Finalement les méthodes utilisées pour contrôler l’orientation du film et la caractérisation des relations d’épitaxie se-ront présentées.

2.2 Les outils de caractérisation

Les caractérisations des couches minces d’YSZ ont été effectuées par Diffraction des Rayons X (XRD, GIXRD), Microscopie à Force Atomique (AFM) et plus locale-ment par Microscopie Electronique en Transmission (TEM).

2.2.1 Diffraction des rayons X

La diffraction des rayons X est l’outil par excellence pour la caractérisation des matériaux possédant un ordre atomique à longue portée. La longueur d’onde des rayons X utilisée (λCu Kα1 = 1,540 598 Å) est du même ordre de grandeur que la périodicité de la plupart des réseaux cristallins, autorisant le phénomène de dif-fraction. Au premier ordre, l’analyse de cette diffraction permet de déterminer les propriétés de symétrie et la structure cristalline du matériau diffractant. Les pre-miers à l’avoir fait en 1913 sont William Henri Bragg et son fils William Lawrence Bragg avec un cristal de chlorure de sodium NaCl [11]. Ils reçurent d’ailleurs pour cela le prix Nobel de Physique en 1915. D’autres analyses plus sophistiquées comme le raffinement Rietveld [12], peuvent quant à elles permettre de déterminer par la simulation de différents paramètres les types et densités de défauts, les positions des atomes dans la maille ou encore les écarts à la stochioemetrie.

Les conditions de diffraction

La première approche de Bragg pour comprendre le phénomène consiste à ima-giner les atomes du réseau cristallin comme des centres diffuseurs périodiques à trois dimensions. Lorsque les rayons X incidents interagissent avec le nuage élec-tronique des atomes du cristal, ils sont diffusés dans toutes les directions par tous les atomes irradiés. La direction pour laquelle la différence de chemin optique entre deux ondes diffusées est un multiple de la longueur d’onde, est alors la direction d’interférences constructives et donc d’intensité diffractée maximale.

La figure 2.2 présente la diffusion des rayons X par une famille de plans (hkl) séparés d’une distance dhkl le long du vecteur de base a de l’espace réel. L’onde incidente arrive avec un angle θ par rapport à la surface. La différence de marche

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δ pour une interférence constructive peut-être calculée de deux manières équiva-lentes. L’une nous donnera la relation de Bragg (dans l’espace réel) et l’autre mettra en évidence la condition de Laue (dans l’espace réciproque). Cette différence de marche δ, représentée en vert sur la figure pour une famille de plan(hkl), peut tout d’abord s’exprimer comme :

δ =2dhklsin(θ) (2.1) dont la loi de Bragg, correspondant aux conditions d’interférences constructives est évidemment issue :

2dhklsin(θhkl) = (2.2)

FIGURE 2.2 – Représentation schématique simple d’une colonne atomique diffusant les rayons X incidents. La distance interéticulaire est représentée par un vecteura de norme dhkl. L’onde incidente et diffusée, de vecteur d’ondeki et k respectivement, forment un angle θ avec la famille de plans atomiques et ont une différence de marche δ représentée en vert. La condition de diffraction sur l’angle θ s’exprime par la loi de Bragg et sur le vecteur

−→

∆k par la condition de Laue.

Avec |ki| = |k | = 1/λ (condition de diffusion élastique), la différence de marche peut également s’écrire comme

δ =λ−→

a · (k −ki) (2.3) et donc la condition d’interférence constructive

λ−→

a · (kki) = (2.4) Le produit scalaire entre le vecteur de l’espace réel a et le vecteur de l’espace réciproque∆k= (−→

k −ki)doit donc être un entier p pour permette une interférence constructive. A trois dimensions, ceci est vérifié si et seulement si∆k=−→

q oùq est un vecteur de l’espace réciproque reliant deux nœuds, défini par :

−→

∆k=−→

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a, b et c sont les vecteurs de base de l’espace réciproque et h, k et l les indices de Miller du noeud pointé par le vecteurq .

Extinction et intensité diffractée

L’intensité diffractée est le résultat de la diffusion des électrons de chaque atome présent dans chaque maille du réseau cristallin. Dans le cas de la diffusion des rayons X, l’énergie des photons incidents et diffusés est très supérieure aux éner-gies de liaison des électrons. Il est donc justifié de considérer la conservation de la quantité de mouvement lors du processus|k | = |ki| = 1/λ. Dans ces conditions la section efficace différentielle de diffusion élastique est [13,14] :

 dσ dΩ



=r2eP()2|F(−→

∆k)|2 (2.6) dans laquelle nous identifions la section efficace différentielle de diffusion Thomp-son pour un électron.

 dσ dΩ



Th

=r2eP()2 (2.7) avec P()2= 1+cos22() le facteur de polarisation dans le cas d’une source X non polarisée et re le rayon de l’électron.

F(−→

∆k) = F(−→

q ) (en condition de Laue) représente la transformée de Fourier de la densité électronique totale du cristal. Dans l’approximation cinématique, c’est à dire en considérant négligeable l’intensité du faisceau diffracté devant celui inci-dent, F(−→

q ) s’écrit comme la somme des diffusions de chaque atome j du cristal positionné enrj : F(−→ q ) = cristal

j fjXe2iπq·−rj (2.8) avec |F(−→ q )| = |−→

∆k| = 2sin(θ)/λ le vecteur de diffusion et fX le facteur de diffusion atomique de l’élément X. Ce dernier peut s’exprimer comme l’intégrale de la densité électronique de l’atome pour une distribution sphérique :

fX = Z

0 4πr2ρXe (−→

r )sin(2πqr)

2πqr dr (2.9) Cette expression nous indique que la diffusion d’un atome diminue lorsque|−q |

augmente. L’intensité diffusée sera donc plus faible aux grands angles θ. Ceci peut s’interpréter classiquement par un déphasage entre les ondes diffusées par les dif-férentes régions du nuage électronique. Il est important également de remarquer qu’aux petits angles fX(−→

q =0) = ZX où ZXest le nombre d’électrons de l’élément X. Il existe donc un contraste entre les atomes légers et lourds lors du processus de diffraction.

Le facteur de structure F(−→

q ) de l’équation2.8 peut se décomposer comme une somme sur le motif atomique d’une maille et une somme sur toutes les mailles du réseau cristallin.

CHAPITRE 2. CROISSANCE DE COUCHES MINCES D’YSZ SUR SAPHIR F(−→ q ) = moti f

k fkXe2iπq·−rk reseau

l e2iπ(hxl+kyl+lzl) (2.10) L’intensité diffractée dans une direction quelconqueq =ha+kb +lc s’écrit alors de manière générale par

I = F(−→q )2L(hkl)2exp(2Bsin

2hkl)

λ ) (2.11) où L(hkl)est le facteur de forme qui tient compte de la taille finie du cristal et le terme en exponentiel représente l’agitation thermique avec B le facteur de Debye-Waller.

Le cas du YSZ

Dans le cas du YSZ, cristallisant dans le groupe d’espace Fm-3m (réseau faces centrées), le motif est composé des atomes de zirconium ou yttrium sur les sites 4a en (0, 0, 0) et des oxygènes sur les sites 8c en (1/4,1/4,1/4) et (1/4,1/4,3/4). Nous pouvons donc calculer au premier ordre le facteur de structure pour une direc-tion [hkl] :

FYSZ(hkl) = hfO(e2iπ(h/4+k/4+l/4)+e2iπ(h/4+k/4+3l/4)) +fY/Zri

×h1+e(h+k)+e(h+l)+e(l+k)i

(2.12) où fO et fY/Zr sont respectivement les facteurs de diffusion atomique de l’oxygène et de l’yttrium/zirconium.

Les couches minces d’YSZ sur saphir, dont nous discuterons dans la suite présentent deux directions de croissance. Celles-ci ont été déterminées par la diffraction en incidence normale des plans (111) et (002) séparés de ∆2θ = 5°. Pour ces deux familles de plans les facteurs de structures sont :

FYSZ(002) =4 fO(e+ei3π) +4 fY/Zr =4 fY/Zr8 fO (2.13)

et

FYSZ(111) =4 fO(ei3π/2+ei5π/2) +4 fY/Zr =4 fY/Zr (2.14) En prenant en première approximation fX = ZX, c’est à dire fO = 8 et fY/Zr ≈ fZr = 40 nous obtenons FYSZ(111) = 160 et FYSZ(002) = 96. Le pou-voir de diffusion des plans (111) est donc plus fort que celui des plans (002) du YSZ. Pour un même volume diffractant, l’intensité diffractée par la famille de plan (111) sera supérieure à celle des plans (002).

Le calcul précédent permet de mieux comprendre l’origine de cette diffé-rence mais n’est pas suffisant pour une comparaison des volumes diffractés se-lon les deux directions. Pour cela, et ce sera fait dans la suite du chapitre, nous

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