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Chapitre 2. Modélisation environnementale des bâtiments

3.2. Méthodes d’analyse de sensibilité employées

3.2.4. Criblage de Morris

La méthode de Morris (1991), aussi appelée méthode des effets élémentaires (Saltelli et al., 2008), est une autre méthode de criblage. Elle permet d’avoir des informations sur l’importance d’un facteur mais aussi sur les effets non-linéaires et d’interactions liées à ce facteur. C’est pour ces raisons que cette méthode a été retenue.

3.2.4.1.

Méthode d’exploration de l’espace

Pour cette méthode, nous faisons correspondre l’intervalle de variation de chaque facteur à un intervalle sur . L’ensemble de l’espace à explorer peut-être représenté par une grille de nœuds dans un hypercube . Chaque nœud correspond à l’intersection des niveaux pour les différents paramètres. Si chaque facteur a niveaux, alors ces niveaux sont et la grille est constituée de nœuds.

La bonne exploration de l’espace repose sur la répétition de plans d’expérience OAT. Pour ce faire, des chemins sont réalisés aléatoirement sur la grille en faisant des sauts d’un nœud à l’autre sur la grille. À chaque répétition, le nœud de départ est tiré aléatoirement. Les nœuds suivants sont ensuite obtenus en ne modifiant que la valeur d’un facteur à chaque saut. Afin d’explorer tout l’espace, sans favoriser de zones, Morris (1991) conseille de choisir un nombre de niveau de discrétisation pair et de faire des sauts de longueur . Vu le plan d‘expérience proposé par la méthode de Morris, le nombre de simulations à réaliser vaut . En effet, pour chaque répétition du plan d‘expérience, il faut simuler le nœud de départ et les nœuds suivants sur le chemin.

À titre d’exemple, deux chemins ont été tracés dans la figure 3-1 dans le cas où deux paramètres incertains sont considérés. Six niveaux de discrétisation ont été retenus, le saut d’un nœud à l’autre a donc pour longueur . Les chemins sont représentés par les trajectoires rouge et verte.

Chapitre 3. Identification de facteurs incertains influents

Partant de points de départ tirés aléatoirement et représentés par des ronds bleus, les valeurs de chaque facteur varient à tour de rôle et sont modifiées de la valeur du saut. À chaque variation de la valeur d’un facteur, une simulation est réalisée pour connaître la sortie du modèle.

Figure 3-1. Exemple de répétition de deux plans OAT pour deux facteurs incertains 1 et 2 et une discrétisation en six niveaux pour chaque facteur

3.2.4.2.

Détermination de l’influence des facteurs

L’étude de l’influence des facteurs repose sur le calcul d’effets élémentaires . Pour chacune des répétitions, lorsque la valeur du -ème facteur varie, l’amplitude de la variation en sortie du modèle est calculée relativement à l’amplitude de la variation en entrée :

(3.3)

avec l’indice de la répétition en cours.

La moyenne des effets élémentaires pour un facteur donne des informations sur l’importance du facteur.

(3.4)

Afin d’éviter que des effets élémentaires de signes opposés ne se compensent, la moyenne des valeurs absolues des effets élémentaires peut aussi être calculée comme dans l’équation (3.5). Plus est grand, plus l’effet du facteur est important.

0,8 0 0,2 0,4 0,6 1 0 1 0,8 0,6 0,4 0,2 Facteur 1 Fa ct eu r 2

3.2. Méthodes d’analyse de sensibilité employées

(3.5)

L’écart-type des effets élémentaires est aussi calculé pour chaque facteur comme dans l’équation (3.6). Un grand implique que l’effet du facteur varie en fonction de l’endroit de l’espace exploré. Cela traduit des effets d’interactions et / ou des non-linéarités.

(3.6)

Il est possible de résumer l’information basée sur le calcul des effets élémentaires en traçant en fonction de À chaque facteur correspond un point dans le graphique de Morris et ils peuvent être classés visuellement en trois groupes :

- Les facteurs proches de l’origine du graphique (groupe A, figure 3-2), ayant une faible valeur de et ont des effets négligeables, ils sont peu influents.

- Les facteurs proches de l’axe des abscisses (groupe B, figure 3-2) sont influents (grand ), mais ne présentent pas d’interactions ou n’induisent pas de non-linéarité (faible ).

- Les autres facteurs (groupe C, figure 3-2) sont influents et comportent des interactions ou des non-linéarités.

Figure 3-2. Exemple de graphique de Morris montrant une classification des facteurs incertains en trois groupes selon leur influence

Afin d’obtenir un classement de ces facteurs en fonction de leur influence, en considérant à la fois les effets linéaires et additifs et les effets non-linéaires et d’interactions, nous considérons deux indicateurs. D’une part, peut être utilisé comme un proxy d’indice de sensibilité total basé sur la

0 200 400 600 800 1000 0 200 400 600 800 1000

σ

μ*

A

B

C

Chapitre 3. Identification de facteurs incertains influents

permet de prendre en compte les effets non-linéaires. Et d’autre part, nous étudions la distance euclidienne à l’origine du graphique de Morris pour chaque facteur (Munaretto, 2014 ; Recht et al., 2014), en considérant que plus le point correspondant à un facteur est éloigné de l’origine sur le graphique de Morris (c'est-à-dire plus µ* est grand, ou plus σ est grand), plus ce facteur aura de l’influence sur les résultats :

(3.7)

3.2.4.3.

Influence du type de facteur

La méthode du criblage de Morris a été définie à l’origine pour des facteurs ordonnés. En présence d’entrées catégorielles, il est nécessaire d’adapter le calcul des effets élémentaires. En effet, ce calcul dépend de la variation de la valeur des facteurs et traduit le classement des valeurs les unes par rapport aux autres (effet d’un doublement de la valeur d’une entrée par exemple). Or, les entrées catégorielles sont par définition non ordonnées. Il n’est donc pas possible de réaliser de graduation. Pour solutionner ce problème, nous avons choisi ici de calculer les effets élémentaires pour les variables catégorielles de la manière suivante :

(3.8)

avec et , deux alternatives pour la variable catégorielle .

Nous considérons que le saut vaut toujours 1 pour les variables catégorielles pour ne pas imposer un ordre. De plus, la valeur absolue de l’effet élémentaire permet de conserver toujours le même signe pour les effets élémentaires d’une variable catégorielle, l’ordre des alternatives pouvant être interverti. Cela est utile pour ne pas augmenter artificiellement la variabilité et donc l’importance de la variable lors du calcul du σ. De cette manière, quelle que soit la valeur prise par la variable catégorielle il est possible de calculer un effet, sans classer les valeurs discrètes les unes par rapport aux autres. Le paquet de fonction ‘sensitivity’ du logiciel R qui contient la méthode de Morris a été adapté pour que les effets élémentaires des variables catégorielles soient calculés comme dans (3.8)56 pour les variables catégorielles.

3.2.4.4.

Étude de la précision des indices

Il est généralement recommandé de réaliser entre 5 et 10 répétitions de plans d’expérience OAT (Faivre et al., 2013 ; Iooss, 2011). Cependant, dans des études en thermique du bâtiment, un nombre plus important de répétitions, variant de 15 à 100, a été réalisé (Recht et al., 2014 ; Vorger, 2014 ;

56

Cette modification de fonction tell.morris du package sensitivity de R a été implémentée dans le script cœur de la méthode du criblage de Morris dans la plateforme de simulation.

3.2. Méthodes d’analyse de sensibilité employées Robillart, 2015). Nous avons donc étudié le nombre de répétitions d’OAT à faire pour garantir des résultats stables. Pour ce faire, des intervalles de confiance sur les indices ont été calculés en utilisant une procédure de ré-échantillonnage par bootstrap. La démarche suivante est appliquée :

1. Un tirage aléatoire avec remise est effectué sur les trajectoires du plan d’expérience de Morris. On obtient alors un nouveau plan d’expérience (de même taille que celui de départ) avec les lignes associées à une trajectoire placées à un autre endroit du plan ou se répétant plusieurs fois.

2. Les sorties du plan d’expérience bootstrap sont reprises dans les sorties associées au plan d’expérience de base en se basant sur le nouvel ordre des trajectoires.

3. Les , , et sont calculés pour toutes les sorties. 4. Les étapes 1, 2 et 3 sont répétées fois.

Les trois méthodes présentées ci-après sont des méthodes d’AS globales. Elles ne font plus appel à une discrétisation de l’espace en niveaux, mais explorent l’ensemble des plages de variation des facteurs incertains.