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Couplage adsorption/transport dans les matériaux poreux

1.4 Couplage adsorption/transport dans les matériaux

po-reux

Si l’efficacité du traitement des eaux polluées par adsorption dépend de manière certaine des propriétés chimiques de l’adsorbant i.e. de sa capacité à retenir les espèces polluantes, il n’en est pas moins nécessaire de prendre en compte le transport des espèces vers les sites actifs d’adsorption. En effet le meilleur site actif serait complètement inutile si les molécules n’arri-vaient jamais jusqu’à lui. La recherche du meilleur compromis entre capacité de physisorption, surface spécifique et transport est la clef pour l’optimisation des capacités d’adsorption des matériaux. Ainsi l’étude du couplage transport/adsorption apparait comme l’un des princi-paux enjeux scientifiques actuels dans le domaine de l’adsorption. En effet, si il existe nombre d’études dans la littérature sur l’amélioration des propriétés chimiques et l’amélioration de la surface spécifique des matériaux, très peu prennent en compte le transport. Actuellement, même si le nombre de publications sur le couplage adsorption/transport est en augmentation ces dix dernières années, son nombre reste toutefois limité (cf. Fig. 1.17), preuve que ce sujet reste encore très largement à explorer.

Fig. 1.17 : Évolution du nombre de publications sur le couplage adsortion/transport au cours de ces dix dernières années. Plus précisément : nombre de publications contenant dans leur titre "adsorption" et "transport" ou "adsorption" et "convection", "adsorption" et "dispersion", "adsorption" et "advection"

Le transport d’une espèce dans un fluide peut être caractérisé par la dispersion. Il existe quelques études dans la littérature sur la dispersion en présence d’adsorption. Une des pre-mières études menée par R. Chao et al. [111] expérimentalement et théoriquement, porte sur la dispersion longitudinale et les transferts de masse entre fluide et solide dans des colonnes de perçage. Un peu plus tard S. Gupta[112] et al. étudièrent l’adsorption et la dispersion de polluant dans les sols par une analyse théorique. Les équations du mouvement des espèces en milieu poreux sont résolues par la méthode de Crank-Nicholson. Toutefois cette méthode repose sur un calcul macroscopique des grandeurs de dispersion et d’adsorption. La topologie et la géométrie locale des pores n’est pas prise en compte. En 1995, J. J. A. Van Kooten[113], développe un modèle analytique d’advection-dispersion prenant en compte la cinétique

d’ad-1.4 — Couplage adsorption/transport dans les matériaux poreux

sorption. Dans ce modèle une distribution complexe du champs des vitesses peut être utilisée. Le modèle analytique est résolu numériquement. Cependant lors des calculs numériques, il est nécessaire de stocker les grandeurs telles que la concentration pour chaque pas de temps. Ainsi la méthode est rapidement limitée par la capacité de stockage et la vitesse des calcu-lateurs. Plus récemment, M. Levesque et al. [114] ont observé analytiquement comment la dispersion de Taylor est affectée par la cinétique de l’adsorption.

En 2014 D. H. Lushkou et al. ont observé, de manière analytique et théorique, les effets de l’adsorption sur la dispersion en présence de flux[115]. Les modèles analytiques utilisés sont ceux développés par Golay[116] en 1954, Khan[117] en 1962 et Levesque et al. [114] en 2012. Par une comparaison au modèle analytique qu’ils ont développé, ils montrent que le modèle de Khan et celui de Levesque et al. décrivent efficacement l’advection et la diffusion, avec des transferts de masse (adsorption) aux parois d’un tube. De plus il est montré dans cette étude que le couplage transport/adsorption ne peut pas être simulé, de manière générale, sans prendre en compte les détails locaux dans le matériau de la cinétique de sorption.

L’étude du transport et de l’adsorption apparait dans l’étude des MOFs hiérarchisées tout d’abord, évoqués comme une perspective par S. Keshin et al. [118] en 2009, puis étudiés plus récemment par F. Villemot et al. [119]. On trouve, de manière plus générale, très peu de publications dans la littérature traitant du transport et de l’adsorption dans les matériaux poreux hiérarchiques [120, 119]. Dans ces études, menées par le même groupe de recherche, l’adsorption et le transport de gaz sont modélisés par simulation moléculaire pour des ma-tériaux possédant des micropores et des mésopores inter-connectés. La simulation est basée sur une structure zéolithique[120] ou Metal Organic Framework (MOF)[119] dans laquelle on a creusé une cavité cylindrique représentant un mésopore. Les macropores sont modélisés par l’ouverture du mésopore sur deux réservoirs. L’adsorption est étudiée par l’analyse des isothermes d’adsorption de l’azote à 77K et du calcul du coefficient de diffusion (calculé à partir de la Fonction d’auto-corrélation des vitesses). Il est montré que l’adsorption de N2

dans un matériaux poreux hiérarchique peut être décrite comme la combinaison linéaire de l’adsorption dans la microporosité et de l’adsorption dans la mésoporosité pondérée par leurs volumes poreux respectifs. Cette conclusion est valable en l’absence de gradient de pression dans le réseau poreux. Le transport dans les matériaux poreux hiérarchiques est ensuite étu-dié, indépendamment de l’adsorption, par simulation NEMD (Non-Equilibrium Molecular Dynamics). Un gradient de pression est imposé par l’application d’une force extérieure. Ceci permet de montrer que l’écoulement dans un micropore n’est pas assimilable à un écoulement de Poiseuille.

À l’échelle mésoscopique, Tallarek et. coll. ont développés très récemment, en 2014, un modèle de Lattice-Boltzmann permettant de prendre en compte l’adsorption.[121] L’adsorp-tion est prise en compte comme un temps de retard du fluide à l’interface solide/liquide. Ce retard traduit la rétention d’une partie du fluide sur les sites d’adsorption. Le modèle est dans ce cas utilisé sur des empilements granulaires pour reproduire le comportement du fluide dans un montage chromatographique.

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Très récemment, en 2015, Botan et al. ont proposé un modèle hiérarchique pour l’étude du couplage entre transport et adsorption.[122] Ce modèle utilise des simulations atomistiques comme base pour accéder aux échelles supérieures de porosité. Le matériau est discrétisé sur un réseau avec trois types de sites possibles : des macropores, des nanopores et des subnanopores. La combinaison de ces sites sur le réseau permet de rendre compte de la hiérarchisation du matériau. Les grandeurs macroscopiques telles que la densité et le potentiel chimique sont calculées à l’aide d’outils de la thermodynamique statistique. Dans cette étude aucune hypothèse n’est faite sur le transport de fluide. De ce fait, ce modèle est capable d’observer les écarts dans le comportement hydrodynamique du fluide avec notamment l’effet du confinement sur le profil de flux. Sa hiérarchisation doit lui permettre de prendre en compte les effets d’interconnexion entre les différentes tailles de porosités sur le transport et l’adsorption.

Chapitre 2

Lattice Boltzmann avec adsorption

Union entre mécanique des fluides et adsorption des espèces

2.1 Outils numériques pour l’étude du transport et de

l’ad-sorption dans les matériaux poreux

Les outils numériques de modélisation et de simulation reposent sans exceptions sur une base d’objets élémentaires reliés par des interactions et qui ensemble forment une entité permettant de décrire le système considéré. Selon les systèmes et les interactions composant le système, il convient de choisir soigneusement les objets élémentaires permettant de décrire efficacement les phénomènes en jeux, d’une part, et d’obtenir le bon compromis entre précision et temps de calcul d’autre part. La taille élémentaire des objets est donc très importante car elle conditionne par extension la taille des systèmes simulables par la technique choisie. De plus, la taille des objets élémentaires découle directement leur nature et leurs propriétés car d’elle dépend le choix de la théorie employée pour les décrire. Le choix d’une méthode de simulation doit se faire, à mon sens, selon deux critères : les caractéristiques du matériau considéré notamment les échelles de taille pertinentes et les phénomènes physico-chimiques étudiés.

Ainsi, la taille de pore est la caractéristique principale à prendre en compte pour le choix d’une méthode de simulation de matériaux poreux. La Fig. 2.1 présente les différentes tech-niques de modélisation et de caractérisation usuellement employées en fonction de la taille de pores des matériaux. À petite échelle, pour des tailles de pores inférieures au nanomètre, la simulation moléculaire quantique, rend très bien compte de la structure atomique d’un matériau. Sa description, dans le cas de la DFT (Density Functionnal Theory), basée sur le calcul de la densité électronique, permet via la prise en compte des interactions électroniques de rendre compte de la structure électronique des atomes composant une structure molécu-laire. Cette technique permet de décrire des systèmes dont la taille reste de manière générale inférieure au nanomètre. À une échelle supérieure on trouve des méthodes de simulation

2.1 — Outils numériques pour l’étude du transport et de l’adsorption dans les matériaux poreux

Fig. 2.1 : Techniques utilisées pour la modélisation et la caractérisation des matériaux poreux en fonction de la taille de pore des matériaux considérés. Bleu : Techniques expérimentales de caractérisation. Orange : Méthodes de modélisation

moléculaire comme la dynamique moléculaire et la méthode de Monte Carlo. Ces méthodes sont basées sur une description atomistique ou moléculaire du matériau et sont régies par les lois de la thermodynamique statistique permettant le lien entre propriétés microscopiques et propriétés macroscopiques. Ces méthodes de simulation moléculaire permettent par exemple de décrire très efficacement l’adsorption et le transport d’espèces dans les matériaux micro et mesoporeux.[123, 120, 124] Actuellement ces méthodes sont capables dans les cas extrêmes de simuler des systèmes contenant 100000 atomes et donc ne permettent pas l’étude de pores de la taille du micromètre. Pour faire face à ce problème Botan et al. ont développé un modèle hiérarchique.[122] Ce modèle réalise un passage à l’échelle supérieure des résultats obtenus par différentes configurations de simulations moléculaire sur un réseau pour calcu-ler les propriétés de transport et d’adsorption à plus grande échelle. La prise en compte de la hiérarchisation dans les matériaux poreux est un réel défi et les possibilités qu’offrent ce modèle sont très intéressantes.

À l’échelle du micromètre les méthodes de simulation de la mécanique des fluides per-mettent de modéliser le comportement des fluides à l’intérieur d’un matériau. Basées sur les équations de Navier-Stokes ou sur l’équation de Boltzmann, elles rendent compte du flux de fluide via le calcul de sa densité et de son champ de vitesse. Ces méthodes sont à utiliser pru-demment dans les matériaux poreux, surtout à très petites échelles où la matière ne peut plus être considérée comme continue. Le domaine d’étude de ma thèse s’étendant entre quelques dizaines de nanomètres et quelques centaines de micromètres, la matière reste continue et on s’affranchit des potentiels problèmes de la mécanique des fluides à très petites échelles. Cependant la mécanique des fluides doit faire face à un autre problème, elle ne prend pas en compte classiquement l’adsorption des espèces à la surface du matériau.