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Correction de la dérive en distance

La dérive en distance de séparation D est plus gênante pour les expériences de na-norhéologie parce qu’elle fausse la distance sphère-plan, avec deux conséquences :

– la position du contact mécanique et celle du zéro hydrodynamique sont affectées. La figure III.11 représente l’évolution de la force statique (corrigée au paragraphe précédent) en fonction de la distance non corrigée. Sur cette figure, on remarque que les positions des deux contacts mécaniques successifs ne se superposent pas. De plus, il y a un écart entre l’entrée et la sortie du premier contact, dû au temps passé dans le contact. La figure III.12 représente l’évolution de l’inverse de l’amortisse-ment visqueux en fonction de la distance non corrigée. On observe sur la position du zéro hydrodynamique (point d’intersection de l’extrapolation de la courbe avec l’axe des abscisses) un décalage identique à celui du contact mécanique pour cha-cun des allers et retours successifs.

– la pente du signal dynamique dans la représentation de l’inverse de l’amortisse-ment visqueux en fonction de la distance est égalel’amortisse-ment affectée, comme on peut le voir sur la figure III.12.

La correction de la dérive en distance est beaucoup plus délicate à effectuer que la correction de la dérive en force. Pour corriger la dérive en distance (si elle est restée linéaire au cours de l’expérience), il faut soustraire une droite à la distance représentée en fonction du temps. Malheureusement, pour choisir cette droite, nous ne pouvons pas nous appuyer sur la représentation de la distance en fonction du temps comme on avait pu le faire pour la correction de la dérive en force. Il est en effet impossible d’identifier clairement la part du signal due à la dérive et celle due à un déplacement réel des

sur-2. Correction de la dérive des signaux statiques

400

300

200

100

0

F

dc

cor

rigée

(µN)

200

150

100

50

0

D non corrigée (nm)

Fig. III.11 : Évolution de la force statique corrigée en fonction de la distance (non corrigée). 0.20 0.15 0.10 0.05 0.00

[G'

'(

ω

)]

-1

(nm/µN)

200 150 100 50 0

D non corrigée (nm)

aller 1 retour 1 retour 2 aller 2

Fig. III.12 : Avant correction : évolution de G′′(ω)−1 en fonction de la distance non corrigée. La fréquence d’excitation est de 19 Hz.

faces. Nous nous basons sur le signal hydrodynamique dans la représentation de G′′(ω)−1

en fonction de la distance, et nous cherchons la correction linéaire en temps qui permet de superposer au mieux les points expérimentaux correspondants aux différents allers et retours. La figure III.13 montre l’évolution de G′′(ω)−1 en fonction de la distance corri-gée ainsi : nous avons obtenu une parfaite superposition des points expérimentaux pour la correction retenue. Cette correction est alors vérifiée dans la représentation de la force statique (corrigée) en fonction de la distance corrigée : la correction obtenue à partir du signal dynamique a également superposé les deux contacts mécaniques successifs2

sur la figure III.14. Le très bon accord de ces deux représentations permet de valider la correction effectuée.

Cette méthode de correction par superposition des signaux hydrodynamiques asso-ciés aux allers-retours successifs suppose que les signaux hydrodynamiques devraient se superposer parfaitement si la dérive était nulle, ce qui implique deux hypothèses sous-jacentes dont il faut avoir conscience.

La première hypothèse est que la variation de la viscosité du fluide au cours de l’ex-périence est négligeable, et donc que les pentes des différents allers et retours devraient être égales dans la représentation de G′′(ω)−1 en fonction de la distance (le rayon de la sphère et la fréquence d’excitation ne changent pas au cours de l’expérience).

La deuxième hypothèse est que la condition limite hydrodynamique n’évolue pas au cours de l’expérience. On peut vérifier cette deuxième hypothèse sur la courbure à petite distance du signal expérimental dans la représentation de G′′(ω)−1 en fonction de la distance corrigée, si l’on dispose de plusieurs courbes complètes. Si la courbure est identique sur ces courbes expérimentales (elles sont parfaitement superposables sur toute la plage de distances explorée), alors la condition limite n’a pas changé. C’est pourquoi il est important d’effectuer au moins deux allers au contact : un aller-retour ne suffit pas, parce qu’en cas d’adhésion forte au retour, la séparation brutale de la sphère et du plan laisse une zone de distance sur laquelle la réponse dynamique n’est pas mesurée. En toute rigueur, il faut de plus que les deux allers-retours soient équivalents, avec les mêmes paramètres expérimentaux. Si on veut changer un paramètre, par exemple l’amplitude de l’excitation pour tester la linéarité de la condition limite, alors il faut faire trois allers-retours : deux allers-retours de référence avec des paramètres identiques, pour la correction de la dérive en distance, et un aller-retour avec le paramètre modifié.

C’est l’existence de ces deux hypothèses sous-jacentes qui rend absolument indis-pensable la vérification de la correction dans la représentation de la force statique en fonction de la distance. Au final, pour que la correction de la dérive puisse être validée, il faut avoir obtenu à la fois une parfaite superposition des courbes expérimentales dans la représentation de G′′(ω)−1 en fonction de la distance corrigée, et un excellent accord dans la représentation de la force statique en fonction de la distance corrigée.

En conclusion nous proposons une méthode de correction de la dérive en distance à partir de la superposition des points expérimentaux dans la représentation de l’inverse de l’amortissement visqueux en fonction de la distance. Cette méthode permet d’obtenir une excellente correction, comme le montrent les figures III.13 et III.14, et comme nous

2

Nous ne pouvons pas nous reposer entièrement sur la position du contact mécanique dans la repré-sentation de la force statique en fonction de la distance pour la correction de la dérive en distance, en cas de déformation plastique des surfaces.

2. Correction de la dérive des signaux statiques 0.20 0.15 0.10 0.05 0.00

[G'

'(

ω

)]

-1

(n

m/µN)

200 150 100 50 0

D corrigée (nm)

Fig. III.13 : Après correction : évolution de G′′(ω)−1 en fonction de la distance corrigée. Les signaux correspondants aux deux allers-retours ont été superposés.

400 300 200 100 0

F

dc

corr

igée

(µN

)

200 150 100 50 0

D corrigée (nm)

Fig.III.14 :Après correction : évolution de la force statique (corrigée) en fonction de la distance corrigée. Les positions des deux contacts mécaniques successifs sont identiques.

le reverrons à plusieurs reprises par la suite. Il convient toutefois de rester extrêmement prudent dans l’utilisation de cette méthode : il existe des situations particulières où l’on n’est pas en droit d’appliquer cette méthode parce que l’une des hypothèses sur laquelle elle repose n’est pas vérifiée, comme nous le verrons dans le chapitre V.

3 Analyse des données et artefacts

Dans un comment non publié à une de nos publications [26], Granick et al. ré-analysent nos propres données expérimentales, et annoncent des longueurs de glissement allant jusqu’à 1 micromètre, là ou nous trouvons un glissement de 17 nm !

Cette communication a attiré notre attention sur la difficulté intrinsèque de déter-miner de façon fiable une longueur de glissement à partir de la force visqueuse entre une sphère et un plan, configuration qui est à la base des mesures de nanorhéologie par SFA et AFM. Nous illustrons ici ces difficultés, en montrant que certaines méthodes d’analyse peuvent amplifier dramatiquement des erreurs expérimentales même minimes, et qu’il convient d’être très prudent pour l’exploitation des données expérimentales obtenues dans cette géométrie.

Nous avons vu au chapitre 1.2 que la force visqueuse entre une sphère et un plan (éventuellement glissant) s’écrit :

G′′(ω) = 6πηR 2ω D f (D/b), (III.5) avec f(D/b) = 1 4(1 + 6D 4b [(1 + D 4b)ln(1 + 4b D) − 1]).

Le problème principal dans la détermination de b est que le premier facteur de l’equation (III.5), i.e. le terme de Reynolds, varie comme 1/D et diverge au contact, alors que le facteur fvarie mollement entre 1 et 1/4. Par conséquent toute erreur (sous-estimation) sur la distance D, entraîne une erreur importante sur le facteur de Reynolds au voisinage du contact, et peut conduire à des estimations dramatiques de la longueur de glissement si la différence entre l’amortissement mesuré et l’amortissement attendu est imputée à la condition aux limites.

En particulier toute représentation de la force visqueuse (ou de l’amortissement vis-queux) directement en fonction de la distance favorise la divergence du facteur de Rey-nolds au contact et est susceptible d’entraîner des erreurs dans la détermination de b.

Nous illustrons quantitativement l’importance des erreurs possibles sur les effets de glissement en utilisant la méthode d’analyse préconisée par Granick et al. méthode qu’ils ont utilisée dans leurs propres expériences ainsi que dans leur comment sur nos résultats expérimentaux.