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Une approche fréquemment utilisée dans les analyses de données d'études randomisées est la méthode en intention de traiter. Celle-ci se base sur le principe d'analyser tous les participants en fonction de leur groupe d'assignation original peu importe l'intervention que le patient reçoit (89). Pour les études observationnelles, un biais de temps immortel peut survenir quand la période de suivi et le statut d'exposition du sujet ne sont pas correctement situés et définis au préalable dans le protocole et le plan d'analyse des résultats (90).

Omettre de tenir compte de ce biais dans les analyses de survie pourrait faire fluctuer les résultats de façon importante. D'une part, lorsqu'il y a une classification inappropriée du temps immortel des sujets exposés (le fait d'être exposé requiert que la personne survive ou ne fasse pas l'événement), la mesure du taux de l'événement est sous-estimée chez les sujets exposés et surestimée chez les sujets non-exposés. D'autre part, lorsque la période de temps immortel est exclue des analyses chez les exposés, la mesure du taux de l'événement est surestimée chez les non-exposés et le rapport de taux est globalement sous-estimé.

Pour démontrer le biais de temps immortel pouvant être introduit dans les études de cohorte observationnelles, Suissa (90) s'est basé sur des études évaluant l'efficacité des médicaments corticostéroïdes par inhalation pour la morbidité et la mortalité de toutes causes chez des sujets atteints de maladies pulmonaires obstructives chroniques (MPOC). En utilisant le modèle de Cox, il a procédé aux mêmes analyses en corrigeant pour le biais de temps immortel pour, ensuite, comparer avec les résultats des analyses originales en intention de traiter. Lorsque les personnes-temps immortelles qui précédaient l'exposition (non-exposés) étaient correctement assignées au groupe des non-utilisateurs, le ratio pour la mortalité était de 0,79 au lieu de 0,66 chez les sujets non-exposés.

Afin que les analyses de la présente étude ne soient pas affectées par le biais de temps d'immortalité (90, 91), dès le moment où la patiente entrera dans la cohorte, elle sera considérée en personne-temps et convenablement classifiée comme non-exposée jusqu'à sa randomisation à un EC.

L'entrée de la patiente dans la cohorte correspondait à la date de son diagnostic. À ce moment, elle était susceptible d'être exposée à un EC pour le cancer du sein. Le temps entre l'entrée dans la cohorte et la date de randomisation était inévitablement immortel pour les sujets exposés. Le fait que la patiente ait été inscrite dans un EC requiert que la patiente ait dû survivre une certaine période de temps entre la date de son diagnostic et la date d'inscription dans un EC. Si la patiente décédait dans une période avant une possible inscription dans un EC, elle était classifiée comme non-exposée et ce temps était considéré.

Pour pallier à ce biais dans les analyses de survie, la sélection des sujets a été effectuée en fonction de l'exposition qui correspondait au moment de la date d'inscription dans l'EC peu importe le délai suivant le diagnostic. De plus, une variable temps-dépendante a été utilisée pour classifier les sujets selon la participation à un EC (1) versus la non- participation à un EC (0). Les personnes-temps immortelles ont été placées au dénominateur chez les sujets non-exposés (92). Ceci correspond, dans notre étude, à la période de temps avant que la patiente soit inscrite à un EC.

CHAPITRE V

5. RESULTATS

5.1. Caractéristiques des patientes

Un total de 6 794 femmes ont été diagnostiquées d'un cancer du sein infiltrant non métastatique entre 1982 et 2008 au CMS. Au cours de cette période, 1 137 (16,7%) femmes ont participé à au moins un EC. La médiane du délai de randomisation entre la date de diagnostic de la patiente et son entrée dans un EC était de 36 jours. La durée de suivi médiane de l'ensemble des femmes était de 6,1 ans. Le tableau 2 présente les caractéristiques de la population au diagnostic des patientes qui n'ont pas participé et de celles qui ont participé à un EC.

Les femmes qui ont participé à un EC étaient significativement plus jeunes. La médiane d'âge des femmes qui étaient sous EC était de 51 ans (± 10,3 ans) et de 57 ans (± 12,8 ans) pour celles qui n'étaient pas sous EC. Quant aux facteurs pronostiques des patientes sous EC, 49,8% avaient un cancer de stade II et 16,2% avaient un cancer de stade III, comparativement à 40,2% et 13,7%, respectivement, dans le groupe non sous EC. Une plus grande proportion de patientes dans le groupe sous EC avait des ganglions axillaires positifs (32,5% vs. 26,1%). La moyenne des ganglions atteints était plus élevée chez les patientes sous EC (résultats non présentés). Toujours dans le groupe sous EC, un plus grand nombre de femmes avaient un grade histologique peu différencié (35,8% vs. 30,5%) et une présence d'envahissement lymphovasculaire (25,9% vs. 19,7%). Pour le statut des récepteurs hormonaux, ceux des œstrogènes et de la progestérone étaient positifs chez la majorité des femmes dans le groupe sous EC (82,3% vs. 76,0%), ce qui est probablement dû au fait que plusieurs EC testaient un type d'hormonothérapie. En ce qui a trait aux traitements reçus, les principaux résultats sont les suivants. Au niveau du type de chirurgie du sein, il était semblable dans les deux groupes. Par contre, plus de patientes dans le groupe sous EC ont eu une dissection ganglionnaire (81% vs. 67,9%). Concernant les traitements systémiques, dans le groupe sous EC, la chimiothérapie adjuvante a été

administrée à 63,3% des patientes contre 36,6% dans le groupe non sous EC. L'hormonothérapie a été administrée à 65,2% des patientes sous EC et à 57,1% pour celles non sous EC. Un plus grand nombre de femmes sous EC ont reçu une combinaison subséquente de chimiothérapie et d'hormonothérapie comme traitements adjuvants systémiques comparativement au groupe non sous EC (39,4% vs. 19,8%). Parmi toutes les femmes, 4,9% ont reçu des traitements néo-adjuvants. Finalement, une très faible proportion des patientes de la cohorte présentait un index de comorbidité(s) > 1.

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