• Aucun résultat trouvé

2.2 Techniques de mesure

4.1.2 Corr´elations

Les diff´erents r´esultats pr´esent´es jusqu’alors ont port´e sur les niveaux, la directivit´e et les spectres en champ lointain. Etant donn´e la nature tr`es diff´erente des deux sources responsables du bruit de m´elange on peut s’attendre `a ce que certaines de leurs ca-ract´eristiques soint identifiables `a partir de l’anaylse directe de l’autocorrelation et de l’intercorrelation des signaux temporels de pression en champ lointain. C’est ce que nous nous proposons d’´etudier dans ce paragraphe. Ainsi, on peut assez naturellement concevoir qu’une impulsion, c’est `a dire une s´equence intermittente du signal acoustique, g´en´er´ee par une grosse structure turbulente sera plus ´etendue que celle g´en´er´ee par une petite structure. Ce type d’information peut ˆetre capt´e par les microphones et peut donc per-mettre de confirmer la pr´esence des deux types de sources dans le bruit de m´elange. Pour tenter de mettre en ´evidence ce ph´enom`ene, on s’int´eresse `a l’autocorr´elation et l’intercorr´elation des signaux de pression. Ces techniques sont clairement d´etaill´ees par

Tam et al. [112]. L’autocorr´elation Rnn, tout d’abord, permet de donner le niveau de

corr´elation entre un signal et ce mˆeme signal d´ecal´e dans le temps. Les impulsions domi-nantes ´etant constitu´ees d’une succession de compressions et de d´etentes, la corr´elation temporelle attendue suivra la mˆeme ´evolution : la valeur sera positive si les deux instants concernent soit une d´etente, soit une compression ; elle sera n´egative, si l’un correspond `a une d´etente alors que l’autre correspond `a une compression. Ces oscillations s’inscrivent

dans une enveloppe d´ecroissante autour d’un temps de corr´elation nul (τ = 0) d’autant plus rapide que les structures dominantes sont faiblement corr´el´ees. La distinction entre les grosses et les petites structures devrait donc se traduire par une amplitude et une dur´ee du pic d’autocorr´elation plus ou moins marqu´ees. Plus pr´ecis´ement, la dur´ee des pics de corr´elation sera indicative de l’´etendue spatiale des impulsions sonores dans leur direction de propagation, tandis que leur amplitude refl`etera leur pr´edominance relative par rapport au bruit ambiant, c’est-`a-dire par rapport aux fluctuations dues aux autres structures turbulentes. L’autoccorelation s’exprime par :

Rnn(τ ) = pn(t) pn(t + τ ) p2 n(t) , (4.3)

avec p(t) le signal de pression, τ le retard temporel, n le microphone consid´er´e (n = 1 `a 9 pour Θ = 30`a 110) ethi d´enote la moyenne temporelle. La Fig. 4.5 montre l’´evolution de

la corr´elation pour les 4 diaphragmes test´es `a NPR= 1.8 et pour 30

≤ Θ ≤ 110. Comme

observ´e par Tam et al. [112], des comportements tr`es diff´erents peuvent ˆetre observ´es entre les microphones situ´es `a l’aval et les autres. Le pic d’autocorr´elation sur les trois premiers microphones est, en effet, beaucoup plus large que sur les suivants et est born´e par une zone de corr´elation n´egative de chaque cot´e. Cette zone n´egative repr´esente tout simplement la corr´elation entre deux phases distinctes d’une impulsion. Cette augmentation de la largeur du pic traduit donc un rayonnement beaucoup plus coh´erent dans les directions de propagation de la source vers chacun de ces premiers microphones. Ce r´esultat est totalement en accord avec le mod`ele de la double source responsable du bruit de m´elange. On peut, par ailleurs, observer une r´eduction de la largeur du pic de corr´elation pour les signaux des microphones situ´es `a l’aval lorsque le diam`etre du diaphragme diminue. Cela traduit le fait que la taille typique des grosses structures turbulentes est proportionnelle au diam`etre du jet consid´er´e, ph´enom`ene bien connu pour les jets classiques.

Pour tenter d’aller plus loin dans l’analyse de l’autocorr´elation, on se propose de

d´eterminer la dur´ee de passage Tnn des structures dominantes sur un microphone n que

l’on peut d´efinir par :

Tnn = Z τ+

τ

Rnn(τ )dτ (4.4)

avec τet τ+les bornes d’int´egration temporelles du pic d’autocorr´elation. Tel que montr´e sur la Fig. 4.6 (a), l’int´egration est r´ealis´ee pour la pr´esente application entre les points de niveau Rnn = 0. Par ailleurs, ´etant donn´e que la fr´equence d’acquisition des signaux acous-tiques est assez faible par rapport `a la dur´ee temporelle du pic d’autocorr´elation (points de mesure localis´es par les cercles noirs), une interpolation lin´eaire est r´ealis´ee entre ces points afin de pouvoir pr´ecis´ement localiser les bornes d’int´egration et discr´etiser le pic (points rouges). Sur les Figs 4.6 (b), (c) et (d), on analyse ainsi l’´evolution de cette dur´ee de passage int´egrale en fonction de l’angle d’observation, du point de fonctionnement

et du diam`etre du diaphragme. D’apr`es la Fig. 4.6 (b) qui montre l’´evolution de c0Tnn

en fonction de l’angle d’observation, on peut constater que le niveau Tnn est nettement

sup´erieur sur les microphones situ´es `a l’aval. Cette observation rejoint les conclusions pr´ec´edentes selon lesquelles les grosses structures rayonnent pr´ef´erentiellement vers l’aval

o`u elles dominent le champ acoustique, tandis que dans les autres directions, le bruit

mesur´e est essentiellement dˆu aux ondes rayonn´ees par les petites structures. Par ailleurs,

Figure 4.5 – Autocorr´elation du signal de pression acoustique en fonction de Θ pour les 4 diaphragmes ´etudi´es et pour NPR= 1.8.

dur´ee de corr´elation mesur´ee par les microphones (et donc la taille des structures dans leurs directions de propagation) ´evolue lin´eairement avec le diam`etre du diaphragme. La

pente est environ 4 fois plus forte pour Θ = 30 (de l’ordre de l’unit´e) que pour Θ = 90

(de l’ordre de 0.25). Ce r´esultat peut ˆetre tr`es bien compris en consid´erant l’origine du rayonnement associ´e aux grosses structures turbulentes. En effet, les diff´erentes ´etudes montrent que la zone d’interaction de ces structures et donc la zone source du rayonne-ment se situe `a la fin du cˆone potentiel du jet. Leur taille typique est donc du mˆeme ordre que le diam`etre du jet. En fonction du NPR pour un diam`etre et un point de fonctionne-ment fix´es, on obtient ´egalefonctionne-ment une ´evolution lin´eaire pour les deux angles d’observation Θ = 30 et 90 (Fig. 4.6 (d)). Cependant la pente est une nouvelle fois tr`es diff´erente (po-sitive pour le premier cas et n´egative pour le second). Cette diff´erence est probablement imputable `a l’amplification convective qui se traduit par une amplification vers l’aval, et une att´enuation vers l’amont et dont l’ampleur s’accroˆıt avec le nombre de Mach (ici le

NPR). L’angle d’´emission ´etant plus ´elev´e que l’angle apparent, 90 correspond `a une

(a) (b)

(c) (d)

Figure 4.6 – (a) M´ethode de calcul de la dur´ee de passage des structures Tnn. La zone

d’int´egration est donn´ee en gris. (b) ´Evolution de Tnn en fonction de : (b) l’angle d’obser-vation, (c) le diam`etre du diaphragme et (d) le point de fonctionnement.

De la mˆeme mani`ere l’intercorrelation Rmnpermet de d´eterminer le niveau de corr´elation

entre un signal et un second (distinct), d´ecal´e dans le temps. Appliqu´e aux signaux de pression des diff´erents microphones, cette m´ethode de traitement de signal va permettre de d´eterminer le niveau de corr´elation du rayonnement acoustique dans la direction an-gulaire. L’intercorrealtion s’exprime par :

Rmn(τ ) = pm(t) pn(t + τ ) p2 m(t) 1/2 p2 n(t) 1/2, (4.5)

o`u m et n d´esignent les deux microphones concern´es num´erot´es de 1 `a 13. Par exemple, la

Fig. 4.7 donne l’intercorr´elation R1,3entre le premier microphone situ´e `a 30 et le second `a

50 pour les diaphragmes S1, S2 et S3 `a NPR= 1.8. Ces deux microphones ont ´et´e choisis

afin d’avoir un niveau de corr´elation ainsi qu’un retard associ´e significatif. Pour S3, on

observe alors un pic de corr´elation entre les deux signaux s’´elevant `a max(R1,3) ' 0.17

pour un retard temporel de ∆τ = 1.27× 10−4 s. Cela signifie que le signal acoustique

arrivant sur le premier microphone `a 30 est fortement corr´el´e `a celui du microphone `a

50, 1.27× 10−4 s plus tˆot. Cela nous apporte ainsi deux informations li´ees `a la fois au niveau et au retard de ce pic de corr´elation. Un niveau d’intercorrelation ´elev´e entre deux microphones situ´es `a des angles diff´erents signifie que le rayonnement acoustique arrivant

sur ces derniers poss`ede une corr´elation angulaire forte. Dans le cas du bruit de m´elange, cela peut permettre de confirmer la pr´esence de la double source caract´eristique en iden-tifiant un rayonnment aval plus coh´erent. Le retard, quant `a lui, donne une indication sur la position de la source (dans l’hypoth`ese ou celle-ci est unique). En effet, selon cette

position, les distances source-microphones Li diff`erent d’un microphone `a l’autre comme

cela est illustr´e sur le sch´ema de la Fig. 4.8 pour les microphones 1 et 3 et les distances

associ´ees L1 et L3. L’analyse du retard va ainsi permettre d’estimer la position axiale de

la source responsable de ce rayonnement coh´erent [114, 35]. En analysant tout d’abord

Figure 4.7 – Intercorr´elation entre les signaux des microphones situ´es `a Θ = 30 et

Θ = 50 pour les diaphragmes S1, S2 et S3 `a NPR= 1.8.

le retard ∆τ entre les deux microphones pour ces trois diaphragmes, on constate une

augmentation de celui-ci lorsque le diam`etre du diaphragme diminue. ´Etant donn´e les

dimensions des diaphragmes ´etudi´es ainsi que les incertitudes sur les positions exactes de chaque microphone, ces r´esultats ne seront pas utilis´es pour localiser pr´ecis´ement la source du rayonnement aval. En effet, un ´ecart de positionnement de 1 cm de l’antenne en champ lointain peut engendrer une erreur de localisation de la source de plusieurs diam`etres de diaphragme. N´eanmoins, ces mesures peuvent ˆetre utilis´ees comparativement. En effet, on peut raisonnablement faire l’hypoth`ese que la position de l’antenne de directivit´e est inchang´ee pour les trois mesures de diaphragme r´ealis´ees `a la suite. Si l’on n´eglige l’effet de l’´ecoulement sur la dur´ee de propagation, alors l’´ecart de retard observ´e est enti`erement imputable `a une diff´erence de position de la source entre ces diff´erents diaphragmes. Ce r´esultat s’accorde tr`es bien avec la th´eorie, qui localise la source de ce rayonnement `a la fin du cˆone potentiel c’est `a dire `a une distance proportionnelle `a D. Cela explique qu’une augmentation de ce diam`etre D aura pour effet un d´eplacement de la source vers l’aval.

On s’int´eresse maintenant au niveau du maximum d’amplitude de l’intercorrelation des signaux des diff´erents microphones afin d’obtenir des informations sur la corr´elation azimutale des impulsions les plus coh´erentes. Les maximas obtenus pour les 9 premiers

microphones (θ = 30 `a 110) et les 4 diaphragmes `a NPR= 1.8 sont report´es sur les

histogrammes de la Fig. 4.9. Par exemple, le premier histogramme en haut `a gauche

(R1n) donne le maximum d’intercorrelation entre le premier microphone situ´e `a 30 et

Figure 4.8 – M´ethode de localisation par intercorr´elation des signaux des microphones en champ lointain aval.

niveaux maximum d’autocorr´elation sont plus ´elev´es que les termes non diagonaux de la matrice d’intercorr´elation (qui plafonnent vers 0.6 `a 0.7) et risqueraient donc de nuire `a la lisibilit´e de la Fig. 4.9. Comme ils ont d´ej`a ´et´e repr´esent´es et comment´es, nous les avons arbitrairement fix´es `a 0 sur cette figure. `A nouveau nos r´esultats s’inscrivent dans ceux obtenus avec les jets classiques [112], qui font ´etat de diff´erences notables entre le rayonnement vers l’aval et celui dans les autres directions. Le maximum d’intercorrelation entre les trois premiers microphones est nettement sup´erieur `a celui obtenu dans les autres directions. Cela montre que la coh´erence spatiale azimutale est bien plus ´elev´ee vers l’aval que dans les autres directions : les ondes ´emises par les grosses structures sont en effet

coh´erentes pour des distances inter-microphones atteignant 20 tandis que cette distance

se limite `a 10 (microphones voisins) pour les petites structures. Par ailleurs, en examinant quels microphones se classent dans l’une ou l’autre des deux cat´egories, on peut se faire une id´ee de la directivit´e des deux sources : celle des grosses structures couvre au moins

les directions de 30 `a 50 voire 60 pour S0 (les angles inf´erieurs `a 30 n’´etant pas

explor´es) tandis que celle des petites structures couvre au moins les autres directions explor´ees sans exclure les faibles angles, le rayonnement des petites structures vers l’aval ´etant simplement masqu´e par celui des grosses structures. On peut en outre observer une augmentation du maximum de corr´elation lorsque le diam`etre du diaphragme diminue, et ce, dans presque toutes les directions. Cela r´esulte probablement d’un effet de Reynolds par lequel, les jets issus de petits diaphragmes sont moins turbulents et donc plus coh´erents. Une ´etude plus fine est n´eanmoins n´ecessaire pour comprendre pr´ecis´ement ce ph´enom`ene. Pour conclure sur ces mesures acoustiques, le bruit de m´elange g´en´er´e par le jet issu d’un diaphragme poss`ede les mˆemes caract´eristiques globales qu’un jet issu d’une tuy`ere. Ceci concerne aussi bien les spectres de champ lointain que la directivit´e ou l’´evolution de la puissance acoustique avec la vitesse. Ces mesures ont par ailleurs permis de re-trouver les deux types de source de bruit de m´elange identifi´ees dans la litt´erature et d’en caract´eriser la coh´erence. Le remplacement d’une buse par un diaphragme ne semble donc pas engendrer de modification majeure des m´ecanismes sources du bruit de m´elange. Toutefois, les l´eg`eres diff´erences qui ont ´et´e observ´ees selon le r´egime d’´ecoulement, nous

Figure 4.9 – Maximum d’intercorr´elation entre les signaux de pression des diff´erents microphones pour les 4 diaphragmes ´etudi´es et pour NPR= 1.8.

incitent `a analyser plus finement les m´ecanismes associ´es aux sources de bruit de m´elange des jets issus de diaphragmes.