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L’infection virale constitue une balance constante entre l’activation de la réponse immunitaire par l’hôte et les contremesures face à cette réponse par le pathogène. En effet, l’efficacité avec laquelle le virus contrôle la réponse immunitaire aura des conséquences sur sa pathogénicité (Young et al., 2003). Les mécanismes de contremesures du pathogène doivent donc être assez efficaces pour favoriser la multiplication du virus mais doivent en même temps être limités pour ne pas entraîner la mort des cellules hôtes avant la fin du cycle viral (Randall and Goodbourn, 2008). Le pathogène échappe à l’activation de la réponse immunitaire soit en camouflant efficacement les PAMP pouvant être reconnus soit en interférant avec l’activation des cascades de signalisation. Les pathogènes codent pour des protéines limitant la réponse IFN qui sont souvent des protéines multifonctionnelles capables d’inhiber cette réponse à différentes étapes de l’induction (García-Sastre, 2017). Ces facteurs sont parfois des protéines de structure, déjà disponibles dans le virion dès son entrée afin d’inhiber rapidement la réponse immunitaire innée. Le tableau 2 regroupe les principales stratégies de contremesures virales, illustrées d’exemples pour différentes familles de virus.

Introduction

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Virus (Protéine) Fonction Référence

Stratégie 1 : Limiter l’exposition de PAMP

Paramyxovirus Coiffe virale pour protéger l’extrémité 5’ppp des ARN viraux (Tawar et al., 2009)

Virus Influenza Utilisation des coiffes des ARNm cellulaires pour les lier aux ARNm viraux

(Gu et al., 2015)

Picornavirus Liaison covalente d’une protéine virale à l’extrémité 5’ des ARN viraux

(Goodfellow, 2011)

Virus à ARN positif Compartimentalisation dans le cytoplasme pour la réplication (Miller and Krijnse-Locker, 2008)

Adénovirus (VIII) Chromatinisation de l’ADN viral (Karen and Hearing, 2011)

Stratégie 2 : Séquestrer les activateurs de l’immunité innée

HCMV (UL82) Inhibe translocation de STING du RE (Fu et al., 2017)

HPV16 (E6) Empêche l’activation d’IRF3 (Ronco et al., 1998)

KSHV Code pour des IRF viraux interférant avec la dimérisation des IRF cellulaires

(Joo et al., 2007)

Adénovirus (E1A) Interaction avec le co-activateur cellulaire CBP et le facteur de transcription STAT1

(Leonard and Sen, 1996) (Look et al., 1998)

Virus de la Vaccine (B18R)

Code pour des récepteurs solubles de l’IFN empêchant leur liaison aux récepteurs cellulaires

(Colamonici et al., 1995)

HPV (E7) Séquestre IRF9 empêchant la formation ISGF3 (Barnard and McMillan, 1999)

HCMV (IE1) Séquestre STAT1 et STAT2 (Paulus et al., 2006)

Stratégie 3 : Inhiber les fonctions des activateurs de l’immunité innée

Flavivirus (NS4B) Inhibe l’activité kinase de TBK1 (Dalrymple et al., 2015)

KSHV (ORF52) Inhibe cGAS, empêchant la formation de cGAMP (Wu et al., 2015)

AdV (E3) Inhibe les kinases IKK et donc l’activation de NF-κB (Friedman and Horwitz, 2002)

MARV (VP40) Inhibe l’activité kinase de JAK1 et donc l’expression ISG (Valmas et al., 2010)

JEV (NS5) Active des phosphatases limitant l’activation de JAK/STAT (Lin et al., 2006)

AdV (VA-I-ARN) Inhibe la dimérisation de PKR, nécessaire à son activation (Launer-Felty and Cole, 2014)

Stratégie 4 : Dégrader les facteurs de l’immunité innée

HCV (NS3/4a) Clive les adaptateurs TRIF et MAVS (Li et al., 2005a) (Li et al., 2005b)

DENV (NS2B3) Code pour une protéase qui clive STING (Aguirre et al., 2012)

Rotavirus (NSP1) Induit la dégradation IRF3 par le protéasome (Graff et al., 2007)

HCMV Induit la dégradation de JAK1 (Miller et al., 1998)

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42 L’activation de la réponse innée et la production d’IFN induisent une réponse antivirale limitant la multiplication et la dissémination du pathogène, tant que celui-ci ne la contourne pas. D’autres moyens de défense existent dans la cellule pour éliminer le pathogène, l’autophagie est un de ces mécanismes.

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CHAPITRE 2

L’autophagie : une voie de dégradation limitant l’infection

L’autophagie est un mécanisme de dégradation impliqué dans de nombreuses fonctions cellulaires. La défense face aux infections, en induisant spécifiquement la séquestration et l’élimination du pathogène, est celle qui nous intéressera dans ce manuscrit. L’autophagie est un procédé en plusieurs étapes faisant intervenir de nombreux complexes protéiques, différentes voies d’activation et effecteurs. Ce mécanisme sera donc tout d’abord décrit afin d’introduire les facteurs cellulaires impliqués dans cette réponse puis la fonction de l’autophagie au cours de l’infection sera détaillée.

I- L’autophagie : un mécanisme de dégradation

A) Généralités

L’autophagie est un mécanisme de dégradation cellulaire impliquant le lysosome (Jones, 2009). Ce processus a tout d’abord été observé dans les années 1960 quand Christian de Duve a mis en évidence la dégradation de mitochondries par le lysosome et a nommé ce mécanisme « autophagie », du grec « se manger soi-même » (Deter and de Duve, 1967). L’investigation des mécanismes moléculaires de l’autophagie chez la levure Saccharomyces cerevisiae a permis d’identifier de nombreux gènes impliqués dans ce processus (Tsukada and Ohsumi, 1993), et ils furent par la suite regroupés dans la famille ATG (AuTophagy releated Gene) (Klionsky et al., 2003). Actuellement, plus d’une trentaine de gènes a été identifiée et ils sont conservés de la levure aux mammifères (Glick et al., 2010). L’identification de ces gènes et des fonctions de leurs protéines correspondantes a été récompensé par le Prix Nobel de Médecine en 2016, attribué au Dr Yoshinori Oshumi.

Il existe 3 types différents d’autophagie en fonction du mécanisme par lequel le cargo, c’est-à-dire l’élément à dégrader, est dirigé vers les lysosomes. La micro-autophagie qui s’appuie sur l’invagination de portions de la membrane du lysosome pour capturer le cargo (Mijaljica et al., 2011). L’autophagie dépendante des chaperonnes (ou CMA : Chaperone Mediated Autophagy) qui se base sur le recrutement de la chaperonne Hsc70 par le motif KFERQ exposé sur le cargo à dégrader. Cette chaperonne induit le dépliement du cargo afin de le transporter à travers la membrane du lysosome en interagissant avec le récepteur lysosomal LAMP2A (Tasset and Cuervo, 2016).

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45 Finalement, la macro-autophagie (nommée par la suite « autophagie » dans ce manuscrit), qui est un processus isolant le cargo en plusieurs étapes (Figure 7). La première d’entre elles est la formation un phagophore qui s’allonge pour séquestrer le cargo dans une vésicule à double membrane, l’autophagosome. Cette vésicule fusionne avec le lysosome pour former l’autolysosome dans lequel le cargo est dégradé par le pH acide et la présence d’enzymes lytiques. Suite à la dégradation, les perméases lysosomales permettent le recyclage des produits de dégradation dans le cytosol (Parzych and Klionsky, 2014).

Ce mécanisme de dégradation est complexe et de nombreux facteurs cellulaires sont impliqués dans les différentes étapes de son activation.

Figure 7: Etapes simplifiées de l’autophagie

Lors de l’étape d’initiation, une vésicule à double membrane, le phagophore, est formée autour du cargo à dégrader. Cette vésicule s’allonge et se referme pour former l’autophagosome. Ce dernier fusionne avec des lysosomes qui contiennent des hydrolases et présentent un pH acide, pour former l’autolysosome permettant la dégradation du cargo. Les éléments de dégradation sont alors recyclés dans le cytoplasme.

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