Partie 2 : Essai sur la régulation des services d'eau potable 121
4.3 Le contrat optimal
étude :
S(V
c)−C(V
c, V
p, θ)−µU, (4.3)
avec µ≡ 2π−1
π ∈]0,1].
4.3 Le contrat optimal
Le contrat de délégation doit spécier un volume d'eauV
cconsommé par les usagers
nals (qui détermine le prix unitaireP(V
c)), un volume d'eau V
pperdu (qui détermine
le volume d'eau V
eà extraire : V
e=V
c+V
p) et un transfert monétaire T représentant
le montant de l'investissement en capital supporté par l'exploitant.
4.3.1 Le cas de l'information complète
Nous supposons ici que la collectivité locale connaît le paramètre θ caractérisant
l'opérateur privé lorsqu'elle propose un contrat. Le contrat optimal doit maximiser le
critère (4.3) sous la contrainte de participation U ≥ u. Puisque µ > 0, laisser des
rentes à l'entreprise est coûteux. En conséquence, nous avons U =u, et les conditions
d'ecacité usuelles s'écrivent :
P(V
c) =C
Vc(V
c, V
p, θ) (4.4)
C
Vp(V
c, V
p, θ) = 0. (4.5)
L'équation (4.4) est simplement l'égalité du prix et du coût marginal. L'équation (4.5)
indique que le volume d'eauV
pperdu est choisi de façon à minimiserC étant donnéV
c.
Elle caractérise donc le niveau de pertes optimal. Pour le moment, nous ne faisons pas
d'hypothèse particulière sur le niveau du coût marginal du volume d'eau consommé en
fonction de θ.
Notons également que la solution optimale(V
c, V
p) donnée par le système ci-dessus
ne dépend pas de π. Ce résultat est essentiellement dû au fait que la collectivité locale
préfère favoriser les usagers (π >
1être xées à zéro.
4.3.2 Le cas de l'information incomplète
Nous considérons maintenant le cas où l'opérateur à une information privée sur sa
technologie, c'est à dire sur le paramètre d'ecacité θ. La collectivité locale n'observe
pasθ mais en a une information a priori représentée par la fonction de densitéf dénie
sur l'intervalle [θ,θ¯].
En eet, même si les exploitants doivent présenter les comptes-rendus techniques et
nanciers de leur activité, la collectivité locale ne peut pas déduireθde ces rapports : les
comptabilités peuvent présenter des lignes de dépenses agrégées qui ne correspondent
pas nécessairement à l'exploitation de l'année courante, ou même de la collectivité.
Un opérateur peut en eet choisir d'allouer certaines de ses dépenses entre diérents
services d'eau dont il a la charge.
Dans un tel cas, l'exploitant a un avantage stratégique qu'il peut utiliser an
d'aug-menter ses prots au-delà de son niveau de réserveu. Le contrat conçu par la collectivité
locale doit alors trouver un point d'équilibre entre l'ecacité et l'extraction de rentes.
Le principe de révélation
8permet de considérer que la collectivité locale propose à
l'opérateur privé un menu de contrats indicé parθ, (V
c(.),V
p(.),T(.)) et que l'opérateur
privé choisit le contrat qu'il préfère en révélant son vrai typeθ. La première étape dans
la caractérisation du contrat d'équilibre est de déterminer la classe des mécanismes
implémentables. Le mécanisme est implémentable (ou réalisable), s'il est compatible
en termes d'incitations et s'il respecte la contrainte de participation.
Si un opérateur de type θ reporte θ
0, ses prots s'écrivent :
v(θ, θ
0) =T(θ
0) +P[V
c(θ
0)]V
c(θ
0)−C[V
c(θ
0), V
p(θ
0), θ].
Le contrat (V
c(θ), V
p(θ), T(θ)) doit donc vérier les contraintes d'incitation (IC)
sui-8Nous utilisons la méthodologie classique des problèmes de sélection adverse utilisée par Baron and
Myerson (1982) et étendue par Guesnerie and Laont (1984).
4.3. Le contrat optimal 135
vantes :
v(θ, θ)≥v(θ, θ
0), ∀ θ, θ
0∈[θ,θ¯].
En dénissant U(θ) = v(θ, θ), la condition nécessaire de premier ordre peut être
obtenue à partir du théorème de l'enveloppe :
U
0(θ) =−C
θ(V
c(θ), V
p(θ), θ). (4.6)
Notons d'abord que (4.6) est une condition locale qui signie que pour tout mécanisme
compatible en termes d'incitations, le prot de l'exploitant pour tous les types possibles
est une fonction décroissante de θ puisque C
θest positif. En d'autres termes, le prot
d'un exploitant avec des coûts élevés (θ élevé) est inférieur au prot d'un autre qui a
des coût plus faibles (θ faible) sur un même service.
La condition de second ordre s'écrit :
C
θVc(V
c(θ), V
p(θ), θ)dV
cdθ +C
θVp(V
c(θ), V
p(θ), θ)dV
pdθ ≤0. (4.7)
CommeU est décroissant enθ, la contrainte de participation (ou de rationalité
indivi-duelle) U(θ)≥u se limite à
U(¯θ) =u. (4.8)
Nous ignorons les contraintes de second ordre (vériées plus tard) de telle sorte que le
programme du régulateur s'écrit :
max
Vc(.),Vp(.)Z
θ¯ θ·
S(V
c(θ))−C(V
c(θ), V
p(θ), θ)−µU(θ)
¸
f(θ)dθ (4.9)
sous les contraintes (4.6) et (4.8). La combinaison de ces contraintes donne une
expres-sion de la rente d'information que reçoit l'opérateur. Nous calculons cette rente comme
étant égale à :
U(θ)−u=
Z
θ¯θ
C
θ(V
c(τ), V
p(τ), τ)dτ (4.10)
de telle sorte que la valeur espérée de U(θ)est aussi la valeur espérée de u+C
θFEn introduisant l'expression (4.10) dans le critère à maximiser, le problème du
régula-teur devient :
max
Vc(θ),Vp(θ)Z
θ¯ θ·
S(V
c(θ))−C(V
c(θ), V
p(θ), θ)−µF(θ)
f(θ)C
θ(V
c(θ), V
p(θ), θ)
¸
f(θ)dθ. (4.11)
La solution optimale (V
c, V
p)est donnée par le système :
P(V
c) =C
Vc(V
c(θ), V
p(θ), θ) +µF(θ)
f(θ)C
θVc(V
c(θ), V
p(θ), θ) (4.12)
0 =C
Vp(V
c(θ), V
p(θ), θ) +µF(θ)
f(θ)C
θVp(V
c(θ), V
p(θ), θ). (4.13)
Si l'on compare le système d'équations (4.124.13) au système (4.44.5) du cas de
l'information complète, on remarque qu'il y a deux termes supplémentaires. Ces termes
disparaissent lorsqueµ= 0, ou de manière équivalenteπ=
12
. Dans ce cas, les rentes ne
sont plus coûteuses, et il n'y a plus d'arbitrage entre ecacité et extraction de rentes.
Ainsi, tester la présence d'information privée consiste à vérier que µ est diérent de
zéro (ou de manière équivalente que π est diérent de
12
).
Un résultat important concernant les solutions du modèle est le suivant. Comme
nous l'avons souligné plus haut, la valeur espérée des rentes est égale à la valeur espérée
deC
θFf
(θ). Réduire les rentes revient alors à diminuerC
θ(voir gure 4.1). Les signes des
dérivées croisées C
θVcet C
θVpsont donc les deux éléments qui régissent les distorsions
par rapport au cas de l'information complète. En particulier, si C
θVp< 0
c'est-à-dire s'il est plus coûteux pour les exploitants les plus inecaces de réduire les pertes,
alors un accroissement des pertes V
préduit les rentes. En d'autres termes, il pourrait
être dans l'intérêt de la collectivité locale de permettre à l'exploitant d'accroître ses
pertes au-delà du niveau optimal, pour que les exploitants les plus ecaces n'aient
pas de gain à se faire passer pour inecaces. Ainsi, l'information incomplète ore une
raison supplémentaire à la présence de pertes d'eau importantes dans les réseaux d'eau
potable.
Dans le document
Analyse économique des coûts d'alimentation en eau potable
(Page 134-138)