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3.2 HR 4796, un anneau aux propriétés intrigantes

3.2.2 Contraintes sur des perturbateurs gravitationnels potentiels

La morphologie intrigante présentée dans la section précédente invite logiquement à enquêter sur la présence de perturbateurs gravitationnels qui pourraient être à l’origine de ces structures (Krivov 2010). C’est le deuxième objectif de l’article, et la principale motivation du choix de la

bande L′, pour laquelle la sensibilité à des objets de faible masse est meilleure.

J’ai donc dans un premier temps établi les limites de détection en employant la méthode d’injection de planètes artificielles qui permet de calibrer les pertes de flux dues à l’ADI (Bonne-foy et al. 2011). Nous avons choisi de garder des cartes de contraste en deux dimensions, plutôt que de montrer uniquement des courbes de contraste à une seule dimension, puisque la présence du disque dégrade la sensibilité dans les régions ou celui-ci est particulièrement brillant (Figure 3.15). Comme je l’ai montré en Figure 18 de l’article présenté en section 2.3.2, les pertes de flux qui affectent une planète peuvent varier selon la position de celle-ci, et être plus importante si la planète est proche du bord du disque en raison des zones négatives dues à l’ADI sur le disque. Calibrer cet effet reviendrait à créer une carte de perte de flux, c’est-à-dire injecter autant de planètes artificielles que de pixels dans l’image, alors que la carte présentée Figure 3.15 ne prend en compte qu’une dépendance radiale de la perte de flux. Nous avons décidé de traiter en détail cet aspect uniquement selon une direction privilégiée le long du demi-grand axe (Figure 11 et 13 en annexe D).

Les données ne révèlent aucune source ponctuelles à plus de 5σ, mais elles permettent de

contraindre la masse de perturbateurs gravitationnels potentiels qui seraient responsables du décentrage du disque et/ou de la pente très forte du bord interne ainsi que de celle du bord externe.

Figure 3.15 – Limites de détection en masse de Jupiter autour de l’étoile HR 4796, basées sur la carte de contraste après réduction cADI, la calibration des pertes de flux et les

modèles d’évolution COND03 (Baraffe et al.

2003). Les isocontours vont de 2 à 10 MJup par

pas de 1MJup

la présence d’un compagnon substellaire à très courte séparation qui décale le centre de masse du système, ou à un compagnon planétaire sur une orbite excentrique qui sculpte alors le bord interne du disque en lui donnant une forme elliptique.

• Dans le premier cas, des données complémentaires obtenues avec la technique de masquage de pupille, ou Sparse Aperture Masking (SAM) permettent d’exclure la présence de compagnons suffisamment massifs pour décaler le centre de masse du système. A titre d’exemple, cette technique est sensible à des compagnons de plus de

29MJup à plus de 80mas d’après les modèles d’évolution de COND03 (Baraffe et al.

2003).

• Alternativement, si le décentrage apparent est créé par un compagnon sur une orbite excentrique sa masse peut ´galement être contrainte. Il existe des travaux théoriques deWisdom(1980) qui donnent la largeurδade la zone chaotique créé par une planète

de masse Mp orbitant une étoile de masse Ms à une distancea : δa

a = 1.3Mp

Ms

2/7 .

Ainsi, si le bord interne du disque est sculpté par une planète, alors la distanceδaau

bord et sa masse Mp vérifient cette expression, et plus la planète est massive plus sa

distance au bord interne du disque est grande, nous permettant à l’aide des limites

de détection obtenues précédemment de contraindre l’espace de paramètres (a, Mp).

L’illustration de cet exercice est donné en Figure 3.16 (à gauche) et a été répétée dans le cas d’une planète sur une orbite d’ellipticité 0.1 (à droite) avec la formule théorique de Mustill & Wyatt(2012).

2. Dans le cas du bord externe, nous n’avons pas exploité nos observations en bande L′ en

raison de leur faible dynamique, mais avons utilisé les profils deSchneider et al. (2009),

complétées par des simulations dynamiques réalisées à l’aide du code DyCoSS (Thébault 2012) pour conclure à la compatibilité entre le profil radial et la présence d’une planète

de8MJupqui sculpterait le bord externe. Selon nos limites de détection, une telle planète

aurait été détectée partout sauf proche du demi-petit axe, ce scénario est donc compatible avec nos observations. Notons qu’une simulation sans planète, absente de l’article, a été

réalisée ultérieurement et publiée dansThébault et al.(2012, présenté en Figure 3.17). Les

résultats montrent que le scénario sans planète reste toujours marginalement compatible

3.2. HR 4796, un anneau aux propriétés intrigantes

Figure 3.16 – La zone située entre l’ellipse

verte et rouge indique la position possible d’une planète dont la masse serait en dessous des limites de détection et qui serait responsable du bord interne très pentu du disque. L’image de gauche suppose une orbite circulaire et celle de droite une excentricité de 0.1

Figure 3.17 – Profils de brillance résultant

de simulations dynamiques pour expliquer la pente de brillance externe du disque, présentés dans Thébault et al. (2012) en correction de la

Ces conclusions invitent donc à réobserver cette cible avec une meilleure résolution angulaire et une meilleure dynamique pour tester ces hypothèses, ainsi qu’à sonder la présence de gaz avec ALMA dont la présence peut également générer une telle morphologie (Lyra & Kuchner 2013).