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IV. Cadre théorique de la recherche

3. Contextualisation d’un projet d’enseignement

Ce qu'on appelle contextualisation dans le cadre d'une intervention didactique, c'est la prise en compte des contextes14 dans la mise en place concrète de programme d'enseignement (Blanchet, dans un entretien pour l'AUF, 2009). C'est donc la prise en compte des représentations, des styles d'enseignement/apprentissage et de la variation culturelle du terrain où aura lieu l'action éducative. Cette prise en compte semble essentielle si l'on veut éviter un enseignement neutre et dépourvu de considération pour le facteur humain (Piccardo, 2007, p.180)

La recherche sur la contextualisation comporte deux axes. Le premier étudie les interactions en classe, les modalités culturelles et interculturelles d'interactions. Le deuxième tente de répondre aux insuffisances de placages de dispositifs sur des contextes pour lesquels ils n'ont pas été conçus (Blanchet, entretien AUF, 2009). Nous nous situerons, à travers cette recherche, un peu à cheval sur les deux, essayant de comprendre ce qu'il en est des modalités culturo-didactiques des deux contextes en présence pour

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Les définitions de la notion de contexte sont nombreuses et citent des variantes historiques, géographiques, sociales, culturelles, professionnelles, etc.(Castellotti & Moore chez Blanchet, Moore et Asselah-Rahal, 2009, p.200).

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tenter de comprendre d'abord comment le projet MRIE est contextualisé et ensuite comment cela est vécu par les auteurs du projet.

Car, pour Coste (chez Castellotti & Chalabi (Dir.), 2006, p.19), la contextualisation est bien « un processus d’ajustement de principes, de

démarches, de contenu d’enseignement ou d’exercices à des réalités locales, culturelles, institutionnelles et pédagogiques. » Mais selon lui, le cœur de la

méthode d’origine est rarement remis en cause et beaucoup des opérations de contextualisation le sont en surface. Généralement, on adapte le modèle après coup ; le contexte est donc pris en compte dans un deuxième temps. Pourtant, pour Auger (chez Castellotti & Chalabi (Dir.), 2006, p.111), tout enseignement est spécifique et devrait être analysé dans le plus grand détail possible. Il faudrait tenir compte des adéquations entre contextes, pratiques de classe, formation des enseignants et élaboration des programmes. Dans cette analyse, il faudrait également ne pas oublier la relation entre l’offre et la demande, même dans un contexte d'enseignement/apprentissage où, après tout, l'étudiant vient se procurer des connaissances, des compétences, une qualification.

Pescheux (chez Castellotti & Chalabi (Dir.), 2006, p.206) propose des solutions plus individuelles aux problèmes de contextualisation et suggère d'intervenir au niveau des enseignants. Elle préconise en effet une formation à l’auto-observation participante qui permettrait à l'enseignant d’analyser sa pratique dans tout type de contextes. Cette méthode d’analyse, si pratiquée couramment par l’enseignant, pourrait l’amener à se créer un « habitus

réflexif » (Schön cit. in Pescheux (chez Castellotti & Chalabi), 2006, p.212),

c'est-à-dire à se poser les bonnes questions quand un problème lié à la différence entre les acteurs survient en classe. Piccardo (2007, p.182) souligne encore que la notion d’adaptation requiert des comportements qui relèvent de l’ethnométhodologie. Dès lors, former à la complexité, à la diversité, aux savoirs-faire culturels doit devenir une priorité car l’enseignant ne peut toujours (se) démêler en souplesse des situations compliquées dans

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lesquelles il est amené à se trouver lorsqu’il travaille dans un contexte bi- pluriculturel.

Les différentes propositions évoquées ci-dessus s'adressaient, en l'occurrence, aux enseignants de langue.

Il est en effet classique de trouver comme solution à la contextualisation d'un curriculum d’étude d’intégrer des données culturelles dans les cours de français (qu’ils soient FLE, FOS ou FOU) des programmes d'enseignement destinés aux étudiants étrangers en France (Babault, chez Castellotti & Chalabi (Dir.), 2006, p.268) ou aux étudiants indigènes participant à un programme impliquant la France et la langue française dans leur propre pays.

Il y a là, il est vrai, un enjeu d'importance puisque plusieurs auteurs (Parpette, Goes & Mangiante, Cavalla, tous en 2010 in Le français dans le monde R/A 47) constatent un écart assez grand entre les compétences linguistiques des étudiants étrangers et celles qui doivent permettre le bon déroulement de leurs études dans un contexte francophone et français. Mais un nombre non négligeable de recherches montre que les manquements vont au-delà des compétences linguistiques pour toucher la méthodologie universitaire, relevant autant du linguistique que du culturel (Goes & Mangiante, Les écrits universitaires : besoins…, 2010, p.145). Trois difficultés sont définies par Cavalla (Méthodologie d'apprentissage de l'écrit universitaire, 2010, p.154) : celle d'ordre scientifique, une deuxième d'ordre culturel au travers de la méthodologie universitaire et enfin des difficultés d'ordre linguistique. Pour de nombreux chercheurs, la méthodologie universitaire repose sur le diptyque "compréhension orale"/ "production écrite" (Goes & Mangiante, 2010, p.146). Des genres de textes fréquemment présents en contexte universitaire ont pu être listés : la dissertation, le commentaire, l'étude de cas. Ces genres impliquent que l'étudiant devra être capable de re-produire, de re-formuler et de re-lier pour gérer, analyser et transposer des connaissances (Goes & Mangiante, 2010, p.151).

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Nous faisons déjà l'hypothèse que ces problèmes se retrouvent au sein du Master conjoint ci-étudié puisque, qui plus est, aucun pré-requis linguistique n'est exigé pour entrer en 1ère année dans le Master conjoint MRIE.

Pour remédier à la problématique exposée, Parpette & Mangiante (chez Castellotti et Chalabi (Dir.), 2006, p.275) proposent, pour chaque contexte spécifique (que ce soit en France ou ailleurs) où la langue cible devra être utilisée, de suivre les étapes d’une démarche-type afin de créer un enseignement de français qui réponde au mieux aux besoins du public concerné. Cette démarche comprend trois étapes principales dont une analyse des besoins des apprenants, la récolte des données et la didactisation de ces données. Plus tard, Goes & Mangiante (2010, p.145) déclinent à peu près de la même manière la démarche qu'ils proposent pour des cours de FOS destinés à l'intégration d'un public étranger dans le milieu universitaire français.

Les recherches de Cavalla l'amènent, elle, à proposer la création d’un référentiel qui donnerait à voir aux étudiants quels types d’écrits et d’oraux seront utilisés en réception et en production dans leur discipline scientifique. Elle fait l’hypothèse que le référentiel aidera les étudiants à s’interroger sur les attentes méthodologiques de l’institution qui les accueille (Cavalla, 2010, p.157).

Après avoir justifié notre position dans le cadre de cette recherche et discuté des notions théoriques sur lesquelles nous nous sommes basée pour mener à bien l'étude, nous pouvons à présent révéler notre méthodologie d'enquête, nos analyses et nos résultats.

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