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b) Contexte familial multi-partenaires facilitateur de l’acquisition de la compréhension des états internes de l’autre

Chapitre VIII. Problématique et hypothèses

VIII.2. b) Contexte familial multi-partenaires facilitateur de l’acquisition de la compréhension des états internes de l’autre

La qualité des relations familiales est considérée comme ayant une influence sur le développement de la CA. Ceci est empiriquement fondé par les recherches dont les résultats ont démontré que le comportement de validation du pourvoyeur de soins – que ce soit en explicitant les états de l’enfant supposés ou en réagissant implicitement aux émotions et états mentaux attribués à l’enfant – favorise la production des comportements révélateurs de la CA chez l’enfant. Par ailleurs, divers travaux ont présenté des résultats controversés quant à l’association entre certaines composantes de la qualité des relations entre l’enfant et des membres de sa famille – comme la chaleur maternelle, l’expressivité familiale, le conflit et la positivité dans la relation de la fratrie – et la production de comportements révélateurs de sa CA. Dans ces recherches, le contexte familial n’est pas pris en considération, alors qu’il fournit des expériences uniques de contact avec plusieurs partenaires simultanément, ce qui très certainement favorise l’apprentissage des points de vue de l’autre. Ainsi, les dimensions

qualitatives relationnelles du contexte multi-partenaires de la famille devraient être associées à la production de comportements révélateurs de la CA.

Différentes dimensions relationnelles dans un contexte multi-partenaires sont à investiguer comme composantes associées au développement de la CA chez le jeune enfant.

Dans un premier temps, il est nécessaire de répliquer les résultats trouvés au sein de la dyade parent-enfant dans le contexte familial. Ainsi, la validation de l’expérience de

l’enfant dans un contexte familial est une dimension interactive à investiguer.

Dans un deuxième temps, la famille est un lieu où divers « esprits » se rencontrent, expérience donnant accès à divers autres ce qui serait facilitateur de la CA. Pour fonctionner en famille, une négociation est nécessaire entre ses membres. Cette négociation entre

plusieurs individus possédant chacun des états internes est un contexte de choix pour

développer la compréhension de l’autre. De plus, lorsque la tâche à réaliser en famille est un partage d’expérience commune, ce contexte d’échange permettrait de développer

spécifiquement la capacité d’intersubjectivité chez le bébé. Ainsi, la manière de collaborer et de se coordonner dans une expérience de partage en famille serait une composante relationnelle significative pour l’enfant dans le développement de sa CA.

Dans un troisième temps, le contexte multi-partenaires est un contexte permettant le cumul d’expériences différentes selon le rôle interactif que l’enfant adopte. Dans un contexte multi-partenaires, l’enfant peut être un partenaire actif avec l’un ou tous ses partenaires, ou il peut être observateur d’une relation engagée entre les autres partenaires. Ces diverses

expériences fondent la capacité de l’enfant de se représenter les états internes de l’autre.

L’observation de la manière de gérer les différentes configurations relationnelles au sein de la famille serait une composante relationnelle spécifique impliquée dans le développement de la CA.

Dans un quatrième temps, la récolte de mesures longitudinales sur la manière de collaborer dans une expérience de partage en famille permet de définir des trajectoires de coordination familiale. Une trajectoire n’est pas définie par la manière dont la famille agit à un moment donné mais en fonction du profil formé par leurs interactions à travers les premières années de l’enfant. Ces trajectoires de coordination familiale sont considérées comme constituant un contexte d’apprentissage dans lequel l’enfant se forge une

représentation des états internes d’autrui. Ainsi, les trajectoires de coordination familiale seraient associées à la production de comportements révélateurs de la CA chez l’enfant à ses différents âges.

La perspective longitudinale adoptée dans ce travail permet de considérer à la fois des hypothèses sur des associations entre des mesures évaluées à un même temps de mesure et sur des associations longitudinales. Ainsi, je pose l’hypothèse que les composantes relationnelles considérées dans ce travail – la validation par les parents du vécu de l’enfant, la coordination entre les membres de la famille et la gestion des différentes configurations relationnelles selon les rôles de partenaire actif versus observateur – sont associées de manière concomitante et de manière longitudinale à la production des comportements révélateurs de la CA.

Figure 12. Représentation graphique de la problématique et des hypothèses de ce travail.

Intersubjectivité primaire

Intersubjectivité secondaire

Théorie de l’esprit

Qu’en est-il de la dynamique familiale? Qualité relationnelle,

expérience d’être actif et observateur au sein des relations.

Compétences intersubjectives Attribution de fausse croyance et

d’émotions Construit psychologiqueComportements obsers Construit psychologiqueComportements obsers Coordination familiale, validation du vécu de l’enfant,

gestion des configurations relationnelles (changement de rôles actif-observateur), trajectoire des interactions familiales

Qu’en est-il de la séquence développementale de la CA ?

Facteurs relationnels

? ?

? ?

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Chapitre IX. Méthode

Ce travail s’inscrit dans une recherche sur la transition à la parentalité réalisée par l’Unité de Recherche du Centre d’Etude de la Famille (UR-CEF). Cette recherche s’est déroulée en deux temps : une première étape concerne le suivi des familles entre le 6ème mois de grossesse et les deux ans de leur enfant (soutenue financièrement par le Fonds National Suisse ; Fonds n° 32-52508.97). Une seconde étape concerne le suivi des familles lorsque leur enfant a 4 ;10 ans.

IX.1. L’échantillon

Dans la première étape de la recherche sur la transition à la parentalité menée par l’UR-CEF, 50 familles volontaires attendant leur premier enfant ont été recrutées par la maternité du Centre Hospitalier Universitaire Vaudois, par certains gynécologues privés, ainsi que par voie de presse.

Ces 50 familles ont été recontactées lorsque l’enfant avait 4 ;10 ans, qui sera par la suite nommé 5 ans. Trente-sept familles ont accepté de revenir dans les locaux de l’UR-CEF avec les frères et sœurs éventuels. Relativement aux 13 familles qui ne sont pas revenues, une famille a déménagé dans un autre pays ; trois familles n’ont pas été retrouvées dans l’annuaire suite à un déménagement ou n’ont pas répondu à nos courriers ; neuf familles n’ont pas souhaité participer à cette étape de la recherche (dont quatre familles avec une expérience de divorce ou de séparation des parents). Vingt-trois familles se sont présentées avec plusieurs enfants. Ces 37 familles sont de milieu socio-économique moyen à moyen supérieur (indice ISP de Hollingshead). La moyenne d’âge des mères à la naissance de l’enfant est de 31 ans (M = 30.97, SD = 2.71) et celle des pères de 33 ans (M = 33.19, SD = 5.08).

IX.2. Protocole

L’objectif principal de la recherche la transition à la parentalité réalisée par l’UR-CEF était d’explorer le développement de la communication familiale depuis la grossesse jusqu’à la deuxième année de vie de l’enfant, puis de faire un suivi de cette communication à ses 5 ans. L’évolution de l’alliance familiale a été donc au cœur de ce projet. Dans cet objectif, un

protocole a été établi. Pour mon travail, j’utilise dans ce protocole les situations me

permettant d’obtenir des mesures sur les compétences intersubjectives et de théorie de l’esprit de l’enfant ainsi que des mesures sur les composantes relationnelles à l’œuvre au sein du système familial. Par ailleurs, les instruments utilisés dans ce protocole me permettant de mesurer des variables contrôle sont également présentés dans cette section.

Aux 3 et 9 mois de l’enfant, une situation de Lausanne Trilogue Play a été réalisée.

Aux 4 mois de l’enfant, seule une partie du Lausanne Trilogue Play a été effectuée, partie concernant un échange impliquant activement les trois membres de la famille. Des

questionnaires concernant le tempérament de l’enfant ont été remplis aux 3 mois de l’enfant.

Aux 5 ans de l’enfant, les familles ont réalisé deux rencontres. La première leur a permis de réaliser un Lausanne Trilogue Play ou un Lausanne Family Play en fonction du nombre d’enfants dans la fratrie. La seconde impliquait uniquement l’enfant afin d’évaluer ses capacités cognitives. Dans cette rencontre, une expérimentatrice lui a administré des tâches d’attribution de fausse croyance et d’attribution des émotions, ainsi que les subtests du

« Wechsler Preschool and Primary Scale of Intelligence, Revised » de vocabulaire et de compréhension. Les parents ont également rempli trois questionnaires. Deux questionnaires concernaient la perception de leur enfant avec un questionnaire sur son tempérament et un autre sur son profil socio-affectif. Le troisième questionnaire concernait leur satisfaction conjugale.

Alors que les 37 familles ont participé à la rencontre permettant l’évaluation des capacités cognitives de l’enfant, 9 familles n’ont pas réalisé de Lausanne Trilogue Play ou de Lausanne Family Play. Ces jeux n’ont pas été réalisés soit parce que les expérimentateurs leur ont demandé de réaliser un jeu libre à la place, soit parce que les parents ne souhaitaient pas réaliser ce jeu car ils étaient séparés ou divorcés.