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Introduction

1- D’une curiosité vis à vis du terrain à l’ébauche d’une problématique à deux niveaux 1.1- Le cheminement du questionnement

1.2- Une problématique générale à deux niveaux 2- Le cadre théorique global

2.1- Les problèmes posés par la théorie de l’agence 2.2- Le rattachement à la sociologie néo-institutionnelle

2.3- Un modèle de décision intergouvernementale chaotique et prenant en compte les idées 2.3.1- Les processus de décision du modèle du garbage can et de Kingdon 2.3.2- L’approche cognitive des politiques publiques

3- La formulation de la problématique

3.1- Les spécificités des O.I.G. pour l’action politique 3.2- Les processus décisionnels dans les O.I.G.

3.3- L’existence de comportements politiques spécifiques du fait du contexte intergouvernemental ? 3.4- Les facteurs d’influence des décisions par les entreprises

Introduction

Dans les deux premiers chapitres de la restitution de notre travail, nous avons cherché à

cerner notre objet de recherche en nous référant à différents champs de recherche et nous

avons examiné successivement : les principaux résultats des travaux de recherche sur les

stratégies politiques des entreprises, les stratégies politiques internationales des entreprises

(Chapitre 1), les organisations intergouvernementales, et les négociations multilatérales

(Chapitre 2).

Dans ce troisième chapitre, nous fixons un cadre théorique global à notre travail et nous

passons d’une préoccupation vague - les stratégies politiques des entreprises dans une

organisation intergouvernementale - à des interrogations plus précises.

1- D’une curiosité vis à vis du terrain à l’ébauche d’une

problématique à deux niveaux

1.1- Le cheminement du questionnement

Notre recherche est née d’une curiosité vis-à-vis d’un terrain, la Commission du Codex

Alimentarius, et du constat de l’implication des entreprises dans ses travaux1.

Nous nous demandions pourquoi et comment les entreprises françaises participaient aux

travaux du Codex Alimentarius et comment elles pouvaient espérer influencer les travaux

d’une organisation intergouvernementale comptant environ cent soixante-dix Etats.

C’est avec ces interrogations que nous avons commencé à lire des documents présentant le

Codex et à explorer la littérature sur les stratégies politiques des entreprises. Nous avons

aussi procédé aux premiers entretiens avec des fonctionnaires français et des représentants

de l’industrie impliqués dans les travaux du Codex, de façon à vérifier l’intérêt de nos

premières questions et la pertinence du terrain.

1

« Le Codex [Alimentarius], ce sont des gouvernements qui se rencontrent, au début, il n’y avait que les

gouvernements seuls et puis, de plus en plus, ils se sont appuyés sur l’industrie. [La Direction Générale de la Concurrence, de la Consommation et de la Répression des Fraudes] a vu ses correspondants industriels évoluer beaucoup, il y a eu une prise de conscience, ils se sont dotés de compétences qu’ils n’avaient pas auparavant, [...], maintenant dans les délégations françaises dans tous les Codex, il y a quasiment systématiquement des industriels ». Extrait d’un entretien mené pour la préparation de notre mémoire de DEA. (M. Lassalle-de Salins

[1998], La perception des risques alimentaires dans le secteur agro-alimentaire , Mémoire de DEA, Université Paris X Nanterre – UFR de Sciences Economiques).

Ces entretiens ont rapidement montré l’existence d’étroites relations entre les entreprises et

l’administration françaises dans l’élaboration d’un certain nombre de normes du Codex

Alimentarius. Ils indiquaient que l’administration considérait qu’elle avait besoin que les

entreprises se mobilisent et participent à la préparation des travaux du Codex et qu’étaient

souvent présents en arrière-plan, non seulement les intérêts économiques de la France liés

à la protection de son marché domestique ou à sa position d’exportateur de produits

alimentaires, mais aussi une certaine « culture française » de l’aliment et de la production

alimentaire. Ils ont fait aussi apparaître que le Codex Alimentarius avait un fonctionnement

très ramifié, avec un organe central (la Commission), des comités spécialisés, des groupes

de travail, différents types de textes, des Etats membres, des observateurs – en bref que le

fonctionnement de cette organisation était « compliqué à comprendre ». Nous avons alors

poursuivi les entretiens avec des questions plus ciblées sur les raisons et les modalités de la

participation de l’industrie aux travaux du Codex et leur évolution, sur le rôle de l’industrie

dans la construction de la position nationale, tout en entrant dans le détail de dossiers

spécifiques.

Notre curiosité pour ce terrain s’en est trouvée avivée mais il nous fallait passer de cette

curiosité pour le terrain à un questionnement plus académique.

Nous avons traversé une longue phase de tâtonnement – inhérente au type de recherche

que nous avons choisi (Hlady-Rispal [2002 : 93]) - avant d’envisager d’axer notre réflexion

sur l’exploration d’une configuration particulière - une organisation intergouvernementale -

pour les stratégies politiques des entreprises. Nous avons alors repris notre lecture des

travaux antérieurs et constaté que peu de recherches portaient sur les stratégies politiques

des entreprises dans cette configuration spécifique2. Plus précisément, les travaux sur les

stratégies politiques ayant pour terrain des décisions intergouvernementales ne cherchaient

pas à mettre en évidence d’éventuelles spécificités des stratégies politiques déployées dans

ce contexte. Notre recherche pouvait alors « utilement » prendre cette question pour objet.

2

Si l’on essaie de retracer sa construction au regard des différents points de départ envisagés

par Allard-Poesi et Maréchal [1999 : 46-50], notre objet de recherche apparaît donc comme

au croisement d’une part d’une question très large et d’un terrain de recherche donné, et

d’autre part du constat d’un manque dans les recherches sur les stratégies politiques des

entreprises.

1.2- Une problématique générale à deux niveaux

La première étape de notre travail était tout d’abord de vérifier en quoi les O.I.G.

constituaient un contexte spécifique pour les stratégies politiques des entreprises, de

comprendre comment elles décidaient et quels pouvaient être les points d’entrée de

l’entreprise acteur politique.

L’étude de la littérature susceptible de répondre à ces questions3 nous a laissée insatisfaite.

Les premiers travaux en droit et en sciences politiques que nous avons consultés nous ont

permis de définir les O.I.G. et d’aborder la prise de décision dans ces enceintes dans sa

dimension formelle comme dans sa dimension concrète, souvent marquée par les rapports

de pouvoir et les inégalités entre Etats. Cependant, le point de vue adopté nous semblait

souvent global, ne permettant pas d’entrer véritablement dans le détail4.

Des travaux plus récents, tant en droit (Breton-Le Goff [2001]) qu’en science politique avec

l’ouvrage collectif récemment publié et centré sur la décision dans les O.I.G.5 (Reinalda et

Verbeek [2004]), nous ont donné plus d’éléments sur les processus concrets. Dans cet

ouvrage, certaines études empiriques s’intéressent à la décision dans les bureaucraties des

O.I.G. (Freitas [2004], Woods [2004]), mais la décision intergouvernementale n’est pas

toujours déléguée au secrétariat des O.I.G.. Les articles de Schemeil [2004] et de Dirks

[2004] laissent plus de place à l’exposé des divergences et convergences entre Etats ainsi

qu’aux apports des observateurs dans la production de textes.

3

Voir Chapitre 2, sous-chapitre 1. 4

Par exemple : comment et quand décide-t-on que le consensus est atteint, et qui le décide ? mais aussi : comment l’O.I.G. décide-t-elle de travailler sur tel ou tel sujet ? comment démarre le travail commun (qui rédige une première version de texte?) ?

5

Les travaux auxquels nous nous référons au paragraphe précédent faisaient tous référence au célèbre ouvrage de Robert Cox et Harold Jacobson (1973), The anatomy of influence : decision-making in international

organization, portant sur la période 1945-1970, et donc dans un contexte très différent du contexte actuel. Sur

ces changements voir l’avant-propos de Cox [2004] à l’ouvrage collectif de 2004, et l’article de Reinalda et Verbeek [2004a].

La décision dans les O.I.G. apparaît alors mettre en jeu une pluralité d’acteurs (des Etats,

des O.N.G., des experts, le secrétariat des O.I.G. qui elle-même est parfois divisée en sous-

unités ayant des perspectives différentes voire conflictuelles) non plus théorique mais bien

réelle.

Pour leur part, et ce dès les premiers entretiens que nous avons menés, les participants à

ses travaux ont décrit l’O.I.G. focale comme un lieu de négociation entre Etats6 dans lequel il

faut trouver des soutiens à la position que l’on souhaite défendre. Ceci nous a poussée à

faire une rapide incursion dans la littérature sur la négociation, détour qui s’est avéré très

éclairant. Il nous a en effet permis d’accorder plus de place à la coexistence du conflit et de

la coopération et à la construction de coalitions et de mieux prendre la mesure de la

complexité des négociations multilatérales7.

Au total, malgré les différents travaux sur le sujet, il nous a semblé qu’il y avait la place pour

une nouvelle interrogation sur la décision dans les O.I.G.. Nous pensons qu’étudier la

décision dans ces organisations non pas d’un point de vue global, mais du point de vue de

celui qui veut l’influencer et en se basant sur une description relativement détaillée de cas

précis, peut nous aider dans notre recherche sur les stratégies politiques des entreprises

dans les O.I.G..

Ainsi, alors qu’au départ nous nous étions focalisée sur les comportements des entreprises,

l’intérêt, voire la nécessité, d’entrer dans le détail du fonctionnement de l’O.I.G. elle-même

s’est fait sentir. En conséquence, notre problématique générale a deux niveaux : le niveau

de la décision intergouvernementale, et le niveau du lobbying des entreprises envers les

Etats parties prenantes à la décision intergouvernementale.

6

Cet angle de vue n’est pas considéré dans Reinalda et Verbeek [2004] où la décision dans les O.I.G. est vue sous les aspects du leadership, de la construction de consensus, de la dynamique organisationnelle, des conflits de loyauté, des fenêtres politiques et des processus d’apprentissage (nous reprenons là les titres des différentes parties de l’ouvrage).

7

Du point de vue empirique, nous nous posons les questions suivantes : − comment se passe concrètement la décision dans les O.I.G. ? − quels sont les points d’entrée pour les entreprises ?

− comment les entreprises interviennent-elles et en particulier que se passe-t-il au niveau national ?

− les interventions des entreprises peuvent-elles influencer la décision des O.I.G.?.

2- Le cadre théorique global

Les travaux sur les stratégies politiques des entreprises font appel – souvent implicitement -

à des courants théoriques variés (Getz [2002]).

Pour notre part, notre démarche se voulant avant tout exploratoire et sans a priori théorique

pour rester la plus ouverte possible au terrain et aux interrogations qu’il suscite chez le

chercheur, nous n’avons pas au premier abord cherché à nous inscrire dans un courant

théorique privilégié. Nous avions néanmoins besoin pour mener notre recherche d’expliciter

les hypothèses générales sous-jacentes à notre travail.

Nous avons commencé le chapitre 1 en indiquant que nous voyons l’Etat (ou une collectivité

d’Etats) comme un acteur de l’environnement de l’entreprise et l’entreprise comme capable

de stratégie politique envers l’Etat ou une collectivité d’Etats et avons fait référence aux

stratégies hors marché, et aux concepts de parties prenantes ou de stratégies relationnelles.

Puisque nous avons montré la nécessité qu’il y a pour la pertinence de notre recherche à y

inclure une analyse de la décision intergouvernementale, il nous faut un cadre de référence

plus englobant et permettant de pouvoir traiter les deux niveaux de notre problématique.

Après avoir envisagé la théorie de l’agence (section 2.1), nous avons finalement choisi trois

points d’appui ad hoc : le néo-institutionnalisme dans sa tendance qui laisse une place à

l’acteur (section 2.2), le modèle de décision de la poubelle et celui de Kingdon ainsi que les

2.1- Les problèmes posés par la théorie de l’agence

La théorie de l’agence semblait être un courant théorique dans lequel nous pouvions inscrire

notre travail puisque :

− d’une part certains travaux sur les stratégies politiques des entreprises voient les entreprises comme cherchant à créer des relations d’agence avec les institutions

publiques8 (Mitnick [1981 : 75, 1993a et b], Keim et Baysinger [1988], Getz [1993],

Attarça [2000 :7]) – entre autres les O.I.G. (Getz [1993]) -,

− d’autre part, des recherches sur la décision dans les O.I.G. ont utilisé la théorie de l’agence comme référence (Reinalda et Verbeek [2004]).

La théorie de l’agence pouvait ainsi potentiellement nous permettre de traiter les deux

niveaux de notre problématique.

Nous en présentons tout d’abord quelques caractéristiques puis voyons de façon plus

détaillée comment Getz [1993] et Reinalda et Verbeek [1994a] s’y sont référés.

La théorie de l’agence s’intéresse à la relation d’agence, c'est-à-dire à la relation entre un

principal qui délègue un travail et un agent qui effectue ce travail, chacun des acteurs étant

mû par la recherche de son propre intérêt (Eisenhardt [1989a : 58-59]). Plus largement, elle

ne concerne pas que la délégation et s’étend à toute forme de coopération (Charreaux

[1987 : 24]. Deux problèmes se peuvent se poser dans la relation d’agence : le problème

d’agence qui se pose dans les cas où les intérêts du principal et de l’agent divergent et où il

est difficile ou coûteux pour le principal de contrôler l’agent, et le problème de partage des

risques quand le principal et l’agent ont des préférences de risques différentes (Eisenhardt

[1989a : 58]). Une part importante de la théorie de l’agence s’intéresse ainsi aux

mécanismes d’incitation et de contrôle que le principal met en place pour contrôler le

comportement de l’agent (ibid., p. 59 et 68]).

Dans le cas de l’action politique des entreprises, il s’agit pour le principal - l’entreprise -,

d’identifier les problèmes qui empêchent les représentants du gouvernement d’être des

8

Notons que Mitnick voit la relation d’agence dans les deux sens : le régulateur peut être un agent de l’industrie lui assurant une protection par la réglementation, et le régulateur peut être un principal qui utilise la

agents parfaits et d’utiliser des tactiques pour les résoudre (Getz [2002 : 319]), alors qu’il n’a

pas de moyens de contrôle formel ou manifeste sur ces agents (Mitnick [1993a : 2]).

Se référant à la théorie de l’agence, Getz [1993] s’attache à identifier les activités politiques

appropriées pour une entreprise en fonction i/ de la cible de l’action politique, ii/ du type de

dossier et iii/ du stade de son cycle de vie auquel il se trouve. Suivant Mitnick [1984]9, Getz

considère que quatre raisons peuvent expliquer que l’agent n’agisse pas dans l’intérêt du

principal : des problèmes de connaissance (l’agent ne sait pas ou ne comprend pas ce que

veut le principal), des problèmes de disposition (l’agent est en désaccord avec l’intérêt du

principal), des problèmes de capacité (l’agent n’a pas les compétences pour agir dans

l’intérêt du principal), et des problèmes d’effort (l’agent ne déploie pas assez d’énergie dans

la poursuite de l’intérêt du principal) [1993 : 247-248].

La relation entre l’entreprise et sa cible est ainsi vue au travers des actions qui peuvent

limiter les problèmes d’agence, et au travers des mécanismes d’incitation/sanction, tandis

que les questions de processus de décision de l’agent, de sa rationalité, ne sont pas

envisagées.

Il est intéressant de noter qu’alors que de nombreux articles sur les stratégies politiques ne

traitent – parfois explicitement mais souvent implicitement – que des contextes nationaux,

Getz [1993] envisage spécifiquement le cas de la cible O.I.G.. Elle montre que, pour

l’entreprise-principal, l’O.I.G. pose principalement des problèmes de disposition10 dus au

grand nombre de ses principaux (ibid., p.253-254). L’O.I.G. est vue comme un agent unique :

c’est implicitement l’établissement d’une relation d’agence entre une entreprise et la

réglementation pour contrôler les choix des agents – des industriels - par exemple en restreignant les choix d’activité industrielle qu’ils peuvent faire (Mitnick [1993b : 98]).

9

Mitnick, Barry M. (1984), « Agency problems and political institutions », Annual research conference of the

Association for Public Policy Analysis and Management, New Orleans, October. Cité par Getz [1993 : 247-248].

10

Si l’O.I.G. a un grand nombre d’Etats membres aux intérêts variés (multiplicité de principaux), elle est peu susceptible d’adhérer à l’intérêt d’une entreprise. Les problèmes de disposition peuvent être réduits par

l’adhésion d’un large public à l’intérêt de l’entreprise (mais plus difficilement dans le cas où la cible est une O.I.G. que dans celui où la cible est une entité d’un gouvernement démocratique) et par la dépendance du décideur vis- à-vis de l’information que peut lui donner l’entreprise (ibid., p.256 et 266). Des problèmes de capacité peuvent aussi se poser car les organisations internationales ont rarement le pouvoir de mettre en œuvre les politiques qu’elles ont préparées (ibid., p.256-257).

bureaucratie de l’O.I.G.11 que Getz étudie et non une relation entre une entreprise et la

collectivité des Etats. Il nous semble que l’on peut aussi faire appel à la théorie de l’agence

pour étudier les relations entre les entreprises et les différentes délégations

intergouvernementales, l’entreprise cherchant à établir une relation d’agence avec chacun

des Etats membres de l’O.I.G.. On étudie alors une somme de relations d’agence de niveau

national.

Pour leur part, Reinalda et Verbeek se réfèrent à la théorie de l’agence pour prendre en

compte la tension entre les Etats membres et le secrétariat dans leur étude de la décision

dans les O.I.G. [2004a : 11]. Ils en critiquent toutefois la perspective rationaliste et

reconnaissent un rôle important à des facteurs autres que les intérêts propres des acteurs

que ceux-ci soient le secrétariat des O.I.G. ou les Etats ; des normes, des valeurs, des idées

se combinent en effet avec les intérêts matériels (ibid., p.23-27). De plus, des phénomènes

tels que la construction progressive de compromis entre les parties prenantes à la décision

(Schemeil [2004]), l’évolution des positions des acteurs au contact des autres acteurs et les

phénomènes d’apprentissage (Dirks [2004]), peuvent difficilement être pris en compte par la

théorie de l’agence puisque celle-ci se focalise sur des relations bilatérales.

Au total, centrée sur l’organisation du contrôle de l’agent par le principal, la théorie de

l’agence ne laisse la place ni à la prise en compte du processus de décision de l’agent ou à

un échange d’idées entre le principal et l’agent12, ni à celle de la dynamique de la

négociation intergouvernementale.

2.2- Le rattachement à la sociologie néo-institutionnelle

La théorie de l’agence présentant un certain nombre de limites pour notre travail, nous nous

tournons maintenant vers la sociologie néo-institutionnelle, dans son courant qui laisse une

place aux acteurs.

11

mais la bureaucratie de l’O.I.G. ne peut pas être considérée comme un acteur unique (voir Chapitre 2, Sous- section 1.3.1.).

Bensédrine et Demil [1998] rappellent les principales caractéristiques du néo-

institutionnalisme en sociologie, notamment la critique de l’acteur individualiste qui cherche à

maximiser son intérêt, ainsi que le poids des institutions – une institution peut être définie

comme « un système qui intervient dans la définition des préférences et des valeurs des

individus » (ibid., p.93) – sur le comportement des acteurs13. La pression des institutions

peut conduire à la convergence des formes et des pratiques organisationnelles14 (ibid., p.86).

Un courant récent du néo-institutionnalisme sociologique reconnaît que si l’institution pèse

sur le comportement de l’individu, celui-ci à son tour peut agir sur les règles (ibid., p.94). La

conformité n’est donc pas la seule réponse possible.

Plusieurs niveaux d’analyse des phénomènes institutionnels sont possibles – le champ

organisationnel, les spécificités nationales, le niveau international –, ce qui pose la question

de l’articulation des différents niveaux (Desreumaux [2004 : 38]). Pour notre part, nous

n’entrerons pas dans cette réflexion, nous contentant d’utiliser cette possibilité offerte par la

théorie sociologique néo-institutionnelle de raisonner sur plusieurs niveaux différents.

Mobilisée par le management stratégique, la sociologie néo-institutionnelle apporte :

− la prise en compte, au-delà de l’environnement concurrentiel, d’un environnement institutionnel qui pèse sur le comportement des organisations. Cet environnement est

celui d’un champ organisationnel15 plus que celui d’une organisation focale.

− la reconnaissance que les acteurs sont influencés par des institutions, ce qui les conduit à se conformer aux règles et à rechercher la légitimité aux dépens parfois de

leurs propres intérêts.

12

Voir l’ « interaction critique approfondie » dans laquelle l’entrepreneur politique et sa cible échangent des arguments (Dubot [1998 : 119-120]).

13

March et Olsen opposent deux logiques d’action (qui ne sont pas exclusives l’une de l’autre) : la logique des conséquences attendues (l’acteur choisit entre différentes possibilités en évaluant leurs conséquences) et la logique de ce qui est approprié dans une situation donnée (les acteurs suivent des règles qui associent des identités particulières à des situations particulières) [1998 : 949-952].