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Conseils pour les doctorants

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Problématique, concepts et méthodologie

6) Conseils pour les doctorants

En demandant aux enseignants-chercheurs de nous donner un conseil pour les doctorants intéressés par le métier, cela nous permettait de savoir ce que l’enseignant-chercheur considérait comme très important et nous leur demandions s’ils conseillaient aux doctorants d’aller travailler en entreprise à la fin de leur doctorat.

Saturation

Dans notre thèse, nous avons interrogé 108 enseignants-chercheurs (voir ci-dessus les tableaux présentant les caractéristiques de notre échantillon). Nous voulions rencontrer des enseignants-chercheurs de gestion en France et au Québec. Nous cherchions à atteindre une

"saturation théorique" qui « est atteinte quand le chercheur n'obtient plus d'information nouvelle et qu'il y a redondance avec les données » (Fortin, 2010: 279). Cette saturation théorique était recherchée autant pour la France que pour le Québec. Nous recherchions une

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33 saturation au niveau des profils d'enseignants-chercheurs, en nous assurant de communiquer avec des enseignants-chercheurs ayant des profils différents et des caractéristiques différentes: groupe d'âge, type d'institution, sexe, disciplines de gestion, avec ou sans expérience de travail, avec ou sans grande responsabilité administrative (ex. doyen), axé ou non sur la recherche, etc. (Bertaux, 2010). Nous visions des enseignants-chercheurs différents pour ainsi mieux cerner la diversité existant dans le métier.

Dans le « Dictionnaire des méthodes qualitatives en sciences humaines, 3e éd. », on nous explique qu'il existe deux principaux types de saturation théorique représentés par deux perspectives de recherche différentes : post-positiviste et constructiviste. Les post-positivistes considèrent la saturation comme un signal démontrant que les données recueillies sont représentatives de la réalité. Dans ce cas-ci, la saturation sera la preuve de la fiabilité des données : « Le chercheur prétend avoir alors produit un sens complet, l'effet des variations observées étant dues aux contextes individuels. Le savoir produit s’applique ainsi à l'ensemble de la population » (Savoie-Zajc, 2009 : 369). Notre thèse ne se situe pas dans cette perspective, mais plutôt dans la perspective constructiviste qui considère que « le sens complet » est impossible à atteindre étant donné l'étendue de la diversité et de la richesse des comportements humains et des contextes dans lesquels ils se produisent :

« Dans la perspective constructiviste, la richesse et la complexité des humains rendent impossible la généralisation du savoir produit. La saturation permettra aux chercheurs de produire un savoir riche, adéquat et nuancé, intimement rattaché au contexte à l'intérieur desquels ils auront été produits. Les tenants de cette vision de la recherche viseront plutôt à produire un savoir transférable : l'utilisateur de la recherche est en mesure d'apprécier les résultats produits, de faire des comparaisons avec son propre contexte et de comprendre le phénomène étudié compte tenu de ses propres contraintes contextuelles » (Savoie-Zajc, 2009 : 369).

Pour réaliser notre typologie, nous avons donc cherché à identifier les profils qui représentent les différents groupes d'enseignants-chercheurs de notre échantillon pour les deux régions étudiées. Ensuite, pour construire les différents types d'enseignant-chercheur, nous avons utilisé quelques entretiens représentatifs pour construire notre typologie en décrivant les caractéristiques des différents types d'enseignant-chercheur. Une fois que chaque type d'enseignants-chercheurs a été bien défini, nous avons relu tous les autres entretiens de notre échantillon afin de les distribuer dans les différentes catégories et du même coup tester notre typologie et l'améliorer si nécessaire.

Pourquoi comparer la France et le Québec

Comme nous l’avons expliqué plus haut, nous sommes Québécois et avons entrepris un doctorat en France, ce qui nous facilitait beaucoup l’accès aux deux « terrains » pour notre thèse, mais le plus important c’est que cette comparaison ait vraiment du sens. La comparaison France-Québec est très intéressante, car elle permet de démontrer les spécificités contextuelles, notamment celles que vivent les institutions d’enseignement de gestion sur chacun des territoires. Le contexte est européen pour la France et nord-américain pour le Québec. Il s’agit de deux contextes différents, mais qui partagent la même langue rendant ainsi la comparaison encore plus pertinente. Ainsi, nous étudions deux régions francophones ayant deux « cultures » différentes. Cela nous amène à approfondir les différences et les convergences par rapport à l’internationalisation de la concurrence qui est partagée par tous les établissements d’enseignement des deux régions. Nous chercherons à savoir comment chaque enseignant-chercheur s'adapte aux nouvelles injonctions institutionnelles découlant des logiques de classement et d’évaluation qui sont internationales et donc communes à la France et au Québec. Nous chercherons aussi à connaitre les formes que prennent les nouvelles injonctions institutionnelles pour s’adapter à ce contexte international.

De plus, avec les écoles de commerce et le réseau universitaire en France, nous chercherons à comprendre comment ces deux types d’établissements d’enseignement supérieur ont su répondre et adapter leur système d’évaluation aux différents classements et accréditations. Pour le Québec, les facultés de gestion font partie des universités. Ainsi, la comparaison entre les universités françaises, les écoles de commerce français et celle des facultés de gestion québécoises nous permettront de mettre en lumière leur mode d’appropriation du système de publication internationale avec ses classements, ses accréditations et ses classements de revues, en gardant en tête le fait que ces établissements d’enseignement supérieur évoluent dans deux contextes différents.

Typologie

Une typologie sert à classer ou catégoriser les informations, les gens, les mots, nos souvenirs; cette activité de classer se fait tout au long de notre vie. C'est à un tel point que l’on ne peut oublier que les typologies sont des outils puissants pour mieux comprendre le

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35 réel dans une recherche en sciences sociales ou tout simplement dans la vie en général. En fait, "les typologies" sont à la base de notre entendement. Nous classons l'information pour identifier, utiliser et comprendre : « Une typologie constitue un système de repères par rapport auxquels les différents cas peuvent être situés (par une certaine proximité ou une certaine distance) et comparés » (Quivy et Campenhoudt, 2006 : 241).

Construire une typologie nécessite que l'on regroupe les phénomènes ou personnes similaires dans un groupe qui est le plus homogène possible: « Statistically speaking, we generally seek to minimize within-group variance, while maximizing between-group variance » (Bailey, 1994: 1). Autrement dit, chaque groupe ou catégorie ou type doit être composé d'éléments les plus homogènes possible. De plus, chaque groupe, catégorie ou type doivent se différencier de façon évidente, c'est-à-dire il faut construire des catégories qui ne se chevauchent pas ou le moins possible (Bailey, 1994). La typologie permettra donc de regrouper les similarités entre les individus ou comportements et de déterminer les différences notamment en utilisant la comparaison.

Dans son livre traitant des typologies, Bailey (1994) nous explique que pour augmenter l'efficacité et la pertinence des catégories, il faut identifier des caractéristiques importantes nous permettant de comparer et distribuer les divers éléments, personnes ou situations pris en compte. Ainsi, il faut des balises jouant le rôle d’indicateurs pour faciliter la construction et la qualité de la typologie. « The difficulty of grouping by similarity grows exponentially with the number of objects to be classified and the number of dimensions on which they are being grouped » (Bailey, 1994: 3). Classer les enseignants-chercheurs en utilisant une typologie permet de les classer et aussi de comparer rapidement les différents types (similarités et différences), notamment en résumant le tout dans un tableau (Bailey, 1994). De plus, cette comparaison est facilitée par le regroupement d'individus en types. Pour reprendre l'expression de Bailey (1994: 12), une bonne typologie sert à « réduire la complexité » (reduction of complexity) afin que les comparaisons soient plus faciles, mais aussi dans le but que la typologie soit avant tout un outil de compréhension facilitant l'interprétation des données recueillies par le chercheur, voire devenir un outil de compréhension qui serait réutilisé par le lecteur. Par exemple, un auteur Bertrand (2003) a classé les enseignants-chercheurs en fonction de leurs principales tâches (enseignement, recherche, tâches administratives, etc.) en utilisant un questionnaire où en premier lieu il demandait aux enseignants-chercheurs de se classer eux-mêmes et en second lieu, il classait

les enseignants en fonction de leurs réponses. C’était une typologie sur la gestion des tâches des enseignants-chercheurs issus de différentes disciplines ou champs de recherche. Une bonne typologie doit être pertinente, mais surtout « utile » :

« If we were not able to classify persons, objects, and concepts into a smaller number of similar classes, it is doubtful that we could manage to describe such a population. [...] Classification procedures allow us to recognize similarities among cases, and group similar cases together for analysis, without having to concentrate on very different cases that may not be immediate interest » (Bailey, 1994: 12).

Par exemple, il existe plusieurs typologies qu'utilisent les médecins afin de déterminer dans quelle catégorie situer un patient atteint d’une maladie mentale ou physique. Ainsi, plus une typologie est complète, plus elle est capable de nous donner une représentation fidèle d'une population donnée, celle des enseignants-chercheurs dans notre thèse. Les types identifiés afin de construire la typologie doivent prendre en compte la diversité des profils possibles selon les indicateurs de comparaison utilisés et bien sûr dans les limites de la représentativité de l'échantillon. Un échantillon qui ne représenterait que le quart des types possibles dans une population étudiée malgré le travail acharné du chercheur ne donnera jamais une représentativité plus grande que celle de l'échantillon, soit du quart pour notre exemple. Dans notre cas, nous avons essayé de rencontrer un maximum de profils possibles même si, comme nous le verrons dans nos résultats, nous pouvons regrouper cette diversité en catégories - en types - représentatives de notre échantillon que nous avons construit dans le but de représenter la population des enseignants-chercheurs en gestion.

Toutefois, lors de la construction d’une typologie, il faut s'assurer de son ancrage

"réel" en évitant des « types purement théoriques », c'est-à-dire des catégories ou des types qui devraient exister "en théorie", mais qui n'ont jamais été observés : « Classical verbal typologies (including the ideal and constructed types) share with all verbal theories the perils of reification. That is, they are vulnerable to the possibility that theoretical constructs that do not exist empiracally will be "reifed" and treated as "real" » (Bailey, 1994: 15). Dans notre échantillon, un seul type n'a pas été « rencontré » par nous, c'est le mobile sans-attache, ce qui est tout à fait conforme à son type, puisque c'est quelqu'un qui n'a du temps que pour ce qui l'avantage (entendre par là: ses publications), donc il est peu probable qu'un mobile sans-attache puisse accepter de nous rencontrer, car participer à notre étude ne lui procure aucun bénéfice direct pour sa carrière. Toutefois, plusieurs personnes nous ont décrit des mobiles sans-attache et nous avons comparé les descriptions entre elles et elles étaient suffisamment

Chapitre I - Problématique, concepts et méthodologie

37 similaires pour créer une catégorie. Nous avons donc ajouté le type « mobile sans-attache » à notre typologie. Nous avons utilisé la "triangulation" pour créer ce type particulier d'enseignant-chercheur en gestion. Tous les autres types sont représentés par des gens que nous avons rencontrés en entretiens semi-dirigés.

Finalement, il faut aussi éviter de créer une typologie avec trop de types différents. Il faut privilégier la maniabilité sur la trop grande précision qui rendrait inutile la typologie qui est un outil pour mieux saisir le réel : "another criticism of classification is that while small ones may be simplistic and a limited value, very large ones may be unmanageable and too complex to use efficiently. [...] Further, as noted, one goal of classification is to reduce complexity and insure manageability" (Bailey, 1994: 16). Ainsi, une typologie doit réduire la complexité du réel en regroupant des données sous forme de divers types identifiables.

Typologie de notre thèse : un aperçu

Nous consacrons tout un chapitre à la typologie et aux caractéristiques de chacun des types. Notre typologie se divise en quatre catégories que nous avons subdivisées en deux, nous donnant ainsi huit types possibles. Ces types ont émergé de notre échantillon. Le fait de participer ou non au système de publication a été le point de départ. Pour faire notre typologie, on a dû chercher une autre « variable » ou « caractéristique » pour croiser nos données dans une matrice/tableau. Nous avons opté pour la « croyance dans le système international de publication », car en écoutant les enseignants-chercheurs nous avons réalisé que plusieurs participaient au système sans y croire. Autrement dit, ils y participaient parce que c’était une injonction institutionnelle, et donc pour être bien évalués par leur établissement. Notre tableau présente la distribution des huit types.

Notre typologie possède deux grandes divisions qui nous permettent de distribuer les enseignants-chercheurs : 1) ceux et celles qui participent ou ne participent pas au système et 2) ceux et celles qui croient ou ne croient pas au système. Participer au système signifie

« publier » dans une ou des revues à comité de lecture. Croire au système est adhérer au système en démontrant une attitude positive qui pourrait se résumer à : « (je crois que) c’est un bon système » ou simplement « j’accepte le système tel qu’il est ». Inversement, ne pas croire au système ou ne pas y adhérer, c’est rejeter le système de publication. Évidemment, le

niveau de « participation » et de « croyance » varie en fonction des types et des individus.

Nous y reviendrons au chapitre VII, le chapitre où nous présentons chacun des types à partir d’exemples tirés de nos entretiens de recherche.

Tableau 6: Typologie des huit types d’enseignants-chercheurs

Croyants

(adhérent au système)

Non-croyants

(n’adhérent pas au système) EC participent au système

(les dominants)

i) Convaincus ii) Mobiles

sans-attache

i) Ambivalents ii) Résignés

EC ne participent pas au système (les dominés)

i) Pédagogues ii) Administrateurs

i) Non-conformistes ii) Résistants

n.b. : EC = Enseignants-chercheurs

Toutefois, pour expliquer d’où découlent ces différents types, il nous faut dans un premier temps mieux comprendre l’environnement international des enseignants-chercheurs.

Comme nous le verrons, chaque type représente une forme d’adaptation par rapport au système international de publication en place où les classements internationaux des établissements et les classements de revues jouent un rôle structurant non négligeable. Dans le chapitre qui suit, nous aborderons la concurrence internationale qui correspond à la toile de fond partagée plus ou moins par tous les établissements dans le monde.

Chapitre II

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