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CHAPITRE 2. ÉTAT DES CONNAISSANCES

2.4 VIOLENCE ENVERS LES FEMMES ET TRANSMISSION DU VIH

2.4.4 CONSÉQUENCES DE LA VIOLENCE ENVERS LES FEMMES

Peu importe qu’elle soit perpétrée par un inconnu ou par un partenaire intime, la violence augmenterait le risque des femmes aux VIH et ITS (Maman, Campbell et al. 2000). Selon les auteurs, il existerait plusieurs mécanismes par lesquels la violence rendrait les femmes vulnérables au VIH. Le premier, qui est le plus évident, est la transmission directe du virus lors de relation sexuelle

forcée ou coercitive. Deuxièmement, la violence envers les femmes peut limiter le contrôle qu’ont celles-ci sur leur santé sexuelle, dont la négociation de comportements sécuritaires. Finalement, le traumatisme lié à des événements violents antérieurs, durant l’enfance ou l’âge adulte, peut affecter les comportements sexuels futurs. De plus, les femmes séropositives qui décident de dévoiler leur statut à leur partenaire courent un plus grand risque de violence (Rothenberg, Paskey et al. 1995; Temmerman, Ndinya-Achola et al. 1995; Gielen, O'Campo et al. 1997; Gielen, McDonnell et al. 2000; Zierler, Cunningham et al. 2000). Une hypothèse alternative et complémentaire suggère que les hommes violents auraient des comportements sexuels risqués. Cependant, la littérature sur le sujet est encore limitée, les chercheurs commençant seulement à étudier le rôle de la violence dans la transmission du VIH chez la population masculine (Martin, Kilgallen et al. 1999; Dunkle, Jewkes et al. 2006; Raj, Santana et al. 2006; Gilbert, El-Bassel et al. 2007; Silverman, Decker et al. 2007).

Plusieurs études venant principalement des États-Unis suggèrent que des antécédents de violence, particulièrement lors de l’enfance ou de la première relation sexuelle, peuvent avoir un impact sur les comportements sexuels futurs. En effet, les résultats de ces études ont montré une association entre l’agression sexuelle durant l’enfance et l’initiation précoce de la vie

sexuelle, un nombre de partenaires élevé, une faible utilisation du condom, l’échange de relations sexuelles contre de l’argent ou de la drogue, l’infection

par une ITS, et l’agression par un partenaire à l’âge adulte (Cunningham, Stiffman et al. 1994; Lodico and DiClemente 1994; Zierler, Witbeck et al. 1996; Wingood and DiClemente 1997; Mullings, Marquart et al. 2000; Parillo, Freeman et al. 2001). Les résultats du peu d’études effectuées sur le sujet dans les pays en développement ont observé les mêmes associations. Au Pérou, les jeunes femmes ayant subi une initiation sexuelle forcée avaient eu plus d’épisodes d’ITS ainsi qu’une première relation sexuelle à un âge plus jeune (Caceres, Vanoss Marin et al. 2000). Une enquête récente effectuée en Ouganda a révélé que les jeunes filles ayant reçu une initiation sexuelle forcée étaient moins susceptibles d’utiliser le condom et rapportaient plus souvent des signes d’ITS (Koenig, Zablotska et al. 2004).

De plus, les études suggèrent également que les antécédents de violence à l’âge adulte seraient associés à des comportements sexuels à risque. Selon la littérature, les femmes ayant vécu des expériences d’agressions sexuelles ou physiques à l’âge adulte ont plus tendance à avoir de multiples partenaires

sexuels, des relations sexuelles non protégées, des relations commerciales, et à avoir contracté des ITS (He, McCoy et al. 1998; Kalichman, Williams et al. 1998; van der Straten, King et al. 1998; Dunkle, Jewkes et al. 2004; Erulkar 2004; Kalichman and Simbayi 2004; Smith Fawzi, Lambert et al. 2005; Hoffman, O'Sullivan et al. 2006).

Il n’est pas toujours évident de déterminer si la violence est une conséquence ou un facteur de risque d’infection au VIH (Maman, Campbell et al. 2000). En effet, les femmes séropositives pourraient également être victimes de violence suite à la divulgation de leur statut à leur partenaire. Dans leur étude, Zierler et coll. ont montré que 20 % des femmes séropositives rapportaient avoir été victimes de violence physique après avoir été diagnostiquées et la moitié croyaient que cela était relié au dévoilement de leur statut (Zierler, Cunningham et al. 2000). Une étude faite chez 310 femmes séropositives a trouvé que 4 % d’entre elles avaient été victimes de violence au moment d’informer leurs partenaires et que 45 % de ces femmes avaient déclaré avoir subi de la violence émotionnelle, physique ou sexuelle quelque temps après leur diagnostic (Gielen, McDonnell et al. 2000).

Les recherches effectuées auprès des femmes ont montré des associations entre la violence et la non-utilisation du condom, ce qui pourrait être relié à l’incapacité des femmes à négocier des comportements sexuels

sécuritaires (Wingood and DiClemente 1997; Kalichman, Williams et al. 1998; Gielen, McDonnell et al. 2002; Wu, El-Bassel et al. 2003; Kalichman and Simbayi 2004; Lang, Salazar et al. 2007). Comme mentionné précédemment, un autre mécanisme pour la transmission du VIH implique que les hommes violents ont des comportements sexuels risqués, comme la non-utilisation du condom. Dans leur étude longitudinale chez les hommes suivant un traitement à la méthadone, Gilbert et coll. ont montré que ceux qui rapportaient ne pas

utiliser le condom avaient plus de chance de perpétrer des actes de violence envers leurs partenaires intimes (Gilbert, El-Bassel et al. 2007). Une autre étude a observé que les hommes ayant rapporté des actes de violence envers leurs partenaires intimes avaient plus tendance à ne pas utiliser le condom ou l’utiliser de façon inconstante (Raj, Santana et al. 2006). La littérature a également rapporté une association entre la violence, plus souvent sexuelle, et des risques accrus d’ITS chez les femmes (Martin, Matza et al. 1999; Wu, El- Bassel et al. 2003; Erulkar 2004; Kalichman and Simbayi 2004; Koenig, Zablotska et al. 2004; Wechsberg, Luseno et al. 2005; Kershaw, Small et al. 2006; Weiss, Patel et al. 2007). Du point de vue des hommes, une étude récente faite au Bangladesh a observé que les hommes violents envers leurs femmes avaient rapporté plus souvent des symptômes d’ITS ou un diagnostic au cours de la dernière année (Silverman, Decker et al. 2007). Une autre étude a aussi rapporté que les Indiens qui avaient eu des symptômes d’ITS étaient aussi ceux qui étaient plus susceptibles d’abuser de leurs femmes (Martin, Kilgallen et al. 1999). Finalement, la littérature a montré que les hommes violents envers leurs partenaires intimes avaient également plus de partenaires sexuelles ou d’aventures extra-conjugales (Martin, Kilgallen et al. 1999; Dunkle, Jewkes et al. 2006; Raj, Santana et al. 2006; Gilbert, El-Bassel et al. 2007; Silverman, Decker et al. 2007). Le fait que ces hommes violents soient plus susceptibles d’être infectés par une ITS, de ne pas utiliser le condom et d’avoir plus de

relations sexuelles extra-conjugales, met leurs partenaires intimes à grand risque d’infection.

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