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4. Pourquoi et comment valoriser les ressources numériques de la

4.2 Connaître les besoins et pratiques des publics pour mieux valoriser

Après avoir présenté les spécificités des différents types de ressources documentaires numériques, il s'agit ici de se tourner vers les destinataires de ces collections et services. L'objectif étant de valoriser l’offre proposée par son adéquation aux besoins identifiés.

«The biggest reason [why electronic resources result a low utilization] is that libraries did not understand what the user's needs are. Therefore, understanding user's needs for electronic resources and the user's information seeking behaviour is very important.»

(Liu and Shu 2008, p.332)

Urquhart and Rowley73 ont défini deux catégories de facteurs influençant l'utilisation des ressources électroniques :

• Individuels : compétences en culture informationnelle, instructions des enseignants, stratégies de recherche, cursus, formations données par la bibliothèque, pédagogie. • Organisationnels : présentation de l'information, information (contenu), compétences

d’enseignement, infrastructure, modalités d'accès à l'information, culture et direction de l'institution, politiques et budgets de l'université.

En nous référant à ces deux catégories, nous présentons ci-dessous les facteurs importants à prendre en compte pour mener à bien une démarche de valorisation. Les facteurs organisationnels ayant été présentés dans le chapitre précédent, nous nous intéresseront plus particulièrement aux problématiques individuelles.

4.2.1 Les facteurs individuels qui influencent les pratiques documentaires numériques

Les pratiques documentaires du public universitaire -les étudiants bachelor, master et doctorants, les enseignants et les chercheurs- ont considérablement évolué ces dernières années suite au développement rapide de l'offre documentaire numérique disponible en ligne et au développement d'Internet comme outil de recherche. Au niveau individuel, plusieurs facteurs influencent les comportements documentaires numériques des usagers : la lecture sur écran, les disciplines, le niveau de besoin et les compétences liées à l'utilisation de l'information elle-même. Le but est de différencier ces besoins et pratiques. Il consiste en l’identification de profils basés sur différentes caractéristiques.

4.2.1.1 Lire sur papier versus lire sur écran

De nombreuses études s’accordent à dire que les comportements de lecture ont changé en passant du papier à l’écran (Belisle 2011, Liu 2005, Stoop, Kreutzer, Kircz 2013). La lecture sur écran est caractérisée par :

«[…] more time on browsing and scanning, keyword spotting, one-time reading, non-linear reading, and more reading selectively; while less time is spent on in-depth reading and concentrated reading, and sustained attention is decreasing» (Liu 2005, p. 705)

Une autre caractéristique relevée dans la littérature est la diminution des pratiques de surlignage et d’annotations qui sont apparentées à la lecture profonde sur document imprimé. (Stoop, Kreutzer, Kircz 2013, p. 292)

«It seems that many people search or browse digital documents, but when they need to read some documents in depth, they will print out and then annotate printed documents.»

(Liu 2005, p. 707)

Avec les écrans de plus petite taille des terminaux mobiles : ordinateurs portables, tablettes et téléphones mobiles, ces caractéristiques se sont amplifiées. La lecture numérique est donc intrinsèquement dépendante du dispositif de lecture utilisé. De ce fait, ces pratiques ont une influence sur les possibilités offertes par la recherche sur les ressources documentaires numériques. Ainsi, le format des documents, les droits d’utilisation (possibilité de copier, les applications pour annoter, surligner les documents, etc.) doivent être clairement présentés et accompagnés. L’objectif visé est de diminuer ces barrières techniques qui freinent l’utilisation des ressources numériques.

4.2.1.2 L’impact des disciplines sur les pratiques documentaires numériques

De manière générale, le passage au numérique a modifié les comportements des usagers dans leurs pratiques. Cependant, ces changements ne se sont pas opérés de la même façon selon les disciplines. En effet, il semble qu'en chimie, sciences naturelles, ingénierie, physique et en mathématiques, regroupées sous l’appellation Sciences Techniques et Médecine

(STM*), l'usage des périodiques électroniques ait dépassé celui du papier. Au contraire, dans les disciplines des Sciences Humaines et Sociales (SHS*), l'offre documentaire étant moins développée sous forme numérique et le public ayant un attachement au papier, les ressources en ligne sont moins utilisées74. (Wu and Chen 2012, p.645, Wallon 2013, p.16). L’enquête ACCEPT menée en 2009 a d’ailleurs confirmé cette différence :

«Le papier est le format préféré des interrogés de toutes les facultés, mais cette

tendance est beaucoup plus marquée aux facultés de lettres avec 73%». (Birri Blezon, Schneider 2010, p. 10)

Sur la base des comportements documentaires, une typologie des publics universitaires a d’ailleurs été réalisée par A. Biglan, cité dans l’article de Withmire. Il propose 3 dimensions de segmentation75 du public universitaire en tenant compte des différences disciplinaires. La segmentation des publics est utile non seulement pour mettre en place une politique de valorisation des ressources, mais aussi pour mieux répondre aux besoins spécifiques des publics cibles. «[…] is that differences in the various dimensions of the academic disciplines produce differences in information-seeking behavior». (Whitmire 2002, p. 632)

4.2.1.3 Des besoins et comportements différents selon le niveau d'études et statut Les besoins et comportements des étudiants évoluent en fonction de leur niveau d’études. Les étudiants de première année ont une «utilisation limitée des ressources documentaires numériques proposées» (Epron 2013, p.46). Ils utilisent majoritairement les documents distribués en classe par les enseignants et ceux qui sont mis à leur disposition sur les plateformes de cours en ligne. Il s’agit notamment des «polycopiés, supports de cours fournis par les enseignants et, dans un deuxième temps, des manuels. Ces deux types de documents sont principalement utilisés sur support papier» (Epron 2013, p.46). De ce fait, le recours aux documents numériques proposés en parallèle par la bibliothèque est restreint (Souchon 2014, p.19). Dans sa méta-synthèse sur les comportements de recherche documentaire des étudiants, A. Catalano76 constate que les étudiants de master et les doctorants ont les mêmes besoins et pratiques. Dans la revue de la littérature proposée par C. Tenopir77, il apparait que les étudiants de niveau master et les doctorants utilisent plus les documents numériques que papier :

«Graduate students have information needs that are often very different than those of undergraduates. Their needs can be more sophisticated and complex. Understanding the information seeking behaviors of graduate students may better equip librarians,

74 Ces informations ont été confirmées dans les entretiens menées auprès des bibliothécaires formateurs.

75 Segmentation 2014, [en ligne]. « La segmentation est le découpage en groupes homogènes et distincts par un critère significatif (pertinent, mesurable et accessible).»

76 Catalano 2013, p. 259

faculty, doctoral supervisors and administration to help shape those behaviors by offering appropriate and needed services and instruction». (Catalano 2013, p. 243)

Dans le cadre de leurs fonctions et pour des questions pratiques (lecture et discussions en classe), les enseignants utilisent principalement les ressources imprimées. Cependant l’usage des ressources numériques est largement répandu et généralement bien installé. Dans le cadre des cours, il existe néanmoins une différence dans les usages en fonction du type de document :

«les manuels, ouvrages spécialisés et essais sont largement utilisés sur support papier. Les usages de la documentation numérique se concentrent quant à eux sur les journaux, revues ou supports de cours déjà existants». (Epron 2013, p. 46).

Les chercheurs quant à eux «ont une préférence pour l’accès le plus direct au contenu le plus large possible» (Mahé 2012, p. 21). De par l’exhaustivité et le niveau d’expertise qu’exige la recherche scientifique, les chercheurs tous domaines confondus ont besoin tant de moteurs de recherche tels que Google Scholar que des ressources proposées par la bibliothèque.

«Les deux interfaces de recherche préférées mentionnées par les chercheurs de manière équivalente sont celles de la bibliothèque et de Google, reflétant ainsi la conscience que les chercheurs ont des limites de Google mais peut-être aussi l’évolution des sites internet de bibliothèques vers une ergonomie “Google-like”».

(Niu et al. 2010, cité dans Mahé 2012, p. 22)

4.2.1.4 Les compétences en culture informationnelle : conséquences sur l’utilisation des ressources documentaires numériques

Comme nous l’avons vu précédemment, l’adoption des ressources numériques n’est pas homogène dans tous les secteurs disciplinaires pour des raisons de disponibilité de documents sous forme numérique, de pratiques et de technologies. Concomitante à cette situation, l’explosion et l’accessibilité accrues des informations disponibles gratuitement en ligne via le web ont transformé considérablement les pratiques documentaires. L’utilisation des ressources documentaires numériques impliquent d’autres compétences que l’on a regroupées sous l’appellation «culture informationnelle» ou en anglais «information literacy».

«To be information literate, a person must be able to recognize when information is needed and have the ability to locate, evaluate and use effectively the needed information». (ALA 1989, cité dans IFLA 2014, [en ligne])

Cette notion implique aussi celle de la maîtrise des technologies de l’information. Ainsi, les normes ACRL* sur les compétences informationnelles dans l’enseignement supérieur précisent :

«[…]les compétences informationnelles amorcent, maintiennent et étendent l’apprentissage tout au long de la vie par le recours à des habiletés pouvant requérir l’usage des technologies, mais elles en demeurent ultimement indépendantes».

Dans un contexte universitaire, le concept de la culture informationnelle est une réponse concrète aux défis posés à l’usager par les nouveaux outils de recherches et les ressources électroniques. Ainsi, les bibliothèques sont au premier rang pour former les usagers à traiter cette masse d’information. Pour cela les bibliothèques se transforment en «bibliothèque[s] enseignante[s]» (Henkel 2012). Par le biais de la formation à la culture informationnelle, la valorisation des ressources aux yeux des publics se fait par l’acquisition de nouvelles compétences nécessaires à l’utilisation de ces ressources indispensables à la réussite des travaux. Des études corroborent justement l’adéquation des formations à la culture informationnelle à la réussite des étudiants78 (Knight 2013, p 753). L’Infothèque de la HEG-Genève utilise d’ailleurs cet argument pour valoriser son offre de formation (Infothèque HEG 2014c79). Ainsi, en intégrant des exemples de ressources pertinents à l’occasion de ces formations, les usagers comprendront la valeur ajoutée de ces ressources sélectionnées par la bibliothèque. L’information Literacy Programms (ILP*) de la Dehli University Library80 illustre l’opportunité d’utiliser la formation comme canal de valorisation :

«wich basically provides necessery informations skills, has evolved as a new method for promotiong the use of library resources, particularly the electronic resources, subscribed by the libraries as well as available in Public domain for open access».

(Singh and Jingal, 2009 p. 431)

4.3 Les bonnes pratiques à retenir en matière de valorisation dans