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3.2 Matériel et méthode

3.2.2 Conditions expérimentales

Maintenant que nous avons décrit tous les éléments nécessaires à l’établissement d’un respiromètre fonctionnel, il s’agit de déterminer le degré d’importance à associer aux dif-férentes conditions opératoires des expériences respirométriques à réaliser qui dépendent évidemment du matériel utilisé mais surtout de l’objectif de l’étude. Rappelons qu’il est important de se placer dans des conditions comparables à celles du traitement des eaux en STEP, mais surtout de tenir compte de tous les facteurs pouvant influencer le taux de respiration. Ainsi, les données respirométriques obtenues pourront être considérées comme suffisamment fiables pour pouvoir effectuer des bilans de masse et obtenir, entre autres, les rendements de croissance qui font l’objet de cette étude. Enfin, les données seront utilisées pour identifier certains paramètres d’intérêt des modèles évoqués en 3.1, notamment ceux liés au stockage. Il faudra donc également s’assurer que les conditions d’application de ces modèles soient respectées.

Après avoir posé le bilan de matière (équation 3.13) sur le réacteur en s’étant assuré de l’étanchéité du système, il est primordial de maitriser les éléments listés en 3.1.5 qui peuvent avoir une influence sur le taux de respiration, pour rappel :

1. Le taux de croissance des organismes aérobies 2. L’âge des boues (ou temps de rétention) 3. La charge en substrat en entrée du système

4. Le type de régime d’écoulement (réacteur piston/complètement mélangé) 5. Le taux de recirculation des boues

7. La distribution et l’efficacité de l’aération

Tout d’abord, la biomasse dégradatrice utilisée pour les manipulations a été prélevée directement en station d’épuration. Les boues ont été prélevées dans 2 stations diffé-rentes. Les premières manipulations ayant été effectuées dans les laboratoires du SIAAP, les boues utilisés étaient celles prélevées par leurs services dans la station de Valenton (figure 3.22. Par la suite, afin de pouvoir comparer l’influence de l’origine de la boue sur les résultats obtenus, les prélèvements ont été réalisés dans la station municipale de La Croix St Ouen (figure 3.23). Dans les deux cas, il s’agit de boues de recirculation préle-vées dans des stations de traitement d’eaux municipales. Ces boues ont déjà connu des cycles de dégradation aérobie et anoxie. On peut donc considérer qu’elles possèdent une grande diversité de microorganismes et une faible charge en substrat organique exogène. Ces boues sont donc parfaitement adaptées à nos objectifs. L’âge des boues est calculé à partir des données d’exploitation des STEP, sur la période de prélèvements, l’âge de celles de La Croix St Ouen (qui ont été utilisées en majorité) était de 28 ± 0, 5j.

Figure 3.22 – Station d’épuration de Valenton, zone de prélèvement des boues par le SIAAP

La charge en substrat doit être réglée en fonction de la charge en boues activées. Il faut en effet avoir suffisamment de substrat pour que la respiration associée à sa dégrada-tion soit significative par rapport à l’activité endogène des boues. Le respiromètre étant

Figure 3.23 – Bassin biologique de la station de La Croix St Ouen

aéré en continu, il est possible de travailler avec des concentrations en MS relativement élevées. La littérature montre qu’un rapport S/X (en DCO/MS) d’environ 0,04 donne des résultats satisfaisants car d’une part, ce rapport permet de négliger la croissance de la biomasse et de considérer le substrat comme entièrement biodisponible à l’échelle de l’expérience. D’autre part, ce rapport permet de se mettre dans des conditions proches de celles observées dans les bassins biologiques des STEP. Cette condition est facile à appliquer dès lors que la proportion de MVS est de l’ordre de 70-80% de la MS, ce que l’on retrouve dans la grande majorité des STEP d’eaux urbaines. La mesure de la MS a donc été effectuée avant chaque manipulation afin de maitriser le ratio S/X. La MVS a été mesurée moins fréquemment : une mesure a été effectuée sur les deux types de boues (Valenton et La Croix St Ouen) lors des manipulations préliminaires et une seconde fois au cours des manipulations suivantes à plus d’un mois d’intervalle. Les résultats ont mon-tré que pour les deux boues le ratio MVS/MS semblait stable dans le temps et compris dans l’intervalle 70-80%. Le ratio était néanmoins plus élevé pour les boues de Valenton que pour celles de La Croix.

Au niveau de l’activité biologique la limitation de la croissance bactérienne ne suffit pas à obtenir des résultats exploitables. Tout d’abord, l’activité de nitrification doit être inhibée pour que la consommation d’oxygène du processus n’interfère pas avec les me-sures. Pour cela, de l’allylthiourée a été ajoutée au milieu avant la dégradation à hauteur de 30 mg/L. Ainsi, seule l’activité hétérotrophe sera mesurée. Il est également nécessaire

de s’assurer de la constance dans le temps des paramètres opératoires, en particulier de l’aération, de l’agitation, de la température et du pH. Les deux premiers sont assurés grâce au matériel à disposition : l’agitation par le variateur en amont du servomoteur et l’aération par le contrôleur de débit étalonné au préalable. L’importante quantité de cha-leur générée par le moteur a nécessité l’installation de deux systèmes de refroidissement : un ventilateur sur le socle ainsi qu’un système de refroidissement liquide externe relié au milieu interne via un radiateur. Grâce à la sonde à oxygène équipée d’un thermocouple ainsi que du multimètre, une température de 25 ± 0,5°C a pu être maintenue durant toutes les manipulations. La surchauffe du moteur ne nous a pas permis de descendre plus bas. Les valeurs des paramètres cinétiques des modèles ASM sont généralement don-nées à 20°C mais les valeurs de ces paramètres peuvent être extrapolés grâce à la loi suivante [Gujer et al., 1999] :

k(T ) = k(20°C) · eθT·(T −20°C) (3.14)

avec :

k(T ), paramètre cinétique k à la température T.

θT = 0, 069, facteur de correction de température pour ASM3 [Gujer et al., 1999].

Cette étude n’a pas pour objectif de dimensionner ou d’optimiser une STEP. Les pro-blématiques liées au régime d’écoulement, à la recirculation et à l’homogénéité du milieu sont donc limitées et uniquement liées aux propriétés du dispositif mis en place. Pour des raisons pratiques, nous avons fait le choix de travailler en batch (ce qui permet de caractériser suffisamment bien les boues en conditions opératoires), la question du régime d’écoulement ainsi que de la recirculation des boues ne se posent donc pas. Pour ce qui est des zones non aérés ou de l’efficacité de l’aération en général, une vitesse d’agitation et un débit d’aération suffisant doivent être appliqués au milieu. Considérant la petite taille du réacteur (2 L), on peut faire l’hypothèse d’un milieu parfaitement mélangé et aéré de manière homogène.

Maintenant que tous les facteurs ayant une influence sur le taux de respiration ont été pris en compte, on peut en toute bonne conscience faire l’étude des données respiro-métriques en associant les résultats obtenus aux conditions expérimentales choisies. D’un point de vue modélisation, on peut constater que ces conditions correspondent à celles d’application des modèles type ASM présentés en 3.1.6. Les variations dans la nature des boues n’est pas prise en compte dans les modèles. On peut néanmoins supposer que la provenance, l’historique et l’âge des boues peuvent avoir une influence sur la dégradation. Nous pouvons alors faire le choix de décrire ces variations de nature en terme de variation

dans les valeurs de certains paramètres choisis.

Si l’on se réfère à nouveau à la liste présentée section 3.1.6, on peut constater qu’une exception a été faite au niveau du pH qui n’est ici pas contrôlé. Les variations du pH seront néanmoins enregistrées ce qui permettra de vérifier que le milieu ne s’éloigne pas trop des conditions de neutralité pour lesquelles les modèles ASM sont décrits. Il s’agit ici d’un compromis entre la volonté d’identifier les paramètres des modèles et celle de travailler dans des conditions représentatives des STEP. En effet, le pH n’est en aucun cas contrôlé à l’échelle industrielle. Cette différence entre une réalité du terrain et les conditions d’application des outils de description associés (ASM) est justement l’un des verrous scientifiques significatifs du traitement des eaux, voire même de l’ensemble des bioprocédés. Il est donc judicieux à ce niveau de connaissance de laisser des marges de manœuvre à notre étude. L’équilibre entre la représentativité des observations, les ca-ractéristiques du dispositif de mesure et la possibilité d’appliquer les modèles constitue en effet la contrainte principale de chaque étude expérimentale ayant vocation à étudier les processus sous-jacents à un procédé industriel. Dans notre cas, il s’agit de l’influence du processus de stockage sur les variations observés du rendement de croissance des boues.