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En condition « saine »

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Il n’existe que peu de données comportementales incluant des tests cognitifs sur des modèles d’hémorragie intracérébrale. Sur des modèles de macrohémorragie intracérébrale, les déficits moteurs sont le plus souvent explorés. On relève ainsi pour ces modèles (rats et souris) des déficits moteurs survenant assez rapidement après l’induction de la lésion (1 à 2 jours après) avec une résolution progressive après environ 1 mois (Hua et al., 2002; MacLellan et al., 2009; Nakamura et al., 2004). Aucune modification du niveau d’anxiété n’a été montré en post lésionnel (Hartman et al., 2009; MacLellan et al., 2009). Au plan cognitif, MacLellan et al., n’ont pas démontré, un mois après l’induction de la lésion, d’altération de la mémoire spatiale évaluée par la piscine de Morris et le RAM. Hartman et al, 2009 ont en revanche démontré des déficits d’apprentissage 2 semaines après l’induction de la lésion mais pas de déficit de la mémoire spatiale.

Parmi les modèles de microhémorragie, assez peu nombreux, l’impact cognitif de ces microhémorragies est également très peu étudié. En 2016, He et al., ont montré une altération de la mémoire de référence spatiale (évaluée par le test de la piscine de Morris) une semaine après l’induction de 5 microhémorragies corticales par irradiation laser (He et al. 2016). Bien

que ce modèle présente des MHC multiples et une évaluation cognitive plus précoce, il est intéressant de noter que les MHC sont corticales, indépendantes vis-à-vis d’une pathologie vasculaire sous-jacente et que l’altération de la mémoire de référence spatiale démontrée concorde avec les résultats présentés dans ce travail. Un autre modèle de MHC a montré des résultats intéressants sur le plan cognitif. Il s’agit d’un modèle de démence vasculaire induit par un régime alimentaire spécifique causant une hyperhomocystéinémie. Ce modèle présente de nombreuses microhémorragies disséminées au niveau du cortex entorhinal et pariétal en majorité, du cortex frontal et de l’hippocampe. Après 11 semaines de régime alimentaire particulier, une neuroinflammation, une augmentation de l’expression et de l’activité des MMP 2 et 9, ainsi qu’une altération de la mémoire spatiale évaluée par le radial arm water maze ont été retrouvées sans altération locomotrice (Sudduth et al., 2013). Ces résultats vont dans le même sens que ceux obtenus dans notre travail sur la mémoire spatiale. Il faut cependant noter, dans le modèle de Sudduth et al., qu’outre l’atteinte vasculaire avec les nombreuses MHC, l’activation des metalloprotéinases et l’atteinte neuroinflammatoire, l’hyperhomoscytéinémie induite a pu, elle-même, participer aux troubles cognitifs (Belarbi et al. 2012; Sudduth et al. 2013; Troen et al. 2008). Il est donc difficile de déterminer si l’altération de la mémoire spatiale observée est en lien avec un effet propre des MHC dans ce modèle. Notre travail, avec la modélisation de la MHC indépendante de toute pathologie, permet de montrer avec certitude un rôle propre de cette petite lésion vasculaire sur la cognition.

Dans notre modèle de MHC, l’atteinte cognitive concerne la mémoire de référence spatiale (évaluée par le labyrinthe de Barnes) et la mémoire visuospatiale (évaluée par le test dPAL). Ces deux tests impliquent fortement l’hippocampe. Le test du labyrinthe de Barnes nécessite un apprentissage et une mémoire spatiale qui font appel au cortex entorhinal et à l’hippocampe, dont les cellules de lieu notamment, communiquent pour former une carte cognitive permettant la navigation allocentrique (Vorhees et al., 2014). Par ailleurs, dans ce test, bien que les repères internes soient évités, il est possible que la souris ait recours à une navigation egocentrique, qui fait appel au cortex entorhinal avec notamment les cellules de direction de tête, mais également à d’autres structures comme le thalamus, le striatum dorsal, l’hippocampe ou encore le cortex pariétal (Sherrill et al., 2013; Vorhees et al., 2014). Il y a donc des structures cérébrales communes impliquées par les deux systèmes. Concernant le test de dPAL, des travaux ont permis de montrer le rôle de l’hippocampe et notamment de l’hippocampe dorsal dans ce test (Kim et al., 2015; Talpos et al., 2009). L’altération des fonctions cognitives évaluées par ces deux tests indique bien une dysfonction hippocampique

dans notre modèle. La MHC étant induite au niveau cortical, il faut envisager qu’elle puisse induire des effets cognitifs « à distance » d’un point de vue spatial. On peut également noter un effet « à distance » dans le temps avec un effet de la MHC qui conduit à une progression plus marquée du déclin cognitif et à un impact encore perceptible à 12 mois sur la mémoire de référence spatiale. Ces effets dans le temps sont indépendants de ceux observés avec le vieillissement de la souris. En effet, la diminution de l’activité locomotrice, l’augmentation du niveau d’anxiété, et l’altération générale des performances en mémoire de référence spatiale mises en évidence dans tous les groupes concordent avec une étude sur le vieillissement réalisée sur différents groupes d’âges de souris C57Bl6 évaluées par une batterie de tests neurocomportementaux (Shoji et al., 2016).

Il est intéressant de noter que chez l’homme, des études réalisées sur des cohortes issues de la population générale ont montré une association entre la présence de MHC notamment lobaires et des altérations cognitives affectant la mémoire, les fonctions exécutives (Akoudad et al. 2016), les fonctions d’orientation (Li et al. 2017) et visuospatiales (Paradise et al. 2018). Buzsaki et al., ont montré que les réseaux neuronaux fournissant l’information spatiale chez le rongeur sont les mêmes que ceux impliqués dans les mémoires épisodiques et sémantiques chez l’homme. Il a aussi été suggéré que la mémoire sémantique serait une extension du système d’encodage spatial utilisé par le rongeur lorsque l’on teste son apprentissage et sa mémoire spatiale allocentrique (Buzsaki et al., 2013; Vorhees et al., 2014). Les atteintes cognitives retrouvées dans le modèle de MHC présenté dans ce travail semblent donc en faire un bon outil translationel. Les études cliniques étudiant l’impact des MHC sur la cognition évoquent souvent deux hypothèses : d’une part celle impliquant un effet propre des MHC dont la présence pourrait perturber le fonctionnement de réseaux neuronaux, d’autre part celle impliquant les effets de vasculopathies sous-jacentes dont les MHC ne seraient que le reflet (Akoudad et al. 2016). L’étude du modèle de MHC réalisée ici montre qu’il y a vraisemblablement un effet propre des MHC, ce qui n’exclut pas le rôle important des vasculopathies sous-jacentes chez l’homme. Enfin, la MHC a diminué le niveau d’anxiété des souris au temps précoce du suivi. Chez l’homme, la présence de MHC dans la population générale a été associée à des syndromes dépressifs mais pas anxieux (Direk et al. 2016).

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